V
 
IDYLLE SANGLANTE

 

Ah ! ah ! voulez-vous-t-y l’histoire

D’la Margot et du grand Frisé ?

Oh ! oh ! l’ Frisé aimait à boire ;

Margot itou, mais d’ l’aut’ côté.

 

Margot mit sa cotte et ses bas,

Et s’en alla là-bas, là-bas.

 

Ah ! ah ! c’était sous l’ blé en meule

Qu’ Margot choutait l’aut’, son amant.

Oh ! oh ! l’ Frisé, du vin plein l’ gueule,

Vint près d’la meule au bon moment.

 

Sa cott’ trousse’ plus haut qu’ ses bas,

Margot riait là-bas, là-bas.

 

Ah ! ah ! qu’ell' disait, comm’ c’est farce !

Mon cocu s’emplit, j’ peux m’emplir.

Oh ! oh ! cria l’ Frisé, ma garce,

Tu es trop chaud’, j’vas te rfroidir.

 

Margot j’ta sa cott’ sur ses bas

Et s’ensauva là-bas, là-bas.

 

Ah ! ah ! l’amant, qu’était point brave,

Laissa Margot avé’ l’ Frisé.

Oh ! oh ! l’Frisé, mâchant d’la bave,

Tira son custach’ raiguisé.

 

Margot dans sa cotte et ses bas

S’empiergeonna là-bas, là-bas.

 

Ah ! ah ! la pauv’ Margot la belle,

Elle eut dans le cou le couteau.

Oh ! oh ! l’ Frisé guincha sur elle

Et puis s’lava les patt’s dans l’eau.

 

Margot sur sa cotte et ses bas

A mis du sang là-bas, là-bas.

 

Ah ! ah ! dit l’Frisé, te v’là morte !

Et l’ grand niqu’doul s’mit à pleurer

Oh ! oh ! qu’il chialait, faut qu’ j’emporte

Un bout d’souv’nir pour l’adorer.

 

Et prenant la cotte et les bas,

Il est parti là-bas, là-bas.

Ah ! ah ! personn’ ne sait c’ qu’il fiche

Depuis qu’il roul’ par les grands ch’mins.

Oh ! oh ! p’t et’ qu’il est merlifiche,

Va-trop d’chartier, ou tend-la-main.

 

Mais il a la cotte et les bas

Pou’ s’ consoler là-bas, là-bas.