CHAPITRE XVIII
Lorsqu'il revint au poste de pilotage, Marc, détendu, fleurait bon l'eau de toilette. Il avait revêtu une tenue propre d'astronaute. Ray, dont le visage rayonnait de joie, tendit un verre à son ami.
-C'est tonique et reconstituant. Tu as besoin de récupérer des forces.
Se laissant sombrer sur un siège, Marc soupira :
-J'ai l'impression d'être passé dans un concasseur géant. Tous mes muscles sont encore douloureux.
-Tu as besoin d'une nuit de sommeil ! Mais auparavant, il faut avertir Khov.
La communication avec le S.S.P.P. fut rapidement établie.
-Message pour le général. Priorité A 1.
Le visage revêche, l'opérateur rétorqua, sans lever la tête : -Vous auriez dû consulter votre ordinateur. Il est onze heures du soir, à New York. Le général est depuis longtemps rentré à son domicile.
-Je maintiens ma demande ! Soyez rassuré, j'en assume l'entière responsabilité !
Le sergent de permanence dévisagea enfin le présomptueux qui allait se faire muter, sans aucun doute, sur un obscur satellite ! En reconnaissant son interlocuteur, il esquissa un sourire.
-Capitaine Stone ! Je sais que vous êtes un habitué des appels nocturnes. On racontait même dans le service que, lorsque Marc partait en mission, des paris étaient engagés sur l'heure à laquelle arriverait son premier rapport. A voir le sourire de l'homme, il était probable qu'il avait gagné ! Je transmets chez Khov.
L'écran du vidéophone fut zébré d'éclairs puis révéla le visage d'une femme blonde. L'épouse de Khov paraissait être âgée d'à peine quarante ans. Seules de minuscules rides autour des yeux pouvaient faire soupçonner qu'elle en avait dix de plus. Avec un très joli sourire, elle s'exclama :
-Capitaine Stone, je suis heureuse de vous voir ! Je suppose que vous désirez parler à mon mari. Je l'appelle...
-Mme Khov recula, sans toutefois quitter le champ de la caméra, et apparut dans une splendide nudité. La vision fut brève car elle se rapprocha très vite.
-Il sort de son bain revitalisant. (Avec un clin d'oeil complice, elle poursuivit :) Je n'oublie pas le service que vous m'avez rendu en dissipant mes doutes sur sa conduite en mission. Depuis, je m'efforce chaque soir de me faire pardonner mes horribles soupçons. Malheureusement, en ce moment, il est un peu fatigué. Si, au cours de vos missions, vous trouvez un bon stimulant...
La face de Khov remplaça celle de sa femme. Il avait les traits tirés, et son teint était bien rouge.
-Que voulez-vous encore ? gronda-t-il avec humeur.
-Malgré le plaisir que j'ai eu à m'entretenir avec madame la générale, je ne me serais pas permis de vous déranger en pleine félicité conjugale s'il n'était survenu des événements graves.
Marc résuma son action depuis son arrivée sur Summa. Au milieu du récit, Khov grogna à l'intention de sa femme, qui écoutait :
-Va me chercher un whisky. Je sens que je vais en avoir besoin !
Le récit de Marc achevé, il resta un long moment songeur.
-Vous avez le chic, mon garçon, pour transformer les missions les plus simples en difficiles problèmes. Restez en orbite autour de Summa en attendant les ordres. Je dois m'entretenir avec le responsable de la Sécurité Galactique, qui informera le Président.
L'écran éteint, Marc se tourna vers Ray.
-Branche tous les détecteurs et le champ de force. Moi, je vais m'offrir un somme monumental. Il me semble que cela fait une éternité que je n'ai pas fermé l'oeil !