Les médecins imposent à Angélique Arnauld, dans ses derniers jours, de boire du lait de femme. Celle que sa mère « n’aimait point » juge cette nourriture pleine d’amertume.
Il y a quelque chose d’inguérissable qui traverse chaque vie de part en part et n’empêche ni la joie ni l’amour.
La voix précautionneuse de Jean Genet sculpte dans l’air son âme émerveillée d’avoir autant souffert.
Je lisais dans une bible de Port-Royal l’histoire d’Élisée ressuscitant un enfant mort. Relevant la tête vers la fenêtre, je vis deux nuages blancs se joindre dans le bleu pur. Je revins à ma lecture, incapable de savoir d’où venait cette joie affolant mon cœur — du livre qui parlait du ciel ou du ciel qui parlait de l’amour.
Les fleurs d’or des genêts sont des crachats divins.
Une ronce se balance au vent sous la fenêtre du bureau. À sa pointe, triomphent de toutes petites feuilles vertes. Dentelées, pleines d’un feu ardent, elles entament une vie candidement ignorante de la mort.
Savoir vraiment quelque chose c’est savoir, comme les nouveau-nés et les vieillards, que nous baignons dans une lumière d’ignorance.
Une brise passait au jardin, aucune feuille du tremble n’était indifférente à son chuchotement et chacune y répondait à sa façon : j’avais sous les yeux l’image d’une vie humaine sensible à tout, parfaite.
Boxé par un papillon.
Les roses trémières se penchent au bord de parler, porteuses d’une annonciation qui, lorsqu’on l’entend, change toute la vie.
La pluie qui fait chanter les pierres est la madone des refusés.
Le clochard fumait un cigare. C’est toujours merveilleux de voir quelqu’un ne pas répondre à l’imaginaire qu’on a de lui. L’inattendu est la signature authentique du divin.
Cette jeune femme de l’autre côté de la porte vitrée, avec ses deux enfants qui se mêlaient à ses jambes et la protégeaient du néant : à l’instant où elle a ouvert la porte, un rai de soleil l’a glorifiée. Il n’y a rien de plus beau à voir dans cette vie que les gens et la couronne qu’ils portent de travers sur leur tête, sans la connaître.