Le défi urbain : inventer la ville africaine pour tous
L’urbanisation du continent, encore inégale, est rapide et massive. En 2015, 472 millions d’habitants peuplent les villes – quinze fois plus qu’en 1950 – et le taux d’urbanisation atteint 40 %. Selon les projections du Programme des Nations unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), l’Afrique comptera 745 millions de citadins en 2030, 48 % de sa population totale. En 2050, 1,3 milliard d’urbains représenteront 56 % de la population africaine.
Métropoles et petites villes

Si les définitions de la ville varient selon les États, l’essor urbain est vif partout mais il ralentit. À l’exception de villes accueillant des réfugiés – capitales politiques comme Khartoum ou petits centres en zones de guerre (Kivu, Bornou, nord Mali) – la croissance naturelle des villes est devenue leur principal moteur démographique. Dans un contexte d’intenses mobilités entre villes et campagnes et entre les villes, les migrants ruraux ne constituent plus la majorité des nouveaux citadins depuis les années 1980 en Afrique subsaharienne.

L’urbanisation est marquée par le surgissement de métropoles et la multiplication de villes petites et moyennes. L’essor des mégapoles (10 millions d’habitants ou plus) – Lagos, Le Caire, Kinshasa et la région urbaine de Johannesburg – ne doit pas occulter la croissance des autres villes. Variable selon les États, le poids relatif des plus grandes villes dans la population urbaine est généralement décroissant depuis 1990. Les systèmes urbains sont pluriels : macrocéphales (Tunisie, Angola), bicéphales (Cameroun, Malawi, Kenya) ou polycéphales (Nigeria, Afrique du Sud). En 2015, quasiment la moitié (47 %) des citadins africains vit dans des villes de moins de 300 000 habitants : une urbanisation par le bas.

 

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Repenser l’urbanisme

Aux indépendances, le modèle hérité de la colonisation combinait monopole foncier de l’administration publique, urbanisme de plan, lotissement inégalement équipé selon les catégories sociales et filières publiques de logement. Très inégale, l’application du modèle a permis de développer des fragments modernes dans les capitales sans répondre aux besoins du plus grand nombre.

Aux exclusions de fait, ou de droit sous le régime d’apartheid (Afrique du Sud, Namibie), est lié l’étalement rapide des espaces illégaux, issus d’une modernité parallèle reposant sur des filières foncières et immobilières très efficaces pour produire des logements. Les bidonvilles – mot né à Casablanca dans les années 1930 – étaient moins importants qu’en Amérique latine avant les années 1980. Ce n’est plus vrai depuis la décennie d’ajustement structurel et l’urbanisation de la pauvreté à la fin du XXe siècle : 62 % des citadins d’Afrique subsaharienne, 13 % en Afrique du Nord, vivaient en 2012 dans des bâtis précaires (tôle, bois, argile) pouvant inclure des parpaings de ciment.

Les politiques de restructuration (légalisation et équipement) et les solutions alternatives destinées aux plus démunis (trames assainies) sont limitées. La « participation populaire » aussi : les petits investisseurs privés et les citadins ordinaires ne peuvent pas financer les réseaux (eau, assainissement, électricité) ou le traitement des déchets. Il faut donc inventer une ville pour tous. Le défi est colossal : en Afrique subsaharienne, selon l’Agence française de développement, il faudrait investir 25 milliards de dollars par an dans les infrastructures pour respecter les normes de base.

 

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Articuler formel et informel

Jusqu’à la fin des années 1970, l’urbanisation a favorisé une inégale mais réelle ascension sociale. Ensuite, les bases économiques urbaines ont été sapées, les effectifs salariés des fonctions publiques et des rares industries manufacturières se sont effondrés et le taux de chômage urbain moyen a atteint 30 % en 2000. La pauvreté monétaire et les inégalités sociales ont été accrues, les activités informelles sont souvent devenues prépondérantes, des systèmes agro-urbains ont assuré la survie, des soldes migratoires ont été inversés.

Le rebond économique des années 2000 a relancé le marché du travail salarié, surtout dans les nouvelles technologies et les services. Néanmoins, les pauvres non qualifiés n’y ont pas accès et la plupart des emplois créés sont toujours informels (petit commerce, artisanat et transports). Dans des villes où les inégalités de revenus sont fortes, où la production de richesses doit être stimulée et les services de base assurés, l’inclusion de la sphère informelle par les collectivités locales est un enjeu majeur du XXIe siècle.

 

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Atlas de l'Afrique
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