Staline n’est plus
Chapitre 1. Coup d’œil par-dessus l’épaule
Nous attendions la vérité pour après notre mort. – Un bref entrebâillement. – Après Ivan Dénissovitch. L’invraisemblable explosion de la presse. Une explosion de lettres. – Ce qu’écrivent nos ennemis. – Un abîme d’incompréhension. Nous cessons d’être un seul peuple.
On cherche à dissimuler la brèche. « Gloire au Parti ! » – Comment on s’y prend pour substituer un faux Archipel au vrai. – Maudit soit l’impérialisme international ! – Les réunions secrètes du Parti tenues par les orthodoxes. – Mais est-il admissible qu’on se batte contre les autorités ? – Comment faire pour que les Bien-pensants sauvent leur peau aux dépens des autres. – « Pourquoi Choukhov ne se battait-il pas ? » – Les communistes ou le simple Ivan ? – Les fables de la presse communiste. – Celles des écrivains soviétiques. – Comme ils sont bien, les camps d’aujourd’hui. – La consigne est : plus un mot sur les camps.
Khrouchtchov et Tvardovski croyaient qu’Ivan Dénissovitch parlait du passé. – Mais moi aussi je l’ai cru ! – Si grande que soit notre part d’épreuves, elle ne nous suffit pas. – Lettres de zeks d’aujourd’hui. – Et les contours de l’Archipel se dessinent à nouveau. – Toutes les lignes de force de notre société vont vers la tyrannie. – Comment les zeks ont lu un livre « approuvé par le parti ». – Même chose dans le monde entourant les camps. – Histoire de la sculpture de Nédov.
Pas de pardon pour les assassins fascistes ! – mais nous ne savions pas, nous ne comprenions pas… – Et ce ne sont pas les commissaires-instructeurs qui sont coupables, mais les détenus eux-mêmes. – Un court moment d’inquiétude. – Comment les guébistes se débrouillent pour tirer jusqu’à la retraite. – On expurge les archives. – Même morts, nous vous faisons trembler ! – « Il est temps de rétablir la notion d’ennemi du peuple. »
Chapitre 2. Les gouvernants passent, l’Archipel demeure
Les Camps spéciaux étaient parmi les enfants chéris de Staline. – Leur affaiblissement après la mort de Staline et la chute de Béria. – Les fonctionnaires du MVD demandent qu’on ne les appelle pas « bérianistes ». – Mesures pour ressusciter « l’initiative au service de la collectivité » ; mais le terrain n’est plus le même. – La résidence hors-zone. – Les commissions de délestage. – L’Archipel et le personnel du MVD au bord du gouffre.
Comment aurait dû se présenter une authentique libération des zeks. – À qui était-ce de demander pardon ? – Reconnaître sa faute est le prix à payer pour être libéré. L’ère de la liberté arrive en toge de procureur. – 1955 et 1956, années fatidiques dans la vie de l’Archipel. – N’était-ce pas le moment de le liquider ? – À quoi Khrouchtchov a utilisé son pouvoir. – La contre-attaque des Agents d’exécution. – Khrouchtchov renforce les camps entre le xxe et le xxiie Congrès.
Notre histoire est arrivée à son terme. – Nouveaux témoins de l’époque post-khrouchtchovienne. – La centrale de Vladimir sous le tsar et sous les soviets. – On retrouve les « colonies » et le Gouitk. – Les quatre régimes de détention. – On n’en a rien à foutre, de votre bonne conduite ! – But de la réforme de 1961 : rendre le zek à nouveau maniable. – De quoi vous faire rester en travers de la gorge le peu que vous recevez. – Les détenus rêvent de pain. – Colis postaux, suppléments apportés par les visites, argent reçu ou gagné, cantine sont soumis à l’arbitraire des patrons des camps. – La norme alimentaire des années Soixante. Tout le monde a faim. – Le Régime-Magicien. – Le régime spécial, à rayures. – C’est devenu moins dur pour les Agents d’exécution. – Se dévouer dans les camps pour la collectivité (service de « chienne »). – L’initiative originale de Vania Alexeïev. – Séances d’éducation politique, radio, écoles. – Séparation des sexes. – Les commissions de surveillance et l’expérience de Galina Filippova. – Les « éducateurs » des camps vus par eux-mêmes et par les détenus. – Croyez les journaux.
Je me rends dans différentes instances en démarcheur pour l’Archipel. – Comme je suis ligoté. – Entretien au siège de la commission du Soviet Suprême. – Entretien avec le ministre de l’Intérieur. – À l’Institut d’étude des causes de la criminalité. – Des réponses sincères.
Chapitre 3. La loi aujourd’hui
Il n’y a jamais eu de condamnés politiques, à plus forte raison n’y en a-t-il pas aujourd’hui… – L’émeute de Novotcherkassk, 1er-2 juin 1962. – Suicide d’un officier. – On tire sur la foule à balles explosives. – Les phases de la répression. – Les manœuvres du Politburo. – Les châtiments qui suivirent. – Troubles à Alexandrov et à Mourom. – Les désordres provoqués par des mouvements de foule ne doivent pas être considérés comme relevant du domaine de la politique. – « Dialogue » avec l’Église au moyen de chalumeaux et de tracteurs. – Un procès de baptistes à Nikitovka, en 1964. – Leurs bilans chiffrés des persécutions. – En dépit de la loi, les peines de vingt-cinq ans n’ont pas été annulées. – Les filleuls de Staline finissent de tirer leur temps. – Quand la gauche occidentale comprendra tout…
On ratisse toujours, mais en utilisant des articles de droit commun. – L’affaire Smélov. – L’affaire M. Potapov. – La grosse masse obtuse de la Loi est infaillible. Pas d’acquittements, pas de révisions. – Petit tableau du tribunal de la province de Riazan. – Le procédé de « l’accrochage » : le sac de délits passé au cou d’un innocent. – La mort d’Ivan Bryksine. – Le décret contre les parasites. – On ne nous promet plus que les crimes vont disparaître. – Notre Loi a un effet rétroactif. – Compte rendu du procès avant qu’il ait eu lieu (Tartu, 1961). – Les faux témoins mènent l’existence la plus prospère. – Juges et procureurs assassins restent impunis. – Les brusques écarts que fait la Loi. – Les décisions de justice se prennent dans les coulisses. – Une injustice qui brûle la poitrine. – Il n’y a pas de loi.