CHAPITRE XV

— À l’attaque ! À l’attaque ! À l’attaque !

Tonith martyrisait la console de contrôle.

— À l’attaque ! Sur toutes les lignes ! À l’attaque ! Faites avancer autant de droïdes que nécessaire pour enfoncer leurs défenses ! Nous avons déjà pris leur premier bastion, continuez ! Continuez ! Ne relâchez pas la pression !

Tonith avait établi son poste de commandement tout près du Centre de Communication Intergalactique, sur le plateau qui surplombait le champ de bataille. Il avait une vision générale de ce qui se passait en temps réel, tout en restant bien à l’abri avec son état-major.

— Mais, amiral, protesta B’Wuf, le premier technicien, nous avons déjà perdu plus de cent mille droïdes lors de nos attaques précédentes. Et nous avons déjà pris leur première place forte par deux fois avant de la reperdre coup sur coup. Nos pertes sont énormes. Je suis désolé, monsieur, je vous conseille sérieusement de maintenir le statu quo jusqu’à ce que les renforts arrivent. Nous les submergerons juste après.

— Mon cher B’Wuf, l’argent d’un compte ne rapporte que des intérêts. Il faut investir pour faire fortune.

Il regarda le premier technicien avec attention. B’Wuf avait la mauvaise habitude de parler lentement, comme s’il cherchait le mot juste pour s’exprimer, ou comme s’il avait peur de dire une idiotie et de se faire réprimander. D’après l’expérience de Tonith, c’était typique du technicien qui sortait la tête de sa spécialité pour se frotter au monde réel. Cet homme abandonnerait la partie quand viendrait le moment de s’accrocher, et il résisterait au moment d’abandonner. Tonith connaissait bien ce genre d’hommes. Mais malgré leurs défauts, ils n’étaient pas inutiles.

— Je… commença B’Wuf.

Tonith le coupa immédiatement.

— Ces droïdes de guerre sont à vous personnellement ? Les avez-vous achetés ? Vous agissez comme s’ils vous appartenaient. Ce sont des capitaux, mon cher B’Wuf, rien d’autre que des capitaux dans un marché très actif, et parfaitement inutiles tant qu’on ne les investit pas intelligemment, vous comprenez ? C’est mon travail que de faire des investissements et votre travail à vous, c’est de m’obéir. À la lettre, B’Wuf, à la lettre. Maintenant…

Tonith remarqua que les autres techniciens avaient tous cessé de travailler pour les écouter.

— Au boulot, vous tous !

Comme un seul homme, tous les techniciens se penchèrent sur leurs consoles. Tonith se retourna vers B’Wuf.

— Nous allons bientôt recevoir du renfort. Quand ils arriveront, je veux que tout soit nettoyé. Maintenez l’avance de votre infanterie. Couvrez-les de près avec l’artillerie et les droïdes tanks.

— Mais monsieur, notre appui aérien a été sévèrement réduit lors de notre affrontement avec le général Khamar. Vous savez bien que le succès dépend de, eh bien, comment dire, de la pleine participation de tous les corps d’armée.

— Ils n’ont pas non plus d’appui aérien !

Tonith serra les poings de frustration.

— Mais monsieur, notre flotte…

— Notre flotte est inutile. Nos vaisseaux observent les leurs et personne n’ose attaquer. Tout simplement parce que si quelques appareils sont détruits, l’équilibre des forces est rompu ; et personne ne prendra ce risque ; tout comme personne n’osera venir à notre aide, de peur d’affaiblir le blocus. Foutus radins. Donc, personne ne peut intervenir. Nous sommes livrés à nous-mêmes tant que les renforts n’arrivent pas. Mais quand ils arriveront, nous submergerons ce qui reste de la flotte ennemie.

— Mais monsieur, nous avons des vaisseaux en orbite autour de Sluis Van. Ils pourraient laisser un cordon de mine et venir ?

— Nous n’avons pas besoin d’eux, maintenant trouvez…

— Mais monsieur, chaque soldat abat en moyenne une centaine de droïdes ! protesta B’Wuf en rougissant.

— Eh bien faites des maths ! Combien sont-ils ? Combien avons-nous de droïdes ? Dès que nous percerons leurs défenses, leur nombre de victimes augmentera d’un coup. Et quand ils sonneront la retraite, nous les écraserons jusqu’au dernier. Maintenant, il suffit !

— Mais, amiral… tenta B’Wuf.

— La ferme ! Arrêtez de me contredire !

Poussé à bout, Tonith fit signe à deux gardes droïdes d’approcher.

— B’Wuf, vous voyez ce coin, là ? Allez vous y asseoir. Vous autres, dit-il au droïdes, descendez-le s’il fait le moindre mouvement.

— Oui monsieur. Quel genre de mouvement avant qu’on le descende ? demanda un droïde, Tonith secoua la tête de désespoir.

— S’il essaie de… Bon, laissez tomber. Il peut se gratter le dos toute la journée, je m’en contrefiche. Ah, B’Wuf, tant que vous êtes là, gardez-la bien fermée, d’accord ? Exécution.

Blanc comme un linge, B’Wuf rampa jusqu’au coin et s’y assit. Les deux droïdes se placèrent exactement en face de lui. Tout doucement, B’Wuf déplaça une main et se gratta la tête. Rien ne se produisit. Il soupira.

Tonith revint au centre de la salle des commandes.

— Vous avez entendu mes ordres. Maintenant, exécutez-les. Je prends personnellement les commandes de chaque opération. Allez, dépêchez-vous, dépêchez-vous ! Peu importe les pertes. Encore un petit effort et nous percerons leurs lignes. La victoire est presque à nous !

Un droïde serveur s’approcha avec une théière pleine. Tonith se servit avidement.

— Quelqu’un veut du thé ? demanda-t-il à la cantonade.

Tout le monde avait l’air occupé.

— Très bien.

Tonith haussa les épaules et sirota son thé. Il sourit. Ses dents étaient aussi rougeâtres que d’habitude.

 

— Yiuiiiiiiiiiihaaaaaaa ! Venez ! Venez ! Allez venez ! hurlait Erk en tirant dans le tas.

Impossible de rater son coup. Chaque tir désintégrait un droïde de combat. Mais ils continuaient d’avancer, unité après unité. L’artillerie entra en action, mais ils serrèrent les rangs et avancèrent encore plus vite, répondant coup sur coup aux tirs de laser, levant devant eux un véritable mur de feu.

— Erk, il faut qu’on décroche, ils nous submergent ! cria Odie.

Mais Erk secoua la tête comme si une mouche l’agaçait et continua à tirer. Il n’avait jamais vu autant de cibles réunies au même endroit, et cela lui procurait comme une sorte de pulsion frénétique de destruction.

Elle l’attrapa par l’épaule et tenta de le tirer vers elle, mais il se dégagea d’un coup de hanche et continua à tirer.

Elle pouvait maintenant voir des centaines de droïdes qui s’approchaient de leur bunker.

— Ils nous encerclent ! Lâche ce laser et ramasse ton harnais. Il faut qu’on se tire d’ici !

Des grattements leur parvinrent de l’entrée du bunker. Odie ajusta son arme et se rua vers l’entrée juste à temps. Deux droïdes émergèrent rapidement. Elle les abattit tous les deux. Erk ne s’en rendit même pas compte. Il cria, jura, jura et tira encore. Et encore. Et encore.

— Des droïdes tanks ! cria Odie. Des droïdes tanks !

Elle en voyait au moins deux à travers les meurtrières, qui progressaient derrière l’infanterie. Les droïdes tanks, appelés « rampants » à cause de leur lenteur, étaient des droïdes entièrement automatiques et lourdement équipés d’armes à têtes chercheuses. Leurs deux canons à tirs croisés avaient un champ d’environ cent quatre-vingts degrés et s’avéraient mortels pour les soldats qui leur faisaient face, bunker ou pas. Des missiles anti-aériens hérissaient leur dos et des lance-grenades complétaient le tout. On les déployait habituellement en chenille, l’arrière-garde protégeant les flancs de la première ligne.

La terre tremblait à mesure que les droïdes tanks approchaient.

Odie pouvait voir les tirs d’artillerie se heurter aux champs de force des mastodontes.

— Halte au feu ! hurla-t-elle en frappant Erk sur son casque aussi fort que possible.

Mais il resta impassible. Il tira sur le droïde tank le plus proche.

Presque instantanément, le système automatique d’acquisition de cible pointa ses canons vers le bunker, mais avant qu’il puisse l’anéantir d’un seul coup, le sol explosa et retourna le monstre comme une crêpe.

La mine que Slayke avait fait enterrer venait de leur sauver la mise juste à temps.

La dernière chose qu’Odie entendit fut un cri.

Puis, tout devint noir.

 

Slayke regarda ses officiers généraux.

— Le temps nous manque. Je ne vais pas le perdre en parlant inutilement. Vous savez tous quoi faire. Nous avons prévu cette situation depuis le début.

Il s’interrompit.

— Eh bien, nous y voilà, leur dit-il.

Mais il était évident que la situation était désespérée. Izable, Eliey et Kaudine étaient tombées, et l’artillerie avait dû battre en retraite avec les survivants des avant-postes jusqu’à Judlie, loin derrière le poste de commandement principal. C’était le plan qu’ils avaient conçu avant même d’atterrir sur Praesitlyn. L’ennemi avait temporairement calmé le jeu pour consolider ses positions et attendre du renfort.

— C’est notre seule chance, dit Slayke. Nous avons le temps de former une dernière ligne défensive sur Judlie. Donnez l’ordre à tout le monde de rallier le bastion immédiatement.

Il attrapa son pistolaser et se détourna de la carte.

Il déclara à ses officiers :

— Nous savions tous que ce genre de situation pouvait se produire avant même de débarquer ici. J’en suis désolé, mais c’est arrivé. Je pensais que Coruscant viendrait à notre aide. Peut-être qu’ils sont en chemin. Peu importe. Nous sommes là, et pas eux. Quand les renforts arriveront, nous leur aurons tellement mâché le travail qu’un simple Padawan Jedi mettra l’ennemi en pièces à lui tout seul. La reddition est impossible, vous le savez tous.

Il lui restait une dernière chose à dire à ses camarades.

— Si nous devons mourir, ma foi, ce n’est pas un mauvais endroit. Je suis fier d’avoir eu le privilège de vous commander, de partager votre amitié et vos peines. Et je suis heureux d’avoir des gens tels que vous près de moi au moment de passer de l’autre côté. Maintenant, allons-y, il faut leur en donner pour leur argent.

Tous les officiers levèrent le poing et crièrent un Hourra ! comme un seul homme.

 

Erk se rendit compte peu à peu qu’un énorme poids l’écrasait. Il ouvrit les yeux mais sans pouvoir discerner quoi que ce soit. Était-ce la nuit ou était-il aveugle ? Tout en luttant contre la panique, il réussit avec difficulté à libérer son bras coincé par les débris qui le clouaient au sol ; il leva son poignet. Sa montre jeta une lueur rassurante dans les ténèbres et il soupira de soulagement. Il n’était pas aveugle, c’était déjà ça. Il lui était difficile de respirer avec ce poids qui l’oppressait. Il remua, et le poids bougea en grognant. C’était Odie. Elle se laissa tomber sur le côté, et les quelques fragments rocheux qui l’avaient coincée contre lui roulèrent à même le sol.

— Ouuuuuf ! souffla-t-il.

Il pouvait respirer à nouveau.

Odie gémit.

— Me-merci d’avoir réussi à nous faire tuer, dit-elle en haletant.

Erk ne comprit pas immédiatement ce qu’elle entendait par là. Et puis :

— Ah, oui. J’en ai descendu un paquet, pas vrai ?

Il plia les bras et s’étira les jambes avant de se lever. À part quelques écorchures et plusieurs contusions, il était à peu près bon pour le service. Il tâta dans le noir, trouva Odie et la releva.

— Tu es blessée ?

— Hon hon. J’ai comme une grosse, heu… Ça ressemble à une écorchure sur ma hanche. Sinon…

Elle se passa une main dans les cheveux et autour du crâne.

— Je crois que ça va.

Il y avait comme du sang sur le côté de son visage. Elle explora la zone du doigt et découvrit une large estafilade.

— On a dû rester inconscients pendant un sacré bout de temps, dit-elle en tâtant la blessure. Le sang a coagulé.

Elle fouilla son paquetage et y décrocha une torche fusée. Elle pressa la détente d’activation et le bunker s’emplit instantanément d’une délicieuse lumière. C’était la bonne nouvelle.

La mauvaise, c’était que l’explosion avait creusé un cratère juste devant le bunker et projeté un énorme rocher sur le plafond qui s’était brisé en deux morceaux. Ils étaient tous les deux prisonniers d’une sorte de tente rocheuse d’environ trois mètres de côté sur deux mètres de haut. Odie posa la main sur le roc.

— C’est aussi solide que… Eh bien, que de la pierre, dit-elle. On a eu de la chance que ça ne s’écroule pas sur nous, on aurait été écrasés.

Elle appuya plus fort sur le rocher.

— Ça m’a l’air assez solide, cela dit. Les morceaux ont l’air de bien s’équilibrer.

— Bon, nous ne sommes pas écrasés. Nous avons de l’air et nous sommes à l’abri dans cette confortable résidence de pierre, commenta Erk d’un ton amer.

— On a le chic pour passer notre vie sous terre, on dirait.

— Ouais, c’est la seule méthode valable pour réussir à passer un peu de temps avec toi. Combien de temps va durer la torche ?

Odie haussa les épaules.

— Ça fonctionne sur batterie. J’ai dû la recharger il y a une dizaine de jours et je ne crois pas l’avoir beaucoup utilisée jusqu’ici. Ça devrait être bon pour environ soixante-quinze heures, peut-être cent.

— On sera sortis d’ici depuis longtemps.

Il ramassa son casque et essaya de le remettre. Mauvaise idée. Des cailloux l’avaient écrasé. Il le secoua tristement et se tourna vers Odie.

— Essaye le tien.

— Je le ferai si j’arrive à mettre la main dessus.

Elle regarda autour d’elle.

— Il a dû être enterré quelque part par là. Parfait. Nous ne pouvons pas joindre le poste de commandement. S’il existe encore.

— Je suis sûr qu’il est encore là, tu peux me croire. Bon, allez. Tu as fait suffisamment durer le suspense. Comment comptes-tu nous sortir de là ?

Elle renifla.

— On n’a qu’à siffler aussi fort que possible. Quand on atteindra le bon timbre en résonance avec la pierre, ce rocher va s’émietter et nous émergerons dans la lumière du matin comme des papillons fraîchement sortis de leur chrysalide.

Erk la regarda quelques secondes et éclata de rire. Elle l’imita. Ils rirent ensemble jusqu’à ce que la poussière les fasse tousser.

— J’ai peur, avoua Odie après un temps. On est coincés ici pour de bon, hein ?

Erk ne répondit pas immédiatement.

— Eh bien, oui, je crois qu’on est bien coincés, répondit-il en tâtant les murs de la main.

— La République n’a envoyé aucun renfort, non ? demanda Odie sans vraiment attendre de réponse.

— En tout cas, ils n’étaient pas là quand on avait besoin d’eux.

— On va mourir ici, tu crois ?

— Ouais, on dirait bien.

Il s’assit en soupirant et lui prit la main.

— On va mourir de soif avant de mourir de faim. Dire qu’on a survécu à tous ces trucs pour finir comme ça.

Elle ne réussit pas à masquer le désespoir et l’amertume dans sa voix. Elle éteignit la torche pour l’économiser.

Les heures passèrent dans le noir. Ils tuèrent le temps en se racontant leurs souvenirs respectifs. Le bon temps, les amis, la famille, la musique qu’ils aimaient, leurs foyers, la délicieuse nourriture qu’ils avaient goûtés. Grâce à ses nombreux voyages, Erk avait le plus d’expérience du vaste monde et il avait un vrai talent de conteur. Il réussit même à faire rire Odie avec ses histoires invraisemblables. Ils mangèrent le reste des maigres rations que le sergent leur avait données quand il les avait affectés au bunker. Il leur restait quand même une gourde d’eau chacun.

Ils restèrent silencieux quelques minutes après avoir mangé et étanché leur soif. Puis, Erk s’approcha d’Odie et l’embrassa. Ils se serrèrent l’un contre l’autre jusqu’à ce que la peur et l’épuisement les terrassent. Ils s’endormirent dans cette position.

Quand Erk se réveilla, sa montre l’informa qu’il était tard dans la nuit. Il avala une gorgée d’eau et réveilla Odie.

— On a loupé le dîner, lui dit-il.

Elle s’assit et se passa la main dans les cheveux.

— Odie, je ne vais pas crever ici, tu m’entends ? Nous n’allons pas y rester !

— Mais qu’est-ce qu’on peut faire ?

Odie toucha la pierre de la main. Elle était aussi solide que tout à l’heure.

— Je n’en sais rien, mais on va trouver quelque chose !

 

La lumière du jour tombait rapidement. À part quelques canons, rien de plus qu’une batterie, l’artillerie lourde de Slayke avait été anéantie. Toutes ses navettes étaient détruites depuis longtemps ; il ne restait pas le moindre vaisseau capable de les évacuer vers ce qui restait de leur flotte en orbite. Mais de toute façon, personne ne l’avait envisagé. Les troupes ennemies avaient fait une pause après s’être emparé des avant-postes de Slayke pour consolider leurs positions et attendre les renforts ; viendrait ensuite l’attaque finale. Et elle pouvait désormais se produire à tout instant. C’était le seul moment de répit que Slayke avait eu depuis le début de l’offensive. Il aurait le temps de préparer leur résistance.

Slayke s’assit, les yeux collés aux jumelles qui lui donnaient un angle de vision de 360° autour de Judlie.

— À vos ordres, monsieur.

Un officier lui tendit un écran et il y jeta rapidement un coup d’œil.

— Dites aux commandants de tenir coûte que coûte. Mais dites-leur que j’autorise les hommes du rang à fuir avant d’être submergés. S’ils ont la moindre chance de s’échapper et de survivre dans le désert, qu’ils le fassent. Clarifiez bien ce point.

L’officier le salua et se tourna vers la console de communication.

Slayke était sûr qu’ils mourraient dans ce désert, mais au moins ils vivraient un peu plus longtemps.

Une longue et sourde salve d’artillerie martela le sol autour d’eux et fit trembler les fondations.

— Quand les tirs auront cessé, ils passeront à l’attaque, dit Slayke à son état-major. Quand ils nous déborderont, tous ceux qui désirent tenter leur chance et s’enfuir ont mon autorisation. Moi, je préfère rester ici et griller sur place.

Les jumelles ne lui étaient plus d’aucune utilité, désormais. Le sol disparaissait sous les nuages de poussière et de débris, rendant toute observation impossible. Il se retourna vers son staff. Leurs orbites et leurs joues étaient creuses, leurs visages très pâles, mais tous restaient courageusement à leur poste, certains échangeant ordres et rapports avec les unités sur le terrain, d’autres vérifiant armes, équipement, eaux et rations. De la poussière humide restait en suspension autour d’eux. Une énorme explosion secoua l’ensemble de l’abri et plusieurs officiers crièrent Encore raté ! avant d’éclater de rire.

Quelqu’un toussa. Les officiers murmurèrent entre eux, sans évoquer la difficulté de commander une armée virtuellement inexistante.

Un gigantesque grondement les submergea, d’abord sourd et lointain, puis grimpa rapidement en un crescendo si profond qu’il fit vibrer leur estomac. Ça venait clairement de derrière. Slayke s’écrasa le poing sur le front. Personne ne se faisait d’illusion sur l’origine du bruit. C’était leur arrêt de mort.

— Leurs renforts viennent d’arriver, déclara Slayke. Messieurs, aux armes.

— Courage ! cria un officier alors que tous se ruaient vers la sortie. Au moins, nous mourrons au combat !

Slayke leva un pistolaser au-dessus de lui.

— Suivez-moi ! ordonna-t-il.