Le miroir.
Un épagneul aux oreilles soyeuses, dont les origines remontaient à Charles II, jeta par hasard un coup d’œil dans un miroir qui se trouvait contre un lambris, dans une pièce du rez-de-chaussée de la maison de sa maîtresse. Voyant son reflet, il pensa qu’il s’agissait d’un autre chien au-dehors, et dit :
« Holà, je ne vais faire qu’une bouchée de ce blanc-bec de jeune chiot ! »
Aussitôt, il se précipita à l’extérieur et tourna le coin de la maison, vers l’endroit où il pensait que se trouvait l’ennemi. Or, au même moment, un bouledogue s’était arrêté sur le trottoir pour exposer ses canines au soleil. L’épagneul s’arrêta court, saisi par une profonde consternation et, après avoir observé un moment le bouledogue à partir d’une raisonnable distance, il dit :
« Je ne sais si vous êtes ami de la paix ou si votre bannière est déployée pour la bataille, ou si votre chant est un chant de guerre. Si vous êtes pacifique, les fenêtres de cette maison font de vous un portrait flatteur digne d’une publication, mais si vous êtes un valeureux soldat, elles vous font une grave injustice. »
Ce discours étant inintelligible pour le bouledogue, il se contenta de sourire, ce qui plongea l’épagneul dans une telle terreur qu’il en mourut sur le coup.