ON NE COMPTE PLUS LES JOURS
Les jours
La liste des choses que j’ignorais ne
cesse d’allonger. Par exemple, j’étais au courant de l’existence,
entre la France et l’Espagne, des montagnes Pyrénées, merci, mais
j’imaginais ensuite tout un pays aussi plat que la Beauce. Erreur.
L’Espagne est pleine de bosses ; et sur les bosses, montant,
descendant, remontant, redescendant, crapahutant, ripatonnant,
Raquel et moi, plus les autres qui nous doublent... Tatiana la
Brésilienne, qui a lâché les deux Peter pour Joaõ, marathonien
brésilien aussi, après le couple de Suisses, et avant deux jeunes
Allemands, english speaking, qu’elle élira finalement
chevaliers servants. Sonia, Madrilène perchée sur ses grandes
quilles, essayant de suivre un peloton de jeunes filles basques,
les trois grâces de Bilbao, emmené par Crispín, « les plus
belles jambes de Mondragón », vieux paysan sportif en passe de
devenir mythique. Je nous définis, Raquel et moi, comme les tortues
(las tortugas) qui partons plus tôt mais nous faisons
dépasser par tous les lièvres (las liebres), le problème
étant que les tortues, dans les fables bien écrites, sont censées
gagner la course, ce qui est loin d’être notre
cas. Mais l’idée que nous réussirons à arriver à
Saint-Jacques-de-Compostelle suffit toujours à nous plonger dans
une commune hilarité. ¡ Hombre !
*
Le chemin ne nous laisse aucune
tranquillité. Non seulement ça monte et ça descend, mais ça passe
du paysage sublime au dépôt d’ordures, de la vision de champs
immenses à la traversée d’usines désaffectées, de petits chemins
qui sentent la noisette à d’ingrats trottoirs longeant des
autoroutes où des camions lancés à toute vitesse klaxonnent comme
des furieux, de cols vertigineux et givrés aux plaines ardentes et
desséchées, de clochers carillonnant en éoliennes grinçantes, voilà
la gueule du chemin ; jamais le temps de s’habituer ! Et
tous les jours, il invente un nouveau moyen de nous flinguer.
*
Et Dieu dans tout ça ? Ma mère
s’imaginait que nous marchions tous derrière un curé en
mâchouillant des patenôtres. Rien de tel. Il n’y a que les Français
pour pérégriner ainsi à la remorque de prêtres ou de professeurs,
prière et culture, art et foi, tralala, monopolisant des refuges
entiers à l’énervement général, car ce n’est pas du tout dans la
logique du chemin, du camino tel qu’il se pratique en
Espagne : individualiste et solitaire. Non pas formé de
troupes de gens partageant les mêmes centres
d’intérêt, mais d’individus farouchement antagonistes liés par le
destin.
Nous ne voyageons pas avec Dieu ;
Dieu habite dans le coin ; on va le voir ou pas, si l’on veut,
si l’on y croit — et mieux encore : si l’on n’y croit
pas. En Espagne, où le catholicisme a été très longtemps religion
d’État, Dieu jouit, si l’on peut dire, d’une fin de vie officielle,
comme une espèce de vieux parent irascible dans sa maison de
retraite. Même les mécréants sont en rapport avec lui. « Si
Dieu me cherche, il saura où me trouver ! » dit Joaquín,
comme une menace, pour justifier sa présence sur le chemin.
On peut prier ensemble, d’une seule voix,
à toute vitesse, dans les églises, le soir avant la messe où des
armées de femmes entre deux âges mitraillent des rosaires comme des
rafales de mitraillettes (Raquel suit très bien le rythme) ;
on peut admirer l’évidence de son œuvre à chaque lever de soleil
dans un nouveau paysage éblouissant, mais on n’en parle pas.
Petit calcul : 30 minutes
pour 150 Ave Maria = 5 Ave par minute.
En réalité, même les pèlerins espagnols
sont loin d’être tous catholiques. Je regrette d’avoir oublié le
prénom de la jeune fille avec qui j’ai terminé une étape (elle
allait beaucoup plus vite que moi, mais avait ralenti pour
bavarder), ensuite, nous avions déjeuné très tard dans une
ferme-refuge en pleine cambrousse, dont la cour était décorée d’un
bric-à-brac d’art contemporain assez surprenant au milieu des
vaches. C’était une saisonnière pour qui le chemin de Saint-Jacques
était à la fois un voyage de découverte, mais aussi des vacances
sportives et pas chères. Issue d’une famille d’anarchistes
des Asturies décimée par la guerre civile, dont
elle n’avait connu comme témoin que son grand-père, artisan
graveur, réduit au silence et à l’indignité, tout ce qui était
religieux lui faisait horreur et la dégoûtait avec une violence
quasi physique. À en vomir. Littéralement.
*
Los Arcos, sixième jour, une petite
affiche : « La célèbre bénédiction des pèlerins après la
messe ». À sept heures, voilà tout notre petit monde devant le
porche. Après la douche, le pèlerin, shorts et sandales en
plastique, a exactement la touche d’un client de camping deux
étoiles. Mais autour, que de beau linge ! Toute une population
endimanchée, tirée à quatre épingles, brossée, lavée, coiffée. Et
soudain sonne le glas. Un enterrement. On se faufile dans l’église
bondée : en plein milieu, tout devant, dans leurs beaux
tee-shirts bien propres et bien tire-bouchonnés, siègent nos deux
Peter, le Hollandais et l’Australien. Peu au fait de la liturgie
romaine, ils protestent quand la famille du défunt veut les chasser
de leur banc. Comme ils ne comprennent pas un mot d’espagnol,
qu’ils sont grands, forts et obstinés, ils gagnent la partie, et
assistent à toute la messe d’enterrement en short, mains posées sur
leurs genoux nus, doigts de pied bien parallèles, au premier rang,
très dignes.
Après la sortie du corps, on nous bénit
comme prévu ; on nous donne même une image de saint Jacques.
Les deux Peter y ont droit aussi, puisqu’ils ont été si sages.
Comme le Hollandais parle trois langues, il lève la main tout le
temps, et finit par se retrouver à la tête de trois images, en anglais, allemand et flamand (il devra en
rendre deux, quand même).
*
C’est dans cette église, dans une chapelle
au fond, que j’ai vu pour la première fois un Jésus mort. Pas une
crucifixion, ou une descente de croix, pas une Pietà où il aurait
été dans les bras de Marie en larmes, mais un Jésus mort, tout
seul, aussi cadavre que le mort qu’on enterrait ce jour-là. Un bras
pendant le long du corps, les jambes un peu pliées, la peau
plombée, cheveux et barbe bruns tordus de sueur et de sang, les
yeux clos. Et au-dessus, debout sur l’autel, dans sa longue robe de
deuil en beau tissu, mains ouvertes : sa mère. La Vierge des
douleurs.
J’en verrai beaucoup d’autres ensuite. Des
Jésus morts et des Marie debout. Tout au long du chemin, Jésus est
mort. Sur la croix, tête pendante, cheveux dans les yeux, à la
Vélasquez de Séville, ou dans des cercueils de verre transparent,
déposés sous les autels, mais partout mort, mort, mort. Et sa mère,
à qui l’on brode de beaux habits de velours mauve, de soie noire et
de perles blanches, à qui l’on apporte des brassées de fleurs
fraîches, Marie, sa mère, pleure debout. Comme au début du
Stabat mater : « seule au plus haut de la
douleur »...
L’Espagne est le pays où Jésus est mort.
Et où nous reste sa mère. Tout au long du chemin, Marie veille, et
à longueur de chapelets, c’est elle qu’on prie et qu’on implore, à
qui l’on chante, à qui l’on parle. Jésus est mort et il nous a
confiés à sa mère, comme il lui avait confié, au
pied de la croix, le jeune Jean : « Femme, voici ton
fils », « Voici ta mère ».
Et nous voici, nous, ici,
aujourd’hui.
*
Raquel s’est entichée d’une « famille
merveilleuse », un « idéal de famille », les de La
Cruz (de la Croix !), qui ont pris son sac en stop dans leur
voiture où la mère trimballe la petite sœur et le casse-croûte,
tandis que le père marche avec les deux fils. Il veut leur montrer
que dans la vie, il y a des choses belles et précieuses, qui ne
s’achètent pas avec de l’argent... Sans que le poids de leur sac
les empêche de profiter du paysage et donc de cette sage
philosophie.
Le plus jeune a une bille
marrante :
« Comment tu t’appelles ?
— Pedro.
— Quel âge as-tu ?
— Douze ans. Et toi ?
— Quarante-cinq... Je pourrais être
ta mère !
— Non. Ma mère, elle a trente-six
ans. »
Bing ! C’est tonique la conversation
avec les enfants.
Son frère aîné, Miguel, a quatorze ou
quinze ans (je ne demande plus !), grand et dégingandé, fou de
livres d’aventures et d’Alexandre Dumas. Nous parlons du Comte
de Monte-Cristo et des Trois Mousquetaires. « J’ai
souvent essayé d’imaginer la suite, dit-il.
— Mais Dumas l’a écrite ! Tu
n’as jamais lu Vingt ans après ni Le Vicomte de
Bragelonne ? »
Il ne les a jamais vus en librairie. Son
œil s’allume, et me voilà lancée dans le récit de l’invraisemblable
naissance du vicomte de Bragelonne, fils d’Athos
et de la maîtresse d’Aramis, devenu jésuite, conçu dans un
presbytère, par une nuit sans lune pendant la Fronde, alors qu’elle
croit faire l’amour avec un curé, et qu’il croit... Que croit-il,
lui ? Mais qu’est-ce que je raconte ? Une histoire
complètement scabreuse à un gamin timide qui m’écoute comme si je
lui faisais le catéchisme !
En retour, Miguel m’enseigne des choses
utiles. Que je ne dois pas attacher la dragonne de mon bâton à mon
poignet, car mon bras pourrait se casser en cas de chute, et qu’il
ne faut pas non plus serrer le bâton dans ma paume, mais au
contraire, le laisser aller avec légèreté au creux de la main, ce
qui est aussi efficace, et évite les ampoules. J’appliquerai ses
leçons, sans perdre la petite calebasse qu’il m’offre avec son
frère (et les sous de leur père !) pour transformer mon bâton
de touriste en véritable bourdon de pèlerin.
Quand nous passons devant un cimetière,
une église ou un calvaire (assez souvent, donc !), Miguel se
retourne, se découvre et se signe, serrant sa casquette contre sa
gorge, il murmure quelques mots très vite, l’air inquiet ;
ensuite, il reprend son discours juste là où il l’avait laissé, et
se recouvre, sans jamais cesser de marcher. Furtives prières, comme
de petites boucles accrochées au droit-fil de son chemin, petits
pas de danse dans sa marche.
Le contraire de son frère. Dans l’église
déserte de Santa Maria, à genoux, mains jointes, tout seul, massif,
Pedro prie d’une façon si fervente, si intense, si ancrée dans le
sol qu’il en devient dense comme la pierre qui marque son
nom.
Très impressionnant, une prière de petit
garçon.
Leur route devait s’arrêter à Viana ;
la petite sœur (être tonitruant de sept ans) et
la mère n’en pouvant plus de jouer les utilités. Nous nous
quitterons à Logroño, après neuf kilomètres tout seuls, sans les
sacs ni les parents ; Raquel, moi, et les garçons très
émus...
*
C’est à Logroño aussi qu’on s’allège en
renvoyant chez soi par la poste les objets trop lourds qui
encombrent les sacs. La seule chose dont je pourrais me débarrasser
est une bible de poche ; je n’ose pas. Alors Raquel,
magnifique et péremptoire :
« Laisse, on te la
racontera ! »
J’abandonne la bible à la
bibliothèque.
*
Nous marchons dans des paysages immenses
et jaunes ; j’ai toujours l’impression que nous courons. Je
proteste auprès des Suisses : « Vous m’aviez dit qu’on
s’habituait à partir du quatrième jour, puis du cinquième, j’ai
toujours mal partout et je n’avance pas...
— Une semaine et c’est
bon ! »
On dirait des profs de piano sadiques, mes
si jolis grands Suisses.
Les nuits
Précisions pratiques sur les lits
superposés qui meublent les refuges.
Le plus convoité est le lit du bas :
on peut garder ses affaires à portée de main,
poser son livre ou ses lunettes par terre, et aller faire pipi la
nuit sans déranger personne (à condition de ne pas se prendre les
pieds dans les nombreux sacs à dos qui encombrent le dortoir).
Inconvénient : on se cogne la tête contre le lit du haut, car
on peut s’allonger, mais pas s’asseoir.
En revanche, on peut s’asseoir sur le lit
du haut, mais on est en exil loin du sol, d’autant plus loin qu’il
n’y a pas toujours d’échelle pour y accéder. Quand il y en a une,
elle peut se trouver à gauche ou à droite, en tête ou au pied du
lit, voire tout à fait au bout, selon les modèles, c’est-à-dire,
puisqu’on change de lit chaque nuit, très rarement au même endroit
que la veille, ce qui rend toute expédition pendant l’extinction
des feux (vingt-deux heures - six heures) fort
risquée.
Les gens du haut et les gens du bas ne se
voient pas sans contorsions. Donc, ils y renoncent assez vite, et
les deux mondes se séparent bien avant la nuit entre monde d’en
haut et monde d’en bas. Disons d’emblée que si le lit du bas est
plus confortable, l’occupant du lit du haut est plus sympathique.
Justement parce qu’il a raté un lit du bas. Soit qu’il ait été en
retard, soit qu’il ait ignoré que c’était mieux, ou qu’il l’ait
abandonné avec largesse à quelqu’un d’autre (en tout cas, il n’a
pas magouillé pour l’obtenir, ou si mal que ses magouilles ont
foiré) : le voisin du haut est un homme honnête, maladroit et
généreux. Un innocent. Un poète. Tandis que celui du bas est du
genre à s’organiser pour que son réveil vrille les oreilles de tout
le dortoir à quatre heures et demie du mat avec toutes ses affaires
bien rangées selon l’ordre où il les enfilera dans de décapantes
exhalaisons d’embrocation. Le monde d’en haut ne
rêve pas de performance ; il est encore un peu dans
l’enfance.
Un de mes premiers voisins d’en haut fut
un énorme jeune rugbyman, dont les gros bras et la grosse tête
sortaient d’un maillot aux grosses rayures blanches et rouges. Ses
pieds dépassaient du lit, et j’imagine que son voisin du dessous
devait être un peu effrayé. Mais en homme du bas, égoïste et
stupide, il ne lui avait pas proposé d’intervertir leurs
couchettes, au risque de finir écrasé. Mon rugbyman ressemblait à
un éléphant de mer échoué sur un minuscule radeau.
En fait, nous avions tous l’air de voguer
sur une mer instable, à Estella, parce que les vieux lits
métalliques « jouaient » un peu, grinçant du bas et se
balançant du haut, comme sous l’effet d’une légère houle. Cette
impression de naufrage collectif était accentuée par une statue de
saint Sébastien, le torse nu transpercé de flèches, à son habitude,
mais qui, pour des raisons inexpliquées, était suspendue par une
grosse corde au plafond, à l’horizontale, comme une figure de
proue, une sorte de trophée capturé sur un vaisseau
ennemi — ou pris sur le nôtre ?
Le dortoir était largement surpeuplé, et
situé fort astucieusement à un carrefour. De nos radeaux, nous
pouvions contrôler la circulation au nombre de phares qui venaient
balayer la pièce, dans un délirant ballet de balises.
Mon jeune, énorme et sportif voisin se
hissa tard sur sa couchette, à la limite du couvre-feu, après avoir
appelé sa maman, sa fédération ou les deux, grâce à tout un
attirail électronique et clignotant accroché à sa ceinture. Il
débrancha ses feux de position, et essaya de
contenir son énorme corps dans les limites de sa petite bannette,
s’allongeant sur le dos, mains croisées sur le ventre. Peu de temps
après, étant donné le peu d’espace entre les lits, une de ses
mains, grande comme une assiette, m’atterrit dans la figure. Je la
rapportai, pardessus notre frontière, à son propriétaire surpris,
qui s’excusa, recroisa les mains et recommença, sans s’en rendre
compte, toute l’opération de zéro. La troisième fois qu’il
s’endormit, les mêmes causes ayant produit les mêmes effets, je lui
proposai une alliance : puisque je ne pourrai éviter d’avoir
son bras dans le nez, autant nous installer confortablement pour
éviter ce désagréable effet de surprise, lassant à la longue. Il se
coucha donc sur le côté et ne laissa émerger de son lit qu’un seul
bras dont il me recouvrit l’épaule ; sa main, placée devant
mon visage, formait un paravent utile contre les phares du monde
extérieur.
Et nous réussîmes ainsi à fermer l’œil un
peu.
C’était un très gentil jeune géant.
*
Entre les pèlerins, qui dorment tant de
nuits ensemble sans coucher ensemble, s’instaure une intimité
d’inspiration assez familiale. La mixité oblige chacun à une
attention et une pudeur qui disparaîtraient sans doute si l’on
séparait les sexes. Là, « plus de raison de se gêner »,
en effet ! À l’exception d’un seul couvent de bénédictines
(peu au parfum, on peut l’espérer, des réalités d’une vie sexuelle
active) où j’ai vu des dortoirs séparés pour hommes et femmes, la
mixité est la règle partout, même dans les
établissements religieux ; il faut croire qu’elle a fait ses
preuves dans la défense et l’illustration de la vertu.
*
Felipe s’approche de notre table, et tous
les convives rentrent le nez sous la nappe ou presque. Le Suisse
devient bleu-mauve et sa femme grise... Raquel me donne un coup de
coude en disant « Ouïe », Sonia regarde ses pieds et
s’éclipse avec Joaõ le Brésilien sur la pointe des baskets. Ceux
qui sont restés le saluent du bout des doigts, sans le regarder. Je
n’y comprends rien. J’ai déjà pris un verre avec ce Felipe, il est
barman à Barcelone, ce qui attire d’emblée la sympathie, et
francophone en plus, qualité rare, surtout pour les Suisses,
logiquement... Cependant ils lui font un sourire hyper forcé,
coincé sur une grimace, pas du tout dans leur genre...
Explication chuchotée : c’est lui
« el Roncador olímpico », le grand
ronfleur, la médaille d’or. Il les a empêchés de dormir deux nuits
de suite, en voulant se mettre à côté d’eux par affection !
Son amitié est redoutable. Mais personne n’aborde la question de
front avec lui. Comme il a une bonne trentaine d’années, on suppose
qu’il a déjà eu l’occasion de vivre avec quelqu’un, et ne peut pas
l’ignorer... Jusqu’à présent, je ne l’ai jamais entendu. Le sort
m’a éloignée de sa funeste zone d’influence, et je saurai désormais
le reconnaître au cas où. Le pire, paraît-il, c’est quand il reste
un lit vide, et qu’il s’y installe au dernier moment, trop tard
pour qu’on puisse lui échapper.
Autant ce type de ronfleur, qualifié
d’olympique (je rencontrerai plus tard les deux
candidats à la médaille d’argent !), est universellement
rejeté, autant les petits ronfleurs réguliers suscitent une assez
vive sympathie et de nombreux fous rires chez les Espagnols, qui
aiment beaucoup le bruit, surtout quand il retarde le moment de
s’endormir. Mais il ne doit pas cependant empêcher le sommeil,
toute la nuance est là.
Il existe quelque part un refuge avec
dortoir particulier pour ronfleurs, objet de la louange générale.
J’ai oublié où il était. Et il n’y en a qu’un, de toute
façon.
L’amour n’attend pas le
roncador.