CHAPITRE XXXVIII

Drysso se tourna vers son aide de camp.

— Combien de torpilles, lieutenant Waroen ?

— Vingt, monsieur.

Deux par aile X. Nous survivrons.

— Vous voyez, lieutenant, pas de quoi s’inquiéter…

— Attendez, monsieur. Vingt-quatre.

— Ça n’a pas d’importance.

— Quarante… Non, quatre-vingts. Quatre-vingts !

Drysso se tourna lentement vers la baie d’observation.

Les boucliers tinrent une seconde avant de s’effondrer. Les sirènes retentirent sur la passerelle quand, à six kilomètres de là, une nouvelle vague de torpilles et de missiles s’abattit sur la proue du vaisseau. Les lignes élégantes du fleuron de la flotte impériale se déformèrent sous le choc des douzaines d’explosions secondaires.

— Waroen, arrêtez ces sirènes ! cria Drysso. Estimation des dégâts ! Batteries, quelle puissance avez-vous perdue et pourquoi n’avez-vous pas encore abattu le Liberté ?

La voix de Waroen retentit au-dessus du vacarme.

— Capitaine, nous n’avons plus de bouclier avant.

— Comment ont-ils pu lancer tant de missiles ?

— Je ne sais pas, monsieur.

— Fils de la Sith ! Trouvez !

Le Liberté tira sur le superdestroyer, ses rayons écarlates lui ravageant la proue. Les blindages fondirent avant de se condenser en nuages de métal, dissimulant ainsi l’étendue du désastre…

Drysso connaissait assez son vaisseau pour imaginer le résultat.

Un point pour l’ennemi. Mais ces dégâts ne sont rien par rapport à ce que nous pouvons faire.

Les batteries ioniques du Lusankya entrèrent en action, frappant le Liberté. Les boucliers du destroyer implosèrent et des éclairs bleus coururent sur la surface de sa coque. Drysso vit des explosions secondaires se multiplier le long des batteries de son adversaire. Le destroyer avait été durement touché.

— Capitaine, j’ai perdu quinze pour cent de ma puissance de feu à tribord.

— Entendu. Lieutenant Waroen, d’où venaient ces missiles ?

— Des cargos, monsieur. Ils se servent de la télémétrie des chasseurs pour nous aligner. (Waroen étudia ses écrans.) Je peux réactiver le bouclier avant, mais cela diminuera notre protection globale.

— Faites-le, Waoren. Batteries, oubliez le Liberté. Détruisez les cargos. La menace principale, c’est eux. Anéantissez-les et cette bataille sera terminée.

 

Tycho Celchu fit virer son aile X sur la gauche. Il croisa la trajectoire d’un chasseur Tie et appuya sur la détente. Deux rafales de rayons transpercèrent les moteurs ioniques du vaisseau impérial ; Tycho dévissa sur la droite et plongea pour éviter l’explosion.

— Toujours avec moi, Huit ?

La voix de Nawara Ven résonna, un peu nerveuse.

— Avec toi, Tycho, tout juste.

— Nouveau groupe, Huit. Puis seconde attaque sur le Lusankya. Je te suis.

— Bien compris, Sept.

Tycho décéléra et se positionna à l’arrière gauche du chasseur de Nawara Ven. Après leur première attaque, les Rogues avaient combattu le quatrième groupe d’Isard. Pris entre les ailes X et les Chir’daki, les Tie n’avaient pas tenu longtemps.

— Ils ne sont que huit, Nawara. Choisis bien ta cible.

— J’en ai une en vue, Sept.

L’aile X de Nawara resta stable tandis que le Twi’lek fonçait vers les Tie.

Tycho fronça les sourcils. L’attaque directe est à notre avantage, mais elle affaiblit les boucliers. Et dans la situation présente, Nawara ferait mieux de les économiser.

Le chasseur du Twi’lek vira sur l’aile et tira quatre rafales. Le Tie partit dans une vrille… Soudain, Tycho se retrouva de l’autre côté du mur de chasseurs, libre de se lancer sur le Lusankya.

— Chef Rogue, Sept et Huit en approche finale.

— Bien reçu, Sept.

Tycho vérifia que Nawara le suivait, puis se lança dans une spirale d’attaque, visant la partie noircie de la proue du superdestroyer. Des geysers de flammes indiquaient les brèches par où l’atmosphère s’échappait. Tycho choisit l’incendie le plus important, bascula sur les missiles et attendit la lumière rouge sur son réticule.

— Double verrouillage pour Sept. Deux torpilles…

Deux traînées bleues filèrent vers le Lusankya.

Autour du vaisseau, d’autres points bleus s’allumèrent, visant le même point.

Wedge et Tycho avaient longtemps étudié le problème. L’unique moyen de battre le superdestroyer était de le bombarder de torpilles à protons et de missiles. Un seul problème : pour réussir, il manquait douze escadrilles… Mais les cargos équipés de lanceurs pouvaient fournir les plateformes dont les Rogues avaient besoin. Asservir les missiles à la télémétrie des ailes X avait permis d’éviter de placer des détecteurs tactiques sur les cargos, ce qui aurait poussé le Lusankya à les prendre pour cibles.

Wedge avait demandé à Booster de lui acheter des lanceurs, des munitions… et des détecteurs qui avaient été branchés sur la station de Yag’Dhul. Le simple fait de les activer, pensait-il, serait suffisant pour faire réfléchir le Lusankya.

Booster avait accepté de rester dans la base pour faire croire au superdestroyer qu’il était pris au piège. Pendant ce temps, les Rogues avaient quitté le système, retrouvant les hangars du Liberté de Sair Yonka et faisant le reste du chemin dans un confort relatif. Les cargos avaient eu le temps de préparer l’embuscade tandis que le Liberté attendait l’arrivée du Lusankya aux limites du système.

Les missiles de Tycho explosèrent contre les boucliers du Lusankya, qui s’effondrèrent. Les rayons de Nawara déchirèrent la coque. D’autres Rogues continuèrent l’assaut contre les batteries tribord.

Si nous pouvons les détruire toutes sur un côté, nos vaisseaux seront tranquilles…

Le Vaillant continuait à arroser la poupe du Lusankya. Les batteries de proue du superdestroyer s’acharnaient sur le croiseur d’Alderaan, mais l’équipage de droïds manœuvrait le vaisseau afin que les rayons ne puissent se concentrer sur un seul point.

Les boucliers arrière du superdestroyer paraissaient encore solides, mais le pilonnage du Vaillant leur pompait une énergie qui aurait pu être utilisée ailleurs.

Tycho passa sous le feu ennemi et remarqua que le Lusankya avait commencé à viser les cargos. Quand les batteries lourdes se tournèrent vers eux, ils se dispersèrent.

Des manœuvres d’évasion, comme prévu, mais les cargos vont avoir plus de mal à lancer leurs missiles. Tycho regarda son écran. Je n’en ai plus que deux, de toute façon. Juste assez pour une attaque.

Il vérifia la localisation de l’escadrille d’intercepteurs impériaux, qui se rapprochait moins vite que prévu.

— Leader, Sept est prêt pour une autre passe.

— Négatif, Sept. Les intercepteurs ont rejoint une navette qu’ils escortent hors de la zone de combat. Sept et Neuf, poursuite avec vos équipiers !

L’astromech de Tycho afficha les spécifications de la navette.

— Il y a une forme de vie à bord. Tu crois que c’est Isard ?

— Possible. Elle ne doit pas s’échapper. Fonce, Tycho.

— Bien reçu, Jesfa.

 

Iella s’accroupit et avança la tête, avant de la retirer et de reculer. Trois tirs de blaster frappèrent le mur.

Trop près à mon goût, pensa la jeune femme.

— Merci, Jesfa, dit-elle dans son comlink. Grâce aux holocams qu’il détruit, nous le suivons à la trace.

Elscol arriva en courant et se laissa tomber à genoux à côté d’Iella.

— On a quoi ?

— Un rat pris au piège, dit la jeune femme en désignant le couloir. Les cages d’escalier sont bloquées ?

— Il ne peut plus sortir du cinquième niveau, annonça Elscol. On évacue les innocents ou on se contente de chasser ce type ?

— Allons le chercher.

Elscol fit un signe à son groupe, composé de deux humains et de deux Vratix.

— Il y en a un qui bouge encore… Soyez prudents.

Deux hommes d’Elscol se mirent en position à l’entrée du couloir. À son signal, les Vratix bondirent pour se placer de chaque côté de la porte. Fermée ; l’inconnu avait dû fuir plus loin. Elscol et Iella coururent à l’intersection suivante et s’accroupirent.

Iella allait avancer quand un mouvement derrière elle attira son attention. La porte qu’ils venaient de passer explosa, détruite par un tir de blaster. Un rayon toucha le premier Vratix à l’abdomen ; le second tomba à son tour, tué par deux coups à la poitrine.

Les deux hommes postés au fond du couloir coururent dans la pièce avant qu’Iella ou Elscol puissent les en empêcher. Il y eut de nouveaux tirs, puis la fumée se dissipa… révélant les cadavres des membres du commando.

— Jesfa, envoie-nous six hommes, dit Iella. (Elle se tourna vers Elscol.) On attend ?

— Quoi ? Que ce type s’échappe ? S’il est entré dans cette pièce, il connaît les codes de priorité. Il y a peut-être un ascenseur secret.

— Ça m’étonnerait, dit Iella en activant de nouveau son comlink. Jesfa, qu’ils apportent une caisse de grenades…

Un blaster vola dans la pièce.

— Je me rends ! dit une voix.

Iella et Elscol échangèrent un regard.

— Sortez les mains en l’air, ordonna Iella, arme pointée.

— Je crois reconnaître cette voix, dit l’impérial.

Iella sourit. Fliry Vorru ?

Le petit homme passa la porte, enjambant les cadavres.

— Ah, Iella Wessiri. Enfin quelqu’un qui me rendra justice…

Elscol se leva et mit le ministre en joue.

— La justice ? J’ai un chargeur plein de verdicts, assassin.

Iella posa la main sur l’arme d’Elscol.

— Non, il se rend.

— Il se rend ? protesta la jeune femme. Iella, il vient de tuer quatre de nos amis !

— Quatre crimes de plus pour lesquels il sera jugé.

— Elle a raison, dit Vorru en souriant. Je suis sûr que la population de Thyferra me fera un procès équitable, si la Nouvelle République le veut bien.

Iella le regarda avec mépris.

— Oui, ministre Vorru, quand la Nouvelle République en aura terminé avec vous, les Thyfeniens auront leur chance.

— J’en suis heureux, Iella. Les Thyferriens ont un sens aigu de la justice. (Vorru baissa lentement les mains.) J’ai les noms des officiels de la Nouvelle République qui ont détourné du bacta. Je connais les accords secrets passés avec Isard par certains mondes membres… L’Alliance ne voudra pas voir ses petits secrets étalés au grand jour.

Iella éclata de rire.

— Vous pensez pouvoir acheter votre liberté ?

— Chère Iella, j’en suis sûr.

— Parce que vous me croyez incapable de faire justice moi-même, dit la jeune femme. Isard a tué mon mari. Si elle s’est enfuie, il faudra que je me venge sur vous. (Elle leva son blaster, visant la tête.) Un coup, et le dossier de l’accusation sera refermé.

Vorru applaudit.

— Joli discours, ma chère, mais j’ai lu votre dossier. Vous ne m’abattrez pas de sang-froid.

— Exact, dit Iella en baissant son arme. (Elle désigna Elscol.) Mais elle, si.

Le tir d’Elscol frappa Vorru à la gorge.

Il s’écroula, face contre terre.

— Bien visé.

Elscol regarda son blaster.

— Je ne me souviens pas d’avoir réglé cette arme sur anesthésie.

Iella sourit.

— C’est moi qui l’ai fait, quand je t’ai empêché de lui tirer dessus la première fois.

— Pourquoi ?

— Vorru a toujours aimé tout contrôler. En te laissant faire, je lui ai prouvé qu’il me connaissait mal… Mais je veux qu’il vive, et qu’il souffre.

Elscol acquiesça et changea le réglage.

— Vorru a probablement raison. Les chefs de la Nouvelle République passeront un marché avec lui.

— S’ils en ont l’occasion, répondit Iella avec un sourire mauvais. Les Rogues ont sorti Vorru de Kessel ; ils peuvent l’y ramener. Pas de politique, pas de marché… Seulement la justice.

Elscol éclata de rire.

— Continue comme ça, et tu me convaincras peut-être d’épargner les Impériaux.

— Je le ferai, Elscol… Une fois Thyferra libérée.