« Concevoir le temps de façon abstraite et intellectuelle est assez simple
: je sais combien de zéros je dois mettre après le nombre dix pour représenter
des milliards. Quant à le digérer, c'est une autre affaire. La notion de temps
est si étrange que nous ne pouvons la saisir qu'à travers une métaphore. C'est
bien ainsi que nous procédons à travers nos démarches pédagogiques. On vend et
on revend le kilomètre géologique ou bien le calendrier cosmique. »Dans les
Racines du temps, Stephen Jay Gould s'est ainsi attelé à l'examen de cette «
métaphore ». Trois textes, trois monuments de la littérature scientifique et
géologique lui servent de support. Mais le propos, une fois encore, dépasse le
seul commentaire et, bientôt, c'est à une véritable reconstruction du passé de
l'univers que le lecteur est convié. Où l'on découvre alors que sans le recours
à deux concepts, antagonistes autant que complémentaires, nous n'y comprendrions
rien : le temps linéaire, d'un côté, celui du devenir qui mène du Big Bang
jusqu'à nous; le temps cyclique de l'autre, celui de la vie éternellement
recommencée, celui de l'immanence et des saisons.