XXIII
Au fond du couloir, une porte de verre. Et, derrière la porte, Chris, avec sa mère et son jeune frère. Chris pose sa main sur la vitre, il me reconnaît, il me fait signe. Je m’approche de la porte.
Comme tout est silencieux ! On croirait un film muet.
Chris lève les yeux vers sa mère et sourit. Elle lui rend son sourire, mais je vois bien qu’elle dissimule un profond chagrin. Elle est très malheureuse, mais elle ne veut pas que les enfants s’en rendent compte.
Et maintenant, je comprends quelle est cette porte de verre : c’est la porte d’un tombeau – de mon tombeau. Plus exactement, ce tombeau est un sarcophage ; je suis enfermé dans une immense crypte, je suis mort, et ils viennent tous trois me rendre un dernier hommage.
C’est gentil de leur part. Ils n’étaient pas obligés de le faire. Je leur en suis très reconnaissant.
Chris me fait signe d’ouvrir la porte de verre. Il veut me parler. Peut-être veut-il que je lui dise à quoi ressemble la mort ? J’ai envie de le lui dire. Il a été si gentil de venir me voir. Je veux lui expliquer que ça n’est pas terrible, la mort. C’est seulement la solitude.
J’allonge le bras pour pousser la porte, mais une silhouette noyée dans l’ombre arrête mon geste. Un doigt se porte sur des lèvres invisibles. Les morts n’ont pas le droit de parler.
Mais ils veulent que je parle. On a encore besoin de moi. Le spectre ne le voit-il pas ? Il doit y avoir une erreur. Il faut que je leur parle, et je l’explique au spectre. Ce n’est pas encore fini. J’ai beaucoup de choses à dire. Mais la silhouette obscure ne m’a même pas entendu.
CHRIS ! Je crie à travers la porte. JE VAIS TE VOIR ! Le spectre s’avance, menaçant, mais j’entends la voix faible et lointaine de mon fils. Où ? Où ça ? demande-t-il. Il m’a entendu – et le spectre, furieux, tire un rideau sur la porte.
Pas la montagne. Il n’y a plus de montagne. AU FOND DE L’OCEAN !
Je me retrouve debout dans les ruines désertes d’une ville abandonnée. Les ruines s’étendent sans fin autour de moi, dans toutes les directions. Il faut que je les traverse seul.