CHAPITRE VI
Au moment où les barques atteignirent la grève, le groupe se trouvait sur la colline, incapable d’entendre ce qui se passait.
— Je me fais du souci pour les autres villageois, dit Oliver à Mundina. Nous les avons abandonnés, et j’en connais certains depuis l’enfance.
— Quand les pillards arriveront au village, répondit-elle, il sera déserté. Il leur faudrait chercher des heures avant de trouver la moindre personne ou le plus petit objet de valeur. Nous savons par expérience qu’ils incendient les demeures pour en chasser les habitants. Nous avons décidé de nous enfuir s’ils arrivaient et de laisser les portes grandes ouvertes.
— Tu prends ça très sereinement.
— J’ai le choix ? Non. Mais dis-moi, comment es-tu tombé sur cette pitoyable créature ? fit-elle, désireuse de changer de sujet de conversation.
— Gil ? Nous avons fait connaissance au bord de la route, à deux ou trois heures de Gérone. Nous l’avons appâté avec un morceau de pain, pas vrai, mon gars ?
Sous le capuchon, le grommellement pouvait ressembler à un acquiescement.
— En échange de pain et d’un peu d’excellent poulet, il nous a raconté une histoire. Fantastique ou étrange. Cela dépend si elle était véridique ou non, ajouta Oliver.
— C’était vrai, señor, dit la petite voix sous le capuchon. Je ne raconte pas de mensonges.
— Non, intervint Mundina, mais tu en as quand même fait un. Un mensonge de taille.
— Señora, vous aviez promis de ne rien dire.
— Non, j’ai promis de t’aider. Et je ne puis le faire si Oliver ne connaît pas la vérité. Tu es toujours en grand danger, même avec cet habit de moine. Dis à Oliver quel âge tu as.
— Quinze ans, avoua Gil.
— Quinze ans ? répéta Mundina.
— Et j’en aurai bientôt seize.
— Je n’y crois pas, fit Oliver. Il a plutôt l’air d’en avoir onze que seize.
— Et ton nom ? Allez, dit-elle sur un ton plus pressant. C’est le moment. Dis ton nom, et abandonne Gil, par tout ce qui est saint.
— Clara, fit la petite voix sous le capuchon.
— Plus fort.
— Clara ! lança l’enfant avec colère.
— Voilà, c’est ça, son mensonge. Au premier regard, j’ai su que c’était une fille. Et une belle fille, de surcroît. Elle a pris les ciseaux de sa maîtresse et s’est coupé les cheveux, elle a emprunté une tunique et elle s’est faite garçon. Mais elle ne ressemble pas plus que moi à un garçon. Tu n’es pas très perspicace, Oliver.
— Par Notre-Dame ! s’écria Oliver en regardant Clara. Tout ce que j’ai pu voir, c’est qu’il… qu’elle était timide et redoutait les soldats. Avec toute la chaleur qu’il faisait hier, elle n’a pas ôté ses habits pour nous accompagner dans le lit du torrent. Je comprends pourquoi, à présent.
Une idée lui traversa l’esprit.
— Quant tu étais cachée dans les buissons, tu nous as… tu m’as vu me sécher ?
— Je n’ai rien vu, señor.
— Et alors, quelle importance ? intervint Mundina. Même sans tes vêtements, tu es un très bel homme !
Devant leur gêne à tous les deux, elle éclata de rire.
— Ah, on ne te changera pas, toi ! dit Oliver. Nous ne lui avons pas facilité les choses. Comme elle était mal à l’aise avec nous, nous avons fait de notre mieux pour l’assurer que les jeunes garçons ne nous intéressaient pas. Cela n’a pas dû la rassurer ! ajouta-t-il en éclatant de rire. Voilà qui est parfait, maîtresse Clara. Certaines énigmes sont à présent résolues, mais dis-moi, en toute franchise, pourquoi ta maîtresse voulait te vendre. Certainement pas parce que tu as cassé une cruche. Elle n’aurait pas pris tant de risques pour un peu de vaisselle en terre.
— La maîtresse n’était pas une femme très avenante.
— Qu’entends-tu par là ?
— Elle était tout le temps à crier après le maître. Même s’il le méritait, ajouta-t-elle.
— Un vieillard lubrique, c’est ça ?
— Pas si vieux que ça, mais oui, vicieux. Et désagréable.
— Il t’a rendu la vie difficile, dit doucement Oliver. Et tu ne savais où aller ?
— La cuisinière a essayé de s’occuper de moi. Elle m’a même laissé partager son lit. Et la maîtresse ne le quittait pas des yeux. Malgré tout, elle croyait que c’était ma faute, ce qui n’était pas le cas, je vous le jure. Je ne l’ai jamais encouragé. Je le trouvais répugnant.
— Ta maîtresse a donc décidé de se débarrasser de toi et de ramasser une belle somme d’argent par la même occasion. Mais ton maître se serait plaint. Il aurait pu encourir de gros ennuis, si une servante de sa maison, une petite chrétienne, était vendue à des trafiquants d’esclaves.
— Elle a attendu qu’il quitte la ville, expliqua Clara.
— C’est là que tu t’es enfuie ?
— La cuisinière m’a parfaitement expliqué ce qu’il adviendrait de moi si j’attendais pour être vendue. Les filles comme moi sont emmenées dans des pays étrangers et vendues aux hommes pour leur amusement ; quand ils en sont las, ils les revendent aux bordels pour qu’elles servent aux marins.
— La cuisinière n’était pas loin de la vérité, admit Oliver.
— J’ai pris une tunique trop grande pour moi dans le coffre à vêtements alors que je rangeais des draps, j’ai fait un paquet avec ma robe et le pain que la cuisinière m’a donné et je suis partie pour Gérone.
— Le reste de l’histoire est-il vrai ?
— Oui, sauf que j’étais chez les sœurs, pas chez les frères, répondit-elle avec une ébauche de sourire.
— Qu’est-ce que je vais pouvoir faire d’elle ? dit Oliver en levant les yeux au ciel. Je pourrais placer une douzaine de jeunes hommes intelligents chez des connaissances qui me sont obligées et qui souhaitent former un apprenti, mais je n’ai pas l’habitude des jeunes femmes !
— Ce qu’il lui faut, c’est un mari, déclara Mundina.
— Mais comment puis-je espérer en trouver un ? demanda Clara. Je n’ai pas de famille, pas d’amis et surtout, pas de dot.
Là-dessus, elle éclata en sanglots à fendre le cœur.
La pluie s’était également abattue sur Gérone la nuit précédente et, ce matin-là, la cour de la maison du médecin était à la fois propre et fraîche. Les arbres scintillaient de gouttes d’eau, et la table du déjeuner avait été dressée à un endroit où elles ne risqueraient pas de tomber sur le pain, le fromage et les fruits.
— Vous n’avez pas encore parlé à Son Excellence ? demanda Judith, l’air inquiet. À propos des effets du défunt, évidemment.
— Vous savez pertinemment que non, lui répondit son mari. À peine me suis-je allongé hier après-midi pour une sieste bien méritée que le jeune fils de maître Astruch est tombé malade. Nous sommes restés auprès d’eux jusque tard dans la nuit. N’est-ce pas vrai, Raquel ?
— Si, papa, dit sa fille en bâillant. Je suppose qu’il doit aller mieux puisqu’il ne nous a pas rappelés.
— Qu’avait-il ? s’enquit Judith.
— Je crois qu’il est allé au jardin et qu’il a mangé un fruit avec lequel il n’a pas fait bon ménage, expliqua Isaac.
— Si les gens font pousser des plantes vénéneuses dans leur jardin, papa, il faut s’attendre à des accidents de ce genre, dit sa fille dont la voix rappelait par instants celle de sa mère.
— Je ne pense pas qu’ils voulaient du mal à leur fils. Ils ignoraient que ces plantes poussaient là, c’est tout.
— Lui vouloir du mal ? Mais ils le gâtent à l’extrême ! s’écria Judith. Ils lui offrent tout ce qu’il désire, sans la moindre retenue. C’est vraiment ridicule de céder ainsi à un enfant.
— Surtout quand ce qu’il veut, c’est du poison, ajouta Raquel.
— Il suffit, Raquel ! trancha sa mère. Ce sont nos amis et nos voisins.
— Oui, maman, dit-elle en revenant à son déjeuner.
— Ce que je voulais vous dire, Isaac, c’est que je me rappelais autre chose, reprit Judith. Une chose que, dans la presse et la confusion d’hier, j’avais omis de vous signaler.
— Qu’auriez-vous pu oublier ? s’étonna le médecin.
Il savait que la mémoire de sa femme était des plus fidèles et, même s’il regrettait parfois sa capacité à se rappeler dans le détail des événements et des conversations déjà anciens, il ne pouvait s’empêcher de se montrer impressionné.
— Dans les affaires de cet homme, dit-elle, en plus de l’argent et des feuilles de papier couvertes d’écriture, il y avait, peint sur un morceau de bois poli, le portrait d’une femme. Une très jolie femme, précisa-t-elle puisque c’était vrai.
— C’est très intéressant. Je regrette parfois, ma mie, que votre père, aussi bon et vertueux fût-il, n’ait pas souhaité apprendre à lire à ses filles. Vous auriez fait une étudiante attentive. Et vous m’auriez dit ce que contenaient ces lettres.
— Je suis très heureuse comme ça, dit Judith, sur la défensive. Mon père a fait pour le mieux. Il pensait que la lecture ne convenait pas aux femmes.
— Je n’en doute pas un seul instant, ma mie.
— De quoi ne doutez-vous pas ? demanda-t-elle, un brin soupçonneuse.
— Des deux choses, ma mie, mais vous auriez tout de même fait une belle étudiante.
Il se leva.
— Dès que Judah aura fini de bavarder, fit-il sèchement, ou de vaquer à une autre occupation, je veux qu’il m’accompagne chez Son Excellence pour que je lui fasse part de cette nouvelle.
— Si vous désirez que je trouve un autre garçon de cuisine, mon mari, vous n’avez qu’à le dire.
— Pour un mois ou deux ? Non. Je m’en contenterai puisqu’il le faut.
— Vous ne pensez pas qu’ils le sauront déjà ? demanda Raquel.
— Très certainement, lui répondit son père. Mais dans ce monde étrange qui est le nôtre, Raquel, les choses importantes sont souvent dédaignées.
— Voilà qui est intéressant, maître Isaac. Si quelqu’un a songé à fouiller dans les effets de Pasqual, dit Berenguer, on n’a pas condescendu à me mettre au courant. Bernat !
— Oui, Votre Excellence, dit le secrétaire qui apparut aussitôt à la porte.
— Pasqual Robert avait avec lui un paquet contenant de l’argent, des lettres et un petit portrait. Qu’il me soit apporté sur-le-champ. Il a été remis hier matin au capitaine.
— Certainement, Votre Excellence, murmura le secrétaire avant de disparaître.
— Le genou de Votre Excellence la fait-il souffrir ? demanda Isaac.
— Vous avez le don assez agaçant, maître Isaac, de deviner ce qui ne va pas en moi avant même que je me plaigne. Comment le savez-vous ?
— Ce n’est pas très difficile. Je suis certain que le père Bernat s’en rend également compte quand votre genou vous tourmente. J’ai apporté une nouvelle mixture qui peut se révéler utile, si votre serviteur veut bien la préparer.
Berenguer frappa dans ses mains et l’homme apparut.
— Oui, Votre Excellence ?
— Faites tremper ceci dans de l’eau chaude jusqu’à obtenir une couleur dorée, dit Isaac, et portez-le à Son Excellence avec l’un de ses cataplasmes.
Le serviteur s’éclipsa.
— La douleur devrait s’atténuer avec le retour du beau temps, ajouta le médecin. Mais si Votre Excellence le permet, je vérifierai que l’état de l’articulation n’a pas empiré.
— Dans notre intérêt à tous ? dit Berenguer en riant. Nul doute que Bernat vous remerciera d’avoir apaisé mon humeur. Faites comme il vous plaira, maître Isaac. Et revenons à ce dont nous parlions hier.
— Oui, Votre Excellence, dit Isaac en palpant le genou de l’évêque de ses doigts longs et habiles.
— J’ai réfléchi à ce que vous me disiez. Je vous ai toujours pris pour un homme sage et perspicace, mais votre théorie me dérange.
— En quoi, Votre Excellence ?
— Il ne peut avoir été tué par quelqu’un de la ville. Qui lui en voulait ici ? Il avait reçu pour instruction de mener une vie discrète et, que je sache, c’est ce qu’il a fait. Nul ne le fréquentait, de près ou de loin. J’étais la seule personne à qui il parlait librement et ouvertement.
— Pourquoi lui a-t-on commandé de vivre ainsi ?
— Je sais seulement que Sa Majesté le désirait. J’ai suggéré aux conseillers qu’on lui donne un poste de greffier et je me suis porté garant de sa discrétion et de son mérite.
— Oui. On disait qu’il venait de Cruilles, que Son Excellence l’y avait connu et pouvait répondre de lui.
— C’est presque vrai. Je le connaissais depuis près de vingt ans, même s’il n’était pas originaire de Cruilles.
— Vos conversations auraient-elles pu être épiées ? demanda Isaac.
— Nul son ne peut franchir la porte donnant sur le couloir. Quant aux deux autres, elles sont gardées par Bernat ou Francesc d’un côté et mon fidèle Jordi de l’autre. Il a toujours été à mon service, et je me soupçonnerais moi-même plutôt que Bernat ou Francesc. Non, personne n’a pu nous entendre.
— De plus, il était très difficile de percevoir les propos que vous échangiez avec maître Pasqual, dit Bernat en apparaissant à nouveau. Les deux portes étaient closes.
— Bernat, dit Berenguer. Vous voyez ? Je laisse habituellement ces deux portes entrouvertes, au cas où j’aurais besoin d’appeler.
— Le capitaine est ici, ajouta le secrétaire, et il apporte les affaires de Pasqual Robert. Désirez-vous que je reste ?
— Oui, Bernat. Nous recherchons des lettres et un portrait. De plus, son argent doit être déposé au trésor pour revenir à ses héritiers.
— J’y veillerai, Votre Excellence, dès que nous l’aurons compté et que le trésorier aura apposé sa signature.
— Bernat est décidément très précis. Je pense souvent qu’il a dû être témoin de beaucoup de vilenies dans sa jeunesse pour être si efficace quand il s’agit d’empêcher ses semblables de s’enfuir avec le trésor de l’Église.
— C’est mon devoir, Votre Excellence, dit-il en ignorant les remarques faites sur son passé.
L’évêque disposait d’un arsenal de plaisanteries grinçantes dont il faisait usage chaque fois que sa goutte se réveillait ou que son genou se rappelait à lui.
Bernat ouvrit le paquetage. En murmurant, il secoua les vêtements, les replia et les empila sous le regard du capitaine. Quand la bourse tomba à terre, le capitaine la ramassa et la déposa sur le bureau de l’évêque. Vint ensuite un petit sac de cuir, qui ne tarda pas à rejoindre la bourse. Puis ce fut le tour du sac en soie brune.
— Ouvrons cela, dit l’évêque. Nous nous occuperons de compter l’argent plus tard.
— Oui, Votre Excellence.
Il y avait, comme l’avait dit Judith, trois feuilles de papier couvertes d’écriture.
— Désirez-vous que je les lise, Votre Excellence ? demanda Bernat.
— Je vous en prie, dit Berenguer en soupirant. Vous êtes là pour ça.
— Souhaitez-vous que je reste, Votre Excellence ? demanda le capitaine.
— Je pense qu’il vaut mieux que nous ayons des témoins. Votre présence nous est utile.
Bernat déplia la première feuille, la parcourut et s’empressa de la ranger.
— Celle-ci n’est peut-être pas pour vos yeux, Votre Excellence. C’est une série de mots qui n’ont aucun sens.
— Un code. Nous la scellerons et la renverrons à la personne qui convient. Continuez.
— Il s’agit maintenant d’une lettre. Elle est simplement adressée à « Mon très cher ».
Bernat la lut très vite, fronçant parfois les sourcils sur un mot.
— Il semble que ce soit une lettre d’ordre privé, Votre Excellence. Si maître Pasqual avait une femme, je dirais que cela vient d’elle.
— Lisez-la, ordonna Berenguer. Elle peut nous apprendre quelque chose.
— Si Votre Excellence le désire. Il est écrit : « Nous nous portons bien tous deux et vous nous manquez beaucoup. Tout est calme ici. J’aimerais connaître la date de votre retour. Le vieux F., qui possède les terres sur la colline, est très malade et veut vendre ses vignes. Elles donnent bien et rapporteraient encore plus avec un peu de soin. Si nous les détenions, nous aurions accès à un autre cours d’eau. F. refuse d’attendre, j’ai donc décidé d’acheter. Je vous assure que nous pouvons nous le permettre. J’espère que vous conviendrez que c’est une sage décision. Le notaire est de cet avis et pense que cela pourrait nous éviter des ennuis à l’avenir. J’aimerais que vous soyez là pour discuter de ces décisions, mais puisque ce n’est pas le cas, je fais de mon mieux. Le notaire a également suggéré que nous acquerrions des parts d’un navire, mais je préfère acheter la prairie de l’autre côté de la route. Elle serait à vendre si j’en offrais un bon prix.
« Votre fils ressemble de plus en plus à son papa, hormis qu’au cours de ces dernières semaines il est devenu si grand que je ne puis le croire. Quand je le regarde et vous vois dans ses yeux, je suis ravagée par le chagrin et me languis de vous.
« Parfois il sourit tout comme sa sœur, et une fois de plus je souffre terriblement pour notre fille. C’est assez affreux que nous ayons dû être séparés en cette époque terrible, mais qu’elle dût mourir m’est encore plus cruel. Quand vous n’êtes pas ici pour me réconforter, je songe aux façons dont j’aurais pu la sauver. Je sais que vous me dites, avec votre sourire bienveillant, qu’il ne sert à rien de me tourmenter. Et que je ne devrais pas ajouter mes vieux chagrins à votre fardeau déjà si lourd. La plupart du temps, je suis heureuse, je travaille dur et je veille sur tout. Je suis en sécurité ici, mon amour. Soyez assuré que nul ne trouble notre sérénité. Mais je m’inquiète pour vous. Votre fils envoie à son papa des baisers, auxquels je joins les miens. » C’est signé « S. », dit Bernat en tendant le papier à Berenguer.
— Cette missive est certainement de son épouse. Ou plutôt, de sa veuve. J’ignorais qu’il fût marié.
— Elle va être bouleversée en apprenant sa mort, dit Bernat. Il semble qu’elle lui était très attachée.
— C’était aussi une femme intelligente et travailleuse, ajouta Berenguer. Mais bien cachée. Qui est-elle ? Qui pourra lui parler de la mort de son mari si nous ignorons qui elle est et où elle réside ? Avez-vous remarqué qu’il n’y a pas un seul nom dans cette lettre ? Les enfants, le voisin, le notaire… personne n’est nommé.
— C’est une femme très prudente, remarqua Bernat.
— Les lettres récupérées dans cette propriété étaient-elles destinées à Pasqual ? demanda Isaac.
— Cette maison n’a pas de maîtresse, répondit le capitaine. Elle est gérée par un bailli. Le maître vit dans le Roussillon, me semble-t-il.
— Et les lettres vont à Barcelone, ajouta Berenguer. Est-ce là le portrait ? demanda-t-il en ouvrant le sac de cuir.
Un ovale de bois lisse glissa sur sa paume. Il le retourna.
— L’épouse de Pasqual est une femme d’une grande beauté, constata-t-il. Où qu’elle vive, chacun doit la connaître. Mais elle m’est totalement inconnue.