Anya s’en voulait de n’avoir pas couru plus vite, de n’être pas arrivée à temps. Elle injuriait son vieux corps, ce cœur usé, ce pauvre souffle.
« Sale carcasse », répétait-elle.
Anton lui prit la main : « Tu as fait ce que tu pouvais. Un jour, ensemble, nous le retrouverons quoi qu’il arrive, et il saura.
— Ce sera trop tard.
— Au moins, il saura. Il faudra qu’il sache la vérité.
— Tu as raison, nous le retrouverons. »
Ils iraient jusqu’à l’adresse indiquée au revers de l’enveloppe, c’était loin, à l’autre bout du pays. Ils connaissaient son prénom, ils possédaient sa photo, ils interrogeraient chaque villageois, ils le reconnaîtraient dans ce chandail bleu qu’il devait porter quotidiennement, car la trame en paraissait usée, ramollie.
Anya se pencha, toucha de ses lèvres l’oreille de la jeune femme. Tous deux venaient de se mettre d’accord sur les paroles qu’elle allait prononcer.
Anton posa sa main sur le dos de sa femme ; les mots retrouveraient plus facilement leur chemin.