L'ALCAÏCERIA
La rue à la largeur des épaules frayées
Descend comme un orvet d'argent entre les coffres
Les tapis les mouchoirs et les manteaux rayés
Dans les cris les regards les désirs et les offres
Toutes les couleurs que l'Orient séria
Amarante safran corail jade ou turquoise
Un chant d'étoffe emplit la Kaïssâriya
Au soleil de l'hiver sous la tente tortoise
Voix d'eunuques discutant les prix entre soi
Bagarre de marins et cavaliers zénètes
Juifs étoilés palpant les laines et les soies
Gardes noirs que poursuit l'offre des proxénètes
C'est dans le souk une singulière partie
D'échecs Chaque marchand accroupi sur sa case
Le cordonnier frappant son pied de fer L'outil
Dans la main l'équarrisseur Sur le tout la phrase
Odorante du méchoui
Vendeurs d'oraisons
Porteurs d'eau philosophes vanniers saltimbanques
Mendiants et fripiers étalant ce qu'ils ont
Esclavons à l'étal cherchant ce qu'il leur manque
Qui caressent la joue et tâtent le jarret
Des chrétiens prisonniers gens des cités à sac
Soudans crépus Voleurs de chevaux navarrais
Mais voici caquetant de baraque en baraque
Et leur rire léger comme un jouet d'enfant
Ce bruit de bijoux qu'elles font quand elles bougent
Promenant leurs yeux d'antimoine sur les gens
Les femmes aux doigts teints dans leurs vêtements rouges
Oh qui n'est pas sensible à la pourpre beauté
C'est du sang qui tressaille en nous qu'elles se couvrent
Il semble qu'à leurs pas la voix nous est ôtée
L'homme en chacun de nous s'émeut Son âme s'ouvre
Comme une écharpe du Yémen Le tisserand
D'abord pâlit Le verrier ressemble à la bouche
De son four Mais le boucher lui c'est différent
Qu'est-ce qui le secoue à perdre ses babouches
C'est qu'il a vu le Fou vous savez bien le Fou d'Elsa
Non
Tout le monde se retourne pour
Rire un coup car c'est à se démancher le cou
Que ce vieillard dément qui parle de l'amour
D'abord il se prend pour Kéïs l'Amirite qui mourut d'amour au pays de Nadjd et sans doute que les navigateurs qui eurent à leur bord le poème de Djâmî et de Hérât où règnent les fils de Timoûr
Ignoraient porter à travers la Méditerranée une plante qui rend fou
Comme ceux-là par inadvertance à leur bagage mêlé des noyaux de Syrie
N'imaginaient point le mardj autour de Grenade un jour ensemencé secouant au printemps des boucles de cerises
Et je ne sais quand vint ici le manuscrit orné d'enluminures
Des amours de Medjnoûn et Leïlâ qui n'ont fini d'être chantées
À quel prix ni dans quelle échoppe d'Andalousie il fut acheté pour qu'en moins de cinq ans passés depuis que le poète l'acheva
La graine de l'insanité conservée au fond de l'écriture eût germé donné cette plante de la folie à l'al-Baiyazin
Et voici qu'un lecteur s'y est à l'amant de Leïlâ si bien identifié
Que comme lui pour tous il a perdu son nom et le nom de son père
Comme lui nul ne l'appelle plus que le Medjnoûn qui veut dire le Fou
Substituant seulement à Leïlâ le nom de sa bien-aimée
Un nom qui n'est d'ici ni du Magrib ni de la Perse
Un nom qu'on n'a jamais chanté le soir dans les caravanes d'Arabie
Et qui ressemble beaucoup à un fruit glacé dans l'été torride
Un vocable de neige et de fleurs qui vient de régions inconnues
Et vous voyez bien que celui-là qui peut marier le ciel d'ailleurs au vers ramal
Et non point comme le vieillard de Hérât en persan reprenant à Nizâmî de Gandja son héritage
Cette Leïlâ d'Arabie à Delhi qu'avait chantée à son tour Khosroû l'Émir
Le Medjnoûn andalou son audace à rebours des traditions de notre poésie
Ayant adopté le chant vulgaire du zadjal qu'inventa le mécréant Ibn-Bâdjdja
Lui comme un idolâtre qui ne connaît pas le chemin de la pierre noire
Tourne son culte révoltant vers une femme à l'Islâm étrangère
Au contraire de cela qui est admis non point seulement aperçue et par mille obstacles séparée
D'un amour impossible d'où sort la démence comme l'eau de la fontaine
Mais sa femme et non pas la femme à un autre donnée
La femme de sa vie et de ses bras la femme qui demeure sa longue musique
Aussi n'avons-nous pas respect de sa démence inexplicable En rupture avec toutes les règles de l'amour convenu
Et qui semble une gifle à nous tous qui vivons tranquillement avec nos épouses nos concubines
Passant de l'une à l'autre et parfois sans tragédie
Fermant les yeux sur leurs amants
C'est pourquoi nous rions de cet homme quand il croise notre chemin
Prenant les devants de l'insulte et la pierre dans la main
Prête à être jetée avant qu'il ait commencé ce chant d'Elsa comme une usurpation
Comme un déni de la coutume héritée
Comme un objet de scandale à l'heure de midi
D'autant plus insupportable qu'il n'est de loi pour le qualifier crime
À moins de l'inventer à son usage
À moins d'imaginer pour cet amour un autre crucifiement
Que celui des pieds et des mains
Tenez qu'est-ce que je vous disais voilà qu'il chante
Intolérable comme la répétition de soi-même
La récidive insolente du péché
Toute une hérésie à lui seul et d'autant plus monstrueuse
Qu'il n'y a pas de roue aux membres de l'insensé
Pas de chevalet pour briser la démence
De chevaux pour disloquer la poésie
Or les enfants suivant le diseur de zadjal
Comme les feuilles font le vent le long des rues
L'œil noir et le pied nu derrière lui dévalent
Vers les faubourgs écrus croquant des fèves crues
Et leur rire se tait alentour goutte à goutte
Quel peuplier géant semble partout neiger
Sur la nuit en plein jour et le chant qu'ils écoutent
Des constellations dans leur coton léger
Comme il arrivait au pont qui a nom du Peuplier le Medjnoûn chanta ce qui ne s'adressait à personne non plus que fait le vent dans la cheminée ou Peau des moulins dans la roue et je le dis à ma manière n'ayant pris nul soin de calquer le vers andalou monorime à la façon des longues laisses des preux Charlemagne et plus par souci d'écho de rotruenge d'ici que de zadjal de là-bas et ce me soit cas de dire une fois pour toutes que je n'ai point songe de je ne sais quelle reconstitution de ce qui fut Une fois pour toutes entré dans cet 'alâm al-khayâl ce monde de l'imagination où je roue à ma voix romance et rêve à ma nuit
Et il n'y avait de la mort de Bajazet à Racine l'écrivant pas même cet espace-temps qui me sépare de l'instant où mourut Lénine. Au moins qu'on m'accorde la marge d'erreur encore à quatre siècles trois quarts honorable au tireur dans la durée
Je disais donc qu'il arrivait au pont au Kantarat al'Oûd qui mène à cette promenade où vont les amoureux
ZADJAL DU KANTARAT AL'OÛD
Elle seule elle a le ciel
Que vous ne pouvez lui prendre
Elle seule elle a mon cœur
Qu'on l'ose arracher ou fendre
Elle seule atteint les songes
Qui mettent mes nuits en cendres
Elle seule échappe aux flammes
Comme fait la salamandre
Elle seule ouvre mon âme
À ce qui ne peut s'entendre
Elle seule et qui sait d'où
Vient l'oiseau vers le temps doux
Elle seule qu'elle parle
C'est comme faire un voyage
Elle seule et son silence
À la beauté des ombrages
Elle seule et tout l'amour
Me sont un même visage
Elle seule et les merveilles
S'étonnent de son passage
Elle seule et le soleil
À peine y peut faire image
Elle seule et qui sait d'où
Vient l'oiseau vers le temps doux
Elle seule et tout le reste
S'en aille au diable vauvert
Elle seule et j'ai pour elle
Seule ainsi vécu souffert
Elle seule ô ma romance
Mon sang mes veines mes vers
Elle seule et qu'elle sorte
Je demeure dans l'enfer
Elle seule et que m'importent
Cette vie et l'univers
Elle seule et je sais d'où
L'oiseau chante le temps doux
Ô paroles à la lèvre inconsidérément envolées... Comment veux-tu que ton zadjal ne te revienne point frapper au visage, homme qui ne mesures l'expression à comment elle est d'autrui reçue ? Comment veux-tu que les gens ne te tiennent à crime de leur préférer ton amour, et de mettre en balance au profit d'une femme tout le poids de l'existence et la perle de l'aube et la pierre des douleurs ? Comment veux-tu qu'ils te pardonnent l'excès de ton âme, eux qui vivent selon la règle et l'étalon, à toi dont la langue est d'hyperbole et l'œil d'éblouissement ?
Ne sais-tu donc que ce monde où tu vis fut de toujours et à jamais demeure celui du pieux mensonge ? Eux tous, qui n'ont crainte hâter la mort d'un père afin de le dépouiller, ces voleurs de bonheur et ces pillards de rêves, spéculateurs de la famine et débauchés secrets, usuriers et gardes-chiourme, maquereaux et revendeurs de chair et de sueur, tortionnaires légaux, assassins et monarques, ou ces gagne-petit des palais, de la guerre et de l'orgie, ah, comme à bas prix tu leur procures l'occasion d'exposer leurs sentiments nobles, leurs cœurs généreux, l'amour de Dieu, de leur prochain, du peuple ! Et, sous le masque de la bonté, ne se trouve-t-il point un chanteur qui sache dire le visage immonde et puant de la Bête, une incantation qui fasse mourir les déguisés de leur odeur révélée ? Quand la vertu cessera-t-elle d'être ce parfum par quoi la décomposition se dissimule, et les siècles passent en vain, les sociétés se succèdent, les dieux, les philosophies, la peste ne change que de costume, et la charogne à son aise étale au grand jour son mufle maquillé... Il n'y a pas une aspiration de l'âme, une grandeur de l'idée, une générosité de l'homme, au bout du compte qui ne serve d'éventail à la puissante Hypocrisie, toujours victorieuse et toujours adulée. Elle a pour cortège les hommes de cérémonie, à qui parole n'est jamais autre que déjà pesée, éprouvée, ajustée, langage que de cette politesse, où se trouve le prix quotidien qu'ils sont payés, les hommes de citation, les hommes-échos, qu'un mot suffit à faire pivoter sur leurs convictions, tant ils sont bien graissés, bien huilés et reconnaissants de l'être... les hommes de prosternation changeant plus facilement d'idole que de liturgie... Et si tu ne vois pas de quoi je veux parler, ne te tourmente pas : point n'est besoin de Grenade aux derniers jours pour l'entendre, à l'imbécile cherchant à lire entre les lignes, qu'il lève le flambeau de sa main tremblante, et lise son infamie au premier semblant de miroir !
Et la parole soit comme avant une bataille : Écartez-vous de ma route, ô Hypocrites !
Car si je veux parler à cette femme, et quelle différence y a-t-il de la prière ou du chant, je ne vais pas cacher mon amour sous la religion, faire semblant de tourner à Dieu ce qui revient à cette femme, et mes ablutions se fassent pour elle, et pour elle prononcés les noms de ma bouche.
Vous vous vantez d'avoir pieusement offert cent noms à Allah, oublieux que c'est lui-même sans vous qui se les est donnés, ou tout au moins quatre-vingt-dix-neuf et le sien, les disant les noms les plus beaux, comme si c'était là de votre part munificence. Et moi, je vous le proclame, à cette femme je donne tant de noms admirables que pour les compter dessus vous n'avez suffisance d'étoiles. Vous dites : « Quelle est-elle donc qu'il lui faille tant de mots à la décrire ? » Et moi, je vous réponds, ô Hypocrites, que votre dieu s'il s'épuise avec cent noms dont le sien, cela prouve que vous lui vouez un culte avare, et moi, je vous affirme, ô Parcimonieux, que celle que je chante a de toute façon les noms les plus beaux : qu'elle choisisse et s'en fasse un collier d'un jour, aussitôt jeté je lui tends toutes les pierres de rare éclat que votre prière pauvre ignore...
Écartez-vous de ma route, ô Hypocrites ! Voici le heu, voici l'ombre et la lumière séparées, voici l'Homme que je charge de se tenir pour moi tourné vers où je situe Dieu, la paume en direction de ma kibla, droit, les pieds écartés l'un de l'autre, car plus grande est l'offrande si tu n'en vois pas la main, plus profond le chant dont tu ne peux situer la bouche.
Prends ma place, vieillard, sois mon cœur et mon cri.
CELLE DONT LE NOM S'ÉCRIT DIVERSEMENT
Une chambre d'ombre avec la haute fenêtre étroite perdue où le soleil ne pénètre à l'heure de la prière licite que d'un doigt jaune à terre pointé sur un manuscrit dont la calligraphie aligne tous les étendards de la langue persane où neigent les points diacritiques si bien que semble ici se poursuivre la Guerre Sainte et non la louange de l'être aimé
Et le chant ramal de Djâmî s'est au Coran substitué
Une chambre d'ombre où ne se voient outre le calme et le parchemin que cette cruche d'une eau froide à quoi s'éteint de temps en temps la soif du poète
Une soif qui l'emplit d'un feu sans fin qui le fait sans force Une soif toujours la même amère amère amère Et la planche où dormir un livre usé par les yeux la porte
Donnant droit sur la rue à travers un rideau
De perles noir et blanc un rideau d'écriture
Une chambre d'ombre fauve un homme seul sur ses jambes croisées
Tout là-haut dans Grenade au fond de l'al-Baiyazin
Où gîtent des fauconniers des Gitans des pauvres et des princes
Il est n'importe quelle heure On entend des enfants au dehors ou la prosternation sonore du muezzin
Tout là-haut dans Grenade et l'homme n'a que faire de parler ou de rire Il n'est de place
Ici que pour la solitude et rien d'autre et le silence et rien d'autre où suis-je et ne faut-il pas demander à qui vit ici pardon de cette entrée au cœur de lui-même et rien d'autre
Mais en vérité je ne suis pas dans cette chambre
Où sans me voir tout à sa propre folie
Cet homme fait de lui-même économie
Tout là-haut dans Grenade au fond de l'al-Baiyazin
Et rien ni les marches de pierre ni la persienne rayée
Ne donne accès sur cet homme ni le plafond d'obscurité ni
Le bourdon parfois d'une mouche
Et sur les murs se répète un mot entre deux alif les lettres sîn et lam de droite à gauche ainsi que je les lis à l'envers de mes yeux latins comme une interrogation S L est-ce elle est-ce Elle à la craie au charbon à la craie au couteau à la craie à l'encre à la craie et qui s'inverse en lettres grecques êta lambda sigma alpha de gauche à droite à hauteur de l'homme à genoux ou latines à hauteur de la bouche ou cyrilliques à hauteur du front ΕΛΣΑ ELSA ЭПЬЗА...
Et qui reconnaîtrait dans l'alphabet d'Occident le mot EN-XA qui vient de l'avenir au pays du Sud-Pacifié
Ainsi les enfants font de la rue un jeu tatoué les nomades un langage entre eux que ne comprend point la maison marquée ou des hommes aux yeux fuyants le blasphème et l'obscénité
Et dans cette chambre aux premiers jours que nous eûmes n'était-il t'en souviens-tu pas tracé sans fin Celui qui aime écrit sur les murs Celui qui aime écrit sur les murs Celui qui aime
Comme une ponctuation du secret du silence
Tout là-haut là-bas dans Grenade au fond de l'al-Baiyazin
Et c'est à la fois une chambre une cellule une cave une grotte ainsi qu'en habitent les Gitans d'aujourd'hui qui n'écrivent aux murs par lettres mais par signes la langue des voleurs
Car l'amour de cet homme-ci n'est-il pas le Vol une cabale de l'avenir le Vol une effraction de mon âme le Vol de ce qui va naître et l'ombre reine à mes yeux dérobée ô sorcellerie
Personne ici n'entre On sait
Qu'il en sort un vieil homme appelé le Fou derrière qui
Les garnements quand il chante s'assemblent le suivant par les ruelles
Et parfois il se trompe et psalmodie un langage lointain qu'ils ne peuvent comprendre une Perse perdue ou la noirceur d'Éthiopie
Ou disent les Esclavons dont s'entoure le Roi dans le Palais Rouge al'Hamrâ
Je ne sais trop quelle clameur kymrique
Et les garnements derrière lui frappent leur bouche de cet étrange nom étranger
Par une dérision des doigts de la langue et de la salive
Là-haut dans l'al-Baiyazin d'où descend la marche et descend le zadjal et les femmes se tournent vers lui riant Voilà Kéïs
Le beau Kéïs du pays de Nadjd chante ô Kéïs ta Leïlâ dont le nom ne se peut retenir dans sa bizarrerie
Chante ô Medjnoûn celle que tu ne montres point
Il passe et le porteur d'eau remplit attentivement les cruches
Que pas une goutte n'en soit perdue
Qui vient des citernes sous l'al-Kassaba dont il paye au Palais de l'Émir redevance
Le Medjnoûn passe avec sa cour dépenaillée il chante il descend dans Grenade où se fait le train de tous les jours
Malgré la haine et le mépris de ceux qui ont science de la poésie, et s'appuient sur le Coran où il est dit que l'amour des voluptés qui viennent de la femme, comme celui des chevaux de race et des terres arables, est tromperie des hommes, à quoi Dieu donnera substitut véritable dans une autre vie, – et comment ont-ils oublié qu'il est dit aussi : De toute chose nous avons créé un couple, – malgré les quolibets et l'injure, au milieu de la foule, à travers les quartiers pauvres ou dans la campagne parmi les valets de ferme et les troupeaux, il passe, le Fou, dans les haillons de sa vie, les ravages du temps sur son visage, il traverse le malheur et la menace, il se hâte, ayant peut-être pressentiment que ce qui n'est point maintenant chanté ne va jamais l'être. Et ne le jugez pas selon votre morale d'état civil parce qu'il a pris le nom d'un prince d'Arabie étant d'humble naissance et non point du pays de Nadjd, mais de cette colline à l'est de Grenade qui en est appelée où les amoureux venaient se promener, si bien qu'il ne l'a point volé, le nom d'An-Nadjdî d'où sans doute ses rêves dérivèrent du côté de l'amant de Leïla, Kéïs Ibn-Amir. Ne lui dites pas qu'il vaudrait mieux déclamer des poèmes qui mettent aux mains grenadines les armes, le feu dans les cœurs et l'intrépidité sur les fronts. Que d'autres cette fois s'en chargent ! Lui sait dans sa chair et son âme que chaque instant de cette saison d'avant l'incendie est ce qu'il lui demeure à glorifier l'amour de qui porte le nom de mon amour. Vous êtes sages et justes, ô gens qui pesez toute chose à la façon de l'or et de l'argent, de la turquoise ou des zoumourroud ! Mais, moi qui vais mourir, je n'ai pas trop de chaque respiration pour nommer Elsa... Je vous donne ici les poèmes du Medjnoûn, tels que je les ai surpris, mêlé aux mendiants et aux gamins des rues, car il parle pour moi, dans cette Grenade appelée vie, où je ne crains ni la honte ni le rire, mais seulement de n'avoir pas dit avant le crépuscule une chose pour quoi je suis né.