20

— Fichtre ! Fichtre ! s’exclama C-3P0 quatre dixièmes de seconde après avoir craqué le code impérial.

Chewbacca grogna une question.

— Grâce à la surveillance radio, Zsinj a appris que le général Solo est sur la planète. Gethzerion est disposée à vendre notre ami aux hommes du seigneur de la guerre. Ayant trouvé les traces du remorquage du Faucon, la sorcière a prévu que le général irait se fournir en pièces à la prison. Elle lui a tendu un piège.

Chewie gémit, puis brandit son arbalète-blaster.

— Il faut les prévenir ! s’exclama C-3P0.

R2 trilla son assentiment.

 

Un sifflement sortit de l’intercom de la prison. Dans les couloirs en plastacier, un droïd noir se hâtait, ses yeux artificiels roulant de droite à gauche. Un petit blaster, pas assez puissant pour tuer, était intégré à son casque. En avançant, il criait :

— Rentrer ! Rentrer ! Rentrer !

Les prisonniers couraient en tout sens, tentant de rester hors de portée du blaster.

Le droïd blessa quand même deux hommes qui tardaient à regagner leur cellule.

Vêtus en soldats, Han et Isolder suivaient le robot garde-chiourme. Déguisées en sorcières, Leia et Teneniel marchaient dans le sillage des deux hommes. Luke traînait derrière, ralenti par la fatigue. Teneniel le prit par la main et le tira.

Le Jedi se concentra du mieux qu’il pouvait. Ils approchaient de la tour des sorcières. Skywalker les sentait, juste devant eux.

Une fois les prisonniers parqués dans leurs cellules, les couloirs devenaient d’un calme mortel.

Le droïd se laissa dépasser sans commentaire. Ils traversèrent des couloirs et des halls déserts, seul le bruit de leurs pas déchirant le silence.

Alors qu’ils passaient devant une série de cellules, Leia se figea.

— Un instant… Je sens… (Elle approcha d’une porte et regarda par le judas.) Je connais cette femme. Elle est d’Alderaan. C’était la conseillère en armement de mon père.

— Avance, souffla Luke. Nous ne pouvons rien pour elle…

— On la disait morte ! Son vaisseau s’était écrasé…

— Avance, répéta le Jedi, plus gentiment.

Ils arrivèrent devant une porte à verrouillage électronique. Derrière un hublot, on voyait une autre porte.

Han avisa le clavier où composer le code d’ouverture. Sans hésiter, il saisit quatre chiffres au hasard. Un voyant rouge l’informa que ça n’était pas la bonne combinaison.

— Arrête ! cria Luke. Laisse-moi d’abord essayer.

Il approcha, posa les doigts sur le clavier et ferma les yeux. Des dizaines de soldats composaient quotidiennement le code. Très vite, Luke sentit sur quelles touches ils appuyaient le plus souvent. L’ordre était plus difficile à reconstituer.

Hésitant, il se fia autant à la chance qu’à son pouvoir. Une lumière verte salua son triomphe.

La porte s’ouvrit. Skywalker la franchit et écrasa un gros bouton pour ouvrir la seconde.

Un ascenseur !

— Venez !

Leia, Han et le prince obéirent ; Teneniel s’immobilisa.

— Ne crains rien, murmura Luke. C’est un ascenseur. Il nous mènera au chemin de ronde qui conduit à la tour.

Quand la cabine atteignit la fin de sa course, la porte s’ouvrit sur une grande baie vitrée enchâssée dans le mur de la prison. Le verre était si transparent, si parfait, qu’on voyait les étoiles briller dans le ciel. Dehors, en contrebas, des Sœurs de la Nuit marchaient sous une vive lumière artificielle.

Skywalker frémit. Il sentait les adeptes du Côté Obscur comme si elles avaient été à deux pas de lui. Isolder et Han se remirent en marche, longeant la baie.

Teneniel semblait paralysée.

— Maîtrise-toi, la conjura Luke. Laisse le calme t’envahir. Puise ton courage dans la Force, qui t’enveloppe comme un manteau. Pour avoir les pièces, nous devrons passer près de ces femmes. La Force peut te dissimuler à leurs regards.

Au bout de la baie, une porte s’ouvrit. Quatre sorcières en robe noire avancèrent vers eux. Celle qui ouvrait la marche avait les mains croisées sur le ventre.

Luke inspira profondément et laissa la Force le submerger.

Han et Isolder prirent la tête du petit groupe. Les Sœurs de la Nuit croisèrent leurs ennemis.

Une fois qu’elles furent passées, une se retourna.

Skywalker capta l’envie de courir à toutes jambes qui saisit Teneniel.

— Hé, vous ! cria la sorcière. Que faites-vous si tard à la prison ?

Se retournant, Han parla dans le microphone de son casque :

— Des problèmes dans le bloc C.

La sorcière hocha la tête et fit mine de s’éloigner. Au dernier moment, elle se ravisa.

— Quels problèmes ? Pourquoi ne m’a-t-on rien dit ?

— Une rixe entre détenus, répondit Han. On ne voulait pas vous déranger.

La Sœur de la Nuit rabattit sa capuche. Sous l’éclairage cru, ce que vit Luke le fit frémir d’horreur.

Les cheveux blancs de la femme étaient emmêlés. Ses yeux ressemblaient à deux boules rouges. Son visage, abomination suprême, n’avait plus rien d’humain. Constellé de vaisseaux éclatés, il ressemblait à une bouillie carmin.

— Je sens ta peur, dit la Sœur de la Nuit à Teneniel. Que peux-tu craindre dans notre domaine ?

Han s’interposa entre la sorcière et leur compagne.

— Avec tant de gardes absents, des rumeurs courent au sujet d’une émeute. J’ai peur qu’elles charrient une part de vérité…

La sorcière acquiesça. Luke sentit qu’elle essayait de les sonder ; il faillit dégainer son blaster, puis changea d’avis, invoquant la Force pour endormir la méfiance de la femme.

— J’irai faire un tour dans le bloc C. Ma présence devrait calmer le jeu. Merci de m’avoir prévenue.

La sorcière remonta sa capuche et repartit vers l’ascenseur.

Han guida ses compagnons dans la tour. Poussant une porte, il pénétra dans une sorte de salle commune.

Une dizaine de Sœurs de la Nuit en robe noire étaient étendues sur des coussins. Fascinées, elles regardaient flotter dans l’air des images d’hommes et de femmes superbes tout en se gavant d’étranges biscuits jaunâtres. Elles ne levèrent même pas les yeux.

Han marcha jusqu’à un ascenseur. Le commando y entra en bon ordre.

— La Sœur de la Nuit… C’était Gethzerion… balbutia Teneniel. Je suis sûre qu’elle m’a reconnue.

Luke fixait la porte de la cabine. Soudain, il eut l’impression d’être très haut dans les airs en train de contempler Dathomir.

La planète était noire et gelée. Plus rien ne vivait. Les hommes, les bêtes, les plantes…

Il ferma les yeux, pensant que la fatigue affectait sa vue. Mais l’image ne s’effaça pas ; un désespoir absolu s’empara de lui. Il aurait voulu crier.

L’avenir. Voilà ce qu’il venait de voir…

— Luke ? demanda Leia, que se passe-t-il ?

— Nous ne devons pas partir… Nous ne pouvons pas partir ! Pas de cette manière…

— Que veux-tu dire ? demanda Isolder.

Solo fit chorus.

— Ouais, qu’est-ce que ça signifie ? Nous allons partir, et vite !

— Non. (Il retira son casque et tenta de reprendre sa respiration.) Sur Dathomir, tout est mauvais. Il y a trop d’obscurité…

Il la sentait approcher. Le froid de la mort s’insinuait en lui.

— Reviens sur terre, Luke, le secoua Solo. Nous sommes là pour récupérer des pièces détachées. Le Faucon réparé, on lèvera le camp. Dès notre retour sur Coruscant, on pourra envoyer une flotte. Tu auras un million d’hommes, si nécessaire. On ne lésinera pas.

— Non, affirma Luke, nous ne pouvons pas partir.

Il était terrorisé, et il n’avait pas l’ombre d’un plan.

Impossible de poursuivre les sorcières pour les attaquer. Un affrontement aurait signifié leur perte.

— Luke, écoute ce que dit Solo, lui conseilla Isolder. Ces gens sont coincés ici depuis des années. Ils n’ont pas besoin qu’on sacrifie nos vies pour eux. Pour être sauvés, ils peuvent attendre notre retour.

Peu à peu, le Jedi retrouvait sa lucidité.

— Non, ils ne peuvent pas attendre. Observe, et tu comprendras. Crois-moi, Isolder, les forces de l’obscurité seront bientôt au complet. La flotte hapienne arrive dans six jours, dis-tu ? Si nous ne faisons rien, elle trouvera une planète morte.

Han secoua la tête, songeur.

— Luke, vieux frère, ce n’est pas le moment de craquer. Je sais que tu subis une sacrée pression, et je sympathise, tu peux me croire. Mais si tu continues à effrayer nos amis, je vais être obligé de sévir. Compris ?

Luke ne pouvait donner tort à son ami…

Quand la cabine s’immobilisa, il appuya sur un bouton.

Les portes s’ouvrirent.

— Voilà l’entrepôt de Gethzerion, Han. N’hésite pas à te servir.

Leia écarquilla les yeux. Il y avait là les épaves d’au moins trente navires : des transports, des chasseurs Tie, des frégates…

Han examina l’étrange cimetière et roula des yeux ronds comme des billes. Au centre de la pièce, illuminés par des projecteurs, se trouvaient un chasseur Tie et un petit transport qui ressemblait beaucoup au Faucon.

Ses capteurs avant étaient orange, ce qui se mariait à merveille à la coque olive et aux réacteurs arrière bleus. Des marques de soudures témoignaient de l’imagination du concepteur de la nef.

— Elles ne sont pas loin d’avoir un vaisseau ! s’étrangla le Corellien. (Il ôta son casque pour mieux voir.) On dirait qu’il ne leur manque plus grand-chose.

— C’est trop beau pour être vrai… murmura Leia.

— A leur époque, ces petits transports corelliens étaient les vaisseaux les plus populaires de la galaxie, expliqua Han. Il n’existe toujours pas de modèle plus résistant.

Isolder retira également son casque.

— Tu veux dire plus mal équilibré et bruyant ?

— C’est la même chose ! triompha Han.

Il s’engagea sur la rampe d’embarquement.

— Attends ! cria Leia.

Le Corellien se retourna.

— Ces vaisseaux sont gardés sous terre, illuminés comme des œuvres d’art… Tu ne trouves pas bizarre l’absence de sentinelles ?

— A quoi bon en mettre ? objecta Han. Ces navires ne peuvent pas voler. Et puis tu as vu la colonne, tout à l’heure ! Cet endroit est à court de personnel, très chère.

— Et les alarmes ? demanda Luke. (Il scruta l’entrepôt avec ses macrojumelles.) Je ne vois pas de lasers, mais ça ne veut rien dire. Il peut y avoir des détecteurs de mouvements, des visualiseurs de champs magnétiques… Dans ce fouillis, on pourrait chercher pendant des jours…

— Alors on se croise les bras ? protesta Han. Il faut voir ce que ce vaisseau a dans le ventre, Luke.

— Il a raison… lâcha Leia à contrecœur.

Tous s’engagèrent sur la rampe d’embarquement. Hélas, le sas du navire était verrouillé.

Solo considéra d’un air morne le clavier du boîtier de commande.

— Si je voulais protéger ce navire, c’est là que je mettrais une alarme. Si quelqu’un compose la mauvaise séquence… Branle-bas de combat !

— Quelle est la bonne séquence ? voulut savoir Teneniel.

Luke laissa courir ses doigts sur le clavier. Personne ne l’avait touché depuis longtemps.

Il ne sentit rien.

— Je nage, avoua Han. Chaque capitaine a son code… Bien entendu, les autorités des spatioports peuvent passer outre. Regardez, ce sont les visas…

Il désigna une colonne de caractères. Des pictogrammes raffinés côtoyaient des encoches faites à la pointe du couteau.

— Le propriétaire de ce vaisseau a beaucoup bourlingué dans les systèmes chokien, viridien et zi’dek. Au temps de l’ancienne République, je connaissais certains codes. Manque de chance, les Impériaux les ont changés. J’ai abandonné trop vite la contrebande…

Isolder approcha et saisit d’une main sûre une séquence de chiffres.

Le hayon s’ouvrit.

— Le code de l’Empire Chokien, annonça-t-il, tout sourire.

Han ne cacha pas sa surprise.

— Tu t’es promené dans ce système malgré leur foutue peste ?

— Je connaissais une fille dans le coin…

— Ce devait être un sacré bon plan, marmonna Leia.

Han entra dans le vaisseau.

— Je vais m’assurer que ces pièces sont dignes d’être volées. Isolder, Leia, dégottez des outils et démontez les capteurs des senseurs. Ensuite, attaquez-vous aux générateurs. Luke, trouve quelques bidons, qu’on puisse récupérer le réfrigérant.

Quand les autres furent entrés dans le navire, Skywalker resta seul avec Teneniel.

— Ça va prendre un moment… Ouvre l’œil, tout ça ne me dit rien qui vaille.

 

Leia et Isolder trouvèrent des outils dans le vaisseau et démontèrent la batterie de capteurs. Luke dénicha des conteneurs au fond du hangar, et entreprit d’en faire rouler un jusqu’au transport corellien.

Teneniel lança des sorts pour améliorer ses sens, mais ça ne lui servit pas à grand-chose, car, inconsciemment, elle avait déjà mobilisé la Force pour ce faire. Ainsi, elle entendait avec une acuité presque gênante tout ce que faisaient ses compagnons.

Fuyant les exclamations de Solo, la jeune sorcière s’éloigna du navire tandis que Luke arrivait avec son conteneur, qu’il poussa dans le vaisseau.

— Reste à me procurer une pompe manuelle, marmonna-t-il.

A l’écart du raffut, Teneniel estima qu’elle remplirait mieux son rôle de sentinelle. Néanmoins, elle regretta de ne pas avoir avec elle un fusil-blaster qui lui eût communiqué un meilleur sentiment de sécurité.

Pour mieux voir, elle décida de monter sur le toit d’un transport qui tenait plus du tas de boue que du navire. Trouvant des prises, elle se hissa à la force des bras et des jambes.

Soudain, elle crut entendre un bruit de voix…

Elle inspecta le hangar à la faible lumière des projecteurs illuminant les deux navires en réparation.

Ne voyant rien, elle continua son ascension.

Arrivée à destination, elle eut pour la première fois une vue d’ensemble de la salle. Au fond du hangar, côté nord, une porte ouverte laissait passer la lumière lunaire.

Teneniel frissonna. Ce décor lui rappelait cruellement la Salle des Guerrières, où elle était entrée juste après la mort de sa mère.

La même angoisse, le même vide régnaient dans le hangar.

Son regard perçant les ombres, elle crut voir des silhouettes bouger dans le noir.

Lançant un sort de détection, elle blêmit. Elle sentait ses ennemies. Ces monstres approchaient…

Elle écarquilla les yeux, tendit l’oreille… Mais ses sens étaient comme brouillés.

Sans transition, sa vision s’éclaircit.

Baritha était au pied du transport, trois autres Sœurs de la Nuit à ses côtés. L’une entonna une incantation, le pouce et l’index se rapprochant pour serrer quelque chose.

Teneniel manqua s’étouffer. Des doigts invisibles lui écrasaient la trachée artère.

— Bienvenue, sœur Teneniel, souffla Baritha. Il a suffi que nous tendions un piège pour que vous y tombiez. Mais que fais-tu là ? En avais-tu assez de tes montagnes ?

La jeune sorcière luttait pour respirer. Le sang battait à ses tempes, et ses poumons brûlaient. Elle voulut lancer un sort pour se défendre, mais comment s’y prendre sans air pour faire vibrer ses cordes vocales ?

— Dommage que je ne puisse pas te laisser vivre encore un peu, regretta Baritha. Gethzerion aurait adoré te torturer…

Elle fit un signe de la main ; l’autre sorcière se mit à chanter plus fort.

Si près de la mort, Teneniel se souvint des mots de Luke : « Laisse la Force te submerger… »

Comme elle ne pouvait pas chanter, les Sœurs de la Nuit la croyaient impuissante. Essayant de se calmer, la jeune femme implora la Force de libérer sa trachée de la pression. Sous elle, le transport en ruine se mit à vibrer, la secouant comme un rancor effrayé. Elle tomba à genoux.

La Force restait sourde à son appel. Elle n’était nulle part… Avant de mourir, Teneniel la solitaire voulut pousser un cri de révolte.

Aucun son ne sortit de ses lèvres. Elle sombra dans le néant comme sa mère l’avait fait longtemps avant elle.

 

Luke entendit le cri de Teneniel résonner à l’intérieur de son crâne. Hurlant à Han de le suivre, il abandonna la pompe manuelle et se rua hors du navire.

A une trentaine de mètres, il aperçut les Sœurs de la Nuit drapées dans leurs robes noires. D’un coup d’œil, il comprit que Teneniel était en grand danger.

— Arrêtez ! cria-t-il. Laissez-la !

Recourant à la Force, il libéra sa nouvelle amie de l’étreinte de la sorcière.

— Quoi ? s’étonna Baritha. Un minable petit homme prétend nous donner des ordres ?

Elle fit face au Jedi.

— Va-t’en, lui cria-t-il. Dis à Gethzerion de partir et d’emmener ses sœurs. Qu’elle libère aussi ses esclaves !

— Sinon, que se passera-t-il, étranger ? Tu nous aspergeras de sang quand ta pauvre tête éclatera comme une noix ? Ignores-tu qui nous sommes ?

— Sois assurée que non ! J’ai triomphé de vos semblables sur bien d’autres mondes…

Derrière Baritha, deux de ses compagnes se mirent à chanter. Les contours de leurs silhouettes se troublèrent.

Luke comprit qu’elles tentaient d’altérer ses perceptions.

— Vous ne pouvez pas vous cacher de moi ! tonna-t-il. Où que vous alliez, je vous traquerai. Votre seule chance de survivre est de battre en retraite sur-le-champ.

— Tu mens ! cracha Baritha en rabattant sa capuche. Artha, Artha !

Skywalker dégaina son blaster et tira. Arrêtant de psalmodier, Baritha dévia le trait d’énergie d’un geste, puis fit sauter l’arme des mains du Jedi.

— Tu n’es pas un jeteur de sorts ! triompha la sorcière.

Une des sœurs bondit. Luke prit son sabrolaser, l’activa et le lança en le faisant tourner sur lui-même. La sorcière tenta de saisir la garde.

Ayant prévu la manœuvre, le Jedi utilisa la Force pour inverser la rotation de l’arme. Quand la vibrolame eut tué la sorcière, il fit revenir le sabrolaser dans sa main.

Baritha et les deux survivantes reculèrent.

— Gethzerion, cria l’une, viens à notre secours !

Teneniel sauta de l’épave pour atterrir souplement à côté de Luke.

— Non ! glapit Baritha.

Elle psalmodia de nouveau. Un panneau solaire se détacha d’un chasseur Tie et s’écrasa sur la jeune femme. Sonnée, elle tomba à genoux.

Baritha chanta plus fort. Un autre panneau vola à travers le hangar.

Teneniel l’évita et défia la vieille femme du regard.

— Tu ne crois pas m’avoir avec ce vieux truc ! siffla-t-elle.

Derrière eux, les moteurs du transport corellien vrombirent. Luke se demanda s’il était raisonnable de vouloir faire voler l’appareil avec des réacteurs au minimum de leur puissance. Comment échapper aux superdestroyers qui patrouillaient dans l’espace ?

Pour l’heure, la question était académique. Le premier danger, c’était Baritha et ses acolytes.

Une antenne se désolidarisa du chasseur Tie et fonça sur Teneniel.

— Suis-moi ! cria Luke.

La jeune femme ne bougea pas et entonna un sort de défense. L’antenne, repoussée, partit dans l’autre sens. Baritha s’en sortit d’une esquive de toréador, mais la sœur qui se tenait derrière elle n’eut pas ce réflexe. Elle s’écroula.

— Sois maudite, Gethzerion, rugit Teneniel. J’en ai assez que tu nous traques, assez de devoir toujours fuir. Tu as fait trop de mal, tué trop de gens ! M’entends-tu ?

Luke regarda son amie. Elle était folle de rage, prête à tout. Les yeux pleins de larmes, le visage empourpré, elle lança un sort et un cyclone miniature commença à tourbillonner dans la pièce. Un chasseur Tie tourna sur lui-même comme une toupie. Il se dirigea vers les deux dernières sorcières, qui improvisèrent un sort de défense.

— Non ! Ne cède pas à la colère ! implora Luke. Ça n’est pas Gethzerion, tu m’entends ? Elle n’est pas là !

Teneniel se retourna, cherchant le regard du Jedi.

D’un coup, elle redevint lucide.

Han ouvrit le feu avec la batterie de blasters avant du transport. Il désintégra les épaves qui leur barraient la route.

Luke tira Teneniel jusqu’à la rampe d’embarquement.

Les deux jeunes gens s’engouffrèrent dans le vaisseau, puis refermèrent le sas avant de se précipiter sur la passerelle.

Han était seul. Luke n’entendait plus le chant des sorcières, mais il les voyait gesticuler dehors.

Solo pulvérisa la cloison du fond de l’entrepôt et tenta de faire démarrer l’appareil.

— Les moteurs sont encore plus mal en point que je le pensais, grimaça-t-il. Ce vieux clou ne décollera jamais !

Sur leur droite, d’autres silhouettes en robe noire accouraient.

— Tire-nous de là, vite !

Le Corellien empoigna le levier de commande.

— Ce foutu truc est coincé ! cria-t-il en le prenant à deux mains.

Skywalker regarda les sorcières. Toutes semblaient occupées à retenir un objet invisible.

Le navire, bien sûr !

En appelant à la Force, Skywalker tendit la main et tira sans peine le levier.

Le vaisseau jaillit hors de l’entrepôt comme un diable de sa boîte.

Les sorcières se trouvaient sur la trajectoire du jet de flammes des réacteurs.

Des traits de blaster s’écrasèrent contre les boucliers.

— Ça n’est rien, Han, fit Luke. Les sentinelles de la prison essayent de faire un carton, mais les boucliers déflecteurs tiendront.

Han mit les gaz. Sans grand résultat.

— Ce truc est un veau, râla le Corellien. Ta Seigneurie, beugla-t-il dans l’intercom, où en es-tu avec les générateurs ?

— Nulle part. Laisse-nous quelques minutes de plus…

— Puis-je te rappeler que Dathomir est une planète interdite ? ironisa Han. En ce moment même, une armada de superdestroyers doit s’apprêter à nous pulvériser.

— Solo, on fait ce qu’on peut ! s’impatienta le Hapien.

— Je m’en contrefiche ! Réussissez !

— Je vais les aider, décida Luke.

Il courut dans la coursive. Teneniel n’avait pas bougé depuis qu’ils étaient à bord.

— Je suis désolée, Luke, souffla-t-elle. Ça ne se reproduira plus…

Skywalker lui fit un signe de tête et continua son chemin. Parvenu dans la salle des machines, il découvrit Isolder, une énorme clef à la main, qui s’acharnait en vain à débloquer des boulons. Leia l’aidait de son mieux en secouant le coffrage métallique.

Le Jedi sortit son sabrolaser.

— Isolder, je vais faire sauter les boulons avec ma vibrolame. Ecarte-toi ! Leia, bouche le bidon de réfrigérant !

Les générateurs libérés de leur compartiment, Isolder et Luke les transportèrent jusqu’au sas. Ensuite, ils aidèrent Leia à faire de même avec le bidon.

— Evacuation du vaisseau ! ordonna la voix de Solo dans l’intercom.

Le message était à peine terminé qu’il rejoignait ses compagnons.

— Nous allons survoler un lac dans trente secondes. Je l’ai vu sur les écrans…

Han ouvrit le sas. La rampe sortit de son logement, entraînant avec elle les générateurs et le bidon.

Surpris, Luke constata qu’ils volaient à cinq mètres du sol. Il estima leur vitesse à soixante kilomètres à l’heure.

Il y eut un bruit sourd ; le vaisseau vibra.

— Les superdestroyers ouvrent le feu, annonça Han. Espérons que les boucliers tiendront encore vingt secondes.

Un tir de barrage secoua le transport. Isolder saisit le bloc de capteurs que Leia et lui avaient démonté. Puis il s’engagea sur la rampe.

Perdant l’équilibre, il dut lâcher son fardeau, qui suivit le chemin emprunté par le reste du matériel.

— Voilà le lac ! cria Han.

Leia, Luke et Teneniel s’apprêtèrent à sauter. Le Corellien, en bon capitaine, passa le dernier.

— On y va ! ordonna le Jedi.

Ils plongèrent dans l’eau boueuse. Remontant à la surface d’un coup de talon, Skywalker chercha ses compagnons.

Teneniel nageait près de lui. Han et Leia étaient à moins de vingt mètres. Plus loin, le prince flottait sur le dos. Leia se dirigea vers lui.

Luke leva les yeux. Ses boucliers parvenus au terme de leur résistance, le vieux vaisseau explosa en une boule de feu.

Le Jedi rejoignit la princesse et le Hapien.

S’étant mal reçu, ce dernier crachait de l’eau en toussant.

— Il a de la chance de ne pas s’être brisé le cou, commenta Leia.

Luke toucha l’épaule du jeune homme.

— Il va très bien…

Autant en marchant qu’en nageant, les cinq compagnons gagnèrent la berge. Luke sentait comme une distorsion dans la Force. Gethzerion essayait de les atteindre…

Ils étaient à moins de dix kilomètres de la prison, en terrain découvert. Même si elle avait vu exploser le navire, la sorcière sondait le terrain à la recherche de survivants.

Luke fit le vide dans son esprit. Du coin de l’œil, il vit que Teneniel luttait pour se contrôler.

Le danger passa, du moins pour l’instant…

— Eh bien, haleta Leia, ça n’était pas si difficile !

— Bien dit ! approuva Isolder, un peu remis. On devrait y retourner !

— Assez plaisanté, fit Luke. Gethzerion enverra des soldats pour chercher les survivants. Il ne faut pas qu’ils trouvent notre piste.

— Donne-moi tes macrojumelles, demanda Han.

Quand le Jedi les lui eut tendues, il scruta le ciel.

— Qu’est-ce que tu vois ? s’enquit Isolder.

— Je vérifie quelque chose… J’ai repéré un truc étrange sur les senseurs…

— Quoi donc ?

— Des satellites… Les hommes de Zsinj en ont lancé des milliers.

— Des mines orbitales ? avança le Hapien.

— Peut-être…

Leia leva les yeux.

— On les voit à l’œil nu, maintenant. Ça ne me dit rien qui vaille…

Luke frémit. Fermant les yeux, il fut de nouveau envahi par la terrible prémonition du froid éternel qui régnerait bientôt sur la planète…