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Larin courait avec légèreté sur la partie supérieure de la station orbitale en restant baissée pour éviter les tirs occasionnels. La structure était entièrement constituée d’hex assemblés entre eux. Certains conservaient un semblant d’individualité et détachaient un membre de l’ensemble pour tirer sur elle à son passage. Elle ne pouvait regarder dans toutes les directions simultanément, mais jusqu’à maintenant elle avait réussi à ne pas récolter de blessure grave.
Cela changerait dès que son message serait reçu, ou si d’elle-même la flotte décidait d’ouvrir le feu. Il lui était impossible de quitter la station maintenant qu’elle était en vol. Si elle s’écrasait au sol, la jeune femme suivrait avec sa section. Tous ses hommes n’avaient pas sauté à bord avec elle, mais ceux qui l’avaient accompagnée l’avaient fait en toute connaissance de cause. Environ deux douzaine ! de commandos s’étaient dispersées sur toute la surface du vaisseau, et chacun travaillait en indépendant.
Les communications étaient très fluctuantes. Elle avait déclenché son émetteur à la première occasion et le laissait répéter en boucle son message, sans savoir s’il y avait déjà eu une réponse. Chaque transpondeur qu’elle plaçait signalait un ensemble de senseurs, un conduit d’aération ou tout autre endroit qui pouvait souffrir d’une frappe. Elle n’avait pas perdu de temps à tenter de s’introduire dans la station. Elle n’y aurait gagné qu’une mort certaine.
C’était plutôt ironique, se dit-elle. La télémesure lui indiquait que la station la rapprochait de l’endroit où Shigar avait dû atterrir, mais elle n’y parviendrait sans doute pas, et il était probable que le Jedi n’avait jamais atteint ce point, lui non plus, puisque son transport s’était abattu en flammes. Elle risquait fort de connaître le même sort.
Un éclair de lumière bleue fusa sur sa droite. Un commando était la cible de trois hex tirant d’angles différents. Il riposta en s’accroupissant pour offrir une cible aussi réduite que possible, mais il ne pouvait viser les trois simultanément, et il n’avait nulle part où battre en retraite. Un tir le toucha à la jointure du casque, et un jet d’air gicla au dehors. Il s’écroula en se contorsionnant pour atteindre la fuite, mais l’articulation de son épaule ne le lui permettait pas.
Elle s’élança vers lui sans se redresser et visa l’hex le plus proche avant de s’occuper des deux autres. Ils tournèrent leur attention sur elle, mais elle avait maintenant une bonne connaissance tactique de l’ennemi. Elle prit pour cible les nodules sensoriels, parce qu’ils étaient plus faciles à atteindre. Et sans vision, comment pouvait-il répliquer ?
Deux autres droïdes se joignirent aux premiers avant qu’elle atteigne le commando. Elle glissa une main sous son aisselle pour le relever et l’entraîna sans cesser de tirer. En se servant de la pesanteur et de son propre élan, elle dévala avec lui le dôme, comme s’il s’était agi du versant d’une colline.
Quand ils furent hors de portée, elle freina et ils réussirent à faire halte. Le bord de la station était en vue. Au-delà, il n’y avait rien sinon Sebaddon, loin, très loin en contrebas.
Le commando se débattait toujours. Elle prit la trousse de réparation dans le compartiment sur sa cuisse gauche et lui fit signe de se calmer. Il obéit. Pendant qu’elle appliquait l’enduit d’étanchéité à prise rapide sur l’endroit endommagé de son casque, ils se regardèrent pour la première fois.
C’était Ses Jopp.
Sa voix parvint clairement à la jeune femme malgré l’obstacle de leur harnachement.
— Vous êtes la dernière personne que je m’attendais à voir.
Elle se retint de dire qu’elle pensait la même chose.
— Je ne pouvais pas vous laisser là.
— Et je vous en suis reconnaissant, vous pouvez me croire. Merci, lieutenant.
Elle n’aurait pu se prononcer sur sa sincérité, mais elle décida qu’elle se contenterait de ces paroles.
— Voilà, dit-elle, satisfaite de sa petite réparation. Vous connaîtrez d’autres journées de combat.
Il regarda sur la droite par-dessus l’épaule de la jeune femme.
— Probablement pas, dit-il.
Elle se retourna et scruta le ciel. Clairement visibles, les traînées blanches des tirs impériaux fonçaient vers eux. Il semblait que le Paramount ait donné tout ce qu’il avait, exactement comme ils devaient le faire, se dit-elle.
Plutôt que de continuer à se dévisser le cou pour suivre l’approche des missiles, elle se retourna et s’assit à côté de Jopp.
— Les meilleures places de tout l’établissement, hein ? fit-elle.
Il eut un petit rire.
— Pour sûr. Les gens tueraient pour les avoir.
Elle songea à ses anciens camarades de la Blackstar, de la bravoure, des liens et de ce sens d’appartenance à un groupe soudé qui lui avaient tant manqué.
— Les soldats comme nous n’apprennent jamais. Les feux d’artifice, ce n’est joli qu’à distance.
Jopp acquiesça.
— Ça change agréablement d’avoir un officier avec nous sur le terrain.
Il la regarda droit dans les yeux.
— Je crois que vous n’êtes pas si mauvaise, finalement, Toxic Moxla.
Elle sourit. C’était le mieux qu’elle pouvait espérer en guise d’excuses, mais dans l’armée cela équivalait à un serment de loyauté qui tiendrait jusqu’à leur mort. Et c’était bien dommage, pensa-t-elle encore, parce que ce serment ne tiendrait pas très longtemps.