Chapitre 28

Sur les six jeux recensés, j’en ai téléchargé trois.

Dans Tueurs à la douzaine, le joueur contrôlait douze combattants qui poursuivaient leurs ennemis et les anéantissaient par les moyens les plus abominables : corps coupés en deux, gorges tranchées, têtes empalées sur des fourches et des piques.

Dans Crime au jour le jour, le joueur était un flic qui enquêtait sur la mort de son frère. Les suspects étaient battus et tués à l’aide des armes les plus variées.

Dans Les Dieux de la guerre, le joueur était un guerrier rebelle qui cherchait à se venger des dieux. Les détails des blessures infligées étaient terrifiants de réalité.

Les autres jeux proposés, L’Ile de la mort, Délire de sang et La Maison de la dévastation, je ne les ai même pas regardés.

J’ai attrapé mon téléphone et appelé Slidell. Il a répondu sur un ton revêche.

Je lui ai parlé du site Web de Finney, du lien vers la boutique de Cuervo et de la réclame pour son site de jeux. Il a dit qu’il demanderait à quelqu’un de faire des recherches pour savoir à qui appartenait le domaine du Dr. Games, et si cette seconde Botánica Buena Salud en ligne avait un rapport avec l’herboristerie du santero. Je lui ai dit aussi que j’avais reçu les réponses de l’entomologiste.

— Donnez-m’en un résumé.

— Cuervo a tué le poulet entre le milieu et la fin du mois d’août.

— Autrement dit, avant son embrassade avec le train.

Je n’ai pas relevé.

— Klapec n’a jamais séjourné dans de l’eau, et il est probablement mort deux jours avant que nous ne retrouvions son corps.

Slidell a gardé le silence un moment. Puis :

— C’est une dame du nom d’April Pinder qui a payé la caution de Vince Gunther. Je me demande si elle est au courant du métier de son copain. De toute façon, je sens qu’on va devenir très bons amis, elle et moi.

— Je veux être présente lors de votre rendez-vous.

Slidell a marmonné quelque chose qui ne l’engageait pas et a coupé la communication.

La pendule affichait dix heures moins dix.

Je n’avais pas un instant à perdre.

 

« Petite paroisse au grand cœur », se plaisent à dire les habitants du quartier à propos de St. Ann. Ce matin-là, l’exiguïté de l’église était à déplorer, car il aurait fallu au moins une cathédrale dotée d’un immense parvis et plusieurs bancs à l’intérieur pour accueillir une assemblée aussi nombreuse.

Déjà, en rentrant chez moi, j’avais aperçu des centaines de personnes en train de s’organiser pour participer à la procession. Des policiers municipaux et des shérifs ; des pompiers ; des militaires ; des médecins urgentistes. À croire que toute personne affublée d’un uniforme avait décidé de défiler.

Comme prévu, les civils étaient venus en foule, eux aussi. À certains endroits, derrière les barrières, les gens s’entassaient sur trois ou quatre rangées. Certains pleuraient, d’autres se tenaient par les épaules ou se donnaient la main. Un grand nombre agitait de petits drapeaux américains.

Suivant les conseils de Slidell, j’ai laissé ma voiture au YWCA et me suis frayé un chemin jusqu’à l’église en jouant des coudes. Devant le portail, des centaines de policiers en uniforme bleu montaient la garde. Leurs patrouilles s’étiraient du stationnement jusqu’à Park Road.

Les journalistes étaient extrêmement nombreux, et ce n’était pas seulement la presse locale qui s’était déplacée, mais également CNN et Fox News qui couvraient l’événement pour l’édition nationale. Des hélicoptères tournoyaient au-dessus de nos têtes.

La météo coopérait. Le soleil brillait dans un ciel d’automne bleu profond. Temps parfait pour un reportage à partir d’un cimetière.

Ma carte dûment examinée par un policier en uniforme, puis mon nom vérifié sur une liste, j’ai été autorisée à pénétrer dans l’église.

Slidell était assis au dernier rang dans le bas-côté, les mains serrées entre les genoux, le visage impassible. En m’apercevant, il s’est décalé sur la droite sans un mot. Je me suis glissée à côté de lui.

Immédiatement, une marée d’émotions m’a submergée.

La triste musique que jouait l’orgue, le parfum de l’encens se mêlant à celui des fleurs, le soleil qui filtrait à travers les vitraux, tout contribuait à faire renaître en moi le souvenir d’enterrements passés.

Le petit cercueil blanc de mon frère ; celui de mon père, avec ses bronzes étincelants ; les ballons s’élevant au-dessus du cercueil de la petite fille abattue par des motards à Montréal ; les gypsophiles recouvrant la tombe d’une amie emportée par un lymphome à quarante-trois ans.

J’ai poussé un profond soupir et me suis concentrée sur la musique. La Marche funèbre de Haendel ou de Chopin ? Je n’aurais pas su le dire. En tout état de cause, ce n’était pas une musique faite pour remonter le moral.

La messe a été célébrée par un prêtre âgé. La patronne de Slidell, Harper Dunning, a lu un texte ; Tony Rinaldi a parlé de son père ; diverses personnes ont évoqué le disparu : collègues, amis, paroissiens. L’assemblée s’est levée, assise, agenouillée ; a repris en chœur les cantiques.

Tout au long de la cérémonie, la silhouette osseuse et tout en angles de Rinaldi n’a cessé de voguer devant mes yeux. Je l’ai revu dans mon bureau, prenant des notes avec son stylo Mont-Blanc ; dans mon labo, examinant le crâne de Susan Redmon ; sur les pavés de la Trente-Cinquième Rue, son veston Armani trempé de sang.

À la fin, des policiers formant une haie d’honneur ont accompagné le cercueil jusque sur le parvis et l’assistance est sortie au son d’une musique de Mendelssohn.

Slidell m’a accompagnée au cimetière. Une scène semblable s’y est déroulée. Policiers, amis endeuillés, reporters, dignitaires.

Larabee était là, en complet noir. J’étais en train de m’approcher de lui quand une main s’est posée sur mon épaule. Je me suis retournée.

Deux yeux verts ont plongé dans les miens.

Sans un mot, Charlie m’a attirée contre lui et serrée dans ses bras.

Je l’ai repoussé des deux mains en reculant. Pourquoi ? Gênée de cette démonstration d’affection en public ? De ma cuite de l’autre jour ? De notre partie de jambes en l’air ?

— Comment tu vas depuis dimanche ? m’a-t-il demandé gentiment.

— Bien.

Réponse sèche, car, derrière ses lunettes de soleil, Slidell, tourné vers son chef, ne perdait pas une miette de la conversation.

— Je t’ai appelée plusieurs fois.

— J’ai été hyperdébordée.

— Je m’inquiétais.

— Je vais très bien. Merci pour la nourriture.

— J’aurais préféré te faire la cuisine moi-même.

— Écoute, je…

— Tu n’as rien à m’expliquer. Pas à moi, Tempe. Tu as agi comme tu le jugeais bon.

— Ce n’était pas moi, Charlie, ai-je répliqué sans bien savoir ce que j’entendais par là.

— Pas toi jeudi, ou pas toi dimanche ?

Sa très courte pause ne m’a pas laissé le temps de répondre.

— On pourrait remettre ça ? Peut-être vendredi ?

— Charlie, jusqu’à tout récemment j’avais quelqu’un dans ma vie, un détective de Montréal. Je ne suis pas sûre que ce soit terminé.

J’ai marqué un temps, ébahie par mes propres paroles. Évidemment que c’était fini entre Ryan et moi. D’ailleurs, je ne pensais plus à lui.

— Loin des yeux, loin du cœur.

Sur bien des points, ai-je pensé en moi-même.

Stand by your man, a-t-il entonné doucement.

Sa réaction m’a arraché un sourire. Cette chanson était devenue une plaisanterie pour notre équipe de tennis après qu’un camarade l’avait fait jouer dans l’autobus pendant toute une journée, lors d’un déplacement pour un tournoi à l’autre bout de l’État.

— Comment s’appelait-il, déjà, celui qui avait cette cassette ? ai-je demandé.

— Drek Zogbauer.

— On avait un Drek Zogbauer dans l’équipe ?

— Je me rappelle les applaudissements quand le chauffeur a fini par lui confisquer son magnétophone. J’étais le premier à applaudir. Ce n’était pas le genre de musique qu’appréciaient les gens de mon groupe.

— Ton groupe ?

— Les supporters des Yankees.

J’ai souri à nouveau, malgré moi.

— Je comprends, Tempe. Il faut du temps pour se remettre.

Oui, tu en sais quelque chose, me suis-je dit encore en revoyant la photo de sa femme tuée dans la tragédie du 11  septembre.

— Je suis désolée.

— Je suis très patient.

Il a souri. Un sourire triste, mais un sourire quand même.

Là, c’est moi qui l’ai serré dans mes bras.

Comme il s’éloignait, je l’ai rappelé.

— Charlie.

Il est revenu.

— Asa Finney a été libéré ce matin.

— L’accolade est superflue, vraiment. Être reconnu comme le meilleur avocat au monde me suffit amplement.

J’ai levé les yeux au ciel.

— Dis-moi sincèrement, entre nous : est-ce que tu le considères comme capable de violence ?

Il a fait un pas vers moi et m’a dit en baissant le ton :

— Pour ne rien te cacher, Tempe, je partage l’opinion de Slidell sur un point : ce gars-là est vraiment bizarre.

— Merci.

Charlie ne s’était pas éloigné de dix pas que Slidell abandonnait Dunning pour me rejoindre.

— C’était touchant, ça.

— On était dans la même classe à l’école secondaire.

— Heureux pour vous deux.

Je n’ai pas réagi.

— Dunning est hors d’elle.

— À cause de quoi ?

— Le standard croule sous les appels de citoyens outragés qui veulent savoir pourquoi la police ne met pas tous les sorciers sous les verrous.

— Jésus.

— Ouais. Ils pensent que le petit Jésus serait d’accord.

Je me suis contentée de secouer la tête.

— Dunning vous tient en partie pour responsable.

— Comment ça ?

— Elle dit que vous avez excité Lingo sciemment.

— Moi ?Je l’ai excité ?

— La plupart des gens qui appellent vous traitent de fille de Satan.

Une demi-heure plus tard, le cortège arrivait au cimetière. Une courte cérémonie s’est tenue devant la tombe. Une salve de pistolet a été tirée, puis le cercueil de Rinaldi a été descendu dans la fosse. La foule a commencé à se disperser.

Le cercueil était presque entièrement recouvert de terre quand j’ai aperçu Larabee, les yeux rivés sur le portail donnant sur Sharon Amity Road. Intriguée, j’ai suivi son regard.

Tels des fourmis agglutinées sur une gomme à mâcher, des journalistes se pressaient autour de deux hommes dont je ne distinguais que le sommet des têtes. L’une argentée, l’autre rase.

Boyce Lingo et son assistant. Profitant de l’enterrement de Rinaldi, ils relayaient leur message de haine et d’intolérance.

Mon corps s’est transformé en un bloc de rage chauffé à blanc.

Sur un coup de coude à Slidell, j’ai foncé vers l’attroupement. Oh, pas dans l’intention de prendre à partie le prédicateur, mais de me dresser bien droite devant lui, pour lui rappeler sa responsabilité dans les paroles qu’il prononçait.

Haletant dans mon dos, Slidell se démenait pour ne pas se laisser distancer. J’entendais d’autres bruits aussi, probablement produits par Larabee.

Je me suis faufilée au premier rang de la mêlée et me suis placée juste en face de Lingo.

— Finney a été remis en liberté ce matin. Libéré afin qu’il puisse payer un tribut à Satan parmi nous, adorer Lucifer et introduire le mal en ce monde.

Tais-toi, Brennan.

— Cela dit, la loi est la loi. Tout homme a des droits et c’est ainsi qu’il doit en être, car tel est notre système. Mais qu’advient-il lorsque ce système commence à s’effriter ? Quand les criminels jouissent de droits supérieurs à ceux des citoyens qui respectent la loi, comme vous et moi ?

Reste calme.

— Je vais vous dire ce qui se produit : O.J. Simpson joue au golf en Floride, Robert Blake et Phil Spector donnent des soirées dans leurs belles demeures d’Hollywood.

— Entendez-vous par là que les jurés se sont trompés ? a crié un journaliste. Que ces hommes sont coupables ?

— Je dis que notre gouvernement perd sa capacité à nous protéger contre les criminels et les terroristes.

— Vous expliquez ça comment ? a lancé quelqu’un d’autre.

— Je vais vous le dire : quantité de lois restreignent le pouvoir de la police et des procureurs, ce qui fait qu’ils se retrouvent pieds et poings liés face au crime. Ces lois doivent être abrogées. Vous pouvez compter sur moi pour m’en charger si je suis élu au Sénat.

À ces mots, j’ai oublié l’avertissement de mon patron, oublié ma décision de me cantonner à un silence intimidateur.

— Le lieu est mal choisi pour faire campagne, commissaire.

Comme la fois précédente, tous les yeux se sont tournés vers moi. Perches et objectifs ont suivi le mouvement.

Un sourire bienveillant s’est épanoui sur le visage de Lingo.

— Nous voici à nouveau face à face, Dr Brennan. Mais vous avez raison.

— Asa Finney a des droits tant que le tribunal n’en a pas décidé autrement.

— Absolument.

— Et ce droit comprend celui d’adorer le dieu de son choix, ai-je ajouté, ne pouvant laisser passer une occasion aussi belle d’exprimer ma pensée.

Le visage de Lingo s’est assombri.

— En vénérant Satan, Asa Finney et les personnes de son acabit ignorent la bonté de Jésus. Ils traitent par le mépris ce que le Sauveur a fait pour nous.

Puis, levant les mains en un geste empreint de modestie, Lingo a ajouté :

— Mais cela suffit. Le Dr Brennan a raison. Que la journée d’aujourd’hui soit consacrée à pleurer un digne officier de police qui a donné sa vie en faisant son devoir !

Sur ces mots, il s’est éloigné.

Sous l’effet de l’adrénaline, j’ai voulu lui emboîter le pas. Tête-Rase m’a bloqué la voie.

— J’ai des questions à poser au commissaire loin des micros.

Il a secoué la tête, les pieds ancrés au sol. D’une voix coupante, je lui ai ordonné de s’écarter de mon chemin.

— Prenez rendez-vous, a répliqué Tête-Rase, impassible.

J’ai voulu le contourner. D’un bras tendu, il m’en a empêchée. J’ai fait un pas sur la gauche. Il a fait de même.

J’allais dire quelque chose que j’aurais regretté par la suite quand Slidell est intervenu, hors d’haleine :

— Plus un geste ! Est-ce que vous avez fait preuve de brutalité envers la petite dame ?

Petite dame ?

Tête-Rase a pris une posture de dur à cuire, les bras croisés sur la poitrine, le menton relevé, la tête penchée sur le côté.

— Votre nom ? a exigé Slidell.

— Qui êtes-vous pour me le demander ?

— Voilà qui je suis, trou de cul, a répliqué Slidell en produisant sa plaque.

— Glenn Evans.

— Vous êtes son domestique ? a poursuivi le détective en désignant du menton la silhouette de Lingo.

— Je suis le secrétaire personnel du commissaire Lingo, a expliqué Tête-Rase d’une voix plus aiguë que je ne l’aurais imaginé venant d’un homme de sa taille.

— Parfait. Vous allez pouvoir m’expliquer pourquoi mon coéquipier, qu’on enterre aujourd’hui, avait téléphoné à votre patron ?

— Vous êtes sérieux ?

— À mort.

— C’est du harcèlement.

— Poursuivez-moi en justice.

— Je ne comprends rien à votre question. Néanmoins, je vais y répondre. Toutes les communications passent par moi, personnellement, et aucun appel d’un policier n’est parvenu au bureau du commissaire Lingo.

— Vous avez l’air bien sûr de vous. Pas besoin de vérifier sur un agenda ou autre chose ? a rétorqué un Slidell que le ton belliqueux d’Evans n’incitait pas au flegme. Vous préférez être interrogé au poste ?

— Vous ne me faites pas peur, détective.

Slidell est resté à le dévisager en silence.

Evans s’est pincé puis tiré le nez. A ramené ses mains près de ses hanches. A tambouriné des doigts sur sa ceinture.

— Et quand aurait eu lieu cette prétendue conversation ?

— Juste avant que le détective Rinaldi ne se fasse descendre. Si vous voulez, je peux demander au juge une assignation à produire les relevés téléphoniques. C’est à votre guise.

— Bullshit.

— Jimmy Klapec. Ce nom vous dit quelque chose ?

— C’est qui ?

— C’est moi qui pose les questions.

Une veine s’était mise à danser la rumba sur le front de Slidell.

— Le commissaire tient à rester à l’écoute des attentes de la population. Pour ce faire, il effectue toutes sortes de déplacements, visite des refuges pour sans-abri, des soupes populaires, des refuges pour femmes battues, des banques alimentaires, et j’en passe… Il rencontre partout un grand nombre de gens.

Slidell restait de marbre, espérant pousser Evans à continuer. Son stratagème a réussi.

— Le commissaire a pu rencontrer ce Klapec n’importe où.

— C’est un jeune de dix-sept ans, qui avait fugué et vivait dans la rue… Le détective Rinaldi était chargé de l’enquête sur son meurtre. C’est pour ça que je serais curieux de savoir pourquoi il a appelé votre patron.

— Attendez. Vous parlez du garçon découvert près du lac Wylie ? Je croyais qu’il s’agissait d’un meurtre satanique.

— Qu’est-ce qui vous fait penser ça ?

— C’était dans tous les journaux.

Slidell a réédité son coup du silence. Il devait chercher à impressionner Evans, car il était peu probable qu’il puisse considérer Lingo comme un suspect éventuel.

— Comprenez-moi bien, M. Lingo est un politicien. Il est en contact avec une foule de gens venant de tous les coins du pays. S’il a rencontré un fêlé de Half Moon qui vit dans la rue – et je ne dis pas qu’il l’a fait –, cela ne signifie pas pour autant qu’il est impliqué dans son meurtre.

J’étudiais le visage d’Evans pendant qu’il parlait. Il avait la peau grêlée de cicatrices, comme Asa Finney, mais sa ressemblance avec le sorcier s’arrêtait là. Evans avait les cheveux blonds et coupés au ras du crâne, des yeux rapprochés, des pommettes hautes et une mâchoire en pointe qui se terminait en un menton proéminent.

— Juste pour rigoler, M. Evans, où était votre patron le 9 octobre ?

— Le commissaire a pris la parole à Greensboro. J’étais avec lui. Si vous voulez, je peux vous faire parvenir le programme de la soirée ainsi que des reçus de cartes de crédit émanant de son hôtel et de différents restaurants. Ah, et aussi, si vous y tenez, je peux produire près de quatre cents témoins oculaires.

Evans avait répondu rapidement, sans prendre le temps de réfléchir. J’ai noté cela dans un coin de mon cerveau.

Au milieu de la foule, j’ai repéré Larabee en grande conversation au téléphone. Probablement parlait-il avec Larke Tyrell et s’efforçait-il de minimiser mes récentes frasques. Connaissant le médecin légiste en chef, il avait peu de chances d’y parvenir.

Au moment où je reportais mon attention sur Evans, j’ai senti comme une sonnette d’alarme au niveau des limbes de mon cerveau.

Qu’est-ce qui avait titillé mon inconscient ?

La voix d’Evans ? Son acné ? Finney ? La référence au satanisme ?

Impossible de le savoir. La cellule de mon cerveau qui avait dressé l’oreille avait déjà perdu tout intérêt pour cette question.

Dommage. Si la connexion synaptique s’était faite à ce moment-là, peut-être qu’une vie aurait été épargnée.