14

A l’aube, la brume montant de la rivière empêcha Luke de voir à plus de quelques mètres devant lui. Tournant peu à peu au marécage, le terrain devenait difficile pour R2. Le long des berges, les silhouettes des arbres carbonisés évoquaient des squelettes dardant vers le ciel leurs membres crochus. Perchés sur leurs branches, de grands lézards tachetés guettaient d’improbables proies…

Derrière Luke, Isolder ne desserrait pas les dents. Chaque fois qu’il se retournait, le Jedi était frappé par l’air soucieux de son compagnon.

Skywalker était mieux placé que quiconque pour deviner les pensées du prince. Quelques années plus tôt, lui-même avait suivi Obi-Wan Kenobi dans une quête tout aussi folle et dangereuse.

Ces derniers mois, je n’ai pensé qu’à une chose : retrouver les archives des Jedi et dénicher des élèves doués pour leur apprendre à maîtriser la Force.

Les choses avaient tourné d’étrange façon. Bien que n’étant pas particulièrement talentueux, c’était le Hapien qui avait déniché Luke.

Cela lui offrait une occasion unique de former un étudiant sans craindre qu’il devienne un nouveau Vador. Une chance extraordinaire de mesurer ses compétences de professeur.

Continuant son chemin en prenant garde à d’éventuels sables mouvants, Luke se demanda s’il n’en avait pas été de même pour Obi-Wan Kenobi. Depuis toujours, il croyait que son mentor l’avait attendu, comme un fermier guette la récolte. Mais son intrusion dans la vie du vieil homme devait peut-être autant au hasard que celle du prince dans la sienne.

A l’évidence, Isolder était animé par la Force. Pourtant, Luke ne sentait en lui aucun pouvoir. Ce dernier était peut-être si nouveau et si ténu que le Hapien lui-même ignorait sa présence.

Luke atteignit une intersection. Le chemin qui s’éloignait de la berge semblait plus sûr. Néanmoins, la piste boueuse l’attirait.

Il obéit à son instinct.

Ne perdait-il pas son temps à rechercher les ruines d’une Académie Jedi ? En tout cas, la mère d’Isolder avait menti en prétendant qu’il en existait une dans la Confédération. Skywalker n’avait jamais été dupe…

La Force envoyait des étudiants aux maîtres quand le besoin s’en faisait sentir. La seule véritable formation d’un Jedi était peut-être de combattre sans préparation les forces des ténèbres.

Sous cet augure, Dathomir serait la meilleure Académie dont on pouvait rêver. Luke sentait de vastes zones de perturbation dans le tissu même de la Force. C’étaient des sortes de trous noirs comme jamais il n’en avait rencontré, sinon dans la caverne de Yoda. Mais ici, ils étaient partout…

Au-dessus de leurs têtes, des reptiles ailés passaient et repassaient. Luke s’arrêta, réalisant qu’ils venaient d’atteindre l’extrémité d’une péninsule. Il ne pouvait plus avancer.

Etudiant les eaux noires bouillonnantes – peut-être un puits de goudron naturel – il chercha un endroit où marcher.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda Isolder, désignant la plate-forme métallique à l’étrange inclinaison qui dépassait des eaux.

Des oiseaux trottinaient sur le métal rouillé. Luke distingua la découpe caractéristique d’un sas…

— On dirait l’épave d’un vieux vaisseau spatial, répondit le Jedi.

A ce qu’ils en voyaient, le navire devait être beaucoup plus grand qu’un destroyer de l’ancienne classe Victory. Pourtant, il devait s’être écrasé sur Dathomir depuis des siècles. Il fallait ça pour attaquer à ce point la coque.

Ecarquillant les yeux, le Jedi repéra une section de métal, près d’un dôme, que la rouille avait épargnée. Un nom était écrit en lettres d’or.

Chu’unthor !

C’était donc ça ! Des centaines d’années plus tôt, ce n’était pas un individu, ou un peuple, que Yoda voulait libérer de Dathomir, mais un vaisseau spatial. Depuis, personne n’y était parvenu.

— Il faut aller voir ! s’écria Luke sans dissimuler son impatience.

— Pourquoi diable ? s’étonna Isolder. Ça n’est qu’une épave…

Luke regarda autour de lui pour repérer un moyen d’accéder au navire. Quittant le bras de terre, les deux hommes marchèrent un bon kilomètre avant de découvrir deux antiques radeaux faits de troncs solidarisés avec des cordes à moitié pourries.

Il y avait des marques fraîches sur la berge.

— Quelqu’un était là il n’y a pas longtemps, constata Isolder.

— Oui. Qui pourrait résister à une si belle épave ?

— Moi, répondit Isolder. Qu’avons-nous à faire de ce vaisseau ? Nous sommes là pour Leia, non ?

R2 approuva, émettant une Kyrielle de bips pour rappeler à Luke que l’eau et lui ne faisaient pas bon ménage, d’autant qu’il n’avait pas son pareil pour attirer les monstres aquatiques.

Isolder regardait les montagnes. Il n’avait aucune envie de perdre du temps en chemin.

Tant pis ! La Force avait conduit Luke jusqu’à l’épave ; il devait lui faire confiance.

— Ça prendra quelques minutes seulement, annonça le Jedi en se dirigeant vers un des radeaux. Qui m’accompagne ?

— J’attendrai ici, répondit Isolder.

Les yeux de R2 pivotèrent pour se braquer sur le Hapien. Bien que mort de peur – si on ose dire – le droïd bipa de mépris et roula sur le radeau.

S’aidant d’un long morceau de bois, Skywalker fit approcher le radeau de l’épave. Le soleil matinal ayant dispersé le brouillard, il distingua mieux le vaisseau échoué.

Long de deux kilomètres, large d’un, il était hérissé d’une multitude de dômes d’habitation. Dans la zone des moteurs d’hyperdrive, la coque était rouillée au point de laisser passer le jour.

La myriade de hublots constellant les dômes indiquait que le Chu’unthor avait été une sorte de ville flottante, peut-être même un navire de plaisance. A son inclinaison, il devait être enfoncé très profondément dans la rivière. A l’évidence, seuls les ponts supérieurs restaient visibles.

L’aspect de l’épave n’avait rien d’ordinaire. Pas de trace de blaster pour témoigner d’une bataille, pas de brèche indiquant une explosion, aucune bosse causée par un atterrissage en catastrophe… Victime d’une panne, le vaisseau avait dû planer, puis tenter de se poser dans le puits de goudron.

Quand il fut plus près, Luke constata que le navire avait été méticuleusement scellé. Les sas n’étaient pas seulement fermés, mais soudés. Les hublots portaient des marques en forme d’étoile, comme si quelqu’un avait tenté de briser le transparacier.

Luke amarra le radeau à une écoutille et sauta sur la coque. On avait bien tenté de s’introduire dans le vaisseau par la force. Des barres de fer et des grosses pierres gisaient autour des sas. A certains endroits étaient peints des mots étranges ; des flèches désignaient les soudures les plus faibles.

On avait travaillé des années pour tenter de vaincre les défenses de l’épave.

En pure perte.

Des enfants, songea Luke.

Mais comment auraient-ils pu manier les énormes barres de fer et les blocs de roc ?

Certains dômes étaient équipés de fiches d’accès électroniques que R2 eût pu forcer si elles n’avaient pas été aussi rouillées.

Tout le vaisseau semblait dans un état lamentable, y compris à l’intérieur. A force d’être battu par des tempêtes de sable, le transparacier lui-même en était comme terni.

Un grand nombre de dômes paraissaient contenir des salles de gymnastique. De gros ballons jonchaient le sol comme si on avait été en train de jouer au moment du crash. Un autre dôme abritait un restaurant, à moins que ce ne fût une boîte de nuit. Des verres et des assiettes, encore pleins de choses innommables, reposaient sur des tables rouillées couvertes de poussière. R2 poussa un long sifflement désolé en découvrant ce spectacle.

— Mon vieux R2, fit Luke, on dirait que les passagers ont quitté le navire pour ne plus jamais revenir.

Le droïd émit une série de bips et de cliquetis afin de rappeler à son maître le message de Yoda : « Nous avons essayé de libérer… Chu’unthor de Dathomir, mais les sorcières nous ont repoussés… »

Il y avait sur cette planète de considérables perturbations dans la Force. Comme si des cyclones avaient aspiré toute la lumière.

— R2, ce que Yoda a rencontré sur cette planète est toujours là, tu peux me croire.

Le droïd couina son assentiment.

Luke se pencha sur un dôme. Il aperçut une pièce remplie de bancs sur lesquels finissaient de rouiller des objets métalliques : des cellules électro-focales, des cristaux amplificateurs, des gardes de sabrolasers…

Des pièces d’armes que seul un Jedi pouvait utiliser !

Le cœur de Skywalker bondit dans sa poitrine. Une Académie Jedi !

Tout devenait clair : il avait exploré plus de quarante planètes pour retrouver une Académie qui n’avait jamais existé ailleurs que dans l’espace.

Pourquoi n’y avait-il pas songé plus tôt ? Le centre de formation des Jedi ne pouvait être qu’itinérant.

Avec si peu d’élèves potentiels, les anciens maîtres avaient dû se résoudre à sillonner la galaxie pour trouver des candidats. Dans chaque système solaire, ils n’avaient dû trouver qu’un ou deux cadets dignes de les rejoindre.

Le dernier des Jedi sortit son sabrolaser et commença à découper le transparacier. Rouillée comme elle l’était, l’épave ne pouvait pas contenir grand-chose d’exploitable. Pourtant, il fallait essayer.

Au rythme de ses coups, des gouttes de transparacier fondu jaillirent de la coque de l’antique vaisseau. R2 recula de quelques mètres…

Absorbé par son travail, Luke ne sentit pas tout de suite qu’on l’observait. Mais soudain, dans son dos, une entité puissante se rua sur lui. Quand il se retourna, ce fut pour apercevoir une femme aux cheveux roux, à la peau fauve et aux jambes nues musclées. D’une détente, elle voulut le frapper du bout de sa botte de cuir. Skywalker esquiva et brandit son sabrolaser.

La femme était trop rapide. Même s’il sentit son attaque suivante grâce à la Force, le Jedi ne put réagir assez vite. La massue de son adversaire s’abattit sur sa main artificielle ; dans une gerbe d’étincelles – des courts-circuits – le jeune Chevalier lâcha son arme.

La femme tenta de lui décocher une ruade dans le ventre. Se laissant tomber sur le sol, Luke roula de côté et utilisa la Force pour rappeler le sabrolaser dans sa main gauche.

Son adversaire s’immobilisa, stupéfaite par ce qu’il venait de faire. A la faveur de ce répit, Luke sentit la Force qui l’habitait. Puissante et sauvage, elle dépassait celle de toutes les femmes qu’il avait rencontrées. Ses yeux marron zébrés d’éclairs orange, elle s’accroupit, pensive.

Luke ne lui donnait pas plus de vingt ans.

— Je ne veux pas te faire de mal, lui assura-t-il.

Elle ferma les yeux à demi et murmura quelques mots. Le Jedi sentit qu’elle le sondait avec sa Force.

— Comment peux-tu maîtriser la magie ? Tu es un homme…

— La Force habite toutes les créatures, mais seuls les initiés peuvent la contrôler.

— Tu te prétends un maître ?

— Oui.

— Alors tu es un Jai, un sorcier mâle venu des étoiles ?

Skywalker acquiesça.

— J’ai entendu parler des gens de ta sorte. Mon aïeule, Rell, dit que vous êtes des guerriers invincibles, car vous avez terrassé la mort. Depuis que vous luttez pour la vie, mère nature vous aime, et vous ne pouvez pas mourir. Es-tu immortel ?

La Force de la femme se tendit de nouveau vers Luke. Cette fois, ça n’était pas pour une attaque, mais pour communiquer. Ouvrant son esprit et son cœur, Skywalker eut soudain une image devant les yeux.

La femme, dans le désert, cherchant à s’approprier quelque chose que d’autres gardaient jalousement. Il vit une hutte faite de brindilles adossée à une falaise de pierre rouge ; il aperçut un campement, à la tombée de la nuit, où des enfants demi-nus jouaient autour d’un feu.

La femme cherchait, rampant vers la hutte, folle de désir pour ce qu’elle contenait.

La guerrière sourit et commença à chanter. L’éclat de ses yeux troubla Skywalker. Jamais il n’avait vu un désir si puissant.

— Waytha ara quetha way… Waytha ara quetha way…

— Un instant ! s’écria Luke. Tu ne crois pas que…

Les fragments de rochers et les barres de fer se mirent à vibrer, faisant résonner la coque du Chu’un-thor. Derrière la chanteuse, la brume tourbillonnait.

« Mais les sorcières nous ont repoussés… »

— Waytha ara quetha way… Waytha ara quetha way…

Des éclairs déchirèrent le ciel ; une dizaine de petits rochers volèrent vers Luke en faisant siffler l’air. Des années plus tôt, Dark Vador avait essayé ce genre de truc contre lui. Force était de constater que le Seigneur Sombre était moins doué que la sorcière.

De quelques passes habiles de son sabrolaser, Luke pulvérisa la plupart des projectiles. L’un des derniers le toucha à la poitrine, le contraignant à reculer d’un mètre.

« Mais les sorcières nous ont repoussés… »

— Un instant ! cria le Jedi. Vous ne pouvez pas simplement réduire les hommes en esclavage pour les transformer en reproducteurs. Ça n’est pas…

Une pluie de pierres et de rochers s’abattit sur la coque du navire échoué. Cette femme, comprit Luke, pouvait faire absolument ce qui lui chantait. Levant un bras, il tenta de se protéger avec la Force. Hélas, son esprit n’était plus en mesure de l’invoquer…

« Mais les sorcières nous ont repoussés… »

Un tronc d’arbre le percuta, puis des pierres. La femme se dressa devant lui, sa massue levée.

Il ne l’avait pas sentie approcher… L’arme s’abattit sur son crâne, qui sembla exploser.

Sonné, Luke mit un genou à terre.

Comme un chasseur avec sa proie, la femme approcha et lui saisit sans douceur le menton.

— Je suis Teneniel Djo, une fille d’Allya. Te voici mon esclave !

 

A la lumière de l’aube, Han Solo luttait contre les multiples traîtrises des marches taillées à même la roche. Comme sur la plupart des planètes à faible gravité, les volcans étaient hauts et abrupts. Pour l’heure, le petit groupe cheminait le long d’une falaise de pierre noire haute de près de deux cents mètres. Les marches étaient assez larges pour qu’un rancor les emprunte ; des milliers de pieds les avaient polies. Durant la nuit, les eaux glacées coulant du sommet du mont avaient gelé, transformant le passage en patinoire.

Derrière Solo, les rancors avançaient en renâclant. S’accrochant de toutes leurs griffes à la roche, ils semblaient terrifiés à l’idée de tomber. Impitoyables, leurs cavalières ne leur laissaient pas un instant de répit.

Chewbacca n’avait pas l’air bien. Juché sur un rancor, il gémissait sans cesse en se massant les côtes.

Sous les rayons du soleil, Han avait loisir d’étudier les amazones dans le détail. Les tuniques qu’elles portaient sous leurs robes étaient faites de peaux de reptiles dont la couleur allait du vert au bleu en passant par l’ocre. Les robes elles-mêmes étaient constituées de fibres végétales tressées.

Les casques restaient l’élément le plus élaboré de leur costume. Ce que Solo avait pris pour des ailes dans l’obscurité était en réalité des morceaux de métal recourbés percés de plusieurs trous où venaient s’accrocher les ornements qui cliquetaient à chaque mouvement des rancors.

Parmi ces colifichets, Han reconnut des fragments d’agate, les crânes peints de minuscules rongeurs, la patte pétrifiée d’un petit animal, des morceaux de tissus colorés, un éclat d’argent travaillé et une boule blanche qui avait de bonnes chances d’être un œil séché.

Chaque femme portait un style différent de casque. Ce détail ne fut pas pour rassurer Solo : dans toutes les cultures, les gens les plus puissants aimaient à se distinguer par leur habillement.

Han aidait Leia et C-3P0 à conserver leur équilibre. Si l’un d’entre eux tombait, il risquait fort d’entraîner les autres, et c’eût été une fin indigne d’un général.

A la sortie d’un lacet, Han aperçut en contrebas une vallée de forme ovale nichée au cœur des montagnes. Des cabanes à toit de chaume formaient un petit village. Autour s’étendaient des cultures.

Les hommes, les femmes et les enfants s’activaient dans les champs, ou nourrissaient des reptiles à quatre pattes parqués dans des enclos. Un large cours d’eau serpentait entre les plantations jusqu’au lac où il se jetait.

Le petit groupe descendit l’escalier de pierre puis passa devant une formation de dix amazones montées sur des rancors. Vêtues de la même façon – tuniques, robes et casques – presque toutes étaient armées de fusils-blasters. Les malchanceuses avaient des lances ou des haches de guerre passées à leur ceinture.

Aucune ne semblait avoir moins de vingt-cinq ans. Leurs visages sales et durs glacèrent davantage Han que le vent froid de la montagne. Sans un sourire, l’air indifférent, ces guerrières semblaient prêtes à laisser à tout moment libre cours à une sauvagerie millénaire.

Derrière le village, dans les hauteurs, se dressait une forteresse. Taillées à même la roche, les fortifications comportaient des tours, des chemins de ronde et des meurtrières. Des panneaux de transparacier récupérés sur des vaisseaux écrasés colmataient les brèches.

Un duo d’étranges canons-blasters surveillait l’entrée de la vallée. Sur la pierre, des entailles et des marques noires indiquaient que ces femmes étaient vraiment en guerre.

Mais avec qui ?

La petite colonne atteignit une plate-forme rocheuse. Sur ordre d’une amazone, le rancor qui portait Chewbacca poussa Leia en direction de la forteresse. Han et C-3P0 furent dirigés vers le village. En chemin, ils passèrent devant les grands enclos où paissaient des troupeaux de reptiles géants.

Ils pénétrèrent dans le cercle de cabanes. Devant chacune, Han remarqua la présence d’une urne de pierre qu’il supposa être un réservoir d’eau.

Par les fenêtres et les portes ouvertes, le Corellien aperçut des tables chargées de paniers de fruits et des murs où pendaient des tentures vivement colorées.

Son amazone le conduisit derrière l’amas de huttes, où se trouvaient des dizaines d’hommes, de jeunes femmes et d’enfants. Sur un terrain sablonneux semé de mauvaises herbes, les villageois avaient creusé des trous pour les remplir avec l’eau de leur seau. Assis au bord de ces flaques, les adultes les scrutaient intensément. Un peu à l’écart, les enfants les regardaient en silence.

Le rancor s’arrêta. Sa cavalière se pencha, poussant Han vers une flaque du bout de sa lance.

— Whuffa ! Whuffa ! glapit-elle, indiquant à Solo d’aller contempler l’eau turbide.

— Tu as une idée de ce que ces femmes veulent ? demanda Han à C-3P0.

— Hélas non, général. Leur langue est inconnue de mes programmes. Certains termes me rappellent le vieux paecien. Mais je n’ai jamais entendu le mot whuffa.

Du paecien ? s’étonna Han. L’Empire Paecien avait disparu près de trois mille ans plus tôt.

Le Corellien s’approcha d’un vieil homme à la barbe grise qui fixait inlassablement sa flaque. Elle était minuscule : cinquante centimètres de diamètre pour moins d’un doigt de profondeur.

Le vieillard leva les yeux.

— Whuffa ! ordonna-t-il au nouveau venu.

Il lui tendit un outil de cuivre et un seau et lui fit comprendre d’aller creuser son propre trou.

— Whuffa… D’accord, j’ai compris.

S’éloignant avec sa pelle et son seau, il s’assit à l’endroit que lui avait indiqué le vieil homme, à l’écart des autres, et creusa une petite cavité qu’il remplit d’eau.

Une odeur épouvantable agressa ses narines. Le liquide n’était pas de l’eau, mais une boisson fermentée primitive résolument puante.

Génial ! pensa Solo. J’ai été capturé par des dingues qui veulent me faire reluquer une flaque jusqu’à ce que j’aie des visions.

Regardant son reflet, il constata qu’il était dépeigné et se passa une main dans les cheveux pour y remédier.

Ne sachant que faire de lui, les guerrières avaient abandonné C-3P0 aux enfants, qui le regardaient avec une curiosité mêlée d’hostilité.

Leia était entrée depuis un moment dans la forteresse. Au loin, Han entendit le bruit des moteurs d’un chasseur Tie. Les dix femmes qui montaient la garde sur leurs rancors levèrent la tête, nerveuses.

C’était plutôt bon signe. Si les amazones avaient des ennuis avec les hommes de Zsinj, il était au moins tombé dans le bon camp.

Quoique… A l’allure minable des fortifications, ça n’était pas si évident…

De toute façon, le Corellien détestait l’idée d’être jugé. Si ces femmes étaient xénophobes, Leia et lui risquaient de finir esclaves, ou victimes propitiatoires. Si elles les prenaient pour des espions, leur sort promettait d’être encore plus désagréable.

Une autre chose déplaisait à Han : la guerrière à la lance avait automatiquement déduit qu’il était l’esclave de la princesse. Une société pareille ne l’enchantait guère…

Han observa les femmes qui les surveillaient. Elles le regardaient sans aménité.

Mieux valait faire semblant de travailler comme une bête !

 

Pendant une heure, le Corellien observa stoïquement sa flaque remplie de la décoction fermentée.

Le soleil tapant dur, il réalisa qu’il avait une soif de tous les diables. Lui était-il permis de boire un peu de la liqueur ?

S’abstenir est plus prudent, décida-t-il. Les esclaves n’ont peut-être pas le droit…

Leia n’était toujours pas sortie de la forteresse. Han vit une femme penchée par-dessus un parapet, cent mètres au-dessus du niveau de la vallée. Très vieille, elle portait une pièce de cuir en guise de cape. Solo crut voir qu’elle charriait un seau.

Elle regarda en bas un long moment, puis agita les bras et parla sans que ses mots arrivent jusqu’à la vallée. Après quelques instants, une boule de cristal s’éleva et vola jusqu’à la vieille, qui la récupéra habilement dans son seau.

Du liquide déborda. Satisfaite, la vieille femme retourna dans la forteresse.

Han se frotta les yeux, éberlué. Ça n’était pas une boule de cristal, mais de l’eau. Une sphère liquide qui avait lentement flotté jusqu’à la vieille.

Entendant comme un bruit de succion, Solo baissa les yeux sur sa flaque. Un ver géant était sorti du trou et il sirotait l’immonde breuvage.

Non loin de Han, un vieil homme murmura : « Whuffa. » Puis il fit signe à Solo de capturer le ver.

Han étudia sa « proie ». Pour le moment, tout ce qu’il en voyait était un tronçon de peau noire muni d’un trou servant à aspirer le liquide. Quand l’animal émergea un peu plus, le Corellien détermina que cette structure fort simple était la tête de l’invertébré.

Tous les regards se braquaient sur Han. Les enfants, les adultes et les amazones retenaient leur souffle. Quoi que fût un whuffa, ces braves gens mouraient d’envie d’en posséder un. Il devait y avoir une récompense en jeu.

Enhardi, le ver sortit davantage de son trou et rampa sur le sable dans l’espoir de trouver une autre flaque de sa liqueur favorite. Cela dit, la bestiole était assez grosse, et sa peau ne semblait pas offrir beaucoup de prise. Han n’avait aucune envie de finir avec un de ces monstres autour du cou…

Il attendit que la bête trouve le courage de se diriger vers le seau encore plein de liquide.

Ayant appris qu’on gagnait toujours à enivrer ses adversaires, il laissa celui-ci boire jusqu’à plus soif.

Puis il passa à l’attaque, saisissant la créature à deux mains.

Le ver se débattit si violemment que Solo bascula en arrière, s’étalant sur le sable sans lâcher prise.

— Tu es à moi ! cria-t-il.

Enfants et adultes s’agglutinèrent autour de lui en poussant des cris enthousiastes.

— Whuffa ! Whuffa !

Agile comme une anguille, le ver parvint à tourner son orifice buccal vers Han. Alors, il lui cracha au visage une bonne dose de la boisson puante.

Cela fait, il commença à siffler dangereusement.

Solo tint bon. L’animal mobilisait toutes ses forces pour réintégrer sa tanière, mais cela ne suffisait pas. Après quelques minutes, Han sentit que la vitalité de sa proie s’épuisait. Tirant un bon coup, il sortit du trou près d’un mètre supplémentaire d’invertébré.

Trois minutes plus tard, il réussit à extirper un nouveau mètre. Des hommes se précipitèrent pour maintenir la tête de la créature.

Han s’escrima pendant une demi-heure avant de comprendre qu’il allait en avoir pour un moment. A la tête d’une bonne vingtaine de mètres de whuffa, il semblait encore loin d’en avoir vu le bout. Par bonheur, il avait mis au point une méthode. A chaque signe de faiblesse du ver, il tirait deux ou trois mètres de plus, puis attendait patiemment la prochaine occasion.

Après une heure de ce régime, le Corellien était au bord de l’évanouissement. Tirant avec tout ce qu’il lui restait d’énergie, il vit sortir du trou l’extrémité caudale du whuffa.

Histoire de livrer un baroud d’honneur, le ver agita frénétiquement l’ultime section de sa personne. A l’autre bout, les choses s’étaient déjà calmées depuis un moment…

Tous les gamins et les hommes du village maintenaient le whuffa. D’un coup d’œil, Han estima qu’il devait mesurer dans les deux cent cinquante mètres de long.

Avec des cris et des chants, les villageois portèrent la prise de Han jusque dans un verger. Des vieillards approchèrent du Corellien et le congratulèrent. Souriant, Solo suivit la procession.

Les villageois entreprirent d’enrouler le whuffa autour d’un arbre nu. Han vit que d’autres vers étaient en train de sécher sous les rayons du soleil. Approchant, il en toucha un. L’animal était mort, mais son cuir avait conservé toute sa souplesse. D’une jolie couleur chocolat, il semblait fort solide. Essayant d’en déchirer un morceau, il dut vite renoncer. Ce matériau était aussi résistant que du fil de nylon.

Jetant un coup d’œil aux amazones, il vit que leurs selles étaient tenues en place sur le dos des rancors par des lanières de whuffa.

Extra ! maugréa intérieurement le Corellien. J’ai capturé une corde !

Pourtant, les villageois semblaient faire tout un plat de l’opération. Ils paraissaient même carrément extatiques. S’ils exécutaient les étrangers, être Han Solo, le dompteur de whuffa, avait une bonne chance de lui sauver la mise.

Et puis même si ce truc n’était qu’une corde, c’était une rudement bonne corde ! Exportée dans la galaxie, elle aurait fait un malheur. D’ailleurs, qu’est-ce qui lui disait qu’elle n’avait pas des propriétés médicinales ? Ces gens étaient en guerre. Peut-être appliquaient-ils des lanières de whuffa sur leurs plaies ? A moins qu’ils fassent bouillir le ver pour fabriquer un élixir de Jouvence ?

Une fois qu’on y réfléchissait, c’était dingue tout ce qu’on pouvait faire avec un whuffa !

— Han ? l’appela une voix féminine.

Le Corellien fit volte-face. Montée sur un rancor, une femme aux cheveux noirs le regardait.

— Je m’appelle Damaya. Tu dois me suivre.

Talonnant le rancor, elle le força à se retourner.

Han sentit sa bouche se dessécher.

— Où… où allons-nous ?

— Ton amie Leia a plaidé ta cause pendant deux heures devant le clan de la Montagne qui Chante. Elle a obtenu ta vie et ta liberté. Reste à déterminer ton avenir.

— Mon avenir ?

— Le peuple de la Montagne qui Chante a décidé de ne pas être votre ennemi, mais ça ne veut pas dire qu’il sera votre ami. Il semble que vous disposiez d’un vaisseau qui pourrait être réparable. Si c’est vrai, les Sœurs de la Nuit et leurs esclaves impériaux voudront se l’approprier. Comme tu es un homme puissant dans ton univers, ils souhaiteront peut-être t’avoir aussi. Nous devons savoir si tu veux de notre protection, et combien tu es décidé à la payer.

Encore haletant et couvert de sueur, Solo suivit Damaya. Après vingt-quatre heures sans sommeil, les yeux lui démangeaient et les sinus lui brûlaient comme s’il avait été allergique à quelque élément de la planète.

L’amazone se dirigea vers la forteresse. Alors qu’ils atteignaient l’intersection où le chemin se divisait en trois, un groupe d’étrangers entra dans la vallée. Han compta neuf femmes humanoïdes arborant une peau marbrée étrangement pourpre. Sans casque, à l’inverse des amazones, elles portaient des robes à capuche couvertes par la poussière du chemin. Solo se demanda s’il n’était pas en train de contempler ses juges.

Quand son regard se posa sur les guerrières qui gardaient la passe, il comprit que les nouvelles venues étaient des ennemies. Alors que leurs montures grognaient et raclaient le sol de leurs griffes, les amazones brandirent leurs blasters.

La première des neuf femmes leva une lance brisée pour signifier qu’elle demandait une trêve.

Damaya mit pied à terre et poussa Han vers l’escalier de la forteresse.

Les femmes encapuchonnées les regardèrent passer. Leur chef, une vieille dame aux cheveux grisonnant sur les tempes, sourit à Han, le faisant frissonner.

— Etranger, où est ton vaisseau ? demanda-t-elle quand il l’eut dépassée.

— Eh bien, hum, il est…

— Ne lui dis rien ! cria Damaya.

Sa voix fit à Han l’effet d’une lame qui aurait tranché la ficelle que tirait la vieille femme. Cette dernière, comprit-il, avait utilisé un des trucs préférés de Luke : manipuler les esprits faibles.

Le Corellien dut rougir, car Damaya le rassura :

— Tu n’as aucune raison d’être embarrassé. Baritha a le pouvoir de dominer les cerveaux.

La vieille femme – Baritha, donc – éclata de rire. Han se détourna, fou de rage.

Sa toute nouvelle Némésis le suivit. Utilisant une moitié de sa lance, elle entreprit d’explorer son entrejambe.

Solo fit volte-face, les poings serrés. Baritha entonna une incantation et tendit les mains comme si elle voulait agripper quelque chose.

Solo sentit qu’un étau invisible écrasait ses deux poignets.

— Ne sois pas si prompt à t’énerver, petit homme ! siffla Baritha. Montre-nous plus de respect, sinon, la prochaine fois, c’est une partie plus sensible de ton anatomie que j’écraserai…

— Gardez les mains loin de moi ! gronda Solo.

Damaya dégaina son blaster et le pointa sur la gorge de Baritha. Puis elle dit quelques mots dans une langue inconnue du Corellien.

La vieille femme libéra Solo.

— J’admirais seulement ton prisonnier. De dos, il est si appétissant. Qui résisterait ?

— Celles de la Montagne qui Chante tolèrent votre présence, cracha Damaya, mais leur hospitalité a des limites…

— Celles de la Montagne qui Chante sont des imbéciles, croassa Baritha en rejetant la tête en arrière et en levant les sourcils pour atténuer ses rides. Vous ne pourriez pas nous jeter dehors si vous le vouliez ! Alors, souffrez que nous soyons là, et pliez-vous à nos exigences. Je méprise votre mascarade de civilité. Et je crache sur votre hospitalité !

— Je pourrais te faire exploser la tête, Baritha, menaça Damaya.

— Qu’attends-tu, ma fille ? (Baritha écarta les pans de sa tunique, révélant une poitrine affaissée.) Abats ta tante adorée ! La vie n’a plus de sel pour moi depuis que vous m’avez chassée du clan. Tire ! Tu sais combien je le désire…

— Je ne me laisserai pas entraîner sur ce chemin, trancha Damaya.

La vieille femme éclata d’un rire aigu.

— Elle ne se laissera pas entraîner ! répéta-t-elle.

Ses compagnes firent chorus à son rire.

Hors de lui, Solo souhaita que Damaya appuie sur la détente et fasse taire ces vieilles pies.

L’amazone rengaina son arme, indiquant à son prisonnier de grimper quelques marches histoire de se placer entre lui et les neuf encapuchonnées.

La forteresse se révéla plus endommagée que Han ne l’avait estimé d’en bas. Les trous provoqués par des tirs de blasters ne se comptaient plus ; certains avaient été rebouchés par une substance caoutchouteuse vert sombre.

Du sable rouge était répandu sur le chemin de ronde. Han se demanda d’où il venait. Toutes les montagnes du coin semblaient être des volcans. On avait dû transporter les pierres sur des kilomètres…

Les deux sentinelles affectées à la porte de la forteresse quittèrent leur poste pour guider les visiteurs. Han jeta un coup d’œil derrière lui : une dizaine de guerrières du clan de la Montagne qui Chante escortaient les neuf mégères.

La petite colonne entra dans la forteresse aux murs décorés de tapisseries. Des torches assuraient l’illumination.

On conduisit Solo et les femmes dans une pièce située sur une arête du bâtiment, de sorte que les fenêtres donnaient sur deux côtés différents du paysage.

Quasiment triangulaire, la salle possédait pas moins de six ouvertures regardant la vallée. Près de chacune était posé un fusil-blaster. Dans un coin, Han remarqua une pile de gilets pare-balles. Près d’un mur se trouvait un canon-blaster. A voir l’huile qui formait une flaque sous l’arme, le Corellien ne douta pas un instant qu’elle était hors d’état de marche.

Au centre de la pièce, un grand animal rôtissait sur une broche.

Une foule d’amazones resplendissantes dans leurs robes en peau de reptile occupait les lieux. Parmi elles, vêtue de la même façon, Han reconnut Leia.

Une des beautés approcha.

— Bienvenue, Baritha, dit-elle à la vieille femme, ignorant Solo. Au nom de mes sœurs, moi, mère Augwynne, j’ai l’honneur de t’accueillir dans le clan de la Montagne qui Chante.

Augwynne avança. Malgré ses mots gentils, son visage demeurait fermé.

— Inutile de minauder ! s’exaspéra Baritha en jetant sa lance brisée aux pieds de l’autre femme. Les Sœurs de la Nuit viennent pour Han Solo et les autres étrangers. Nous les avons capturés en premier : ils nous appartiennent !

— Il n’y avait aucune Sœur de la Nuit avec eux, répondit Augwynne. Des soldats impériaux les gardaient sur notre territoire. Après les avoir tués, nous avons offert l’hospitalité à leurs prisonniers. Je crains de ne pouvoir accéder à ta requête.

— Les Impériaux sont nos esclaves, tu le sais très bien. Ils amenaient les étrangers chez nous à fin d’interrogatoire.

— Si tu veux simplement questionner le général Solo, je peux t’aider. Général, pourquoi êtes-vous sur Dathomir ?

Augwynne regarda intensément la bourse pendue à la ceinture de Han. Le Corellien comprit le message.

— Je suis propriétaire de cette planète, et de tout ce qui s’y trouve. Je viens inspecter mon domaine.

Les Sœurs de la Nuit poussèrent des cris étranglés.

— Un homme ose prétendre qu’il possède Dathomir ! s’indigna Baritha.

Han sortit l’holocube de sa bourse et l’activa. L’image de Dathomir apparut, le nom de son propriétaire en incrustation.

— Non ! cria Baritha.

Elle agita la main. L’holocube vola dans les airs.

— La loi est la loi ! déclara Han. Ce monde est à moi, et je demande aux Sœurs de la Nuit de débarrasser le plancher.

Baritha le défia du regard.

— Avec plaisir, dit-elle. Procure-nous un vaisseau et nous partirons.

Une fois encore, il éprouva l’étrange compulsion de lui révéler la cachette du Faucon.

— Assez, Baritha ! cria Augwynne, brisant le charme empoisonné. Tu as eu ta réponse. Dis à Gethzerion que le général Solo reste parmi nous comme un homme libre.

— Tu ne peux lui rendre sa liberté, siffla Baritha. C’est notre esclave !

— Il a gagné son autonomie en sauvant la vie d’une de nos sœurs. Tu ne peux plus rien y changer.

— Mensonges ! Qui a-t-il sauvé ?

— Sœur Tandeer…

— Il n’y a personne de ce nom dans le clan ! Je t’accuse d’imposture. Qu’on me montre cette…

Les femmes de la Montagne qui Chante s’écartèrent pour laisser passer Leia. Vêtue d’une tunique d’écailles rouges et d’un casque orné de crânes de rongeurs, la princesse affronta le regard de Baritha.

— Ai-je déjà vu cette donzelle ?

— C’est une magicienne de la région des lacs. Le clan l’a adoptée. Lance un sort de vérité, et tu verras que je ne mens pas.

Baritha toisa l’assemblée du regard.

— Je n’ai pas besoin de lancer un sort pour savoir ce qui est vrai, marmonna-t-elle. Mais votre argumentation est fallacieuse…

— Notre argumentation repose sur des lois que toi et tes semblables n’avez jamais respectées.

— Les Sœurs de la Nuit réclament ces esclaves. Livrez-les-nous, ou nous viendrons les prendre.

— Menaces-tu de verser le sang ? demanda Augwynne.

Les femmes de la Montagne qui Chante entonnèrent une sourde mélopée. Se regroupant, les Sœurs de la Nuit donnèrent elles aussi de la voix.

— Gethzerion, cria Baritha, nous avons trouvé l’étranger ! Il possède un vaisseau, mais les vipères de la Montagne qui Chante refusent de nous le remettre.

Han entendit un sifflement à ses oreilles, presque comme si une mouche était en train de bourdonner dans son crâne. Les poils de sa nuque se hérissant, il comprit que la nommée Gethzerion entendait Baritha, et qu’elle était en train de lui répondre.

Le Corellien recula ; Baritha se détacha du cercle de ses compagnes et lui saisit le bras, serrant avec une force surhumaine.

Une guerrière de la Montagne qui Chante dégaina son blaster et tira. D’un mot magique et d’un geste nonchalant de la main, la sorcière dévia le trait d’énergie.

Ricanant, elle lâcha Solo.

Comme une seule, les Sœurs de la Nuit se précipitèrent vers les fenêtres et sautèrent, leurs robes claquant comme des ailes. Han fit une grimace. Il n’aimait pas songer à ce que seraient leurs corps, une fois en bas.

Mais, flottant dans l’air, Baritha cracha :

— Le sang coulera !

Sa menace fit trembler les murs de la pièce. Contente de son effet, elle se laissa tomber.

Han courut à une fenêtre : les Sœurs de la Nuit atterrissaient en douceur dans la vallée.

Des guerrières accoururent, blaster au poing.

— Qu’on les laisse partir, dit Augwynne.

Elle s’approcha de Solo, regardant le sang qui coulait le long de son biceps.

— Général, félicitez-vous que Gethzerion vous veuille vivant. Au fait, bienvenue sur Dathomir !