11

Atlanta, USA — Printemps 1981

Un commando de « superflics » très spéciaux

Sandy Ford reposa l’écouteur et relut avec attention la liste des médicaments qu’elle venait de consigner dans son registre. Elle fronça les sourcils. « Mon Dieu, songea-t-elle, encore une demande de Pentamidine ! » Celle de ce matin venait de New York. C’était la seizième, alors qu’elle n’en avait pas enregistré la moitié pendant toute l’année précédente. La Pentamidine était l’un des seuls médicaments qui pouvaient agir sur le type de pneumonie parasitaire que Michael Gottlieb avait diagnostiquée chez cinq jeunes homosexuels de Los Angeles. Cette maladie était jusqu’à présent si peu fréquente que l’unique fabricant de Pentamidine, le laboratoire britannique May & Baker, n’avait pas jugé rentable d’engager les frais nécessaires à son homologation officielle pour sa mise en vente sur le marché américain. Comme quelques autres drogues pouvant combattre des affections rarissimes en Occident, tels la maladie du sommeil ou le choléra, la Pentamidine était devenue une « orphan drug », un remède orphelin. Cette appellation lui valait de n’être disponible que dans un seul endroit aux États-Unis, le Parasitic Disease Drug Service – le Service pharmacologique des maladies parasitaires, où travaillait Sandy Ford.

Cette officine était l’un des rouages de l’organisation la plus impressionnante inventée par l’homme pour se défendre contre la maladie et la mort, le Center for Disease Control – le Centre de contrôle des maladies infectieuses, plus communément connu sous ses initiales CDC. Son siège, un immeuble de sept étages en briques rouges, occupait tout un quartier de la banlieue d’Atlanta. Décoré d’une imposante tête en marbre d’Hygea, la déesse mythologique de la Santé, son hall d’entrée donnait accès à une véritable ruche où s’activaient, dans des centaines de bureaux et de laboratoires, plus de quatre mille spécialistes dont la seule mission était d’améliorer et de protéger la santé du peuple américain. Parmi eux, le CDC comptait des épidémiologistes, des microbiologistes, des entomologistes, des physiciens, des chimistes, des toxicologues, des médecins, des dentistes, des officiers de santé publique, des pharmaciens, des vétérinaires, des conseillers en éducation, des statisticiens, des rédacteurs, des professeurs de sciences sociales, des experts de l’environnement et de l’hygiène industrielle. Leur champ d’action couvrait les domaines les plus inimaginables.

Qu’il s’agisse de la prévention des accidents du travail ou des risques de l’environnement, du planning familial, du danger présenté par certains jouets, des problèmes de nutrition, de la consommation du tabac, de la surveillance épidémiologique internationale, la compétence de cette armée de techniciens et de savants embrassait pratiquement tous les domaines de la santé. Mais c’était surtout en matière de prévention et de contrôle des maladies infectieuses et des épidémies que l’organisation d’Atlanta avait conquis sa réputation internationale. Laboratoire du dernier recours, le Centre de contrôle des maladies recevait chaque année d’Amérique et du monde entier quelque cent soixante-dix mille prélèvements de sang ou d’organes contaminés par des maladies au diagnostic encore mystérieux. C’était le plus grand élevage de microbes et de virus de la planète, une sorte de zoo de l’invisible où l’on conservait des spécimens d’agents infectieux presque éteints comme celui de la variole, ou bien de fraîche date comme celui des infections hémorragiques d’Amérique du Sud, des fièvres de Lassa, de Marburg ou d’Ebola. Avec ses banques géantes de sérums et de tissus contenant plus de deux cent cinquante mille échantillons des maladies répertoriées, le CDC représentait la mémoire collective de toutes les endémies humaines. Qu’il concernât la malaria de Trinidad, des souches du choléra africain, des encéphalites du Texas, la poliomyélite, le typhus ou l’influenza, chaque échantillon figurait dans un catalogue électronique qui les classait en plus de deux cent cinquante catégories sous des étiquettes différentes portant la mention « disponible », « usage restreint » ou « postérité ».

* * *

Ce FBI spécialisé dans la chasse aux microbes et aux virus était né en mars 1942, trois mois après l’attaque japonaise sur Pearl Harbor. Il s’appelait alors le Bureau de contrôle du paludisme dans les zones de guerre. Il était basé à Atlanta où la malaria, endémique dans le sud des États-Unis, faisait peser une menace sérieuse sur les nombreux camps d’entraînement militaire installés dans la région. Ses responsabilités s’étaient peu à peu élargies à la dengue, une maladie également propagée par un moustique, puis à la fièvre jaune et au typhus. En 1945, ses installations s’étaient enrichies d’un laboratoire dont la mission était de débusquer les maladies tropicales rapportées par les GI des théâtres d’opérations de la Seconde Guerre mondiale.

Le retour à la paix aurait dû mettre un terme aux activités de l’organisation. Mais l’existence d’une équipe hautement spécialisée dans les problèmes de santé parut si séduisante aux responsables de Washington que le Bureau fut maintenu et qu’il reçut, en 1946, le nom de Centre des maladies transmissibles. Il se vit bientôt doté de toute une infrastructure de laboratoires équipés pour l’étude des bactéries, des parasites, des champignons, des bacilles, des microbes et des virus. La peste et d’autres maladies susceptibles de se transmettre à l’homme entrèrent, en 1947, dans le champ de ses compétences.

La création, en 1951, d’un service de renseignements sur les épidémies, l’Epidemiology Intelligence Service, transforma le centre en un véritable bureau de recherche chargé de lutter contre tous les agents pouvant menacer la santé des populations. Son fer de lance était un corps d’une centaine de jeunes médecins d’élite, de vétérinaires, d’officiers de santé publique recrutés pour deux ans et soumis à une formation intensive. Les détectives de l’EIS restaient disponibles jour et nuit, prêts à prendre l’avion pour n’importe quel point des États-Unis ou du globe afin d’y traquer les coupables de toute épidémie nouvelle.

Baptisée en 1980 de son nom actuel, le CDC d’Atlanta n’avait cessé de multiplier ses interventions sur tous les terrains. « Notre mission est d’identifier et d’éliminer autant que faire se peut les maladies et les décès inutiles, déclarait son directeur Bill Fœge, un pionnier de l’éradication de la variole dans le Tiers Monde. Cela signifie que nous devons surveiller le Sud à cause des risques d’encéphalite équine, de dengue, de fièvre jaune ; surveiller les frontières, l’arrivée des avions et des bateaux ; surveiller les apparitions soudaines des maladies respiratoires et infectieuses qui tuent chaque année des centaines de milliers d’Américains. »

Une « hot line », un téléphone rouge, répondait vingt-quatre heures sur vingt-quatre à toute demande d’assistance. L’empoisonnement de trois New-Yorkais après la consommation d’un saumon fumé avarié, l’asphyxie d’un couple de Virginie le lendemain de la dératisation de leur maison, une épidémie de fièvre rhumatismale aiguë chez des marins de la base de San Diego, la contamination par des bactéries résistantes à la triméthoprime de cent cinquante-sept visiteurs d’une foire de Caroline du Nord, tout mobilisait le CDC, et ses limiers menaient chaque année plus de douze cents enquêtes. Si presque toutes concernaient des incidents localisés peu importants, une bonne centaine d’affaires justifiaient, elles, une intervention massive, comme cette fameuse épidémie qui, en juillet 1976 à Philadelphie, tua vingt-neuf vétérans de l’American Légion.

Dans la mobilisation générale pour découvrir les responsables de cette tragédie, les médecins-détectives du CDC envoyèrent plus de trois mille cinq cents questionnaires, interrogèrent des centaines de congressistes, les employés de l’hôtel où s’était tenue la convention, les habitants et les habitués du quartier. Ils épluchèrent les bulletins de la météo, le plan d’attribution des chambres, le programme des différentes manifestations. Ils analysèrent l’eau, la glace, la nourriture ; examinèrent en laboratoire les ustensiles, la vaisselle, les appareils de climatisation, les insectes, la poussière. Mais ils ne purent trouver qu’un seul dénominateur commun aux nombreuses victimes : la maladie elle-même. Elle devint l’épidémie la plus célèbre des temps modernes. Après quatre mois d’efforts concentrés, les enquêteurs de l’organisation médicale la plus prestigieuse du monde n’étaient même pas parvenus à connaître la nature de l’agent infectieux responsable. Une toxine ? Un champignon ? Une bactérie ? Un bacille ? Un virus ?

Après avoir frôlé une fin peu glorieuse, l’enquête devait connaître un rebondissement spectaculaire. Deux chercheurs travaillant dans leurs laboratoires sans fenêtre identifièrent enfin dans les tissus de leurs cobayes le responsable de l’épidémie, une banale bactérie qui avait choisi pour habitat les turbulences des conduits de climatisation de l’hôtel où les congressistes s’étaient réunis. La découverte de la Legionella pneumophilia permit de mettre un nom sur de nombreux autres cas de pneumonie mortelle à l’origine inexpliquée.

L’histoire du CDC n’était pas seulement jalonnée de victoires. Elle avait aussi connu cette année-là un retentissant fiasco. Persuadés qu’une épidémie mortelle de grippe porcine transmissible à l’homme était sur le point d’éclater, ses responsables avaient fait vacciner plus de cinquante millions d’Américains. Or, non seulement l’épidémie ne se déclara pas, mais plusieurs centaines de personnes se retrouvèrent paralysées à la suite de l’inoculation du vaccin. L’affaire avait dégénéré en scandale politique et abouti au renvoi du directeur du CDC. L’État, lui, s’était vu condamner à verser plus de cent millions de dollars aux victimes de cette inopportune campagne de vaccination.

* * *

Mis à part une épidémie de fièvre et d’éruptions cutanées constatées chez des femmes utilisant une certaine marque de tampons périodiques et la soudaine apparition dans l’Ohio de cas d’entérite chez des consommateurs de marijuana, aucune affaire spectaculaire n’avait depuis longtemps fait appel au flair des détectives d’Atlanta. Pour le docteur Harold Jaffe, membre de l’Epidemiology Intelligence Service, un flegmatique Californien à lunettes, la seule menace préoccupante qui pesait en cette fin de siècle sur la santé du peuple américain semblait être « la résistance accrue de la chaude-pisse aux antibiotiques », menace qui mobilisait toute l’activité de son confrère de trente-sept ans, le docteur James W. Curran, Jim pour son entourage.

Jim Curran était le chef du service des enquêtes de la brandie des maladies vénériennes du CDC. Avec ses yeux fureteurs, sa petite taille, son air perpétuellement aux aguets, il incarnait le prototype parfait des super limiers de l’organisation. Il avait consacré la plus grande partie de sa carrière à combattre les ravages de la blennorragie, un fléau qui frappait chaque année près d’un million d’Américains. Parmi les nombreuses publications scientifiques que cette infection lui avait inspirées se trouvait une étonnante étude comparative sur la résistance immunitaire aux gonocoques. Pour rendre son travail aussi pointu que possible, il n’avait pas hésité à choisir pour modèles deux échantillons extrêmes de la société : des prostituées et des religieuses.

* * *

La bonne vieille « chaude-pisse » n’allait pas rester longtemps le principal sujet d’intérêt des experts de l’organisation. Au CDC comme dans les consultations de médecins, d’autres signes indiquaient, en ce printemps 1981, que le front des maladies sexuellement transmissibles commençait à bouger. Chaque jour, le téléphone rouge d’Atlanta sonnait pour signaler quelque observation inquiétante. En ce début d’avril, l’appel d’un dermatologue new-yorkais fit l’effet d’une petite bombe. Le docteur Fred Siegal déclarait soigner plusieurs jeunes homosexuels atteints de crises géantes d’herpès péri-anal. Les ulcérations se propageaient à d’autres parties du corps. Désarmé, il demandait au CDC la stratégie que recommandaient ses experts en pareils cas.

Deux nouveaux S.O.S. allaient, quelques jours plus tard, achever de mettre Jim Curran et son équipe sur le sentier de la guerre. Le premier venait de Los Angeles. Faute d’avoir pu convaincre le plus grand journal scientifique américain de sa découverte d’une nouvelle épidémie, le docteur Michael Gottlieb suppliait le CDC de publier d’urgence dans son bulletin la description des cinq cas de jeunes homosexuels en train de mourir de pneumocystose dans son hôpital de UCLA. Certes, le bulletin d’Atlanta n’avait ni l’audience ni le prestige du New England Journal of Medicine. Mais le Morbidity and Mortality Weekly Report, le Rapport hebdomadaire de morbidité et de mortalité – tel était le nom du petit fascicule d’une vingtaine de pages que recevaient chaque semaine ses cinquante-sept mille abonnés –, était un irremplaçable instrument d’information sur les questions sanitaires concernant le pays. Chaque numéro présentait un tableau indiquant le nombre et les causes des décès survenus au cours de la semaine dans les cent vingt et une plus grandes villes des États-Unis. D’autres tableaux recensaient les cas de toutes les maladies infectieuses. On apprenait des choses stupéfiantes, ainsi le sort de ces huit Américains frappés, au cours des dix premiers mois de l’année 1980, par la lèpre, ce mal répugnant qui avait valu à la jeune Indienne Ananda Chowdhury d’être maudite par sa famille.

Le MMWR comptait des informateurs dans le plus petit village du pays, et la diversité des sujets traités en faisait un observateur universel. On y trouvait le rapport d’un dentiste de Virginie signalant un taux alarmant d’érosion dentaire chez les nageurs de compétition. L’enquête des limiers du CDC avait permis d’établir que l’eau de la piscine locale contenait une concentration d’acide cent mille fois plus forte que la normale. On y découvrait que, après une tempête de neige dans le Colorado, les hôpitaux de Denver avaient dû procéder à quatorze amputations de doigts accidentés par des aspirateurs de neige. Que des médecins de Porto Rico, de Floride et du Texas avaient été surpris de constater, chez soixante-douze réfugiés haïtiens de sexe masculin, de soudaines poussées mammaires, probablement dues à un déséquilibre hormonal provoqué par la subite amélioration de leur alimentation.

La moitié des cas de maladies ou de décès présentés par le bulletin relevait précisément d’intoxications dues à des produits alimentaires. Comme l’apparition de psittacose chez des éleveurs de dindes de l’Ohio ou d’asthme chez les employés d’une conserverie de crabes en Alaska. On ne comptait plus les cas d’empoisonnement digestif, de fièvre typhoïde ou de salmonellose révélés par le journal des médecins-détectives d’Atlanta. Cet éclectisme n’empêchait pas le MMWR d’avoir ses préférences. La prévention des épidémies constituait l’un des premiers objectifs du CDC. Il n’était pratiquement pas de numéro qui ne consacrât au moins un texte à quelque syndrome affectant la collectivité, comme cette épidémie de typhus générée par des écureuils volants, de rage chez les rats des régions de la côte Est, d’hépatites virales dans un village mexicain de la Sierra Madre, ou la fameuse maladie des légionnaires de Philadelphie.

* * *

Dûment vérifiées par le représentant du CDC à Los Angeles, les observations du docteur Michael Gottlieb fournissaient un incontestable scoop au modeste bulletin d’Atlanta. Elles parurent le 5 juin 1981 sous le titre « Cas de pneumocystose — Los Angeles », à la page 2 du volume 30, fascicule 21, un numéro qui deviendra historique pour avoir été le premier au monde à parler d’une maladie que l’humanité allait bientôt découvrir avec terreur sous le nom de SIDA. La petite histoire retiendra cependant que le rédacteur en chef du MMWR ne jugea pas opportun d’accorder la page de couverture de son bulletin à ce sujet, préférant pour celle-ci un article sur deux touristes américains ayant, au cours de leurs vacances aux Caraïbes, contracté la dengue, une fièvre éruptive bénigne transmise par un moustique.

Les cinq cas présentés par Michael Gottlieb dans les quarante-six lignes de sa communication apportaient en fait peu d’informations sensationnelles : il s’agissait de jeunes homosexuels qui ne se connaissaient pas, qui avaient tous un lourd passé de maladies sexuellement transmissibles, qui inhalaient tous des substances toxiques et qui souffraient tous de pneumocystose, cette fameuse pneumonie parasitaire frappant seulement les organismes privés de défenses immunitaires. Pourtant, Michael Gottlieb précisait d’emblée que cette affection était très grave puisque deux de ses malades étaient déjà morts.

* * *

Le deuxième S.O.S. qui, ce printemps 1981, déclencha la mobilisation de Jim Curran et de ses troupes vint, lui, de la capitale de l’est des États-Unis, New York. Un chef de service de la faculté de médecine de la New York University, le docteur Alvin E. Friedman-Kien, révélait une subite épidémie d’un autre mal rarissime. Ce mal n’avait aucune ressemblance avec celui qui frappait à Los Angeles. Sauf une : il s’attaquait lui aussi à de jeunes homosexuels dont le système de défenses immunitaires avait été détruit pour une raison inexpliquée.

Plus grands que l'amour
titlepage.xhtml
lapierre_V7_split_000.htm
lapierre_V7_split_001.htm
lapierre_V7_split_002.htm
lapierre_V7_split_003.htm
lapierre_V7_split_004.htm
lapierre_V7_split_005.htm
lapierre_V7_split_006.htm
lapierre_V7_split_007.htm
lapierre_V7_split_008.htm
lapierre_V7_split_009.htm
lapierre_V7_split_010.htm
lapierre_V7_split_011.htm
lapierre_V7_split_012.htm
lapierre_V7_split_013.htm
lapierre_V7_split_014.htm
lapierre_V7_split_015.htm
lapierre_V7_split_016.htm
lapierre_V7_split_017.htm
lapierre_V7_split_018.htm
lapierre_V7_split_019.htm
lapierre_V7_split_020.htm
lapierre_V7_split_021.htm
lapierre_V7_split_022.htm
lapierre_V7_split_023.htm
lapierre_V7_split_024.htm
lapierre_V7_split_025.htm
lapierre_V7_split_026.htm
lapierre_V7_split_027.htm
lapierre_V7_split_028.htm
lapierre_V7_split_029.htm
lapierre_V7_split_030.htm
lapierre_V7_split_031.htm
lapierre_V7_split_032.htm
lapierre_V7_split_033.htm
lapierre_V7_split_034.htm
lapierre_V7_split_035.htm
lapierre_V7_split_036.htm
lapierre_V7_split_037.htm
lapierre_V7_split_038.htm
lapierre_V7_split_039.htm
lapierre_V7_split_040.htm
lapierre_V7_split_041.htm
lapierre_V7_split_042.htm
lapierre_V7_split_043.htm
lapierre_V7_split_044.htm
lapierre_V7_split_045.htm
lapierre_V7_split_046.htm
lapierre_V7_split_047.htm
lapierre_V7_split_048.htm
lapierre_V7_split_049.htm
lapierre_V7_split_050.htm
lapierre_V7_split_051.htm
lapierre_V7_split_052.htm
lapierre_V7_split_053.htm
lapierre_V7_split_054.htm
lapierre_V7_split_055.htm
lapierre_V7_split_056.htm
lapierre_V7_split_057.htm
lapierre_V7_split_058.htm
lapierre_V7_split_059.htm
lapierre_V7_split_060.htm
lapierre_V7_split_061.htm
lapierre_V7_split_062.htm
lapierre_V7_split_063.htm
lapierre_V7_split_064.htm
lapierre_V7_split_065.htm
lapierre_V7_split_066.htm
lapierre_V7_split_067.htm
lapierre_V7_split_068.htm
lapierre_V7_split_069.htm