Le premier Objectif du millénaire pour le développement était de réduire de moitié, entre 2000 et 2015, l’extrême pauvreté monétaire (moins de 1,25 dollar par habitant par jour), mais pour une majorité d’Africains, aucune amélioration du niveau de vie n’a été induite par la croissance économique. D’après les Nations unies, le taux d’extrême pauvreté a baissé, depuis 1990 : de 56 % à 41 % en Afrique subsaharienne et de 5 % à 1 % en Afrique du Nord. Cependant, ce recul a été le plus lent au monde et le nombre total de pauvres a augmenté : 436 millions en 2013 contre 291 millions en 1990. La part de l’Afrique subsaharienne, où quatre pays (Nigeria, RDC, Tanzanie et Éthiopie) concentrent 52 % des pauvres du continent, serait passée de 15 % à 34 % de la pauvreté mondiale de 1990 à 2010 ; et selon la Banque mondiale, la tendance à la hausse perdure en 2015, même avec une ligne de pauvreté réajustée à 1,90 dollar. Les ruraux, les femmes et les jeunes sont particulièrement touchés par la vulnérabilité des exploitations familiales agricoles et par le fort taux de chômage urbain, auxquels se combine un taux de précarité d’emplois, surtout informels, élevé (78 % en Afrique subsaharienne et 35 % en Afrique du Nord). Avec en moyenne 39 % de travailleurs pauvres, la redistribution des fruits de la croissance demeure très inégalitaire.
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L’Afrique est au second rang mondial, après l’Amérique latine, en termes d’inégalités de revenus. En 2015, parmi les dix pays au plus fort coefficient de Gini, sept sont africains : l’inégalité est particulièrement élevée en Afrique australe, au Rwanda et en RCA. Les deux dernières décennies ont été marquées par l’essor du nombre de millionnaires : leur fortune a surtout été amassée dans les mines, les hydrocarbures, les transports, le commerce, les services financiers, la construction et l’immobilier. D’après New World Wealth, ils sont au nombre de 160 000 et leurs avoirs cumulés atteignent, fin 2014, 660 milliards de dollars. En 2015, 29 d’entre eux font partie des « super-riches » (plus d’1 milliard de dollars), dont 8 Égyptiens, 7 Sud-Africains et 5 Nigérians. L’inégalité exacerbée des revenus est aujourd’hui considérée comme un frein au développement, d’autant plus que l’évasion fiscale hors du continent est considérable : cette dernière est estimée à 60 milliards de dollars par an selon le PNUD et 100 milliards selon Oxfam.
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La notion de classes moyennes est floue, hétérogène et variable. Pour la BAD, les classes moyennes africaines sont constituées d’individus pouvant dépenser de 2 à 20 dollars par jour, en parité de pouvoir d’achat. Ils sont 327 millions en 2010, soit 34 % de la population du continent (26 % en 1980) : 199 millions d’entre eux formeraient une « classe flottante » (2 à 4 dollars dépensés par jour), quatre fois plus nombreuse qu’en 1980 et composée de personnes sorties de la pauvreté. Dans l’enquête réalisée en 2015 dans cinq pays (Cameroun, Côte d’Ivoire, Kenya, Maroc, Nigeria) pour la CFAO – l’un des grands distributeurs en Afrique –, les classes moyennes sont définies en fonction du revenu (de 12 à 50 dollars par jour), du niveau d’équipement et du type de dépenses : elles ne constitueraient que 13 % de la population. Quelles que soient les définitions, trois éléments décisifs sont à souligner : leur effectif augmente, leur consommation soutient la croissance et leur épargne croît.
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