De Harry Rosenmerck à Monique Duchêne
Nazareth, le 1er juin 2009
Chère Monique,
D’après les photos que m’a montrées Annabelle, je pense que tes vêtements peuvent être enterrés sans honte.
Quant à ton père, il était alcoolique et étourdi. Ça aurait été délicat pour ta mère de répéter à tout bout de champ : « Excusez mon mari, il est alcoolique. » Il valait mieux dire étourdi. Elle avait du bon sens.
Annabelle est solitaire pour une fille de son âge. Elle reste à la maison, lire, des heures. Quels personnages que nos enfants ! David, je ne le connais réellement plus. Mais j’ai fixé une image statique de lui dans ma tête. Tandis qu’Annabelle, parfois je reconnais l’enfant qu’elle était, et à d’autres moments, elle m’échappe. Je continue à prétendre être un père exemplaire et solide. La vérité, c’est que nos enfants continuent à croire qu’on peut les protéger de la vie, pour toujours.
Je n’ai compris la faiblesse de mon père que lorsque je suis devenu père à mon tour. Je vais de mon mieux. Je commence à me sentir vieux souvent. De plus en plus souvent.
Harry