Vous êtes si faibles et méprisables que je n'ai pas besoin de me soucier des précautions d'usage quand je me prépare à vous combattre. » Blade douta que Krog soit réellement aussi arrogant, ou du moins il l'espéra. Autrement, s'il gagnait ce jour-là, il aurait à servir un fou. Mais, d'un autre côté, il appréciait le geste.
Un murmure ponctué de quelques vivats s'éleva derrière Blade et, en se retournant, il vit Drebin émerger de l'obscurité de la tour. Le pansement avait disparu de son bras et seule une longue cicatrice rosâtre apparaissait sur les muscles, dans la crasse. Deux assistants le suivaient, le premier portant une épée dans un fourreau de toile huilée, l'autre trois lances dans un étui de cuir en bandoulière. Drebin n'était vêtu que d'un kilt très court, un couteau dans la ceinture, et de poignets de force en cuir. Il s'avança dans la cour, s'arrêta et prit la pose un moment, levant une jambe, puis l'autre. Cela provoqua encore quelques vivats. Apparemment, l'habileté de Drebin au combat à mains nues était bien connue du public.
Un carré de dix mètres de côté était tracé à la peinture blanche sur le sol, contre un des murs. Les « soigneurs » de Drebin l'escortèrent à travers la foule en direction d'un des coins du carré tandis que les gardes menaient Blade vers le coin opposé. Ensuite, les gardes remirent à Blade les mêmes armes que portait Drebin : le couteau, l'épée et les trois lances en bandoulière. Blade les soupesa, jugea de leur équilibre. Cela poserait des problèmes de se servir de lances de jet dans une arène si étroitement entourée sur trois côtés par une foule dense. Le peuple de l'Œil-Bleu ne s'en souciait peut-être pas mais lui si.
Pour la troisième fois, des murmures s'élevèrent. Il y eut beaucoup plus de vivats, la plupart apparemment sincères, lorsque Krog et Halda sortirent du bâtiment. La foule s'écarta sur leur passage et ils avancèrent vers l'arène sans regarder à droite ni à gauche, certains que leur simple présence leur ouvrirait un chemin. Halda portait son habituelle collection de couteaux et Krog était lui-même armé d'une épée fine et légère. Blade était sûr qu'entre ses mains une seule épée était plus que suffisante.
Krog s'arrêta au bord de l'arène, regarda Blade, puis Drebin, de nouveau Blade, dégaina son épée et la brandit au-dessus de sa tête.
— Le peuple de l'Œil-Bleu est assemblé ici pour assister au duel entre le maître de guerre Drebin et le combattant Blade. Le duel continuera jusqu'à la mort d'un des adversaires. Les armes de la nature ainsi que celles manufacturées par l'homme sont autorisées. Je serai seul juge et arbitre. Cela te convient-il, ô peuple?
— Cela nous convient ! répondit un rugissement de près de mille gorges.