LA MORT DE BENAZIR BHUTTO

La mort de Benazir Bhutto m’a surpris pendant que j’étais aux toilettes. Les derniers soubresauts d’une diarrhée intermittente. J’entendais, dans l’autre pièce, la voix haut perchée de la correspondante de la BBC au Pakistan qui n’arrêtait pas de marteler le nom de Benazir Bhutto. En général, quand on répète plus de trois fois dans une phrase le nom d’une personnalité publique, c’est qu’elle vient de mourir et que sa mort a été violente. Avant même la fin du commentaire de la journaliste, j’entends une série d’explosions. Des cris. Des sirènes. Un vacarme épouvantable. Je n’arrive pas à quitter ma place car ma diarrhée vient de repartir en force. Le bruit de la foule couvre maintenant la voix de la journaliste. J’imagine qu’à cet instant, un peu partout dans le monde, c’est la même surprise, alors qu’aucune mort n’était plus prévisible que celle-là.

 

C’est bizarre que ce soit le Moyen-Orient

qui donne d’une certaine manière l’impression

que les dés ne sont pas toujours pipés en politique.

On risque encore sa vie là-bas.

Tout ce qu’on risque de perdre ici,

c’est sa réputation.

 

Ce qui m’a ému

dans cette sanglante histoire,

c’est le retour de Benazir Bhutto,

pour les funérailles,

dans son village natal de Larkama.

On y revient toujours à la fin.

Mort ou vif.

 

La chambre de bois.

Benazir, qui voulait

diriger le vaste et populeux Pakistan,

doit s’y trouver à l’étroit.

Et bien seule dans cette pièce

faite pourtant sur mesure.

 

On naît quelque part.

Si ça se trouve

on va faire un tour dans le monde.

Voir du pays, comme on dit.

Y rester des années parfois.

Mais, à la fin, on revient au point de départ.