CHAPITRE 3

Aujourd’hui…

Les voies orbitales de Cato Neimoidia bourdonnaient d’activité. Une forte présence Impériale rivalisait avec un flot continu de transports qui allaient et venaient, souvent accompagnés par des chasseurs TIE ou des escadrons de mercenaires. Même depuis l’orbite, Starkiller remarqua des traces d’activité militaire récente, en particulier une profonde brûlure noire près d’une des villes suspendues de la planète. On avait eu recours à des munitions lourdes mais probablement pas nucléaires car la population proche n’avait pas été évacuée.

Starkiller n’avait jamais eu de raison de mettre le pied sur cette planète avant, ni pendant sa brève période de recrutement pour la rébellion naissante, ni pendant son premier apprentissage auprès de Dark Vador, quand il jouait les assassins et les apprentis. En effet, vaincre ceux qui défiaient son Maître – et leur survivre – avait été une part importante de la formation de son ancien moi à bord de l’Executor. Ces opposants avaient été ses premières vraies cibles, les droïdes PROXY mis à part. C’est seulement quand il s’était montré performant que le Seigneur Noir l’avait jugé digne de combattre avec lui.

Starkiller fit un tour complet de Cato Neimoidia, à l’abri dans le chasseur TIE de Dark Vador, et se contenta d’observer. Il avait passé treize jours dans un puits sur Kamino et il lui semblait être dans les griffes de Vador depuis une éternité. Il avait oublié à quoi ressemblait la lumière du soleil. Il avait oublié ce que cela faisait de se sentir libre. Il y avait tant de choses qu’il avait oubliées et tant de choses qui revenaient peu à peu.

Juno.

Elle paraissait étrangement proche, sans aucune raison. Dans son esprit, elle apparaissait de plus en plus clairement au fil des heures. Il n’arrivait pas à croire qu’elle avait presque disparu de ses souvenirs. Oh, il comprenait très bien pourquoi. Il connaissait les manipulations de Dark Vador et le pouvoir du Côté Obscur. Il avait vécu avec, dans sa vie originale, et en avait même tiré du pouvoir. Il était capable d’exercer sa volonté sur les autres pour obtenir ce qu’il voulait, mais il ne doutait pas que… Vador avait presque réussi à chasser de son esprit tout souvenir de la femme qu’il avait aimée.

Maintenant, elle était de retour et il lui semblait inconcevable qu’elle en soit jamais partie. Même quand il avait tout perdu dans sa vie précédente, quand le dernier espoir de victoire lui avait été enlevé, il avait pensé à elle. Son décès n’était rien par rapport au fait de savoir qu’elle avait réussi à s’échapper indemne de la station spatiale de l’Empereur.

Puis… la mort. Et la renaissance. Et l’oubli, l’impuissance et la peur.

À présent, il était de retour. Rien ne pourrait se dresser entre lui et Juno. Pas longtemps en tout cas. Avec elle en ligne de mire, qui l’encourageait, il se sentait plus fort que jamais.

Du fin fond de sa mémoire, il entendit les paroles d’une Jedi assassinée. Maître Shaak Ti : Tu vaux beaucoup mieux que ça. Puis sa propre voix, qui ne s’adressait pas à elle mais à Juno, dans un autre lieu, à un autre moment : La Force est plus forte que quoi que ce soit qu’on puisse imaginer. C’est nous qui la limitons et pas le contraire.

Starkiller inspira profondément et ferma les yeux. Son esprit n’était qu’un petit point dans l’immensité sans cesse en mouvement de la galaxie. Il sentait les remous et les courants combinés de toutes les choses vivantes qui ondoyaient en lui. Avec un petit effort, il parvint à se détacher de lui-même et à rejoindre ce flux, cherchant celui dont il avait besoin.

Le bourdonnement d’une foule emplit son esprit. Du mouvement se dispersa dans sa vision mentale, il eut du mal à distinguer quelque chose de spécifique. S’agissait-il d’ailes en mouvement ou de banderoles ? C’était difficile à dire. Des silhouettes qui auraient pu appartenir à des êtres vivants brillaient en bleu autour de lui. Au-dessus, pendait un œil énorme qui regardait vers le bas.

Êtes-vous toujours avec moi, Kota ?

Sa vision changea, se tinta de rouge, de rouge foncé, comme si quelqu’un avait tranché la gorge d’une bête géante et l’avait vidée sur le sol. Quelque chose grogna puis poussa un hurlement. Des corps s’agitèrent et il y eut une poussée de violence sauvage.

— Tout ça, c’est dans ta tête, mon garçon, dit Kota dans son souvenir.

Des lumières vertes apparurent. Encore du sang. Des membres arrachés tombèrent dans la poussière. La foule hurla.

Le général Rahm Kota, penché en arrière sur ses talons, respira bruyamment, encerclé de cadavres. Depuis combien de temps se battait-il maintenant ? Six jours ? Sept ? Il commençait à être épuisé. À chaque vague, il était plus près de Terreur. Et quand cela se produirait, tout serait terminé pour de bon.

Starkiller ouvrit les yeux. Ses lèvres serrées formaient une fine ligne.

— Tiens bon, vieil homme, murmura-t-il. Puis il manœuvra avec souplesse le chasseur TIE de Vador en dehors de l’orbite.

Les forces Impériales sur Cato Neimoidia étaient groupées autour d’une ville-pont, elle-même suspendue au-dessus d’un profond gouffre, qui s’enfonçait à une distance abyssale dans la croûte de la planète. Pourquoi ? Peut-être le dictateur local aimait-il jeter ses prisonniers par-dessus bord pour qu’ils servent d’exemples à leurs amis. Starkiller s’en fichait. Il n’allait pas passer par-dessus bord. Il était venu dans un unique but : sauver le général Kota ou au moins apprendre de sa bouche où il pourrait trouver Juno. Rien d’autre n’avait d’importance. Pas même les vues infinies de l’espace ni la lumière d’un soleil inconnu.

Son vaisseau avait été repéré dès le moment où il était arrivé. Quand il effectua sa descente, il fut immédiatement rejoint par une escorte de chasseurs TIE, qui pensaient que le vaisseau était piloté par Dark Vador, l’exécuteur en chef de l’Empereur, comme le suggérait le code de son transpondeur. Starkiller ne les détrompa pas. Tout ce qui facilitait son chemin était bon à prendre. Les TIE envoyèrent des avertissements, dégagèrent une baie d’atterrissage devant lui puis repartirent pour reprendre leur routine habituelle. Il posa sans encombre le chasseur stellaire volé sur la plateforme vacillante. Il était conscient qu’il n’y avait rien, à part quelques couches de métal, entre lui et le gouffre sous ses pieds mais cela lui était égal. D’autres auraient peut-être été intimidés, mais ça ne lui faisait ni chaud ni froid.

Plusieurs speeders garés sur la plateforme devant le hangar s’étaient dispersés à son approche. Un escadron de stormtroopers était au garde-à-vous en deux rangs parfaitement parallèles, les armes en position de revue, pas menaçantes. Si Vador avait deviné qu’il venait ici, le potentat local n’en avait pas été informé. C’était parfait.

Il atterrit, coupa les moteurs avec douceur et efficacité puis s’extirpa du siège de pilotage. L’écoutille s’ouvrit dans un sifflement. Ses bottes touchèrent le métal chaud de la plateforme qui résonna sous ses pas.

Un homme dégarni avait rejoint le hangar. Il était vêtu de lourdes tuniques où les insignes Impériaux se mêlaient au harnachement Neimoïdien. Il se tenait à la tête de la double rangée de stormtroopers. Il semblait nerveux mais son expression se transforma en étonnement quand il vit apparaître Starkiller.

C’est seulement à ce moment-là que Starkiller se rendit compte de l’apparence qu’il devait présenter. L’uniforme de vol qu’il portait était sale et déchiré après les semaines passées dans le puits de Vador et son incessant entraînement au combat. Dans son ancienne vie, l’art du camouflage et de l’invisibilité lui avait été inculqué, mais il était à présent bien trop pressé pour se soucier de cela.

— J’attendais le Seigneur Vador, dit l’homme en tunique.

Il devait s’agir du potentat en personne à en juger par l’air d’autorité qu’il pensait irradier.

Starkiller reconnut sa voix. Il l’avait entendue dans une vision sur Kamino en train de dire :

— Essayez de lâcher les chiens-rasoirs Corelliens.

Mais il n’avait pas de temps à perdre en conversation mondaine ou en réflexions mystiques.

— Le Jedi, demanda Starkiller, où est-il ?

— Il est en vie, pour le moment.

— Je vous ai demandé il était.

L’homme en tunique se redressa, pressentant un piège.

— Quels sont les codes de sécurité pour le secteur ?

Starkiller ignora la question et continua à marcher entre les doubles rangées de stormtroopers.

— Les codes de sécurité !

Avec un raclement de plastoïde, les stormtroopers changèrent la position de leurs armes pour les pointer sur lui. L’homme en tunique dégaina un blaster et le visa d’une main sûre.

Les Impériaux se tenaient entre Starkiller et Kota. Starkiller serra les lèvres pour former une sorte de sourire puis alluma ses sabres laser.

— Tuez-le ! ordonna le potentat en tirant deux coups précis. Starkiller les dévia sans difficulté vers le sol. Les troopers ouvrirent le feu des deux côtés et il se retourna pour dévier les tirs de blasters qui venaient sur lui. Du coin de l’œil, il vit le potentat se diriger vers le turbo-ascenseur.

Pas si vite, pensa-t-il en tendant la main pour faire revenir l’homme.

Les portes de l’ascenseur s’écartèrent et deux troopers lourdement armés ouvrirent le feu en sortant de la cabine. Pressé de tous côtés, Starkiller fut contraint de laisser filer le potentat et de se consacrer entièrement aux menaces immédiates. Des tirs de blasters rebondissaient furieusement autour de lui. Déviés par ses doubles lames, ils allaient frapper les jointures du cou, les viseurs et les systèmes de respiration. Des missiles en provenance des deux nouveaux arrivants furent tirés sur lui, emplissant l’air de fumée. Son bouclier de Force réussit à détourner le plus gros de leur effet. Starkiller poursuivit alors sa progression en écrasant par télékinésie les lance-missiles et en déclenchant les charges restantes. Dans un éclair aveuglant et avec un boum assourdissant, le dernier obstacle disparut.

Il se sentit gagné par une puissante excitation. Pour la première fois, en plein combat, il réalisait qu’il était vraiment en vie. Il n’était pas une ombre qui rôdait dans un trou quelque part et qui rêvait d’exister.

La Force était avec lui et il était libre. Il était libre et il avait une mission.

Le potentat était parti depuis longtemps. Starkiller se précipita dans le turbo-ascenseur en contournant les codes de sécurité à grands coups de sabre laser. Il monta aux étages supérieurs. Pendant l’ascension, les parois de transparacier révélèrent la ville suspendue dans toute sa splendeur, à sa gauche et à sa droite, mais la vue ne l’intéressait pas. Il examinait les bâtiments à la recherche d’informations tactiques. La vision qu’il avait eue de Kota laissait deviner un espace ouvert et un grand rassemblement de gens.

Les scans qu’il avait pris en orbite n’avaient montré aucun endroit de ce genre. La plus grande structure de la ville était les baraquements Impériaux, un bâtiment circulaire en plein centre.

Quand le turbo-ascenseur atteignit le sommet et que les portes s’ouvrirent sur la ville, il fut accueilli par le brouhaha distant d’une foule.

Il sortit et écouta attentivement. Le bruit provenait des baraquements.

Il se mit en route à pied, courant à toute vitesse à travers les rues. Elles étaient peu peuplées, il y croisait de temps en temps un Neimoïdien à la peau verte, bien déterminé à rester hors de son chemin. Il n’entendait aucune alarme mais elles devaient retentir quelque part. Ces soupçons furent confirmés quand des bruits de bottes s’élevèrent dans les rues derrière lui.

Il emprunta la voie des airs, escaladant le bâtiment le plus proche jusqu’à son sommet et sautant vers le suivant. De cette façon, il évitait complètement les routes. Il se balançait d’une prise à l’autre et se sentait léger. La Force frissonnait en lui comme de l’oxygène très pur. Les niveaux inférieurs de la ville s’étendaient autour de plusieurs larges tours circulaires, connectées entre elles par des lignes de tram aérien. Il était très simple de se déplacer de l’une à l’autre dans le cœur de la cité, léger comme l’air.

Quand les forces de sécurité Impériales comprirent sa stratégie et activèrent les batteries de canons dans les niveaux supérieurs de la ville, les choses devinrent bien plus intéressantes.

Il évita des tirs d’armes en sautant de rails de tram en bâtiment et de bâtiment en rails de tram. Il sentait un calme familier l’envahir. C’était un calme né non pas de la paix ou de la tranquillité mais de la violence et de la colère. D’innombrables heures passées à méditer du Côté Obscur, à alimenter les énergies négatives que Dark Vador l’encourageait à embrasser avait fait de la transe du combat une seconde nature pour lui. Affronter des personnes réelles était plus difficile que se battre contre des droïdes PROXY, mais il en tirait un plus grand plaisir, le défi étant plus complexe. Un guerrier qui se battait rationnellement et sans émotion se comportait exactement comme un droïde. Les êtres vivants étaient plus étranges, plus imprévisibles et donc bien plus difficiles à vaincre.

Il balança son sabre laser comme au ralenti. Il regarda des décharges d’énergie reflétées s’avancer entre lui et ses cibles avec une lenteur qui ne trahissait pas leur pouvoir meurtrier.

Une fois, dans son autre vie, il avait été envoyé sur Ragna III pour étouffer un soulèvement des Youzzems, un peuple hostile. Il avait alors à peine douze ans et il avait été trahi par les armes que son Maître lui avait données. Elles l’avaient toutes lâché à son arrivée sur la planète, en même temps que son vaisseau, et il s’était retrouvé armé de sa seule Force et de son intelligence. Il s’était battu pour rejoindre l’installation Impériale la plus proche et était parvenu à s’enfuir de la planète. Il s’attendait à des reproches pour avoir raté sa mission ou à des félicitations pour avoir survécu. Il n’avait reçu ni l’un ni l’autre et le souvenir de son incompréhension lui revenait à présent, aussi clair que le cristal de son premier sabre laser. Il avait fini par comprendre que la leçon n’était pas de survivre mais d’accepter son propre pouvoir destructeur. Il avait laissé dans son sillage des dizaines de Youzzems blessés ou morts. Jusqu’à ce jour où il avait été contraint de laisser sortir sa rage, il n’avait pas imaginé de quoi il était capable… ni du peu d’encouragements dont il avait besoin pour y parvenir.

Plus tard dans cette première vie, Starkiller avait été terrifié par toutes les morts qu’il avait causées sous les ordres de son Maître obscur. Il avait été l’arme de Dark Vador, pointée droit sur les ennemis de l’Empereur et rien, avait-il juré, ne pouvait entraver sa route. Seul l’amour de Juno était parvenu à le détourner de ce chemin meurtrier et le mobiliser vers autre but, qu’il avait été incapable d’atteindre. Il était sa propre arme désormais et celle de personne d’autre, mais il ressentait encore l’écho de ce remords, le sentiment tenace que tuer n’était pas la réponse, malgré la plénitude paisible qui remplissait en affrontant les geôliers de Kota. Entraîné à la violence, fabriqué dans la violence, il avait du mal à assimiler l’idée qu’il pouvait y avoir d’autres solutions. Mais, alors même qu’il était habité par la transe du combat, il était capable d’envisager cette possibilité.

La clameur s’amplifia à mesure qu’il approchait des baraquements : il entendait des chants, des cris et la fureur de la foule. Les tirs concentrés sur lui s’intensifièrent aussi. Des jumptroopers équipés de jetpacks commençaient à converger dans sa direction. Il se dirigea vers une tour étroite reliée au bâtiment Impérial par plusieurs passerelles surélevées. Quand il fut à une distance suffisante pour sauter, il s’élança vers une des plateformes d’observation en transparacier, fendant l’air devant lui à l’aide de ses sabres laser. La fenêtre se brisa.

Il roula sur la plateforme, se releva et courut jusqu’aux escaliers. Ceux qu’ils croisaient bondissaient hors de son chemin les bras en l’air et appelaient les secours. Ils étaient vêtus avec extravagance et quelques-uns étaient des Neimoïdiens. Les humains étaient nettement plus nombreux que les autres. Mais ils ne ressemblaient pas à des officiers Impériaux.

Starkiller grinça des dents en pénétrant dans ce qui ressemblait à un casino. Voilà qui expliquait la présence de nombreux vaisseaux autour de l’enceinte Impériale : le potentat gérait, sous le manteau, une entreprise clandestine qui lui rapportait des crédits. C’était le cas d’un grand nombre de potentats que Starkiller avait renversés à la demande de Dark Vador quand il était encore au service de l’Empire. Vénaux, égoïstes et cruels, ils écrasaient leurs sous-fifres avec une main de fer tout en offrant des faveurs à ceux qui, comme eux, étaient haut placés dans la hiérarchie.

Le bien-être de l’Empire ne l’intéressait plus mais la galaxie dans son ensemble se porterait mieux si on éliminait un de ces Impériaux corrompus.

Il sentait le grondement de la foule à travers la semelle de ses bottes. Il était proche maintenant, très proche. Les défenses du casino étaient solides mais ce n’était rien pour lui. Ce qu’il ne pouvait combattre par les armes, il le détruisait tout simplement. Au dernier carrefour, il dévia un tram aérien de ses rails et le projeta dans le bâtiment. Le choc produisit un trou assez grand pour laisser passer une armée entière. Starkiller sauta dans le chaos d’étincelles et de métal fondu puis courut dans la direction où il sentait la présence de Kota, continuant à se battre pour défendre sa vie dans ce chaos de civils en fuite et d’impériaux armés.

Un long corridor étroit menait à une double porte en duracier. Elle était gardée par six stormtroopers. Starkiller ne prit pas la peine de s’arrêter pour les combattre. D’un geste, il les repoussa sur le côté et fit exploser les portes. Le grondement sourd de la foule le frappa comme un coup frontal. Il ralentit sa course, se mit à marcher et, quand il franchit l’ouverture, se retrouva dans une gigantesque arène de pierre, une zone de combat peinte en rouge par le sang, exactement semblable à celle de sa vision. Les côtés escarpés étaient remplis de spectateurs, mais quelques-uns seulement étaient présents en personne. Les autres assistaient au spectacle par hologramme. Leurs poings, griffes ou tentacules étaient levés, bleus et clignotants, et ils scandaient en cœur dans différentes langues.

Starkiller ne comprenait pas ce qu’ils disaient mais il devinait la nature de leur message.

— À mort ! À mort ! À mort !

Rahm Kota se tenait au centre de l’arène, entouré d’une légion d’assaillants morts ou blessés. Il serrait son poing autour de la gorge d’un stormtrooper agonisant. Son sabre laser vert étincela quand il le leva pour porter le coup final. Starkiller sentit à nouveau remonter un souvenir : il s’était déjà trouvé dans ce genre de position, jeté dans des arènes et obligé de tuer tous ceux qui s’attaquaient à lui. Mais ce n’était qu’un exercice d’entraînement. Cette fois, le spectacle n’avait rien d’un exercice.

— Kota ! cria-t-il.

Le vieux général leva la tête pour apercevoir celui qui le hélait par-dessus les hurlements de la foule.

— Ce n’est pas possible…

Starkiller courut vers le centre de l’arène. La foule hua et siffla. Un ordre puissant parvint d’en haut :

— Envoyez le Gorog !

Starkiller s’arrêta devant son deuxième Maître.

— Par la Force, murmura Kota en l’examinant avec ses yeux qui ne voyaient plus suite à une blessure que Starkiller lui avait infligée. On aurait dit qu’il le voyait tout de même.

Son épuisement irradiait de sa peau sale comme la chaleur jaillit du soleil. Il était mal en point, à bout de forces, et paraissait prêt à s’effondrer. Il tituba en arrière. Il paraissait ivre de fatigue.

— Je t’ai vu mourir…

— Vous m’avez vu dans votre avenir aussi.

— Oui, mais…

Une série de bruits sourds s’élevèrent en provenance d’un immense portail de l’autre côté de l’arène. Les énormes portes de métal commencèrent à s’ouvrir. Un grondement féroce jaillit de l’intérieur.

Starkiller se retourna pour affronter la nouvelle menace.

— Pourquoi ne pas vous reposer pendant cette bataille, général ?

Kota agrippa l’épaule de Starkiller et dit en souriant :

— Pas question. J’ai un compte à régler.

Quelque chose bougea de l’autre côté des portes. Quelque chose de lourd, de bestial et d’imposant.

Starkiller sourit aussi, même s’il ne saisissait pas ce qu’il y avait de drôle. Il aurait voulu demander des nouvelles de Juno mais ce n’était pas le moment.

— Vous n’avez jamais été très doué pour recevoir des ordres, lâcha-t-il simplement.

De l’obscurité surgit un Rancor Taureau rugissant. Sa salive éclaboussait le sol. Starkiller avança de trois pas puis se plaça fermement entre la bête et Kota. Il était confiant. Sur Felucia, le premier Starkiller avait vaincu un Rancor Taureau. Celui-ci devait être un adversaire aussi coriace. Il leva son sabre laser, prêt à frapper.

Cependant, quelque chose clochait dans la façon dont la bête se déplaçait. Ses yeux, grand ouverts, fixaient un point droit devant mais ne se focalisaient pas sur Starkiller ou sur Kota. La lueur que l’ancien apprenti de Vador lisait dans ce regard n’était pas de la fureur. Il s’agissait d’autre chose, qu’il ne parvenait pas à discerner.

— Je me fiche de savoir si les entraves ont été testées ou pas, décréta la voix avec force. Ouvrez la barrière du Gorog immédiatement !

Starkiller reconnut la voix, c’était celle du potentat qui l’avait « accueilli » sur la plateforme d’atterrissage. Il entendit un nouveau bruit sourd. Le Rancor Taureau regarda derrière son épaule et Starkiller comprit alors qu’il ne courait pas vers lui mais qu’il essayait d’échapper au danger.

Ce qu’il lisait dans ses yeux, c’était la peur.

Une main énorme surgit du portail ouvert derrière le Rancor. Elle appartenait à un bras aussi épais qu’un petit croiseur. Chaque doigt griffu était aussi long qu’un chasseur stellaire. Elle réagit avec une rapidité surprenante et souleva le Rancor Taureau du sol de l’arène, sous leurs yeux, puis le ramena, hurlant, dans l’obscurité. Il y eut un craquement et les cris s’arrêtèrent. Des os se brisèrent dans un bruit atroce. Des tissus se déchirèrent.

La foule était silencieuse à présent. Personne ne bougeait. Sous le choc, Starkiller recula d’un pas et examina l’obscurité. Qu’est-ce qu’il avait vu exactement ? S’agissait-il d’une hallucination ? Un rugissement puissant s’éleva dans l’obscurité et il se prépara à faire face.