62.

– Il y a un souci, officier ?

Dragomir avait appris que les policiers américains, avides d’un respect qu’on ne leur témoignait que rarement, adoraient qu’on mentionne leur grade.

– Rien de bien grave, monsieur. Nous préférons simplement nous présenter pour que vous sachiez où vous adresser en cas de problème.

Les joues et les oreilles du jeune homme avaient pris une couleur écarlate et son sourire lui dénudait les gencives.

– C’est bien de savoir, fit Dragomir, écorchant délibérément son anglais pour se donner l’air inoffensif.

L’astuce marchait avec tout le monde, il l’avait bien remarqué. Il avait pris l’habitude d’étudier les gens comme un entomologiste examine les spécimens de papillons.

Le policier se dandinait d’un pied sur l’autre en faisant craquer le plancher du porche, tapotant ses cuisses du bout des doigts.

– Vous travaillez pour les Alderson, si je comprends bien.

Dragomir prit un air modeste.

– Oh, je suis juste le gardien, ici. Je travaille pour la famille. Des petits travaux.

– Ah, oui. Apparemment, un voisin a remarqué du matériel de construction devant la maison.

– Oui ?

– Je voulais seulement m’assurer qu’il n’y avait pas d’infraction… par rapport au permis de construire et tout ça, quand on décide d’agrandir…

Ce gamin ne possédait pas la moindre autorité, il avait même l’air de s’excuser d’être là. Pas comme la police russe qui traitait toujours les gens comme des criminels.

– Non, je fais juste l’extérieur. Le propriétaire veut un jardin en terrasse.

– Vous permettez que je jette un coup d’œil à l’arrière ?

Il dépassait les bornes, cette fois. Si Dragomir exigeait un mandat de perquisition, ce gars rappliquerait une heure plus tard avec deux collègues et un document signé par le juge. Ils fouilleraient même la maison, pour le plaisir d’étaler leurs droits.

– Allez-y, je vous en prie, fit poliment Dragomir.

L’officier Kent parut soulagé.

– C’est juste manière de dire au chef que j’ai fait mon boulot, vous savez.

Dragomir contourna la maison à la suite du policier et ils se retrouvèrent sur le terrain nu. L’officier avait l’air d’observer les traces de pneus et le tuyau gris planté au milieu.

– C’est une fosse septique, ça, Andros ? demanda-t-il en s’approchant.

Dragomir se figea sur place. Il n’avait pas dit son nom au policier. Le voisin avait dû le renseigner.

Ce détail le remplit d’inquiétude.

– Ça sert à aérer la terre… À cause du compost…

Il avait improvisé de son mieux.

– Vous parlez du méthane qui s’accumule ?

Dragomir se borna à hausser les épaules. Il ne parlait pas bien anglais, lui, il se contentait d’exécuter les ordres. Il n’était qu’un simple employé.

– Pour une fosse septique, il faut demander un permis, vous êtes au courant ?

La figure du flic était rouge comme un bortch froid.

– Pas de fosse septique, lui assura Dragomir en souriant.

Des petits cris étouffés s’échappèrent du conduit et le policier pencha la tête de côté. Ses ridicules oreilles semblaient s’agiter.

– Vous avez entendu ?

– Non, fit Dragomir en secouant lentement la tête.

Les cris de la fille étaient devenus plus forts et plus distincts.

AU SECOURS AIDEZ-MOI JE VOUS EN PRIE MON DIEU

– On dirait que ça vient de là-dessous, fit le policier. Bizarre, quand même.

Secrets Enfouis
cover.html
ident1.html
ident1-1.html
p1.html
p1chap1.html
p1chap2.html
p1chap3.html
p1chap4.html
p1chap5.html
p1chap6.html
p1chap7.html
p1chap8.html
p1chap9.html
p1chap10.html
p1chap11.html
p1chap12.html
p1chap13.html
p1chap14.html
p1chap15.html
p1chap16.html
p1chap17.html
p1chap18.html
p1chap19.html
p1chap20.html
p1chap21.html
p1chap22.html
p1chap23.html
p1chap24.html
p1chap25.html
p1chap26.html
p2.html
p2chap1.html
p2chap2.html
p2chap3.html
p2chap4.html
p2chap5.html
p2chap6.html
p2chap7.html
p2chap8.html
p2chap9.html
p2chap10.html
p2chap11.html
p2chap12.html
p2chap13.html
p2chap14.html
p2chap15.html
p2chap16.html
p2chap17.html
p2chap18.html
p2chap19.html
p2chap20.html
p2chap21.html
p2chap22.html
p2chap23.html
p2chap24.html
p2chap25.html
p2chap26.html
p2chap27.html
p2chap28.html
p2chap29.html
p2chap30.html
p2chap31.html
p2chap32.html
p2chap33.html
p2chap34.html
p2chap35.html
p2chap36.html
p2chap37.html
p2chap38.html
p2chap39.html
p2chap40.html
p2chap41.html
p2chap42.html
p2chap43.html
p2chap44.html
p2chap45.html
p2chap46.html
p2chap47.html
p2chap48.html
p2chap49.html
p2chap50.html
p2chap51.html
p2chap52.html
p2chap53.html
p3.html
p3chap1.html
p3chap2.html
p3chap3.html
p3chap4.html
p3chap5.html
p3chap6.html
p3chap7.html
p3chap8.html
p3chap9.html
p3chap10.html
p3chap11.html
p3chap12.html
p3chap13.html
p3chap14.html
p3chap15.html
p3chap16.html
p3chap17.html
p3chap18.html
p3chap19.html
p3chap20.html
p3chap21.html
p3chap22.html
p3chap23.html
p3chap24.html
p3chap25.html
p3chap26.html
p3chap27.html
p3chap28.html
p3chap29.html
p3chap30.html
p3chap31.html
p3chap32.html
p3chap33.html
appen2.html
collec3.html