CHAPITRE XVIII
 
Dans le souterrain

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TOUS LES ENFANTS portaient de gros pull-overs, à la demande de François. Il savait qu’il ferait froid dans le souterrain. Mick avait prêté l’un de ses lainages à Pancho.

La précaution n’était pas inutile. Les enfants constatèrent qu’il régnait, dans le passage, une humidité pénétrante.

Ils arrivèrent dans la petite caverne. François éclaira les parois et montra aux autres les crampons qui permettaient de monter jusqu’au trou qu’on voyait dans la voûte.

« Laisse-moi passer la première, François, demanda Claude. J’ai hâte de voir ce qu’il y a là-haut !

— Non, c’est moi qui monte le premier, répliqua François. Il y a peut-être du danger ! »

Il se mit en devoir de grimper le long de la paroi à l’aide des crampons. Il tenait sa torche électrique entre les dents, car il avait besoin de ses deux mains.

Il passa sa tête par le trou de la voûte et ne put retenir un cri d’étonnement :

« Oh ! Il y a ici une grotte plus grande que six salles de danse, et les parois brillent comme si elles étaient phosphorescentes ! »

Il rampa hors du trou, se mit debout, et fit quelques pas dans l’immense grotte. Il éteignit sa lampe. La lumière phosphorescente que dégageait la roche était presque suffisante pour y voir clair !

L’un après l’autre, les enfants grimpèrent dans cette étonnante caverne. Mick et Claude eurent quelque difficulté à hisser Dagobert, mais ils finirent par y arriver. Dagobert regarda alors autour de lui d’un air inquiet. Cette caverne où régnait une étrange lueur ne lui inspirait pas confiance. Claude le caressa pour le rassurer.

Mick, abasourdi par le spectacle qui s’offrait à ses yeux, dit à François :

« Tu crois que c’est là que se trouve la cachette de Lou et Carlos ?

— Explorons cette grotte, nous verrons bien ! » répondit François.

Les cinq enfants examinèrent attentivement toutes les aspérités et les creux des parois. Cela leur demanda du temps. Ils ne trouvèrent rien.

Claude, Annie, Pancho et Mick se regroupaient, découragés de leurs vaines recherches, lorsque François, qui se trouvait tout au bout de la caverne, poussa une exclamation :

« Tiens, un mégot ! Ça prouve que nos bonshommes sont venus jusqu’ici ! Voyez, au milieu de la paroi il y a un grand trou. Il doit y avoir là un autre passage… »

Il se hissa dans l’ouverture, tandis que les autres accouraient.

« Ils sont passés par là ! s’écria triomphalement François. Voici une allumette à demi consumée ! »

Ce nouveau passage était fort étroit, il fallait y marcher courbé. De plus, il suivait un parcours capricieux. François pensa qu’il s’agissait là du lit d’un ancien cours d’eau souterrain. Le sol présentait un aspect poli comme si, en effet, l’eau avait coulé dessus pendant longtemps.

François fit part de ses observations à Claude, qui le suivait. Elle dit en riant :

« J’espère que ce cours d’eau ne va pas se remettre à couler subitement ! Nous serions dans une drôle de situation ! »

Le passage se prolongeait assez loin. Annie se demandait quand elle en verrait le bout, lorsque François remarqua que la paroi, sur sa gauche, se creusait profondément, à mi-hauteur.

Il eut un cri de triomphe :

« Ça y est ! Nous avons trouvé ! Regardez tout ce qu’il y a ici ! »

Les autres enfants se pressèrent autour des François…

Ils virent, posés dans le creux de la paroi rocheuse, des sacs, des coffres, de vieilles valises…

« Je veux voir ce qu’il y a dedans ! » dit Pancho, qui ne tenait plus en place, tant sa curiosité était vive.

Il posa par terre sa torche électrique, attrapa un sac, et défit le nœud du cordon qui le tenait fermé. Puis il plongea sa main dans le sac. Il ramena à la lumière une assiette d’or !

« C’est beau, ça ! dit le jeune saltimbanque, éberlué. On dirait qu’ils ont volé la vaisselle d’un roi ! »

Le sac était rempli d’objets de grande valeur : des plats, des assiettes, de petits plateaux d’or fin. Les enfants les étalèrent à terre. Comme ils brillaient à la lueur de leurs lampes !

« Lou et Carlos sont des cambrioleurs de grande classe, dit François, pensif. Il n’y a aucun doute là-dessus. Regardons dans ce coffret ! »

Le coffret en question n’était pas fermé à clef. Mick en souleva le couvercle aisément. À l’intérieur se trouvait un vase de Chine, si fragile qu’il semblait prêt à se briser au moindre souffle.

« Je ne m’y connais pas en porcelaine de Chine, dit François, mais je crois qu’il s’agit là d’une pièce rare… Ça doit coûter un prix fou ! »

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Claude, de son côté, fouillait dans un sac d’où elle extrayait des écrins de cuir.

« Regardez ! dit-elle, des bijoux ! »

Les enfants poussèrent des exclamations de surprise et d’admiration. Des diamants étincelèrent, des rubis jetèrent leur éclat pourpre, le vert merveilleux des émeraudes brilla soudain. Des bagues, des broches, des colliers, des bracelets, ornés des plus belles pierreries, s’étalaient sous les yeux des enfants éblouis… Dans un écrin, Annie trouva un diadème composé de diamants de belle taille. Elle le posa sur sa tête.

« Je suis une princesse ! Voici ma couronne ! dit-elle en riant.

— Ça te va bien ! » dit Pancho, admiratif, Annie retira le diadème et le replaça soigneusement dans son écrin.

« Je n’en reviens pas ! avoua François. Lou et Carlos ne sont pas des cambrioleurs ordinaires. C’est difficile de voler des objets si coûteux, car ils sont généralement bien gardés. Vous pensez bien que leurs propriétaires ne les laissent pas traîner ! Lou est un excellent acrobate, nous a dit Pancho. Je parie qu’il escalade les murs, monte sur les toits et s’introduit dans les maisons par les fenêtres, pendant que Carlos fait le guet en bas...

— C’est vrai que Lou peut grimper au mur d’une maison en s’accrochant à du lierre, à des gouttières, à n’importe quoi ! dit Pancho. Et il sait sauter comme un chat ! Je comprends maintenant pourquoi mon oncle était souvent parti au milieu de la nuit !

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Je suis une princesse ! Voici ma couronne ! »
dit-elle en riant.

— Au cours de leurs voyages, quand Lou et Carlos entendaient parler de bijoux ou d’objets d’art de grande valeur, ils préparaient leur coup… poursuivit François. Ensuite, ils ramenaient les marchandises volées dans cette camionnette que tu nous as montrée. Tu nous as dit que ton oncle était furieux le jour où il t’a surpris en train de fouiller dedans. C’était là qu’il mettait ses larcins en attendant de les apporter ici ! Il faut reconnaître que c’est une fameuse cachette ! Quand la police abandonne les recherches concernant les objets volés, alors ils viennent les chercher et les vendent…

— Pas bête, leur plan ! dit Mick. Je me demande comment ils ont découvert ce souterrain dans la montagne.

— C’est la meilleure cachette qu’on puisse rêver ! dit Claude. Et voilà que nous venons mettre nos roulottes juste sur l’entrée ! On comprend que la plaisanterie ne soit pas de leur goût !

— Qu’allons-nous faire, maintenant, demanda Mick.

— Avertir la police, naturellement, répondit François. Je pense que ça peut l’intéresser beaucoup… »

Les enfants remirent tout en place, avec le plus grand soin. François éclaira le passage qui se prolongeait devant eux.

« Voulez-vous continuer l’exploration ? Je serais curieux de savoir jusqu’où va ce, passage. Il y a peut-être d’autres belles grottes !

— Sortons d’ici, dit Pancho qui se sentait mal à l’aise. On en a assez vu ! J’aime mieux, aller respirer dehors.

— Allons seulement voir où conduit cette galerie, dit Claude. Ça demandera deux minutes !

— Bon », admit François, qui ne demandait pas mieux.

Il marcha en tête, éclairant devant lui.

Le passage aboutissait à une autre caverne, beaucoup moins grande que la précédente. Au fond, quelque chose brillait d’un éclat argenté. On entendait un faible bruit que les enfants n’identifièrent pas tout de suite.

« Qu’est-ce que c’est ? demanda Annie, inquiète.

— De l’eau ! s’écria Claude. Ecoutez-la couler !

— C’est vrai, dit François. Il s’agit d’une source qui coule dans la montagne, à la recherche d’une issue.

— Comme ce torrent que nous avons vu près du pont, avant d’arriver au bois de pins, fît remarquer Claude. Il sortait de la montagne. Vous vous en souvenez ? C’est peut-être sa source ? »

Ils s’approchèrent de la source. Elle s’épandait le long de l’une des parois de là caverne. François proposa une explication :

« Je crois qu’autrefois elle traversait cette caverne et suivait le passage par lequel nous sommes venus. Tenez ! Il y a une sorte de rigole creusée dans le sol, ici… On dirait que le parcours de la source a changé, pour une raison qu’on ne peut deviner.

— Allons-nous-en ! dit Pancho. Je veux aller retrouver Bimbo. Il doit s’ennuyer ! Et puis, j’ai froid. On sera si bien, là-haut… On goûtera au soleil… Je n’ai pas du tout envie de goûter ici !

— Moi non plus », avoua François.

Ils retournèrent sur leurs pas. Sans s’arrêter, ils jetèrent un regard sur les sacs et les valises qui contenaient les objets précieux apportés là par Lou et Carlos. Puis ils traversèrent la grotte phosphorescente et descendirent par le trou dans le sol qui communiquait avec la petite caverne qui se trouvait en dessous. François et Claude firent descendre Dagobert entre eux. C’était difficile…

Ensuite, ils reprirent le passage qui devait les ramener sous les roulottes. Chacun d’eux se réjouissait de revoir bientôt le soleil.

« C’est curieux, je ne vois pas la lumière du jour au-dessus de ma tête, dit François, très étonné. Pourtant… »

Il se hâta de monter le long de la paroi, en se servant des crampons. Où donc était l’ouverture ? Se seraient-ils trompés de chemin ? Quand il distingua des planches, là-haut, son sang se glaça d’horreur…

« Nous ne pouvons pas sortir ! s’écria-t-il d’une voix changée. Il est venu quelqu’un, qui a rebouché l’ouverture avec les planches, et qui a sans doute replacé la roulotte dessus… Nous sommes prisonniers ! »

Tous les enfants regardèrent avec désespoir l’issue bouchée.

« Qu’allons-nous faire ? demanda Claude. Il faut trouver quelque chose ! »