CHAPITRE XVII

Pendant qu’ils avançaient dans les tunnels, Jaina, Lowie et DTM décidèrent que l’étape suivante consisterait à libérer Nien Nunb et ses fidèles collaborateurs. Avec leur aide, peut-être réussiraient-ils à reprendre le contrôle de Kessel.

Au cours des heures précédentes, les jeunes Jedi avaient entendu des équipes de gardes arpenter les passages principaux en s’interpellant.

Czethros redoublait d’efforts pour les capturer, mais les mercenaires faisaient tant de bruit et se montraient si maladroits qu’il aurait fallu être idiot pour tomber entre leurs griffes.

Or, Jaina et Lowie étaient loin d’être sots.

À présent que Czethros avait mobilisé toutes ses ressources pour débusquer les saboteurs, les jeunes Jedi avaient un gros avantage : il restait très peu de gardes pour surveiller les prisonniers. Un seul se tenait encore devant le champ de force où étaient retenus Nien Nunb et les mineurs.

Jaina observa le mercenaire à la peau grise, à la mâchoire inférieure pendante, à la bouche dépourvue de lèvres et aux yeux orange profondément enfoncés dans leurs orbites. Il ressemblait à un cadavre en voie de momification, mais la jeune fille supposa qu’il en était de même pour tous les membres de son espèce.

Le garde ne portait qu’un blaster à la ceinture. Les jeunes Jedi auraient facilement pu lui régler son compte, mais ils répugnaient à tuer sans nécessité et avaient décidé de faire appel à leurs pouvoirs pour se débarrasser de lui.

Jaina chuchota quelque chose à l’oreille de Lowie. Ils se concentrèrent, laissant la Force envahir leur esprit. Puis ils sondèrent prudemment les environs jusqu’à ce qu’ils effleurent la conscience du mercenaire, lui envoyant des pensées apaisantes pour le plonger dans un état à mi-chemin entre l’hypnose et le sommeil.

Quand les jeunes Jedi avancèrent dans le passage, le garde les aperçut et réagit si vivement qu’ils faillirent perdre le contrôle de son esprit. Jaina se dirigea vers lui d’un pas rapide.

— À votre place, je ne remuerais pas… Surtout si j’avais un rat-scorpion de Kessel sur mon épaule et qu’il s’apprêtait à me piquer.

Le garde baissa la tête et ses yeux s’écarquillèrent d’horreur. Sous l’influence de la Force, il voyait le monstre perché sur l’épaulette de son uniforme. Il se figea et gémit :

— Enlevez-le ! Enlevez-le !

Lowie se précipita. Au lieu de dégainer son blaster et de tirer sur le jeune Wookie, le garde se brossa frénétiquement le cou et l’épaule pour tenter d’en déloger le rat-scorpion…

Lowie le saisit par le col et le poussa vers le champ de force étourdissant qui retenait les prisonniers. Le mercenaire s’écroula.

— C’est presque trop facile, dit Jaina.

— Ça le sera beaucoup moins quand il s’agira de pirater les codes de sécurité du Soleil Noir, rappela DTM.

— Peut-être, fit la jeune fille en regardant Lowie. Mais vous êtes là pour m’aider.

Nien Nunb et ses employés se rassemblèrent de l’autre côté de la barrière d’énergie scintillante en criant des encouragements aux jeunes Jedi. Ils savaient qu’ils seraient bientôt libres.

Lowie et DTM mirent quelques instants à couper le générateur de champ de force. Les étincelles se volatilisèrent, et les mineurs se ruèrent dans le passage. Riant aux éclats, ils remercièrent leurs sauveurs.

Jaina regarda les prisonniers qui avaient envahi le tunnel et comprit que le vent venait de tourner. À son arrivée sur Kessel, Czethros avait bénéficié de l’élément de surprise. Mais il avait perdu son avantage, et la situation n’allait pas tarder à se retourner contre lui.

Pendant que les envahisseurs continuaient à passer au peigne fin les tunnels les plus éloignés, Nien Nunb conduisit les évadés vers une armurerie doublée d’une salle de contrôle. Là, ses employés pourraient récupérer de l’équipement et des armes afin de s’emparer à nouveau des mines.

Une fois à l’intérieur, le petit Sullustéen entra ses codes dans l’ordinateur et saisit très vite une suite de commandes. Lowie l’assistait en grognant des suggestions que DTM traduisait aussitôt.

Nien Nunb interdit l’accès de tout le complexe à Czethros et à ses mercenaires.

Ragaillardis, les mineurs demandèrent la permission de regagner leurs quartiers pour s’assurer que les envahisseurs n’avaient pas détruit ou volé leurs affaires.

Nien Nunb secoua la tête à regret : ils ne pouvaient pas se permettre de disperser leurs forces.

Jaina savait que la bataille n’était pas encore gagnée. Un rude combat les attendait s’ils voulaient reprendre le contrôle des mines.

— Pouvons-nous utiliser cette salle comme base d’opérations ? demanda-t-elle. Elle est bien protégée, et nous n’aurons pas de mal à la défendre.

— Sans problème, dit Nien Nunb.

La jeune fille expliqua comment Lowie et elle avaient saboté l’émetteur. Les choses se présentaient mal pour Czethros, et la libération des prisonniers n’allait pas lui faciliter la tâche.

Nien Nunb se connecta aux holocaméras de sécurité. Lowie grogna en découvrant l’image qui apparut sur l’écran.

Des silhouettes armées avançaient dans le tunnel ; le traître Kymn marchait à leur tête. Derrière lui, ils reconnurent le capitaine de cargo qui avait trompé Nunb.

Le Sullustéen émit un bruit de gorge méprisant et couina de brèves instructions, ordonnant à tous les mineurs de rester sur leurs gardes. Il allait régler le problème : n’avait-il pas une revanche à prendre ?

— Et nous ? lança DTM. Qu’allons-nous faire ?

— Nous tenir prêts à intervenir au cas où, répondit Jaina.

Les mineurs brandirent leurs armes et se préparèrent au combat pendant que Nien Nunb se faufilait hors du centre de contrôle et s’engageait dans le couloir obscur. En proie à une colère qu’il n’avait encore jamais ressentie, le timide Sullustéen se jura de montrer au capitaine blond comment se comporte un véritable héros.

Il marchait d’un bon pas, tout en s’efforçant de mettre un plan au point. L’équipe de Kymn serait surprise de le voir, car elle cherchait des saboteurs inconnus.

Nien Nunb avança encore. En l’apercevant, le second administrateur et le capitaine blond sursautèrent.

— Il s’est échappé ! hurla Kymn. Emparez-vous de lui ! Non : tirez-lui dessus !

— Je croyais que Czethros voulait le garder comme otage, objecta le capitaine blond tandis que les gardes se précipitaient.

— Ne t’en fais pas pour ça ! cria Kymn. Ce misérable rongeur me mène la vie dure depuis trop longtemps. J’aimerais bien inverser les rôles, pour une fois.

Les mercenaires du Soleil Noir chargèrent. Avec une panique partiellement feinte, Nien Nunb émit un couinement, fit demi-tour, puis s’enfuit le long du tunnel sinueux.

Les gardes éclatèrent de rire. Persuadés que leur proie n’avait aucune chance, ils se lancèrent à sa poursuite sous la direction du capitaine de cargo et de Kymn qui leur hurlait des ordres.

Quand il eut franchi le dernier angle, avant la salle de contrôle, Nien Nunb se plaqua contre la paroi. Ses fidèles employés jaillirent en brandissant leurs armes, flanqués par les deux jeunes Jedi.

Pris au dépourvu, les gardes s’arrêtèrent ; ceux du fond bousculèrent leurs camarades de devant. Paniqués, ils voulurent battre en retraite. Ils ne s’attendaient pas à rencontrer de résistance.

Pensant que Kessel était en son pouvoir, Czethros avait renvoyé les meilleurs parmi les gardes sur d’autres champs de bataille. Désormais, sa base d’opérations était son point faible.

Les évadés poussèrent des cris de triomphe et visèrent. Des tirs de blaster fusèrent. Les envahisseurs ouvrirent le feu à leur tour et réussirent à blesser un des mineurs.

Le second administrateur réalisa très vite que cette embuscade lui serait fatale. Deux de ses mercenaires s’écroulèrent en hurlant. Les défenseurs étaient bien protégés par la configuration du tunnel, alors que ses troupes se retrouvaient exposées.

— À gauche ! ordonna-t-il. Par ici ! On file !

Dans la confusion, les gardes tirèrent encore quelques rafales qui ne touchèrent aucun mineur. Les évadés ripostèrent.

Personne n’était sérieusement blessé.

Et les forces du Soleil Noir avaient fui.

Les défenseurs les poursuivirent en poussant des cris de vengeance. Leurs voix se répercutèrent contre les murs tandis que l’équipe de Kymn s’enfonçait dans les profondeurs de la mine. Nien Nunb émit un couinement aigu ; ses employés battirent en retraite à regret.

De retour dans la salle de contrôle, le Sullustéen se mit à entrer des codes et à taper des commandes. Des portes métalliques se refermèrent dans les tunnels. Lowie éclata d’un rire tonitruant et Jaina consulta le moniteur pour voir ce que Nien Nunb venait de faire.

— Vous voulez dire qu’ils sont prisonniers dans les mines ?

Le Sullustéen sourit. Il expliqua que les zones d’excavation les plus retirées pouvaient être isolées à la discrétion de l’administrateur en chef. Kymn et ses mercenaires étaient désormais piégés par du plastacier blindé, à un endroit où ils ne pourraient causer de tort à personne. Les forces de sécurité de Kessel iraient les y chercher une fois qu’elles auraient rétabli l’ordre sur la planète.

L’humeur était au soulagement. Les défenseurs se félicitèrent de cette première victoire éclair.

Pourtant, Jaina se sentait mal à l’aise. Un obstacle majeur demeurait : Czethros en personne.