CHAPITRE XVII

Dans un coin de l'astroport, Marc attendait la fin des conversations entre Parker et le gouverneur. Enfin, le colonel vint le rejoindre.

-J'ai les mains libres! L'annonce de la destruction de six pirates a réjoui le gouverneur. Prétextant qu'ils pouvaient avoir des complices sur Terrania XXV, j'ai obtenu l'ouverture d'une enquête. Je vais trouver le capitaine Kirchner qui me donnera accès à son ordinateur.

-Pourquoi perdre votre temps? Nous savons tous les deux qui est le coupable.

-Nous n'avons aucune preuve!

-C'est inexact! Il y a les aveux de Shepard pour le meurtre de Standman. Inculpez Furster de complicité, ce qui vous permettra ensuite d'enquêter sur les autres aspects de l'affaire.

Parker était un homme d'action et il préférait les solutions rapides.

-Entendu, je fais sortir un trans armé et dix hommes. Nous irons cueillir votre suspect. Au diable, les susceptibilités de la police locale.

-Il serait prudent que je vous précède. Le repaire de Furster est bien gardé et il serait désolant que nous lui laissions une occasion de filer ou de détruire des preuves.

Sortant une radio de sa poche, Parker la tendit à Marc.

-Nous resterons en contact permanent. Le brouillage est automatique et nous ne risquons pas qu'une oreille indiscrète surprenne nos conversations.

A la sortie de l'astroport, Marc rejoignit Ray et Oliver qui se morfondaient dans le trans. Il tendit des plaques de monnaie au jeune homme.

-Va à l'hôtel retenir des chambres et attends-nous.

-J'aimerais voir si Maggie...

-O.K. Mais ne t'éloigne pas de l'hôtel.

Oliver arborait une mine embarrassée.

-Marc, je voulais te demander... pour Lina... Crois-tu que je doive dire à Maggie...

-Écoute ma vieille expérience, sourit Marc. Mieux vaut te taire pour l'instant. Plus tard, lorsque vous serez vieux...

Le trans démarra en douceur, prenant directement la route menant à la propriété de Furster.

-Parfait, annonça la voix de Parker. Nous restons à cinq minutes derrière vous.

Longeant la route sinueuse à travers bois, Ray ricana :

-J'espère que cette fois nous ne serons pas interceptés !

Dix minutes plus tard, ils parvinrent sans encombre devant la grille de la propriété. Les deux mêmes gardes jaillirent de leur guérite, fusil-laser à la main.

D'un geste très naturel, Ray sortit du trans, les bras écartés, les mains bien visibles.

-Nous avons rendez-vous avec M. Furster.

-Je dois demander confirmation. Nous n'avons pas été informés.

Un garde s'approcha de l'interphone mural tandis que l'autre surveillait les visiteurs.

D'un souffle puissant, Ray projeta la grenade anesthésiante qu'il avait dissimulée dans sa bouche. Quinze secondes plus tard, les deux gardes s'effondrèrent sans avoir compris ce qui leur arrivait. L'androïde pénétra dans la guérite pour débrancher les systèmes de sécurité et ouvrir la grille.

-La voie est libre, annonça Marc à la radio.

Parker répondit d'un ton hésitant, ennuyé :

-C'est une véritable effraction que vous me demandez de commettre.

-Nullement ! Vous constaterez seulement que la grille est ouverte et que les gardiens sont drogués. Il est du devoir de tout policier de s'informer si un délit n'a pas été commis !

Ray ne tarda pas à arrêter le trans devant l'entrée principale de la propriété. Les deux amis mettaient pied à terre quand un garde armé émergea de l'ombre, un fusil-laser à la main. Il était grand, le visage poupin, les cheveux blonds.

-Les mains en l'air! Ne bougez plus.

Très décontracté en apparence, Marc leva les bras.

-M. Furster nous attend.

Le regard méfiant, l'homme grogna :

-Comment avez-vous franchi la grille? Je n'ai pas été prévenu.

-M. Furster désire une discrétion absolue. Je dois l'aider à évacuer des visiteurs impromptus, dit Marc avec un clin d'oeil complice.

Le garde hésita, baissa son arme.

-Je préviens le patron.

Il commit l'erreur de se retourner pour saisir un téléphone intérieur. Ray plongea sur lui et l'assomma d'une solide manchette sur la nuque.

Furster était assis dans son bureau en compagnie de deux hommes vêtus de combinaisons d'astronautes. Ils sursautèrent en voyant la porte s'ouvrir et Marc apparaître.

-Ne vous dérangez pas ! Je venais simplement vous annoncer mon retour. J'ignorais que vos aviez des visiteurs.

-Comment... comment êtes-vous arrivés ici? hurla Furster. Hans! À l'aide!

-Si vous appelez le charmant angelot blond qui était dans l'entrée, je crois qu'il dort.

-Qui est ce type ? questionna un des astronautes. Il faut le liquider en vitesse sinon dans quelques heures tout Terrania XXV saura que nous avons trouvé refuge ici !

Furster plongea la main dans le tiroir de son bureau.

-Je vous le déconseille, lança une voix sèche. Vous êtes en état d'arrestation. Mes hommes ont ordre d'ouvrir le feu en cas de résistance.

Le colonel Parker avait pénétré dans la pièce, suivi de quatre miliciens, bien sanglés dans leur uniforme noir de la Sécurité Galactique. Ils pointaient leurs armes vers les trois hommes qui, une longue minute, restèrent figés de surprise.

Enfin, ils se levèrent avec précaution et un milicien leur entrava les mains derrière le dos par des menottes magnétiques.

-Je proteste! cria Furster. Je ne connais pas ces hommes. Ils se sont introduits chez moi et j'ai dû les héberger sous la contrainte.

Devant l'absence de réaction de Parker, il se fit menaçant:

-Prenez garde ! J'ai des relations très haut placées. S'il le faut, le gouverneur interviendra... Vous serez cassé de votre grade...

En dépit de ses vociférations, Furster fut traîné hors de la pièce par un milicien tandis qu'un autre empilait avec méthode tous les papiers se trouvant dans le bureau.

-Votre hypothèse était exacte, capitaine, sourit Parker. Pour complicité de piraterie, Furster sera jugé par l'ordinateur de la Terre et non sur Terrania XXV. Il ne pourra donc pas bénéficier d'amitiés locales. Je vais appeler des renforts pour boucler le personnel de la propriété et les interroger.

Avec un discret soupir, il ajouta :

-Comme je ne pense pas indispensable de mentionner votre intervention, il serait préférable que vous vous éclipsiez.

-Nous ne sommes déjà plus là, colonel. Si vous voulez me joindre, nous allons à l'hôtel.