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— Je me demande vraiment pourquoi je t’ai donné rendez-vous, dit Han à C-3P0.

Il occupait une table de la Cantina la plus cotée de Coruscant. C’était un endroit tranquille. Une bonne aération, des couples ondulant sur la piste au son des flûtes à bec de Ludurian…

Chewie releva les yeux de son verre et grogna. Le Wookiee n’ignorait pas que son ami mentait. Lui savait pourquoi Solo voulait voir le droïd-protocole.

C-3P0 dévisagea le Corellien. Son processeur lui ordonna de pousser plus loin ses investigations.

— Peut-être puis-je vous aider, général ?

— Eh bien… Ces derniers jours, tu as été beaucoup plus proche de Leia que moi… Elle ne m’a pas vraiment à la bonne, si tu vois ce que je veux dire, et elle passe le plus clair de son temps avec ce satané prince… Après l’attentat de ce matin, ils sont tellement entourés de gardes du corps qu’on peut à peine les apercevoir. Pour finir, Leia m’a laissé un message holo disant qu’elle part pour Hapes.

C-3P0 réfléchit aux propos de Han pendant exactement trois secondes et douze dixièmes, un record pour lui. La matière étant délicate, il n’entendait pas passer à côté d’un de ces sous-entendus dont les humains raffolaient.

— Je vois, dit-il enfin, vous avez avec elle un problème d’ordre diplomatique.

C-3P0 était sans doute le traducteur le mieux programmé de l’univers. Ceci posé, ses amis de chair et de sang faisaient rarement appel à ses talents pour résoudre leurs problèmes sentimentaux. Pas né de la dernière usine, le droïd sentit que le général plaçait en lui une confiance inhabituelle. C’était l’occasion ou jamais de faire ses preuves.

— Général, vous avez choisi le bon droïd ! Comment puis-je vous aider ?

— Je ne sais pas trop… Tu les as beaucoup vus. Tu sais ce que c’est, hein ? Je me demandais s’ils sont si près l’un de l’autre que ça.

C-3P0 consulta immédiatement sa mémoire visuelle, recensant toutes les occasions où les deux jeunes gens s’étaient retrouvés de concert devant ses microcaméras. Ils avaient dîné ensemble trois jours de suite ; durant plusieurs réunions de travail, ils s’étaient entretenus du meilleur moyen de régler le conflit entre les Verpine et les Barabels. La veille, ils étaient allés à une réception où l’on avait dansé…

— Général, le premier jour, le prince maintenait une distance moyenne de cinquante-six centimètres entre lui et l’ambassadrice Organa. De toute évidence, cet intervalle diminue d’heure en heure. On peut donc dire qu’ils sont « si près que ça ».

— Jusqu’à quel point ? demanda Han.

— Si nous analysons les huit dernières heures, ils ont été en contact physique pendant près de quatre-vingt-six pour cent de leur temps. (Les capteurs optiques du droïd enregistrèrent la nouvelle couleur des joues de Solo. De blêmes, elles avaient viré au pourpre.) Je suis désolé que ces nouvelles vous perturbent…

Han vida un verre de rhum corellien. Sachant que c’était le deuxième en moins de dix minutes, C-3P0 fit une rapide règle de trois et conclut que le général, attendu son poids et le degré d’alcool du breuvage, en avait un bon coup dans l’aile. Néanmoins, le seul symptôme, pour l’instant, était un léger ralentissement de son débit de paroles.

Han posa une main sur l’avant-bras doré du droïd.

— Tu es une super unité protocole, C-3P0, marmonna-t-il. Il n’y en a pas une autre au monde que j’aime comme toi, tu peux me croire. Dis-moi, que ferais-tu si un foutu droïdo-prince voulait te piquer la mère de tes futurs enfants ?

Les senseurs de C-3P0 calculèrent le taux d’alcool de l’haleine du Corellien. Prudent, le droïd se pencha en arrière pour protéger ses processeurs de l’effet corrosif.

— La première mesure que je prendrais, pontifia-t-il, serait d’évaluer la partie adverse pour déterminer ce que j’ai à offrir qu’elle n’a pas. N’importe quel psycho-droïd vous conseillerait la même chose.

— Mouais… grogna Solo. Qu’ai-je donc à offrir à Leia qui ferait défaut à Isolder ?

— Voyons un peu… souffla le droïd. Le prince est riche, généreux, bien éduqué, et – selon les critères humains – très séduisant. Ce portrait établi, voyons ce qui lui manque par rapport à vous…

C-3P0 fouilla dans ses fichiers, menaçant de surchauffe ses circuits intégrés.

— Fichtre ! s’exclama-t-il quand il eut fini. Je vois votre problème. Eh bien, il nous reste toujours les bons vieux sentiments… Je suis sûr que Leia ne vous oubliera pas sous prétexte qu’elle a trouvé un meilleur soupirant.

— Je l’aime, gémit Han, je l’aime plus que ma vie, plus que mon propre souffle. Quand elle me touche, je me sens comme… Bon sang, je ne sais pas dire ces trucs-là !

— En avez-vous informé la princesse ?

— Evidemment que non, soupira Solo, puisque je ne sais pas les exprimer. Tu es un psycho-droïd. (Il se servit un autre rhum.) Saurais-tu comment on communique ce genre de choses ? Tu connais peut-être une chanson, ou un poème ?

— Bien entendu ! J’ai en mémoire les chefs-d’œuvre de plus de cinq millions de cultures. Voilà un de mes favoris, un chant tchuukthai :

« Shah rupah shantenar

shan erah pathar

thulap enarpa

 

Uta, emarrah spar tane

arratha urr thur shaparrah

Uta, Uta sahvarahhn

harahh sahvarauul e thutha

res tarra hah durrr… »

Han avait écouté la douce musique des syllabes, apprécié la mélodie des harmoniques, goûté la subtilité des accents toniques…

— Très joli, admit-il. Et ça veut dire quoi ?

C-3P0 traduisit aussi fidèlement que possible :

« Quand le soir tombe sur la plaine

Je reviens vers ma tanière

Un rat de Thula dans la gueule.

 

Alors je sens ta douce empreinte

Laissée sur les os par tes tendres mâchoires.

Les ailerons de ma tête frémissent

Et ma queue balance majestueusement

Tandis que mon chant d’amour

Retentit dans la nuit glacée… »

Chewie poussa un long hurlement modulé.

— Merci, C-3P0, soupira Solo. Tu peux t’arrêter, j’ai compris le principe…

— Il y a quatre-vingt-huit autres couplets, annonça C-3P0. C’est une ode magnifique. Les cinq cents vers sont tous plus beaux les uns que les autres !

— Super, super… Merci, grommela Han, toujours aussi désespéré.

Il regardait quatre consommateurs assis à une table voisine. C-3P0 comprit que le Corellien n’avait pas écouté un mot de sa déclaration. Tout ce qui l’intéressait, c’était la conversation des deux couples.

Le droïd rembobina sa bande audio intégrée et repassa les dernières minutes d’enregistrement en isolant les voix des quatre jeunes gens :

Première femme : Regardez, c’est le général Solo !

Deuxième femme : Oui, mais qu’est-ce qu’il a mauvaise mine. Vous avez vu les valises, sous ses yeux ?

Premier homme : Et ses habits ? On dirait un clodo !

Deuxième femme : C’est à se demander ce que lui trouve la princesse Leia !

Première femme : Le prince Isolder, voilà un homme ! En ville, des tas de marchands ambulants vendent des posters de lui. Ça part comme des petits pains…

Deuxième homme : Pour sûr ! J’en ai même offert un à ma sœur.

Premier homme : Moi, je préférerais une photo de ses gardes du corps…

Première femme : Avec le corps qu’il a, je tuerais pour le garder à leur place.

Deuxième femme : Très peu pour moi ! J’aimerais mieux être sa masseuse… Tu imagines, manipuler chaque jour ses superbes muscles ?

 

Han tapa du poing sur la table.

— Bon, C-3P0, finissons-en ! Veux-tu bien garder un œil sur Leia pour moi ? Si elle te demande de mes nouvelles, dis-lui qu’elle me manque. Marché conclu ?

C-3P0 mémorisa la consigne.

— Comme vous voudrez, général, fit-il avant de se lever pour quitter la Cantina.

Chewie grogna un au revoir affectueux au droïd-protocole devenu l’espion de Solo.

Dans les rues de Coruscant, C-3P0 partit d’un pas décidé. Il avait entendu parler d’un ordinateur central connu pour sa langue de concierge. A coup sûr, un processeur bavard confierait volontiers à un droïd les secrets qu’il eût scellés à une forme de vie biologique.

Han avait besoin d’un conseiller sentimental. Eh bien, il allait voir ce qu’il allait voir !

 

Threkin Horm s’était mis sur son trente-et-un. Une longue tunique verte, un pantalon blanc, les cheveux mis en plis pour que des bouclettes viennent mourir sur ses oreilles, il semblait même un peu moins gros qu’à l’accoutumée.

Leia eut besoin d’un moment pour comprendre que l’absence de sa chaise expliquait cette illusion d’optique.

Le président du Conseil trônait sur son estrade.

— Comme vous le savez, j’ai organisé cette session extraordinaire pour que nous discutions du mariage de la princesse Leia avec Isolder, le Chume’da de Hapes.

L’assistance applaudit. Avec ses murs couverts de tentures et ses fauteuils couleur prune, la salle du Conseil pouvait contenir près de deux mille personnes. Pour l’heure, une centaine de conseillers étaient présents. Le reste des sièges faisaient la joie d’une foule de curieux. Au fond de la salle, des dizaines de médiadroïds brillaient de tous leurs chromes.

Leia avait une place réservée dans la première rangée de fauteuils, à quelques mètres de l’estrade. Ces derniers jours, sa vie avait fait la une un peu partout. La tentative d’assassinat du matin, filmée sous vingt angles différents, passait sans discontinuer sur toutes les chaînes. Quelques heures plus tôt, les services de contre-espionnage avaient fouillé l’ambassade, découvrant une multitude de micros reliés à des dizaines de canaux.

A première vue, pour le public, les attentats royaux battaient d’une courte tête les mariages et les divorces. Comme attirée par l’odeur du sang, une meute de journalistes avait fondu sur les deux jeunes gens.

Leia trouvait à la chose un seul aspect pratique : si un autre tueur l’attaquait, il lui faudrait d’abord trucider les pisse-copie et les cameramen qui formaient une haie autour d’elle.

Enfin, tout ça ne durerait pas bien longtemps.

— Honorable Threkin Horm, très chers membres du Conseil, déclara Leia en se levant, je vous remercie d’être venus, bien sûr, mais ne trouvez-vous pas tout cela un peu prématuré ? La proposition de Hapes est flatteuse, j’en suis d’accord. Cependant, je ne l’ai pas encore acceptée…

— Chère Leia, susurra Horm avec un sourire condescendant, par le passé, votre lucidité et votre prudence vous ont souvent servie. Mais dans le cas présent… (Il écarta les bras, théâtral.) J’ai vu comment le prince et vous vous regardez, et je sais que vous avez accepté de partir avec lui pendant six mois afin de visiter la Confédération hapienne. A mes yeux, c’est une idée formidable ! Cela vous permettra de mieux connaître votre futur époux. Quant à la maison royale de Hapes, elle verra à quel point votre jolie petite tête est faite pour porter une couronne. (La foule rit de la plaisante métaphore.) Mettons la chose aux voix, si ça vous chante ! Amis du Conseil, ne trouvez-vous pas que Leia et Isolder forment un beau couple ?

La plupart des politiciens professionnels firent grise mine. Les curieux, en revanche, poussèrent des cris d’approbation à en faire trembler les vitres.

Pour Leia, tout ceci tenait plus du carnaval que du débat parlementaire.

— C’est de mon mariage qu’il s’agit ! explosa-t-elle, indignée par l’audace de Horm. Isolder a conscience, comme vous devez tous l’avoir, que nous ne sommes pas fiancés. Je me rends dans la Confédération pour…

Elle se tut, comprenant soudain pourquoi le prince désirait l’emmener. Il voulait que les dignitaires de Hapes, ses futurs vassaux, puissent la jauger. Par la même occasion, elle se rapprocherait de lui, c’était évident…

Threkin Horm avait raison sur toute la ligne. Malgré ses stupides dénégations, un enfant de quatre ans aurait compris ce qui était en train de se tramer.

Leia tourna la tête pour jeter un coup d’œil à Han. Il avait l’air plus misérable que jamais.

La princesse se rassit. Se souvenant que la session était retransmise sur des dizaines de chaînes d’information, elle fit son possible pour ne pas rougir.

Elle aurait dû contredire Horm, bien entendu, ne serait-ce que pour sauver la face. Mais son cerveau refusait de fonctionner. Pour la première fois de sa vie, Leia Organa était à court de mots.

— Evidemment, que c’est de votre mariage dont il est question, concéda Horm. Il n’est pas en notre intention de vous le voler. Nous voulons simplement être prêts pour le cas où vous épouseriez Isolder.

— Conseiller Horm ? intervint une voix pointue.

Se retournant, Leia aperçut un droïd doré au fond de la salle : C-3P0 ! Dressé sur la pointe des pieds, il agitait frénétiquement les bras.

— Conseiller Horm, puis-je avoir la parole ?

— Comment ? railla Threkin. Laisser un tas de ferraille s’adresser au Conseil ?

Leia sourit intérieurement. Les défenseurs des droits des droïds allaient faire des gorges chaudes de cette remarque. C’était peut-être le premier accroc sérieux de la carrière du président Horm.

Elle se releva, ravie de jeter un peu d’huile sur le feu.

— Ça n’est peut-être qu’un droïd-protocole, mais je pense que nous devrions le laisser parler.

L’assistance non métallique réserva un accueil mitigé à cette déclaration. Dans le coin des médiadroïds, elle souleva un tonnerre d’applaudissements.

— Eh bien, balbutia Horm, je… je ne vois aucun inconvénient à… Hum, que ce tas de… cet honorable droïd vienne donc prendre ma place…

Sous les acclamations de ses semblables, C-3P0 se dirigea d’un pas lent vers l’estrade. Leia n’avait jamais vu un droïd prendre une telle initiative. Que pouvait-il bien vouloir ?

C-3P0 s’installa derrière le micro et s’adressa à la foule :

— Chers conseillers, chers citoyens d’Alderaan, je propose que cette assemblée s’occupe bel et bien de préparer un mariage : celui de la princesse Leia avec le général Solo !

— Quoi ? hurla Horm. C’est grotesque ! Solo n’est même pas de sang royal, c’est un… un…

Horm se tut, réalisant qu’il valait mieux pour lui ne pas se mettre les Corelliens à dos. Néanmoins, il haussa les épaules avec dégoût.

La foule grommelait, des insultes fusant de ci de là. Leia se demanda si elle n’avait pas fait un impair en laissant le pauvre C-3P0 monter à la tribune.

— Je dois m’élever contre l’affirmation du président, déclara le droïd doré. J’ai passé la matinée à converser avec des ordinateurs au-dessus de tout soupçon, et j’ai découvert des faits que vous me semblez trop prompts à traiter avec mépris. Il est vrai que le général Solo est le premier à les laisser dans l’ombre. Voici toute l’affaire : bien que sa planète natale soit une démocratie depuis trois siècles, Han Solo, par la naissance, est le roi légitime de Corellia.

Des cris montèrent de toute part ; les médiadroïds commencèrent à holographier Solo sous tous les angles.

La voix nasale de Horm parvint un instant à dominer le tumulte.

— Plaît-il ? Plaît-il ? Allons, allons, ça n’est pas sérieux…

Leia tourna la tête. Un bon tiers des spectateurs étaient debout, hurlant leur joie. Recroquevillé dans son siège, Han avait viré au cramoisi. A son expression, Leia crut volontiers qu’il avait laissé dans l’ombre certains détails de sa généalogie.

Les droïds protocoles étaient programmés pour ne pas mentir. Il devait y avoir quelque chose…

Han se mit une main devant les yeux et baissa la tête.

Pourquoi ne m’a-t-il jamais rien dit ? s’étonna Leia.

 

A bord du Thpffftht, le vaisseau d’un conseiller bith, Luke regardait la transmission holographique avec intérêt. Le monde moderne était incroyable. Même sur une planète perdue comme Toola, les faits et gestes de Leia et Isolder – et maintenant Han – fascinaient assez les gens pour qu’on dépense des fortunes à envoyer les images à travers l’hyperespace.

D’un certain point de vue, ça pouvait se comprendre… Leia vivait le rêve de toutes les femmes : être aimée d’un prince incroyablement riche et beau. L’attentat avait apporté le piment indispensable à une grande histoire d’amour.

En conséquence, Luke Skywalker pouvait regarder sa sœur évoluer en trois dimensions devant ses yeux alors que des centaines d’années-lumière les séparaient.

Le vaisseau bith devait sauter sous peu dans l’hyperespace. En attendant, Luke regardait le spectacle.

Les caméras étaient rivées sur Solo, qui ne savait plus où se mettre. A son côté, Chewbacca roulait des yeux comme des billes.

Un petit sourire flotta sur les lèvres de Skywalker.

Han est un roi, pensa-t-il, et ça ne m’étonne pas. J’aurais dû m’en apercevoir tout seul. Mais pourquoi n’avoir rien dit ?

Malgré le sourire, Luke était profondément troublé. Il sentait, très loin de là, s’éveiller une sombre puissance. Trop de gens, dans la galaxie, s’opposaient à l’union de Leia et d’Isolder. Luke captait leurs intentions malfaisantes.

Il pria pour que les techniciens biths aient bientôt fini leurs essais. Plus tôt ils passeraient en hyperdrive, plus vite il serait dans le système de Roche, près de Leia.

La représentation holographique de C-3P0 reprit la parole :

— C’est comme je vous le dis, mes amis ! Han est l’héritier du trône. Son arbre généalogique indique que sa lignée paternelle a pour source Berethon e Solo, qui introduisit la démocratie dans l’empire corellien. Il est facile de suivre les ramifications jusqu’à Korol Solo, six générations plus tard. Hélas, les archives de cette époque furent détruites durant les Guerres Cloniques, brisant la continuité de l’arbre généalogique.

« Mais nous savons que Korol Solo se maria et eut un fils qui naquit sur la planète Duro. A cause de la guerre, le garçon ne revint jamais sur son monde natal. Il se nommait Dalla Solo, mais changea pour Dalla Suul afin de dérouter d’éventuels poursuivants. Son premier fils fut baptisé Jonash Suul. Ce dernier eut à son tour un fils, qu’il nomma Han Suul.

« Le jeune homme reprit son patronyme original : Solo. A l’évidence, notre général est parfaitement conscient d’être de sang royal. Pour des raisons qui me dépassent, il a déployé des efforts surhumains afin de brouiller les pistes…

La foule murmura de plus belle, et Threkin Horm s’égosilla pour tenter de rétablir l’ordre.

Alors Solo se leva et quitta la salle, la tête enfoncée dans les épaules. Leia se retourna pour le regarder partir. Impressionnée, la foule fit silence.

Horm en profita pour tonner :

— Ce Dalla Suul, n’était-il pas également connu sous le nom de Dalla le Noir, le tristement célèbre meurtrier ?

— Eh bien oui, admit C-3P0, mais les livres d’Histoire le décrivent plutôt comme un kidnappeur et un pirate…

— Mes amis, cria Threkin, quelle noble lignée que celle-là ! Dalla Suul était une des chevilles ouvrières du crime organisé. Qui peut attendre que des gens sensés prennent au sérieux les prétentions aristocratiques de Solo ?

— Président, objecta C-3P0, étant un droïd ignorant, je dois avouer ne pas comprendre en quoi les agissements de ses ancêtres augmentent ou diminuent la respectabilité d’un individu. De tels concepts dépassent les possibilités d’analyse d’un modèle AA-1 d’unité protocole. Mais puisque la fille illégitime de Dalla Suul était votre mère, je suppose que vous parlez en connaissance de cause.

Horm blêmit ; ses mains se mirent à trembler.

La retransmission cessa. Un médiadroïd accoucha aussitôt d’un commentaire aussi brillant qu’improvisé. Allergique au bavardage, Luke désactiva l’holonet.

En quelques générations, la lignée de Han était passée du sang bleu au gangstérisme. Pas étonnant qu’il ne se soit jamais étendu sur le sujet.

Ça expliquait aussi pourquoi il était sorti de la salle avant que C-3P0 ait terminé son exposé généalogique.

Pauvre Han…