26

Dans la salle aux murs éventrés, Isolder trouva les capteurs à l’endroit où il les avait laissés. Des cadavres de Sœurs de la Nuit gisaient un peu partout ; ajouté à l’obscurité, cet élément lui mettait les nerfs à vif.

Tendant une main pour saisir le bloc de capteurs, il entendit du bruit. Blaster au poing, il braqua sa lampe-torche sur une silhouette noire.

C’était Teneniel Djo. Elle le regarda, puis détourna les yeux. Ses joues ruisselaient de larmes.

— Ça va ? lui demanda le prince. Tu as besoin de quelque chose ?

— Non. Je suis en pleine forme… (Le ton de sa voix démentait l’information.) Ainsi, tu es sur le départ ?

— Oui.

Isolder dirigea le faisceau de sa lampe vers le mur pour ne pas éblouir la jeune femme. Il ne savait pas grand-chose des plans de Han, mais un point semblait acquis : quitter Dathomir était à l’ordre du jour !

Teneniel avait ôté son casque ; débarrassée de ses robes, elle portait une simple tunique d’été et des bottes, comme le jour de leur rencontre.

Elle contemplait le ciel sans étoile.

— Je m’en vais aussi, déclara-t-elle.

— Vraiment ? Où donc ?

— Dans le désert, pour méditer.

— Je croyais que tu voulais rester avec ton clan ? Tu disais te sentir seule…

Elle tourna la tête vers lui. En dépit du peu de lumière, il vit le stigmate, sur sa joue.

— Mes compagnes sont d’accord. J’ai tué sous le coup de la colère, violant ainsi mes vœux. Si je ne me purifie pas, je risque de devenir une Sœur de la Nuit. Le bannissement est une juste punition. Dans trois ans, si je désire revenir, elles m’accepteront.

Elle encercla ses genoux de ses bras.

Isolder l’observa un moment, ignorant quelle conduite adopter. Devait-il lui dire adieu, tenter de la réconforter, ou partir sans un mot avec ses capteurs ?

S’asseyant près d’elle, il lui tapota l’épaule.

— Ecoute, tu es une fille solide. Tu t’en sortiras…

Pouvait-on proférer pire niaiserie ? Quel avenir s’offrait à la jeune femme ? Dans trois jours, la flotte hapienne écraserait les forces de Zsinj. Mais Dathomir serait dans un sale état, ayant perdu au minimum les récoltes de l’été.

Le prince suspectait qu’il y aurait d’autres conséquences. Après une telle agression, l’écosystème risquait de n’être plus jamais le même.

Débarrassée du manteau de nuit, Dathomir demeurerait une planète blessée.

Et il y avait les Sœurs de la Nuit. Peu de femmes de la Montagne qui Chante ayant survécu, les forces des ténèbres auraient la partie belle.

La jeune femme devait se tenir le même raisonnement, car les larmes coulaient de plus en plus fort sur ses joues.

— Teneniel, le Faucon peut transporter six passagers… Si tu le désires, il y a une place pour toi.

— Mais où irai-je ?

— Où tu voudras ! Choisis une étoile, c’est tout !

— Je ne connais rien à l’Univers. Comment savoir où aller ?

— Viens sur Hapes avec moi, proposa le prince.

Prononçant ces mots, il comprit que c’était la chose qu’il désirait le plus au monde. Il admira ses longs cheveux, ses jambes nues. Malgré la folie et la mort qui ravageaient la planète, plus rien ne comptait pour lui que la tristesse de cette femme. Oubliant qu’il était presque fiancé à Leia, il aurait donné n’importe quoi pour prendre Teneniel dans ses bras.

La sorcière le regarda, ses yeux lançant des éclairs.

— C’est ça ! Et que deviendrai-je ? Une curiosité ? Teneniel, la primitive de Dathomir ?

— Je t’engagerai comme garde du corps… Avec la Force pour alliée, tu pourras… (La moue de la jeune femme le dissuada de continuer.) Ou alors, deviens ma conseillère. Grâce à tes pouvoirs, tu seras mon plus grand soutien. Je parie que tu serais capable de deviner les complots de mes tantes, et…

Il se tut, songeur. Jamais il n’avait vu les choses comme ça, mais c’était la pure vérité : elle serait très utile à son peuple.

Il avait besoin d’elle.

— Et que serai-je d’autre ? demanda la jeune femme. Ton amie ? Ta maîtresse ?

Isolder déglutit péniblement. Il savait ce qu’elle voulait. Sur Hapes, sans titre ni héritage, on la tiendrait pour une roturière. S’il l’épousait, ce serait pour essuyer une humiliation publique suivie d’une implacable disgrâce. Pouvait-il laisser un de ses cousins s’emparer du trône par épouse interposée ?

Il serra brièvement la jeune femme contre lui pour lui dire adieu.

— Tu as été une amie fidèle, et une maîtresse juste, puisque je suis toujours ton esclave, selon ta loi. Je te souhaite beaucoup de bonheur…

Il se leva, prit les capteurs et tourna une dernière fois la tête. Teneniel le regardait. Il eut l’impression qu’elle lisait en lui comme dans un livre ouvert.

— Comment pourrai-je être heureuse si tu me quittes ? demanda-t-elle.

Isolder ne répondit pas.

— Tu as toujours été un homme courageux, n’est-ce pas ? Pourras-tu te regarder encore dans un miroir si tu abandonnes la femme que tu aimes ?

Il se figea. Lisait-elle dans son esprit, ou interprétait-elle simplement ses émotions ?

M’entends-tu ? pensa-t-il très fort.

Aucun écho…

Il songea à ses longues jambes, à l’odeur du cuir qu’elle portait, à ses yeux couleur cuivre comme aucune Hapienne n’en avait jamais eu.

Il songea à ses douces lèvres, qu’il aurait tant voulu embrasser.

— Pourquoi ne le fais-tu pas ? demanda-t-elle.

— Je ne peux pas, répondit-il sans se retourner. J’ignore ce que tu veux me faire, mais sors de mon esprit !

— Je ne veux rien faire, Isolder. C’est toi le responsable. Nous sommes liés l’un à l’autre, j’aurais dû m’en apercevoir dès le premier jour. Tu étais dans le désert pour trouver l’amour, comme moi. Notre lien a grandi de jour en jour. Il est impossible de tomber amoureux d’une sorcière de Dathomir sans qu’elle le sache. En tout cas, pas si elle t’aime aussi…

— Tu ne comprends pas ! s’énerva le Hapien. Si je t’épouse, ce sera la disgrâce. Mes cousins…

Le blaster du prince vibra dans son holster ; des étincelles en jaillirent pour former une boule de feu. Un vent surnaturel se leva, qui déchira les derniers lambeaux de tapisseries et fit tourbillonner les gravats.

Isolder regarda la sorcière : elle était très en colère.

— Je me moque de la désapprobation publique et de tes cousins ! Vivre sur ta planète ne m’intéresse pas. Choisis un monde désert, si ça te chante, et nous y serons heureux.

Elle se leva, se campa devant lui, et chercha son regard.

Puis elle approcha, séductrice.

Le cœur du Hapien fit un bond dans sa poitrine.

— Sois maudite ! éructa-t-il. Tu vas faire un gâchis de ma vie !

Teneniel acquiesça. Lui passant les bras autour du cou, elle l’embrassa.

Isolder se revit à neuf ans, avec son père, sur la plage de Dreena, une planète inhabitée de la Confédération. Comme l’océan, le baiser de Teneniel était pur.

Comme lui, il chassait les doutes, noyait les incertitudes.

A regret, il se dégagea.

— Allons-y. On a peu de temps.

Se tenant la main, les deux jeunes gens s’engagèrent dans l’escalier.

 

Quand les villageois lui ramenèrent Luke, Leia crut d’abord qu’il était mort. Du sang séché sur le visage, son frère avait les yeux vitreux.

Mais dès que ses porteurs l’eurent posé sur l’herbe, sous la lumière des projecteurs du Faucon, il sourit faiblement.

— Leia… Tu m’as appelé, n’est-ce pas ?

— Je… Ne t’inquiète pas, tout va bien…

— C’est faux… Où est Han ?

— Chez Gethzerion. Elle massacrait des otages. Il ne pouvait pas laisser faire ça. Zsinj viendra le chercher dans trois heures.

Luke tenta de s’asseoir.

— Non ! Je dois arrêter Gethzerion ! C’est pour ça que je suis venu ici.

— Tu n’es pas en état, objecta Leia, le forçant à se rallonger. Luke, ta vie est en danger ! Repose-toi ! Bats-toi pour vivre un jour de plus.

— Trois heures de repos suffiront… Promets de me réveiller.

— Endors-toi… Je promets…

Le Jedi faillit sombrer dans le sommeil.

Au dernier moment, il rouvrit les yeux et regarda sa sœur, une expression furieuse sur le visage.

— Ne mens pas ! Tu n’as aucune intention de me réveiller…

Isolder approcha, Teneniel à son côté. Tous deux s’acharnaient depuis un moment à mettre en place le bloc de capteurs.

— Ami Luke, affirma le Hapien, Leia a raison. Repose-toi. Tu es trop faible pour agir.

Luke renversa la tête en arrière, fermant les yeux comme s’il ne pouvait plus rester éveillé.

Puis il parla, la voix redevenue terme et impérieuse.

— Qu’on me laisse un peu de temps… Tu ne connais pas le pouvoir de la Force, prince…

Le Hapien posa une main sur l’épaule de son ami.

— Je l’ai vue à l’œuvre, et…

— Non, tu ne sais rien ! s’insurgea Luke. (Il parvint à s’asseoir.) Aucun de vous ne sait ! Jurez de me réveiller ! Jurez-le !

Epuisé, il se laissa retomber sur le dos.

Dans ses mots, Leia sentit davantage que de la conviction. Il y avait en lui quelque chose de puissant, comme un feu qui couve. Soudain, l’espoir de la jeune femme renaquit de ses cendres.

— Je promets, murmura-t-elle.

Elle recula, observant la silhouette brisée étendue sur une civière. Il était inutile de se bercer d’illusions. Dans quelques jours, une semaine peut-être, sans doute serait-il capable de défier Gethzerion.

Mais dans trois heures…

Isolder étendit une couverture sur le Jedi.

— Tu veux que nous le portions sur une couchette du Faucon ?

— Oui… Le bloc est en place ?

— Affirmatif, mais j’ai toujours des problèmes avec les senseurs longue distance.

Leia ne savait plus que penser. Tout en elle lui criait de courir porter secours à Han. Mais le temps leur manquait. La prison était à deux jours de rancor. S’ils essayaient d’utiliser le Faucon, les vaisseaux de Zsinj les repéreraient et les détruiraient. A part sauter dans l’hyperespace, ils n’avaient rien à faire qui…

Une idée germa dans son esprit.

— C-3P0, R2, venez par là !

Le droïd-protocole accourut.

— Que puis-je pour vous, princesse ?

R2 dévala à son tour la rampe.

— R2, demanda Leia, peux-tu déterminer combien il y a de superdestroyers là-haut ?

L’astrodroïd hésita un moment. Son compartiment ventral s’ouvrit, et un capteur en sortit. Il effectua un balayage du ciel, puis bipa frénétiquement.

— R2 ne peut pas focaliser ses senseurs sur un objet extra-orbital, traduisit C-3P0. Il ne capte que les ondes radio. Apparemment, le manteau de nuit bloque la lumière sur tout le spectre, y compris les ultraviolets et les infrarouges. Cependant, R2 a détecté vingt-six sources d’émission radio. D’après ses calculs précédents, il estime que quarante destroyers de Zsinj sont présents.

Isolder soupira.

— Pas étonnant que j’aie des problèmes avec les senseurs longue distance. Ça n’est pas une panne, mais un blocage…

— Exact, approuva Leia.

— A l’inverse, tant que nous volerons sous le manteau de nuit, nous serons invisibles. A condition, bien sûr, de garder le silence radio.

— Encore exact !

Isolder regarda les tubes à torpilles du Faucon.

— Allons faire sauter le repaire des sorcières et voir si on peut sauver Han !

— Non, pas tout de suite… Luke veut que nous l’attendions…

 

Dans le speeder, Han était assis au milieu d’une vingtaine de Sœurs de la Nuit qui composaient une assemblée déprimante et quelque peu malodorante.

L’appareil slalomait parmi les arbres géants. Solo espéra que la sorcière qui pilotait savait ce qu’elle faisait.

Sans le fouiller – une erreur fatale – les femmes lui avaient lié les mains devant lui avec des lanières de whuffa.

Le speeder passa une colline puis piqua avec une brutalité à faire vomir. La forêt derrière lui, l’engin fonçait vers les lumières de la prison.

Han ferma les yeux, songeant à son avenir immédiat.

Attendre était la bonne option. Il pouvait déclencher le détonateur n’importe où, bien sûr, mais il voulait emporter Gethzerion avec lui dans la mort.

Bientôt… Très bientôt…

Ils arrivèrent dans la cour de la prison. Les sorcières descendirent de l’engin et s’égaillèrent.

Deux d’entre elles conduisirent Solo dans un immense hangar à ciel ouvert.

— Adosse-toi à ce mur et ne bouge plus, lui ordonna la plus vieille.

Les deux femmes se postèrent près de la porte.

Han réalisa que son cœur battait la chamade. Gethzerion n’allait pas tarder à se montrer.

Il passa les pouces dans sa ceinture. Le détonateur n’attendait plus que son bon plaisir…

 

Plusieurs heures étaient passées. La température baissait régulièrement et la fichue sorcière ne s’était pas montrée.

Solo regarda sa montre. L’heure du rendez-vous approchait. Les transports de Zsinj ne se montrant pas, le Corellien se demanda si la sorcière n’était pas en train de jouer à un jeu dangereux avec le seigneur de la guerre.

Peut-être mégotait-elle sur les détails du marché ?

Pour apaiser ses craintes, le speeder de Gethzerion effectua deux petits voyages qui prirent le temps nécessaire pour aller et venir de la forteresse.

Gethzerion ramenait ses brebis au bercail…

A l’issue du dernier trajet, deux points lumineux apparurent au-dessus de la prison.

La décente fut rapide ; les transports se posèrent sans problème.

— Général Solo, il est temps de partir, siffla une des sorcières.

Han déglutit, fit quelques mouvements pour se dégourdir les membres, puis marcha vers la sortie. Les phares des transports l’obligèrent à cligner des yeux.

Des commandos en armure se déployaient dans la cour. Mais où étaient les sorcières ? S’il faisait tout sauter maintenant, peu de soldats survivraient, et un transport, au moins, en aurait un sacré coup dans l’aile.

Mais Gethzerion…

— Halte ! cria un Impérial.

Un officier descendit du navire. Solo le reconnut à ses implants en platine. Le général Melvar…

Il approcha de Han et le dévisagea. Plaquant un ongle tranchant sous l’œil de son prisonnier, il fit mine de vouloir l’extirper de son orbite.

Il se ravisa à l’instant où le Corellien allait appuyer sur le bouton de mise à feu.

Melvar parla dans un micro fixé à son épaule :

— Identification positive. C’est bien Solo.

L’officier se tut. Han remarqua qu’il portait une oreillette.

— Compris, maître. Je le conduis à bord.

Le général prit son prisonnier par le bras, lui enfonçant ses ongles dans le biceps.

— L’ami, n’abîme pas la marchandise, d’accord ? Tu pourrais le regretter un jour…

— Voilà qui m’étonnerait, général. Faire souffrir les autres n’est pas qu’un passe-temps pour moi. Sous les ordres de Zsinj, c’est devenu une mission… très agréable.

Il accentua sa pression, touchant un nerf. La douleur irradia dans l’épaule du Corellien et jusqu’au bout de ses doigts.

— Je dois reconnaître que tu es doué, mon gars, admit Han.

— Quel bonheur d’avoir affaire à un connaisseur ! Générai, je suis sûr de pouvoir convaincre mon maître de me laisser… régler votre sort. Ce serait plein d’enseignement, non ? En attendant, dépêchons. Zsinj n’aime pas attendre…

Il poussa Solo vers la rampe d’embarquement du transport. Le Corellien se demanda s’il allait seulement apercevoir Gethzerion.

Il était à mi-chemin du sas quand une voix s’éleva :

— Un instant !

Melvar se figea, puis se retourna.

Au pied de la tour, à cent mètres de là, Gethzerion défiait l’officier du regard. Une dizaine de Sœurs de la Nuit l’entouraient.

La vieille femme approcha. Solo comprit que le moment d’agir était venu. Quand elle serait près d’eux, le feu d’artifice enverrait en enfer quelques beaux spécimens de monstres.

Il aurait pu faire mieux, mais il ne fallait pas se plaindre.

Savoir qu’il allait mourir dans quelques instants déconcertait le Corellien. Il n’avait pas de nœud dans l’estomac, pas de boule dans la gorge. Las, démoralisé, plein de regret, voilà comment il se sentait. Après une vie aussi brillante, c’était plutôt décevant.

Gethzerion s’arrêta au pied de la rampe, à moins de deux mètres de lui. Il sentit son haleine chargée d’ail et de mauvais vin.

— Général Solo, on peut dire que vous nous aurez fait courir… J’espère que votre séjour vous a plu…

— Je savais que vous viendriez fanfaronner, lâcha Han. C’est pourquoi j’ai apporté un petit cadeau…

Il sortit le détonateur de sous sa chemise et appuya sur le bouton.

Melvar recula vivement. Renversant un de ses soldats, il s’étala à terre avec lui.

Rien d’autre ne se produisit. Han regarda le détonateur.

La goupille était cassée.

— Des problèmes techniques, général ? s’enquit la sorcière. (Elle sourit.) Sœur Shabell a détecté votre détonateur. D’un simple sortilège, elle l’a saboté. Espèce de crétin plein d’autosuffisance ! Croyais-tu pouvoir menacer Gethzerion ? Vermine !

Elle prit le détonateur des mains de Han et le tendit à Melvar, qui s’était relevé.

— Je vous confie cet objet, général. Il est mieux entre vos mains que dans les siennes.

— Merci, grogna l’officier.

— J’ai un autre présent pour vous…

Ses yeux rouges brillant intensément, la sorcière pointa l’index sur Melvar. L’officier se prit la tête à deux mains comme s’il venait de recevoir un coup de massue, puis il tituba et s’écroula.

Dans la cour, près de cent commandos en armes subirent le même sort. Certains parvinrent à tirer une ou deux fois en l’air ; la plupart n’eurent même pas ce réflexe.

Han tourna la tête vers le transport, s’attendant à le voir ouvrir le feu.

Rien ne se passa.

Des Sœurs de la Nuit se ruèrent dans la cour, poussant devant elles les prisonniers qui feraient office d’équipage. Une sorcière écarta violemment Solo, qui bascula de la rampe.

Des cris se firent entendre. Si les servants des canons étaient sûrement morts en même temps que Melvar et les autres, il restait à bord quelques hommes qui vendaient chèrement leur peau.

Les sorcières négligeaient le transport désarmé. Han ne s’en étonna pas. Gethzerion aurait été stupide d’affronter les superdestroyers dans un cercueil volant.

La sorcière avança vers lui. A ses pieds, Han avisa un blaster lâché par un commando. Même s’il parvenait à plonger, son adversaire ne lui laisserait pas le temps de tirer.

— Que vais-je donc faire de toi, général ?

Han leva ses mains liées.

— Madame, sachez que je n’ai rien contre vous… Ces derniers jours, j’ai surtout cherché à vous éviter, ce qui n’est pas une offense, bien au contraire. Serrons-nous la main et restons bons amis…

Gethzerion eut un sourire cruel.

— Bons amis, vraiment ? Ne trouves-tu pas plus juste que je me venge ?

Elle leva l’index. Han sentit que ses pieds décollaient du sol. Une corde invisible lui serrait le cou.

Gethzerion se mit à chanter. La pression augmenta.

Solo toussa, se débattit, flanqua des ruades dans le vide.

— Je me demande ce que m’aurait fait ton détonateur thermique ? s’interrogea la sorcière. Je suppose qu’il aurait déchiré ma chair, pulvérisé mes os, et carbonisé mes entrailles. Donc, je devrais te rendre tout ça. Mais pas si vite, pas tout à la fois… Par souci d’originalité, j’ai bien envie de commencer par l’intérieur. Avec mon pouvoir, je suis à même de te briser les os un par un. Tu sais combien il y en a dans un corps humain ? Quand j’en aurai fini avec toi, tu pourras tripler ce nombre… Amusant, non ? Commençons par une jambe. Ecoute bien !

Elle pointa l’index. Le tibia de la jambe droite de Han craqua sinistrement. La douleur remonta jusqu’à sa hanche.

— Aaaahhh ! cria-t-il.

Puis il vit quelque chose dans le ciel noir.

Les lumières du Faucon, à deux kilomètres de là. Le navire volait en rase-mottes…

Leia ?

Un sourire cruel se dessina sur les lèvres de la sorcière.

Han chercha un moyen de modérer le zèle de son bourreau.

— Madame, commença-t-il, vous n’allez pas faire ça à mes dents, hein ? (L’idée n’était pas géniale, mais il n’en avait pas trouvé d’autre.) Je veux dire… hum… je suis très sensible des dents…

Il regarda autour de lui. Les Sœurs de la Nuit sortaient par grappes de la tour.

— Oui, les dents… Je n’y avais pas pensé…

Elle agita son index.

La molaire supérieure droite de Solo explosa avec un petit bruit dégoûtant. La douleur irradia jusqu’à l’œil, comme si Gethzerion avait l’intention de le tirer par l’intérieur pour qu’il traverse son palais.

Han se maudit de lui avoir donné des idées pareilles. Le Faucon n’arrivait pas assez vite. A ce rythme, il serait en bouillie avant d’être secouru…

— Un instant ! cria-t-il. Si on discutait ?

Gethzerion pulvérisa la molaire supérieure gauche du Corellien.

Par bonheur, le Faucon choisit ce moment pour tirer son premier missile. La base de la tour explosa et plusieurs Sœurs de la Nuit s’envolèrent dans les airs, pas toujours en un seul morceau.

La tour pencha ; elle s’écroulerait bientôt.

Gethzerion tourna la tête. Libéré de son emprise, Han retomba sur le sol. La douleur déchira sa jambe brisée.

Les blasters du Faucon ouvrirent le feu avec une précision diabolique. Des traits d’énergie frôlèrent la tête de la sorcière, qui bondit de côté.

Han se demanda ce qui se passait. Personne ne pouvait tirer aussi précisément avec les blasters d’un vaisseau. Pas même lui.

Il roula sous la rampe d’embarquement pour se protéger des débris volants. Les droïds postés sur les six tours de la prison venaient de prendre le Faucon pour cible avec leurs canons-blasters.

Le vaisseau fondit sur la prison en effectuant un quadruple looping qui lui permit d’éviter les projectiles. Solo n’avait jamais vu personne manœuvrer comme ça, Chewie et lui compris.

Le type assis dans le fauteuil du pilote était un as comme il n’en existait pas deux dans la galaxie. Hélas, ce devait être ce bellâtre d’Isolder…

Après un retourné presque impossible, le Faucon repassa sur la prison, tirant de toutes ses armes.

Les droïds et les tours disparurent dans un nuage de fumée. Le transport désarmé fut touché et s’embrasa.

Implacable, le Faucon amorça un autre survol.

Gethzerion devait avoir compris que tout essai de résistance au sol serait inutile, car elle bondit sur la rampe d’embarquement et la remonta à une vitesse surhumaine. Peu après, les réacteurs du transport vrombirent ; l’air environnant prit une nuance bleue.

Les boucliers déflecteurs !

Le navire était un transport impérial armé jusqu’aux dents et très bien protégé. Pour le Faucon, ça ne serait pas un adversaire négligeable.

S’il ne voulait pas finir rôti, Han avait intérêt à sortir vite de sous le transport. En conséquence, il rampa aussi lestement qu’il le pouvait et se réfugia derrière un tas de gravats, non loin de la tour. Dans leur hâte, il y avait peu de risque que les Sœurs de la Nuit lui tirent dessus.

Le Faucon engagea ses canons à ions dans la bataille, mais les boucliers du transport résistèrent. Sous le tir de barrage, l’engin décolla…

Le Faucon contourna une colline, perça une brèche dans le mur de la prison et se posa à quelques mètres de Solo.

Le sas ventral s’ouvrit et Leia cria :

— Han, viens !

Augwynne sauta à terre avec trois de ses sœurs casquées et armées. A leurs regards, Solo eut pitié des gardiens de la prison.

Il rampa jusqu’au Faucon. Isolder vint à sa rescousse, le portant quasiment à l’intérieur.

Le Corellien regarda le prince.

— Mais… qui pilote ?

— Luke, répondit Leia.

— Luke ? Impossible ! Il est bon, mais pas à ce point !

— Personne ne l’est ! confirma Isolder en tapotant l’épaule du blessé. Il faut que j’aille voir ça !

Il repartit vers la passerelle.

Leia plongea son regard dans celui de Han. Puis elle lui prit le visage et l’embrassa. Malgré ses molaires douloureuses, le Corellien apprécia le baiser.

Le vaisseau se cabra et fit une franche embardée, car Luke s’autorisait des figures que le stabilisateur d’accélération ne pouvait compenser. Sur la passerelle, Chewie poussa un grognement désespéré.

Avec l’aide de Leia, Han gagna un fauteuil et s’y laissa tomber. Dans un compartiment, au-dessus de sa tête, il prit un médikit et colla un timbre antidouleur sur son bras.

Les canons-blasters dorsaux du Faucon ouvrirent le feu. Solo regarda autour de lui. Chewbacca, Isolder, Teneniel et les droïds étaient tous là.

— Qui s’occupe des canons-blasters ? demanda Solo.

— Luke, répondit Leia.

Han ouvrit de grands yeux. Il était possible de servir les canons-blasters depuis la passerelle, mais on y perdait beaucoup de précision. Or, Skywalker avait presque arraché la tête de Gethzerion, évitant Solo, qui se trouvait à moins d’un mètre. Tout ça en pilotant un vaisseau lancé au maximum de sa propulsion classique.

Ça faisait beaucoup pour un seul homme…

Dans le siège du pilote, Skywalker était inondé de sueur. Les manettes et les boutons du tableau de commande semblaient animés d’une vie propre. En réalité, il les déplaçait avec la Force.

Le Jedi faisait le travail du pilote, du copilote, et du canonnier. Quand il tira un barrage de missile sans désactiver le bouclier antiparticules, Chewie grogna de terreur et se plaqua les mains sur les yeux.

Au moment fatidique où tout aurait dû exploser, Luke coupa le bouclier une fraction de seconde, puis le ralluma. Les missiles étaient passés de justesse…

Solo n’avait jamais vu des réflexes pareils.

Les boucliers arrière du transport résistèrent avec peine. Alors les sorcières ouvrirent le feu avec leurs propres canons-blasters.

Luke accéléra à fond. Le Faucon fit un bond en avant, évitant les traits d’énergie. Sans perdre de temps, le Jedi tira une salve de torpilles à protons.

Les Sœurs de la Nuit pulvérisèrent l’un après l’autre les projectiles. Han n’en revint pas. Aucun canonnier n’était capable de ça !

— Leia, Isolder ! cria Luke. Chargez-vous des canons ventraux et dorsaux. Feu à volonté ! !

— Abandonne ! lança Han. Leurs boucliers sont trop solides ! Tu vas juste abîmer mon vaisseau…

— Tu veux que ces sorcières sèment la terreur dans la galaxie ? Pas question ! Je continue. Leia, Isolder, aux canons !

Luke écrasa le bouton d’activation des brouilleurs radio, envoyant dans l’espace une véritable tempête d’informations. Han se demanda quelle mouche piquait son ami. Les sorcières n’avaient sûrement pas l’intention d’appeler quelqu’un. Les brouilleurs servaient simplement à prévenir la terre entière qu’un vaisseau était là.

Leia et Isolder commencèrent à tirer. Baissant tous les boucliers, Luke ajouta à leur partition une salve de canons à ions.

Le transport accéléra, échappant au danger.

— Elles vont sauter dans l’hyperespace ! prévint Han.

Sur l’écran, le transport filait comme une flèche.

— Pas si près du puits gravitationnel ! affirma Luke.

Il accéléra à son tour.

Han comprit soudain la tactique du Jedi. Conscient que l’armement du Faucon ne percerait pas les défenses du transport, il avait activé les brouilleurs pour avertir Zsinj que les sorcières essayaient de monter assez haut pour sauter dans l’hyperespace.

Le Faucon s’enfonça dans l’obscurité du manteau orbital. Han retint son souffle quand tous les écrans devinrent noirs.

Luke coupa les brouilleurs ; le Faucon jaillit hors du manteau de nuit, le transport ouvrant toujours la route.

Solo cligna des yeux… Tant de lumière !

C’était comme respirer un bol d’air frais après un séjour sous terre.

Les indicateurs de proximité bipèrent. Levant les yeux, Han vit deux superdestroyers fondre sur eux. Luke se dégagea à tribord. Une pluie de missiles percuta les boucliers affaiblis du transport.

Han compta les impacts sur la coque du vaisseau. Des fragments de métal chauffé à blanc s’en détachèrent pour tourbillonner dans l’espace.

Une nouvelle salve acheva le travail. Devenu incandescent, le transport explosa, boule de feu un instant aussi lumineuse qu’une étoile.

Solo hurla de joie tandis que Luke faisait demi-tour, visant la protection du manteau de nuit.

Une nouvelle fois, l’obscurité les avala.

— Leia, Isolder, restez concentrés ! ordonna Luke. On n’a pas encore fini…

Les exclamations de triomphe des deux jeunes gens se turent.

Luke ouvrit la radio. Aussitôt, la passerelle fut envahie par un flot de communications codées. Solo comprit : des chasseurs les avaient suivis à l’intérieur du manteau de nuit. Zsinj ne les lâchait pas.

— Qu’est-ce que tu as encore en tête, gamin ? demanda Han.

— Il faut détruire le manteau de nuit ! Il n’y a pas que des êtres pensants sur Dathomir, mais des arbres, de l’herbe, des lézards et des vers. La vie, Han. Tout un monde de vie !

— Plaît-il ? s’indigna le Corellien. Ne me dis pas que tu veux risquer ta peau pour des lézards et des vers ! Trouvons une faille dans la défense adverse et filons d’ici !

— Pas question ! répondit le Jedi.

Chewbacca grogna, mais Skywalker ne lui prêta pas la moindre attention. Enfoncé dans son siège, il scrutait l’obscurité.

Au moins, il nous éloigne des chasseurs, se félicita Solo.

Luke ferma les yeux, comme s’il était en transe, et accéléra.

Regardant son ami, Han comprit qu’il allait tous les faire tuer. Etrangement, cela lui parut sans importance.

D’accord, fais-nous tuer ! Après tout, on serait déjà morts sans toi…

— Merci, murmura Luke comme si Han avait prononcé ces mots à voix haute.

Le Jedi fit feu avec les deux batteries de blasters. Solo ne vit même pas leurs traces lumineuses. L’obscurité était si totale que même cette infime lueur leur était refusée.

Skywalker attendit un moment. Le Corellien regarda l’écran tactique. Il n’y avait pas l’ombre d’une cible. Pourtant, le Jedi tira de nouveau avec une grande concentration.

Il continua ce manège pendant les vingt minutes suivantes, sans résultat.

C-3P0 se glissa derrière Han et murmura :

— Pardonnez-moi, Votre Majesté, mais ne devriez-vous pas vous charger des tirs ? J’ai peur que tout ça ne nous mène nulle part…

— Faisons confiance à Luke, marmonna Solo. Il sait ce qu’il fait…

Skywalker ouvrit brièvement la radio. Le volume de communications avait triplé, voire quadruplé. Des centaines de chasseurs devaient tourner dans le secteur. Apparemment, les efforts de Luke commençaient à inquiéter Zsinj.

Soudain, le Jedi tira une dernière salve, et ils sortirent à nouveau de l’obscurité pour voler parmi les étoiles. Solo eut besoin de quelques minutes pour comprendre que le manteau de nuit n’existait plus. Dathomir s’affichait de nouveau sur l’écran de contrôle, avec ses océans turquoise et ses continents marron foncé.

Chewie grogna ; Luke s’éloigna de la planète.

Levant les yeux vers l’écran tactique, Han manqua s’étrangler. Il y avait des centaines de vaisseaux dans le secteur. Des superdestroyers impériaux, bien sûr, mais aussi une nuée de Dragons hapiens. Les chasseurs Tie et les ailes X dansaient un ballet mortel autour des plus gros bâtiments.

La mère d’Isolder venait d’arriver !

Un vaisseau hapien tira dans toutes les directions une salve de torpilles à l’éclat argent typique. Solo frissonna. Les Hapiens piégeaient l’hyperespace avec des mines spéciales. La manœuvre était risquée, car elle contraignait tous les vaisseaux à rester dans l’espace normal pendant dix à quinze minutes. Jamais les Rebelles n’avaient utilisé cette tactique à la signification limpide : la victoire ou la mort.

Luke passa en vitesse d’attaque, verrouillant ses blasters sur un superdestroyer déjà pressé par un Dragon. Autour du navire impérial, l’espace fourmillait de chasseurs Tie. C’était beaucoup plus qu’un seul vaisseau pouvait en contenir dans ses baies. Ils étaient tombés sur un gros poisson.

— Qui peut bien être dans ce navire ? demanda Solo, étonné de voir d’autres bâtiments se porter à son secours.

— Zsinj, répondit Luke. C’est un Super Star, Han. Le Poing d’Acier. Quand tu as cru l’avoir détruit, tu as dû te montrer un peu optimiste…

— Laisse-moi ton fauteuil, gamin, ce type est à moi.

Luke tourna la tête. Pour la première fois, Han s’aperçut que le visage de son ami était couvert de contusions. Mais ses yeux restaient clairs.

— Tu peux t’en sortir ? Han, c’est un gros morceau…

— Oui, mais c’est ma planète qu’il menace. Le poisson est à moi. Cela dit, rien ne t’empêche de m’aider à ramener la ligne, si ça te chante.

— Vos désirs sont des ordres, majesté, obtempéra Luke.

A son ton, ça n’était pas qu’une plaisanterie. Il libéra le siège du pilote.

Han s’assit, serra les dents pour ne pas sentir les élancements de sa jambe, et s’adossa au siège. Pour la première fois depuis des mois, il se sentait chez lui.

— Maintenant, ouvre bien les yeux, gamin. (Il modifia le cap du Faucon pour qu’il s’éloigne du Poing d’Acier, comme s’il voulait changer de cible.) Je ne connais pas tes trucs de Jedi, mais le meilleur moyen d’approcher un Super Star est de faire semblant de vouloir en être le plus loin possible.

Le Corellien jeta un coup d’œil à l’écran armement. Il restait quatre missiles à concussion Arakyd dans les tubes de lancement, mais plus l’ombre d’une torpille à protons. Il arma les missiles et transféra sur sa console les commandes des batteries de blasters. Fondant sur un chasseur Tie, il tira une courte salve suffisante pour désintégrer le petit appareil. Cela fait, il fit mine de vouloir s’attaquer à un autre Tie.

Accélérant, il sentit le Faucon résister comme si une main invisible le retenait.

Un rayon tracteur.

Chewie gémit.

— Je sais, souffla Han. Toute la puissance aux boucliers déflecteurs arrière. Ils ne nous tiendront pas longtemps…

Serein, il accéléra en direction du Poing d’Acier, donnant assez de puissance pour que le Faucon, malgré le rayon tracteur, soit une cible mobile. Quand il plongea sous un essaim de chasseurs Tie, il entendit Luke toussoter. Ils fonçaient sur le destroyer Super Star à une vitesse vertigineuse.

Solo attendit de découvrir vers quelle zone du navire ennemi le tirait le rayon. Quand il le sut, il guetta le moment où ils traverseraient le bouclier antiparticules.

Alors il largua deux missiles à concussion.

Le rayon tracteur les attira vers la coque du Super Star. A l’impact, deux boules de feu enveloppèrent le Poing d’Acier. Profitant d’une brève interruption du faisceau tracteur, Han se dégagea.

Il retint son souffle en passant au-dessus d’une tourelle qui ne parvint pas à pivoter assez vite pour les canarder.

— Tu es à l’intérieur de leur champ anticoncussion, cria Isolder dans l’intercom. Solo, tu peux tirer quand tu veux !

— Ouais… Je sais…

Un canon-blaster les prit pour cible. Han piqua pour éviter les traits d’énergie.

Puis il régla sa radio sur la fréquence impériale.

— Message urgent pour le seigneur Zsinj ! Code rouge. Poing d’Acier, répondez ! C’est de la première importance !

Un long moment passa avant que le visage du seigneur de la guerre s’affiche sur l’écran.

— Zsinj, j’écoute ! cracha-t-il, les yeux exorbités par la fièvre de la bataille.

— Ici le général Solo. (Le Faucon vint se placer en face du modula de commande du Poing d’Acier.) Regarde tes écrans, vermine. Et va te faire voir chez les Wookiees !

Il attendit une demi-seconde avant de tirer ses deux derniers missiles. L’horreur se peignit sur le visage de Zsinj.

La moitié supérieure du module de commande se désintégra dans une gerbe de feu. Ses boucliers hors service, le destroyer Super Star devenait une cible facile. Un canon ionique hapien saisit l’occasion de frapper. Un autre tira un chapelet de torpilles à protons.

Han s’éloigna du navire agonisant, content de laisser les Hapiens finir le boulot. Zsinj mort, la flotte ennemie ne tarderait pas à se rendre.

Personne ne cria de joie derrière lui. Dans le silence, Solo s’aperçut que ses mains tremblaient.

— Chewie, prends les commandes…

Le Corellien croisa les mains sur sa poitrine. Des mois de frustration, d’inquiétude et de peur. Voilà ce que Zsinj lui avait coûté.

Han sentit les mains de Leia se poser sur ses épaules. Souriant, il la laissa le masser. Peu à peu, ses muscles se détendirent. Pour la première fois en cinq mois, il eut l’impression qu’ils se dénouaient.

J’étais une vraie boule de nerfs, sans elle…

Comment avait-il pu ne pas s’en apercevoir ? En tout cas, ça ne se produirait plus jamais…

— Ça va mieux ?

Solo réfléchit. Tuer un homme, même Zsinj, n’avait rien pour le réjouir. Pourtant, il était… soulagé.

— Oui… Je ne me suis pas senti aussi bien depuis… Bon sang, je ne sais pas au juste…

— Le monstre a une tête de moins…

— C’est ça… Maintenant que le papa requin est mort, ses petits vont s’entre-dévorer…

— Ce qui nous fera beaucoup moins de requins, en fin de compte…

— Et profitant de la confusion, la Nouvelle République pourra pénétrer sur l’ancien territoire de Zsinj et reprendre une petite centaine de systèmes solaires…

Leia fit pivoter le siège. Isolder, Teneniel, Luke et les droïds étaient massés dans la coursive.

Les gens adoraient fêter les victoires en groupe. Han avait toujours préféré les célébrations solitaires.

— Tu as gagné, murmura Leia, les yeux brillant de larmes.

— La guerre ? s’étonna Solo, trouvant qu’elle en rajoutait. Non. Pas encore…

— Je ne parlais pas de ça. Avant notre départ, tu as dit que je devrais t’épouser si je retombais amoureuse de toi sur Dathomir. Eh bien, c’est fait. Tu as gagné…

— Heu… C’était une sorte de pari, mais un peu stupide, non ? Je ne voudrais pas te forcer à… Enfin, oublions ça…

— Pas question, Han Solo ! Dette de jeu, dette d’honneur !

Elle se pencha sur lui et l’embrassa.

Oubliant ses douleurs, il sut qu’il était l’homme le plus heureux du monde.

 

Isolder les regardait en souriant. Sur Hapes, cette histoire allait lui causer une multitude de tracas. Pour sûr qu’il ne s’amuserait pas… Pourtant, il était heureux pour ses deux amis.

Son comlink bipa sur une fréquence réservée à la sécurité de la Confédération. L’image d’une Hapienne s’afficha sur le petit écran de l’appareil.

— Je suis content de te revoir, Astara. Je ne m’attendais pas à accueillir la flotte avant trois jours… Quelqu’un a dû choisir une route… hum… plus rapide.

— Par l’Holonet, j’ai programmé le chemin emprunté par le Jedi sur l’ordinateur de navigation de la flotte. Ça lui a économisé quelques parsecs…

— Pas mal joué, mais très dangereux…

— J’ai agi sur ordre de la reine, prince. Elle arrive demain avec les vaisseaux olanjis. Pour l’heure, plusieurs destroyers ennemis se sont rendus. Tant que la Ta’a Chume n’est pas là, vous commandez la flotte… Quels sont vos ordres ?

Isolder s’ébroua. Que sa mère ait risqué ses précieux vaisseaux pour lui l’étonnait au plus haut point.

— N’accepte que les redditions sans condition. Tous les navires en bon état deviendront propriétés de Hapes. Quant au spatioport, détruis-le !

— Compris. Quand repartons-nous ?

Le prince réfléchit. Zsinj pouvait avoir appelé des renforts. Mieux valait ne pas tramer dans le coin.

— Deux jours.

— Tant que ça ? s’étonna Astara, habituée à des retraites plus rapides. Je devrai demander confirmation à votre mère.

— Il y a des prisonniers politiques sur Dathomir, plus des indigènes qui voudront peut-être en partir. Il faut les contacter, et organiser un éventuel exode… J’ai dit deux jours !