Epilogue
Lamar Gallineo eut trois semaines de suspension.
Les Affaires internes remirent leur rapport à ce moment-là, pour confirmer les dires de l’inspecteur Gallineo. Il était en état de légitime défense lorsqu’il avait tiré sur Christian DeRoy, puis sur Frank Quincey.
La mort du proviseur n’était pas de son fait et il n’avait mis en aucun cas la vie d’Allistair McLogan en danger. C’étaient Frank Quincey et Christian DeRoy qui étaient responsables.
Après que Lamar eut quitté le lycée de Harlem ce jour-là, Quincey avait appelé son petit protégé pour le prévenir que la police le cherchait. Christ DeRoy s’était alors enfui vers leur repaire. Plus tard dans la soirée, l’adolescent avait appelé le proviseur chez lui pour l’attirer dans un piège, afin de l’éliminer. À ses yeux, ils méritaient tous de mourir. Peu importaient les moyens.
Gallineo retrouva son bureau, les messages de soutien de ses collègues.
Il se réinstalla en face de Doris qui n’avait cessé de venir le voir chez lui.
Tout rentra dans l’ordre.
Mais il mit longtemps avant de pouvoir regarder un lycée sans penser à tous ces adolescents sensibles et influençables.
Certains étaient durs comme du roc. D’autres manipulables à merci.
Les rues de New York n’étaient pas moins sûres que celles d’une autre grande ville du monde.
C’était la raison qui ne l’était pas.
Des femmes et des hommes menaçaient chaque jour ce fragile équilibre qui tenait la civilisation.
Lamar n’éprouva aucune pitié pour eux. Malgré leurs blessures, malgré les adolescences traumatisées de quelques-uns, Lamar n’oubliait pas qu’à tout moment, encore aujourd’hui, ils avaient le plus important, ce qu’il avait lui-même expérimenté : le choix.
Frank Quincey fut jugé à Manhattan.
Sévissant dans un État appliquant la peine capitale, il fut condamné à mort.
Lorsque le verdict fut annoncé, il se leva et fit le signe fasciste.
Cinq ans plus tard, le 18 décembre à 4 h 30 du matin, lorsque les gardes l’emmenèrent vers la salle d’exécution, Frank Quincey s’effondra.
Il pleura. Il supplia.
Il implora qu’on l’excuse. Qu’on lui redonne sa chance. Il jura qu’il ne décevrait personne.
En entrant dans la pièce qui allait être pour lui son tombeau, il tomba à genoux.
Il s’urina dessus.
Il fallut quatre gardes pour lui accrocher les sangles.
Ses gémissements contrastaient avec le silence qui régnait sur les lieux.
Il fut tué en dix-sept minutes selon le médecin qui l’ausculta pour certifier qu’il était mort.
On nettoya la salle juste après, la laissant immaculée pour l’aube.
Propre et anonyme. Dans l’attente du prochain.