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Donald avait fini sa journée de travail depuis deux heures quand il rentra dans la maison familiale.

Il travaillait dans l'aciérie, au nord de la ville. Une des dernières de la région. Comme chaque soir il était allé boire un verre dans un bar où, de façon discrète, il se plaisait à regarder les femmes qu'il n'oserait jamais aborder.

Il gara sa voiture près de la camionnette de son père, puis sortit son arme de la boîte à gants. Il ne s'en séparait que pour travailler. Il aimait l'avoir toujours sur lui. Sans elle, il se sentait moins qu'un homme.

Il sortit de la voiture et mit son pistolet dans son ceinturon, caché sous sa longue chemise.

En cette fin de mois d'août, l'air était encore brûlant, bien que le soleil soit presque à l'horizon.

Donald marchait sur le chemin pavé qui menait à la porte d'entrée. Il savait qu'il ne tarderait pas à partir un de ces jours. Mais il craignait de perdre toute mesure s'il était totalement livré à lui-même.

Le meurtre de la prostituée remontait à près de deux mois. Il se faisait violence pour ne pas recommencer aussitôt.

L'affaire avait fait la une d'un quotidien à scandale de Selzttle. Le journaliste s'était amusé à faire le rapprochement avec le meurtre d'une autre prostituée commis un mois plus tôt.

Donald n'était en rien responsable, mais le journaliste ne s'était pas embarrassé d'une enquête. Il avait lié Les deux meurtres pour essayer de créer une psychose chez ces filles.

Il était sur le perron quand son sixième sens le mit en alerte. Il posa la main sur la poignée de la porte et comprit ce qui le gênait. Il n'y avait aucun bruit.

À cette heure, son père aurait dû être devant la télévision à regarder une série quelconque.

Sans s'en rendre compte il porta la main à son ceinturon, défit la lanière, prit son pistolet et enleva la sécurité avant de le remettre en place.

Il ouvrit la porte. Toujours aucun bruit.

Il longea le couloir et passa la tête dans le salon. Personne.

Donald n'aimait pas ça. La voiture de son père était bien garée sur le parking devant la maison. Il devait être là.

Peut-être était-il encore en train de s'ébattre avec sa garce de mère ?

Il avait passé son enfance à entendre les gémissements orgasmiques et théâtraux de cette folle. Jamais elle ne lui avait épargné les moindres sons et paroles intimes.

- Donald ?

C'était la voix de sa mère. Elle provenait de la cuisine. Le ton était bizarre.

Donald ne répondit pas et s'avança vers la cuisine. Ce qu'il vit le figea sur place.

Son père était affalé sur la table, une immense mare de sang s'agglutinant sous sa chaise. Il tourna la tête et vit sa mère, assise en face de lui, qui le braquait d'un fusil de chasse.

- Il n'a eu que ce qu'il méritait. Ton père m'a trahie, et maintenant...

Donald avait immédiatement compris ce qu'elle allait faire. Il regarda d'un air surpris vers la fenêtre. Aussi puérile soit-elle, sa ruse fonctionna.

Sa mère détourna le regard un instant pour savoir ce qu'il avait aperçu.

Un instant qui suffit à Donald pour dégainer son arme et lui flanquer une balle en pleine tête.

— Espèce de salope ! !jura-t-il en s'approchant lentement.

Sa mère était tombée de sa chaise. Une flaque de sang s'élargissait au niveau de sa tempe.

Donald lui donna un léger coup de pied, juste pour le plaisir de voir sa carcasse morte sans réaction.

Il reporta son regard vers son père et remarqua une photo posée sur la table. Il la prit et comprit ce qu'il venait de se passer.

On voyait clairement deux filles déshabillées, dont le visage avait été découpé au cutter, et son père tout aussi nu.

Il n'aurait jamais pensé qu'il puisse aller voir des putes. Nous sommes pareils ! se dit-il sans un sourire.

- Ces petites garces te l'ont fait payer, dit-il en supposant un chantage.

Son père n'ayant pas voulu ou pu payer, la photo avait dû être envoyée en représailles.

Donald ne ressentait aucune douleur face à ses deux parents gisant dans leur sang. Seulement de la haine et de la colère.

La seule personne pour qui il avait de l'estime était morte. Le seul être qui l'ait jamais aimé.

Il reprit la photo, l'étudia un moment et découvrit dans un coin un tee-shirt posé sur une chaise. SEX PISTOLS était écrit en grosses lettres.

Un flash s'alluma dans sa tête. Il avait déjà vu ce tee-shirt sur une des trois petites allumeuses qui passaient leur temps au All Night Long, un bar fréquenté en majorité par des jeunes branchés.

Plus personne ne porte de tee-shirt d'un groupe aussi ringard ! se dit il, sûr de sa découverte.

Il regarda les corps sans tête sur la photo. Ça pouvait tout à fait correspondre à leur gabarit. Il supposa dès lors que celle qui avait pris la photo était la troisième fille du trio.

La colère bouillait sous son crâne. Une envie pressante de décharger sa haine sur n'importe quelle fille le tétanisa sur place.

Il resta un moment à juguler ses émotions, avant de monter à l'étage cacher la photo dans un endroit où personne n'irait la chercher.

Puis il redescendit, se rendit dans le salon et prit le téléphone.

Un moment, il avait pensé repartir de chez lui. Mais cela aurait pu paraître suspect. Non, il allait appeler les flics.

Pour le meurtre de sa mère, il plaiderait la légitime défense. Aucun doute, il s-en sortirait avec du sursis. Les analyses prouveraient que son père avait bien été tué par l'arme de sa mère et que cette dernière était morte après lui. Une chose était certaine, il ne parlerait pas de la photo, il ne salirait pas la mémoire de son père.

Il composa le numéro de la police et commença à imaginer ce qu'il ferait subir à ces trois garces une fois son procès terminé.

Sept Jours à River Falls
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