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La vue du casque rond caractéristique stoppa net Larin. D’un signe vif de la main elle ordonna à Shigar de rester a couvert tandis qu’elle reculait jusqu’à un couloir bondé de monde où elle resta le temps que le Mandalorien passe devant elle et s’éloigne.

Au second regard, elle constata que ce n’était pas Dao Stryver. L’armure de celui-ci était bleue et argent, non grise et verte, et Stryver était plus grand et plus massif. Les gens s’écartaient quand même au passage du Mandalorien.

Elle agrippa le bras de la personne la plus proche.

— Qui est-ce ? demanda-t-elle en désignant le casque qui disparaissait dans la foule.

— Seulement Akshae Shanka, répondit l’Evocii, l’air un peu apeuré, comme si Larin était une débile potentiellement dangereuse. Restez loin de lui, si vous savez ce qui est bon pour vous. Il est arrivé deuxième dans deux Grandes Liasses.

— Et je parie que ça n’a pas amélioré son caractère, grommela Larin en laissant partir l’esclave.

Tout en attendant le prochain conflit d’importance pour se manifester, les Mandaloriens se distrayaient en participant à des combats rituels entre eux, et ils y entraînaient toute personne assez folle pour se montrer intéressée par ces jeux violents. Ils étaient dangereux et imprévisibles dans tous les domaines, excepté un : revenus au sein de la galaxie pendant la Grande Guerre, ils n’étaient pas disposés à s’éclipser de nouveau avant longtemps.

Larin patienta une minute, pour être bien sûre que Shanka ne revienne, puis elle replongea dans le flot de gens qui parcouraient le couloir principal et fit signe Shigar de la suivre.

Ils remontaient la piste d’un renseignement glané auprès d’un des chefs cuisiniers du palais. Deux visiteurs entourés de mesures de haute sécurité – les émissaires de République et de l’Empire, supposaient Larin et Shigar étaient logés dans des appartements de luxe situés au cœur de cette immense structure. Il était difficile d’accéder à ce secteurs, mais ils avaient appris l’existence d’un conduit reliant les itinéraires de service sous-jacents – comm celui qu’ils empruntaient en ce moment – et les sous-sols des appartements de haute sécurité. Passer de l’un à l’autre demandait du temps, mais jusqu’ici cela ne présentait pas de difficultés particulières.

Larin ouvrait la marche d’après le plan qu’elle avait mémorisé, et elle gardait son attention fixée devant elle. Shigar était sur ses talons, elle en était sûre, sans même avoir à le vérifier. Il se déplaçait avec la même légère qu’un cygne d’Aldérande et pouvait se fondre dans la foule aussi subitement qu’une bouffée de fumée se dissipe dans la brise.

Quand elle fit halte au croisement suivant pour s’orienter, il apparut simplement à côté d’elle, comme s’il surgissait de nulle part.

— Nous y sommes presque, dit-il. Je prendrai la tête à prochaine étape.

— D’accord, dit-elle. Mais je me demandais : pourquoi allons-nous dans cette direction ? Notre priorité ne devrait pas être le coffre-fort ?

— Elle le serait si nous savions où le trouver. Quand nous aurons atteint un des émissaires, nous aurons notre guide pour nous y mener. Nous savons que tous les deux l’ont vu. Il vaut toujours mieux questionner les personnes qui savent que des gens au hasard.

Elle ne put que le lui concéder. Ils avaient appris beaucoup en se mêlant avec le personnel opprimé du palais, mais tous les renseignements importants qu’ils avaient obtenus étaient noyés dans un discours sans intérêt. Trier le bon grain de l’ivraie leur avait pris plus de temps qu’ils ne l’auraient souhaité.

— Après vous, dit-elle.

C’était à son tour de suivre. Deux personnes marchant côte à côte attiraient toujours plus l’attention que des individus dans la foule. Entouré de serviteurs et d’esclaves inconnus, ils se diluaient dans le paysage, passaient et étaient instantanément oubliés. C’était un effet qu’Akshae Shanka n’obtiendrait jamais.

 

Ils atteignirent l’entrée du conduit souterrain sans incident. Là, Larin fit un croc-en-jambe à un Gamorréen qui alla bousculer un Evocii lourdement chargé. Pendant cette diversion, Shigar en profita pour activer son sabre laser et découper le gros verrou de sécurité de la porte. Les gonds rouillés grincèrent quand il ouvrit le battant mais, dans les cris et les invectives ambiantes, personne ne le remarqua. La dispute n’en était pas encore à son paroxysme que Larin se glissait derrière lui, et ils refermèrent la porte.

C’était beaucoup plus calme de ce côté, mais aussi beaucoup plus sombre. Shigar prit une profonde inspiration. Il était content de ne plus évoluer dans le flot de ces espèces multiples condamnées à un sort attristant. Il avait eu un aperçu du luxe que s’accordaient ceux qui occupaient le sommet de la pyramide sociale sur Hutta. Il savait quels privilèges ils savouraient. Tout autour de lui, il avait pu voir le coût que cela exigeait, en saleté et en misère.

Mais les entrailles de Coruscant étaient très comparables, et cette constatation atténua quelque peu son ressentiment envers les Hutts. Peut-être était-ce simplement dans la nature des choses. Et peut-être que la rebuffade de Maître Nobil était méritée. Comment l’Ordre Jedi aurait-il pu changer une situation qui perdurait depuis des millénaires ? Ce n’était pas la mission du Conseil, quand les loups de l’Empire cherchaient à prendre la galaxie à la gorge.

Une légère lueur jaune apparut.

— Tout droit, et ensuite à gauche, c’était bien ça ?

La voix de Larin éveillait des échos sifflants dans les kilomètres de tunnels métalliques qui s’étendaient devant eux. À la lumière de la lampe fixée à son blaster, il leva un doigt pour se barrer les lèvres et acquiesça. Elle roula des yeux et ajouta :

— Il n’y a personne ici. C’est ce qu’on nous a dit.

Il secoua la tête et l’invita d’un geste à passer devant.

Mieux vaut ne prendre aucun risque, se dit-il.

Larin repartit d’un pas prudent. Le conduit était sec et vide, assez grand pour qu’ils avancent sans devoir s’incliner. Ils auraient même pu courir côte à côte s’ils l’avaient voulu. De temps à autre, des tuyaux et des câbles emmêlé ! pendaient de la voûte, ce qui les obligeait à se baisser pour passer. Par deux fois, ils durent même sauter par-dessus un puits béant dans le sol. Mais, hormis cela, ils ne furent pas gênés.

Ils atteignirent l’embranchement après quinze minutes Alors que Larin s’en approchait, Shigar la saisit fermement par l’épaule et la força à s’immobiliser.

Elle tourna vers lui un regard interrogateur. Il posa la main sur la lampe du fusil pour masquer son faisceau lumineux.

Pendant un moment, l’obscurité fut totale. Puis un faible lueur se manifesta, et le son d’un mouvement disert résonna autour d’eux. Quelqu’un se trouvait dans le tunnel juste après le coude.

Shigar s’avança, sans presque oser respirer. À travers la Force, il sentit trois organismes groupés, mais pas assez nettement pour définir leurs intentions. S’ils guettaient des intrus, pourquoi cette lumière ? Et si ce n’était pas un piège, pourquoi ce silence ?

Il risqua un coup d’œil dans l’embranchement. Trois silhouettes imposantes et cornues se tenaient immobiles autour d’une lampe et contemplaient la voûte en se grattant la tête. Des Horteks, ce qui expliquait pourquoi ils ne parlaient pas. Cette espèce était en effet télépathe. De plus, leurs uniformes grossiers et les outils éparpillés à leurs pieds expliquaient leur présence dans les tunnels. Ils appartenaient aux services de maintenance et étaient donc là pour leur travail.

Shigar prit le temps de rassurer Larin, puis il ferma les yeux. Ses pouvoirs télépathiques étaient modestes, mais ils s’étaient améliorés auprès du Grand Maître, au point que Satele Shan pouvait lui transmettre des concepts simples sans prononcer un mot. Les Horteks étaient réceptifs aux pensées extérieures et vulnérables à la persuasion par la Force. S’il parvenait à combiner les deux, il pourrait aisément se débarrasser d’eux.

Il réussit à se concentrer avec une facilité surprenante. Ses exercices mentaux pendant le voyage pour Hutta s’avéraient payants. Quelques secondes plus tard, les Horteks ramassèrent leurs outils et partirent.

— Bien joué, chuchota Larin quand le son de leurs pas lourds s’estompa au loin.

Elle se glissa dans l’autre tunnel et régla sa lampe au minimum.

— À partir d’ici, ça va être plus difficile, prévint Shigar en décrochant son sabre laser de sa ceinture. Ne cédons pas à l’autosatisfaction.

— Eh, regardez ça…

Larin avait braqué sa lampe sur la voûte, à l’endroit où les Horteks auraient dû être encore en train de travailler. Quelque chose avait crevé la paroi en métal et l’avait l’ait fondre. Des fils argentés pendaient du trou tels des lambeaux de toile d’araignée. Larin souffla doucement sur l’un deux, qui se mit à osciller, aussi raide qu’un pendule.

— On dirait des fils métalliques.

— Impossible, dit Shigar. Il s’étire.

Larin dirigea la lumière sur l’extrémité du fil, qui s’allongeait visiblement.

— Il pousse ou il extrade ? s’interrogea-t-elle.

— Peu importe. Ce qui se passe au-dessus ne nous concerne en rien.

— C’est un palais hutt. Je dirais que votre réponse est un exemple de philosophie de survie.

 

Le premier droïde de sécurité qu’ils rencontrèrent était une sphère métallique qui tomba en vrombissant d’un conduit vertical et se hérissa aussitôt d’armes. Larin l’abattit d’un seul tir, devançant Shigar d’une fraction de seconde.

Elle souffla une fumée imaginaire du canon de son blaster.

— Il faudra faire mieux que ça pour avoir le dessus sur… euh, moi.

Elle avait failli dire pour avoir le dessus sur une ancienne de la Blackstar, mais elle se reprit à temps. Elle ne voulait pas qu’il se demande ce qu’un ancien commando d’élite de la République faisait à rôder avec lui dans les entrailles du palais de Tassaa Bareesh. La seule idée de lui raconter son histoire entama son assurance. Et pourtant, ce qu’ils faisaient maintenant lui rappelait l’ancien temps, et l’état mental qu’elle avait connu alors s’imposait à elle avec un naturel déconcertant. L’effronterie, la vantardise et la belligérance, le tout couplé avec des courses dans des endroits obscurs, pour abattre des cibles.

— Restez aux aguets, dit Shigar. Il y en aura d’autres.

Le deuxième droïde de sécurité jaillit d’un tunnel latéral dans un sifflement. Ses lumières clignotèrent et il leur ordonna de ne plus bouger. Shigar s’occupa de celui-là en le tranchant en deux avec son sabre laser.

— Pas si rapide, cette fois, hein ?

Elle lui répondit d’un sourire.

Ils progressaient sans hâte, avec prudence. Les droïdes de surveillance constituaient certes un danger, mais leur présence signifiait aussi qu’ils approchaient de leur objectif. Les zones luxueuses du palais étaient presque aussi bien protégées que la chambre de Tassaa Bareesh.

Le tunnel se dédoubla et revint sur lui-même. Shigar parcourut les embranchements sans hésiter – et sans se tromper, Larin l’espérait –, tandis que les droïdes convergeaient sur eux comme des mouches. Leur temps de réaction s’améliora avec la pratique, jusqu’à ce que les drones connaissent la destruction presque dès leur apparition.

Puis un modèle de surveillance trois fois plus gros que les autres fonça sur eux en bourdonnant et en tirant avec une cadence rapide. Shigar se servit de son sabre laser comme d’un bouclier puis dévia les projectiles et les lui renvoya. D’un geste de la main, il provoqua l’effondrement d’une portion de la voûte qui écrasa le droïde sous ses débris.

— Mieux vaudrait ne pas faire ça trop souvent, commenta-t-il quand la poussière se fut en partie reposée.

— Les gens vont finir par le remarquer, si le sol s’affaisse sous eux.

— Par ici, dit Shigar qui venait de remarquer quelque chose en hauteur.

Elle le suivit jusqu’à la paroi. Là, une échelle métallique était rivée dans le mur et s’élevait dans un conduit vertical.

— Vous êtes sûr que c’est le bon ? demanda-t-elle.

Il testa son poids sur les échelons inférieurs, qui tinrent bon.

— Aussi sûr que je peux l’être. Je passe devant.

— Ne tuez rien avant que je vous aie rejoint.

 

Le conduit débouchait sur un sous-sol empli de barils d’huile ensevelis sous une couche de deux centimètres composée de carapaces d’insectes desséchées et de poussière. Ils semblaient avoir été entreposés là des dizaines d’années plus tôt. Shigar se déplaça lestement entre eux, laissant à peine une empreinte. Larin était presque aussi légère, et elle avait démontré qu’elle maîtrisait l’utilisation de son blaster à canon court. À plusieurs reprises, il avait été tenté de lui demander pourquoi elle avait gaspillé son temps dans les vieux quartiers de Coruscant, mais il ne voulait pas se montrer indiscret. Derrières ses plaisanteries, elle ne se livrait pas. Mais s’il y avait quelque chose qu’il devait savoir, elle le lui dirait le moment venu, il n’en doutait pas.

Sois gentil, lui avait recommandé Maître Satele. Il avait beaucoup réfléchi à cette instruction. Et elle devait s’appliquer à Larin, la jeune femme qu’il avait déjà sauvée une fois du Mandalorien. Était-ce de la gentillesse, cependant, qu’être arraché à son foyer et plongé dans la guerre de quelqu’un d’autre ? Mais il sentait en Larin une absence de racine corrosive qui risquait de l’empoisonner si on ne la contrait pas. Sur Coruscant, elle n’était qu’une personne de plus, déchue de ses droits civiques et prise dans les émeutes de la faim, les rébellions séparatistes, la corruption généralisée. Ce dont elle avait besoin, c’était d’avoir une direction, un but. Il pouvait lui offrir cela, temporairement au moins, si elle le voulait.

Le sous-sol aux barils se terminait sur une porte verrouillée. Le sabre laser eut très vite raison de cet obstacle. Ils poursuivirent dans un escalier étroit, sentant le moisi, qui les mena niveau après niveau à une cave en pleine activité. Une équipe d’Evocii rangeait des caisses de denrées délicates dans une chambre froide sans doute très coûteuse. Tous ces esclaves étaient bien trop occupés pour remarquer les deux silhouettes véloces qui filèrent dans leur dos et passèrent aussitôt dans les cuisines.

Larin trouva un réduit, et Shigar y attira à leur suite une esclave relativement bien vêtue.

— Nous sommes des invités de ta maîtresse, expliqua-t-il, et il la poussa à accepter ce mensonge en recourant discrètement à la Force. Mais il est évident que nous nous sommes égarés.

— Vous êtes très loin de la salle du trône, monsieur.

— Sais-tu où les deux émissaires sont logés ?

— Oui, monsieur. Je travaille à la blanchisserie et je suis souvent appelée à venir dans ce secteur.

— Tu seras donc heureuse de nous rappeler où il se trouve.

L’Evocii leur fit une description détaillée des deux suites.

Elles étaient quasiment mitoyennes, mais avec des entrées diamétralement opposées. Celle occupée par l’émissaire Vii, de la République, était la plus proche.

— Déjà entendu paner de ce Vii ? demanda Larin en aparté.

Shigar dû convenir que non.

— Mon maître se réserve toutes les questions touchant à la politique.

— C’est un sujet qui devrait être à tout le monde.

— Soit dit entre nous, je partage tout à fait cet avis.

Shigar interrompit l’esclave car, dans sa volonté de les aider au mieux, celle-ci en était venue à égrener des détails très anecdotiques.

— Tu vas également nous donner les codes d’accès aux clones sécurisées, au cas où nous les aurions oubliés.

— Oui, monsieur, mais pas ceux des suites elles-mêmes, je ne les connais pas. Les gardes pourront vous aider quand vous arriverez là, je pense. Ils vous reconnaîtront, bien sûr ?

— Bien sûr, affirma Shigar. Tu n’as pas besoin de t’inquiéter pour ça.

— Non, monsieur. Je n’ai pas besoin de m’inquiéter pour ça.

Docile, l’Evocii leur dévoila tout ce qu’elle savait, et il mémorisa chaque information.

— Avant de te laisser repartir, dit-il à l’esclave, je veux que tu le saches : c’est dangereux d’être ici, aujourd’hui.

Trouve un endroit où te cacher et restes-y jusqu’à ce que l’agitation passe. Tu ne veux pas être blessée.

— Je ne veux pas être blessée.

— C’est bien.

La servante sortit du réduit et se hâta d’aller obéir à ses instructions.

— Prête ? demanda Shigar à Larin.

— Je suis née prête.

— Vous me l’avez déjà sortie, celle-là.

— Ah bon ?

Ils se glissèrent hors du réduit et s’engagèrent sans traîner dans les couloirs bien entretenus. Il était plaisant de ne plus soulever des nuages de poussière à chaque pas, ni de se prendre des toiles d’araignée dans le visage. Ici, des vases et des statues fragiles s’alignaient à intervalles réguliers, et Shigar prit grand soin de ne rien endommager. Quelqu’un avait créé ces œuvres, et la préservation de la culture figurait parmi les nombreuses missions d’un Jedi.

Ils arrivèrent au poste de contrôle que l’Evocii avait décrit. Cinq sentinelles houks gardaient l’accès aux appartements privés dévolus au représentant de la République. Plus nombreux que prévu. Larin jaugea la situation d’un simple coup d’œil et fit part à Shigar de la stratégie qu’elle envisageait par une série rapide de signes de la main. Heureux de la laisser prendre les commandes, il approuva d’un hochement de tête.

Elle surgit à découvert par une roulade qu’elle termina en se redressant à genoux, puis tira aussitôt dans les épaules de deux des Houks. Ils basculèrent à la renverse. Shigar passa devant elle d’un bond, sa lame brandie pour les défendre tous deux. Un troisième garde s’écroula, touché par sa propre décharge que le sabre laser lui avait renvoyée. Plus que deux. Larin évita de peu un tir et riposta de deux coups en pleine poitrine. Shigar trancha le bras du dernier adversaire.

Il conserva sa posture défensive dans les volutes de fumée, prêt à frapper de nouveau si l’un des gardes au sol se permettait le moindre tressaillement. Larin arriva souplement à sa hauteur. Son épaule portait juste une trace sombre, là où la décharge l’avait ratée de peu.

— Pas d’alarme, dit-elle, satisfaite. Nous les avons neutralisés à temps.

— La porte doit être verrouillée. Voyez si vous pouvez nous faire entrer sans déclencher aucun système de sécurité.

Elle s’agenouilla devant la serrure et ôta son casque pendant qu’il guettait toute nouvelle arrivée. Du boîtier plat encastré dans la cuisse gauche de son armure, elle déroula une pochette souple contenant une série de fins outils de précision. Elle les utilisa un à un sur le mécanisme de la porte tout en fredonnant. Shigar allait lui demander combien de temps cela lui prendrait encore quand elle rangea les outils dans leur étui, se releva et toucha le panneau d’accès.

La porte s’ouvrit en coulissant, surprenant les deux Houks de faction de l’autre côté. Shigar dévia les décharges de leurs blasters et Larin les neutralisa en un éclair. Ils entrèrent dans la suite et refermèrent derrière eux.

La scène qu’ils découvrirent était totalement inattendue.

Un Twi’lek aux vêtements de couleurs criardes était penché sur les corps étendus des membres d’une équipe de la Sécurité Rapprochée de la République. Il voulut saisir un module de communication mais Shigar le lui arracha des doigts d’une traction de la Force.

— Que se passe-t-il ici ? lança Larin d’un ton dur, tout en autorité. Qu’avez-vous fait de l’émissaire ?

— Moi ? rétorqua le Twi’lek, l’air mortellement offensé. Ces créatures sont dans cet état sans que j’y sois pour rien ! On les a trouvées ainsi, droguées, dans une cantina. Et l’émissaire a disparu.

Larin cola le canon de son fusil sous le menton du Twi’lek.

— Vous mentez.

— L’émissaire est un hôte de marque, invité ici uniquement pour affaires ! Nous ne lui voulons aucun mal !

— Il n’a pas tort, fit Shigar.

— Ce qui ne veut pas dire que je dois aimer ça.

Elle retourna le fusil et frappa le Twi’lek à la tête avec la crosse. L’autre s’effondra comme une masse.

— Vous, vous ne bougez pas d’ici pendant que je vérifie votre petite histoire.

Larin souleva un des gardes du corps et le déposa sur un canapé, puis elle lui tapota doucement les joues.

— Son pouls bat toujours. C’est un début.

Pour ne pas blesser l’homme, Shigar vint à la rescousse et plaça sa tête sur un coussin avant d’essayer de le réveiller.

Une main posée sur le coussin, l’autre sur le front du garde, il se concentra et instilla le flot de la Force dans le corps inerte pour le ranimer.

Le garde du corps tressaillit et ouvrit des yeux apeurés. Il y eut un crissement quand sa crête s’ouvrit. Le coussin absorba le tout.

— Désolé de vous surprendre ainsi, dit Shigar avec calme. Vous avez été drogué. Je m’appelle Shigar Konshi, Et voici Larin Moxla. Le Grand Maître Satele Shan nous a envoyés ici pour vous aider.

Ce n’était pas entièrement vrai, mais l’explication se tenait.

L’homme le repoussa et se mit en position assise. Il passa une main dans ses cheveux et se racla la gorge.

— Désolé pour ma réaction. Je suis le sergent Potannin. Où est l’émissaire Vii ?

— Nous l’ignorons, répondit Larin. Nous espérions que vous pourriez nous le dire.

Le sergent secoua la tête.

— On a dû nous tendre une embuscade. L’émissaire Vii discutait avec un homme qui travaille pour les Hutts. Il s’appelle Jet Nebula. Et il y avait quelqu’un d’autre… un Mandalorien.

— Quel Mandalorien ? demanda Larin qui se rapprocha île Potannin. Vous connaissez son nom ?

— Je ne me souviens pas. (Le chef des gardes tourna vers eux un regard implorant.) Il faut retrouver l’émissaire.

Shigar acquiesça. Un Dao Stryver actif sur Hutta risquait de créer des complications, mais ce n’était pas nécessairement un désastre. La mission d’origine pouvait toujours être menée à son terme.

— Bon, vous et Larin allez chercher l’émissaire, décida le Padawan. Si le Twi’lek a dit vrai, les Hutts vous aideront.

— Et vous ? demanda la jeune femme.

— Je vais aller jeter un œil à ce coffre-fort. Ce que vous ne pouvez apprendre de l’émissaire, je le découvrirai là-bas. Sergent, vous voulez bien me dire comment m’y rendre ?

Potannin lui fit une description détaillée de l’itinéraire à suivre depuis la suite jusqu’au coffre, en passant par le sas atmosphérique de sécurité. Shigar enregistra chacune de ses indications.

— Vous avez vu ce qui se trouve à l’intérieur ?

— Il y a le calculateur de navigation du Cinzia et un artefact que l’émissaire Vii n’a pas réussi à identifier. Fait d’un métal étrange, (Potannin eut une grimace d’excuse.) Désolé, c’est tout ce que je sais.

— Ce n’est pas grave.

Shigar aurait pourtant aimé que le sergent en ait appris davantage. Les reliques des anciens Sith et Jedi pouvaient parfois être identifiées par les marques spécifiques qu’elles portaient.

— Je vais le voir de mes propres yeux, et peut-être que |e comprendrai à quoi il correspond.

— Vous êtes sûr de vouloir y aller seul ? lui demanda Larin avant qu’il parte.

— J’ai mon comlink, répondit-il. En cas de problème, je vous appellerai.

— Vous avez intérêt, dit-elle en lui effleurant le bras furtivement. On se revoit plus tard, de toute façon.

Shigar la laissa ranimer les autres en compagnie du sergent. Le sabre laser prêt, il se replongea dans l’immensité du palais de Tassaa Bareesh, puis il progressa en comptant les intersections une à une.