Il était midi passé quand la Defender a repris l’autoroute en direction de Boston. J’éprouvais la nette impression que Marshall Marcus avait une excellente raison de croire que sa fille avait des ennuis. Qu’il l’avait même prévu.
Ce n’était pas un accident, même s’il n’y avait pas forcément de lien avec le premier enlèvement. Il s’agissait peut-être tout simplement d’une dispute entre Alexa et sa belle-mère, au cours de laquelle elle aurait menacé de quitter définitivement la maison, avant de disparaître.
Mais pourquoi Marcus me l’aurait-il caché ? Il aurait pu avoir des scrupules à me déballer son linge sale en présence de sa femme, bien que la discrétion ne fût certainement pas son fort. Il était plutôt du genre à étaler en toute décontraction ses problèmes de transit ou de prostate, et à vanter les effets du Viagra sur sa libido. Comme disait mon neveu Gabe, Marcus donnait dans la surinformation.
Alors que je m’apprêtais à contacter Dorothy pour qu’elle tente de localiser le portable d’Alexa, mon BlackBerry a sonné. Jillian, ma secrétaire.
– Votre fils est ici.
– Ça m’étonnerait, je n’ai pas d’enfants.
– Il dit que vous deviez déjeuner ensemble.
Je percevais en fond sonore une atroce musique branchée à plein volume. Jillian avait transformé mes bureaux en internat de lycée.
– Mince, je vois. Il s’agit de mon neveu, en réalité.
J’avais promis à Gabe de déjeuner avec lui, mais j’avais oublié de le noter.
– Bizarre. J’ai eu une longue conversation avec Gabe, persuadée qu’il était votre fils, et il n’a jamais démenti.
En fait, Gabe aurait bien aimé que ce soit le cas.
– Merci. Dites-lui que j’arrive.
– Il a l’air sympa, comme gamin.
– Et cette musique, ça vient de vous ?
Un clic, et le tapage s’est arrêté.
– Quelle musique ?
– Vous voulez bien me passer Dorothy ?