L’humble paysan.
Un conseiller que le Président avait chassé hors de Washington baignait de ses larmes la route qui le ramenait chez lui.
« Ah, disait-il, l’ambition est une chose bien désastreuse ! Ses récompenses sont bien maigres, ses déceptions sont terribles ! Alors que je vois là-bas ce paysan qui cultive son champ dans la quiétude et le bonheur ! Il se lève avec l’alouette, passe la journée entière à son travail et se couche à la nuit pour ne connaître que de plaisants rêves. Il est à cent lieues de la folle ruée pour une place et du pouvoir ; le rugissement de la lutte ne touche son oreille que comme le lointain murmure de l’océan. Homme heureux ! Homme trois fois heureux ! Je vais l’approcher et me chauffer au soleil de son humble félicité, paysan, je te salue ! »
S’appuyant sur son râteau, le paysan retourna le salut d’un signe de tête, mais ne dit rien.
« Mon ami, dit le conseiller, vous avez devant vous ce qui reste d’un homme ambitieux – ruiné par la poursuite de postes et de pouvoirs. Ce matin, quand j’ai quitté la capitale de la nation…»
« Étranger, l’interrompit le paysan, si vous y retournez prochainement, vous pourriez peut-être user de votre influence pour me faire obtenir le poste de receveur du courrier à Smith’s Corners ? »
Le voyageur passa son chemin.