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Le transport rebondit sur la couche nuageuse au-dessus d’Akiva. Le soleil forme une ligne brûlante par-dessus les volutes blanches. On dirait de l’acier en fusion. Par-dessous la couverture nuageuse, on aperçoit à peine Myrra. Elle est cachée par les nuages et quand on l’entrevoit, elle semble enveloppée dans un brouillard rose cotonneux.
Le sergent-major Jom Barrel des Forces Spéciales de la Nouvelle République (la SpecForce) se tourne vers les cinq hommes et femmes qui sont à sa droite, près de la porte ouverte. Leurs torses sont protégés par une armure en fibre de carbone, les épaules frappées de l’emblème de la Nouvelle République : le phénix de l’Alliance, désormais entouré de soleils. Le symbole d’un jour qui se lève, d’une aube nouvelle. Un phénix qui renaît vraiment de ses cendres.
Les soldats présents aux côtés de Barrel sont : les caporaux Kason, Stromm, Gahee’abee, Polnichk et Durs. Il sait qui est qui, même si leurs visages sont cachés par les masques de saut orbital.
Il leur adresse le signe de tête qu’ils attendent.
— Sautez !
Un par un, ils se détachent et se jettent vers les nuages, les lance-lims accrochés dans le dos, les bras tendus, comme s’ils essayaient d’atteindre le soleil.
À son tour.
Barrel déteste sauter. Il est prêt à n’importe quoi d’autre. Ramper dans un marécage sur Naboo. Se geler les fesses dans une base aux murs de neige. Un jour, ils ont dû piloter un vaisseau de combat dans une mégatempête électrique au-dessus de Geonosis pour arrêter des Impériaux qui s’étaient mis en tête de redémarrer l’ancienne usine de droïdes. Les éclairs se déchaînaient, accompagnés de vents violents et de grêle qui martelait si fort la coque qu’elle a laissé des bosses dans le métal. Il était persuadé qu’ils mourraient avant même de se poser. Pourtant, il préfère encore cela à sauter d’un vaisseau.
Surtout un saut suborbital.
Enfin, il n’a pas le choix.
Barrel s’élance après Durs, le dernier de la file. Il a la même impression qu’à chaque fois : ses entrailles sont aspirées par son derrière et son cœur reste quelque part derrière lui dans le ciel. Il est pris de panique, terrorisé. Puis…
L’air se balance. Une onde de choc le frappe. Son corps se met à tourbillonner et, au-dessus de lui, il voit une face du transport percée d’un trou béant, de la fumée noire qui s’en échappe dans un jaillissement de flammes et une pluie d’étincelles. Le vaisseau gîte, s’incline et commence à chuter…
Barrel tente d’utiliser son comlink, mais il sait que cela ne sert à rien. Toutes les communications sont coupées. Rien de ce qu’il dira n’arrivera où que ce soit.
Le mieux qu’il ait à faire pour le moment, c’est de se laisser tomber en tentant de survivre à la chute.
Mais c’est une tâche bien plus ardue qu’il ne s’y attendait : en dessous de lui, il voit le caporal Kason disparaître dans un éclair.
Quelque chose monte du sol : le tir aveuglant d’un turbo-laser.
Une seconde plus tard, Kason n’est plus qu’une giclée rouge et des débris de fibre de carbone déchirée qui tourbillonnent dans les nuages.
Nous sommes tous morts, se dit Barrel.
Un nouvel éclair et Stromm y passe à son tour : un tir de laser le désintègre en plein vol. Barrel plonge dans l’espace occupé par Stromm deux secondes plus tôt.
Il fait signe aux autres.
— Nous sommes comme des pigeons qui se font tirer dessus ici. Nous devons être des faucons. Engagez les para-ailes.
Il est trop tôt, leur altitude est trop grande.
Les vents à cette hauteur risquent de les tuer. Mais ont-ils le choix ?
En dessous de Barrel, les trois autres étendent bras et jambes… et les combinaisons ailées se déploient.
C’est trop tard pour Gahee’abee – au moment où les para-ailes du Kupohan s’étendent des poignets à ses chevilles, il meurt. Un tir de canon laser en provenance de la surface de la planète le réduit à quelques lambeaux d’ailes emportés par le vent.