24.
Ils attendaient minuit. Le ciel était toujours d’un bleu extraordinaire, mais dans une teinte plus foncée maintenant. Il devait sûrement y avoir un nom pour ça. Les arbres qui ceinturaient le jardin formaient de grandes ombres mystérieuses. Tout était parfait. Les enfants dormaient tous à cette heure. Angela, le dos renversé sur sa chaise de jardin, n’en était pas loin. Winter songeait sérieusement à la soulever dans ses bras pour aller la déposer quelque part dans la maison. C’était dur d’être parent de jeunes enfants. Elle l’avait été plus que lui ces dernières semaines, à l’inverse du semestre précédent. Il savait ce que c’était. On s’effondrait avant minuit, surtout après un verre de vin.
Halders contemplait le paysage : en bas de la côte de Lunden, les lumières du centre-ville, bien superflues en cette saison. Quelques voitures glissaient le long du stade d’Ullevi.
– À l’étranger, les gens ne peuvent sans doute pas comprendre que le Nord, ça peut aussi être ça, fit-il.
– On a tout ce qu’il faut, pas vrai ? sourit Winter.
– Tu penses !
– On ne se rend pas compte de la chance qu’on a, poursuivit Winter en prenant un paquet de Corps dans la poche de sa chemise.
– Moi si, je m’en rends compte, glissa Aneta Djanali.
– Il reste du vin, annonça Halders en se penchant pour attraper une bouteille sur la table. La nuit ne fait que commencer.
– Et quand est-ce qu’elle finira de commencer ? demanda la jeune femme.
– Tu te fous de moi ?
– Mais non. Au Burkina Faso, on n’a pas d’expression comme ça. La nuit tombe à la même heure chaque soir, assez tôt, et dure autant toute l’année. Douze heures de jour, douze heures d’obscurité.
– Comme à Kuala Lumpur ! lâcha Halders. Pas vrai, Bertil ?
Il ne reçut pas de réponse.
– Bertil ?
Un grognement se fit entendre depuis la chaise longue occupée par le commissaire.
– Laissez-lui le temps de se réveiller, sourit Birgitta.
– Il dort déjà ? Les aventures ne sont pourtant pas finies pour aujourd’hui.
Ça, Halders aurait mieux fait de le garder pour lui, se dit Winter. La seconde d’après, le portable qu’il avait rangé dans sa poche de chemise, à côté du paquet de Corps, se mit à sonner.
Winter vit la compagnie sursauter, tressaillir du moins : qui cela pouvait-il être ?
C’était le service de garde de la crim.
Quelqu’un avait appelé le numéro d’urgence de la police. Le commissariat central avait envoyé une voiture ; celle-ci avait ensuite transmis le message au service de garde de la brigade, lequel venait d’appeler deux techniciens de permanence ce jour-là. Ils étaient déjà partis sur les lieux.
– On a trouvé un corps à Bergsjö, l’informa le commissaire de garde, Johan Västerlid.
– Où ça exactement ?
Västerlid décrivit l’emplacement.
– Un homme ou une femme ?
– Je ne sais pas.
– Appelle-moi dès que tu en sais plus, lui demanda Winter avant de raccrocher. Un cadavre à Bergsjö ! lança-t-il à la cantonade.
– J’avais compris, fit Halders. Ça pourrait être n’importe qui.
– Mais ça pourrait bien être l’informateur du Frangin.
– On a prévenu le Frangin ? (Ringmar reprenait du service.)
– Non, pas encore. Pas que je sache en tout cas.
– Qu’est-ce que vous allez faire ? s’enquit Angela.
– J’attends les nouvelles des experts, répondit Winter.

Ce fut Lars Östensson qui l’appela, un des vétérans de la brigade technique.
– Un homme relativement jeune.
– Comment est-ce qu’on l’a tué ? demanda Winter.
– À première vue, lésion par instrument contendant.
– Vous avez pu l’identifier ?
– Non.
– Les lieux exacts ? Ce ne serait pas à l’endroit où on a retrouvé la bagnole ?
– Non. Plus au nord.
– Tu as prévenu Öberg ?
– En fait, c’est lui qui m’a prévenu. Le commissaire de garde avait téléphoné chez lui.
– Et qu’est-ce qu’il fait ?
– Il arrive.
– Décrivez-moi le physique de la victime, continua Winter.
Il écouta la réponse d’Östensson avant de le remercier. Il composa immédiatement un autre numéro.
Le Frangin Malmers décrocha dès la deuxième tonalité.
Winter lui donna le signalement de la victime.
– Putain ! Ça pourrait être lui. J’y vais.
– Moi aussi, déclara Winter. On arrive.
– T’es dingue ou quoi ?
– Pourquoi tu me demandes ça ?
– Ben, c’est la Saint-Jean.
– Plus maintenant, répondit le commissaire en jetant un coup d’œil à sa montre.

Ils avaient besoin d’un chauffeur mais Winter savait qu’il serait impossible d’obtenir une voiture de police avant un moment, pour cause de nuit de la Saint-Jean.
– J’appelle Lars. Lui au moins, il ne boit pas.
Lars Bergenhem, sa femme Martina et leur fille Ada avaient été invités chez Halders, mais la petite avait attrapé la varicelle deux jours auparavant. On avait renoncé à la faire garder : trop pleurnicharde.
Vingt minutes plus tard, Bergenhem était sur place. Halders, Ringmar et Winter montèrent dans sa voiture. Ils avaient pris du café en attendant, aucun n’était ivre, mais aucun n’était vraiment frais non plus. Ringmar accusait le coup un peu plus que les autres.
Winter cligna des yeux deux ou trois fois tandis qu’ils roulaient vers les quartiers nord. Il ne ressentait pas la fatigue. Il avait encore de la réserve. Un cadavre d’homme. Qui était-ce ? Ça ne les avancerait peut-être pas beaucoup de voir le corps. Il fut saisi d’une légère douleur à l’arrière du crâne. Une nouvelle nuit de travail. Qui rencontreraient-ils ? À quel point se rapprocheraient-ils de la solution de l’énigme ? Ou alors cette nuit les égarerait-elle encore plus ? Ça lui était déjà arrivé avant. L’affaire paraissait mieux circonscrite, mais c’était une illusion, elle se resserrait d’un côté mais se développait d’un autre, bien plus loin, en dehors des limites qu’il avait cru pouvoir lui assigner. Les lignes de frontière avaient bougé.
– On est où maintenant ? demanda brusquement Ringmar.
Winter regarda au-dehors. Un long corps de bâtiment industriel s’étirait sous ses yeux.
– Gamlestad, répondit Bergenhem sur un ton légèrement surpris.
Bertil aurait dû reconnaître le coin.
– Prends par Kortedala, lui conseilla le vétéran.
Sa voix s’appesantissait un peu trop sur les voyelles.
– C’est ce que je fais.

Ils tournèrent dans un carrefour étrangement isolé, comme abandonné de la gent automobiliste.
– La rue des Années-Lumière, lut Halders. Putain de nom !
On traversait la forêt : bois, route, quelques maisons noyées dans l’obscurité, encore du bois. Ç’aurait pu être n’importe où en Suède, mais nulle part ailleurs que dans ce pays.
Ils croisèrent une voiture, tous phares éteints.
– Quel con ! s’écria Halders. Putain de con !
Personne ne commenta.
– Pourquoi on est tous là ? continua l’inspecteur. Si ça se trouve, ce type, c’est un vulgaire quidam.
Aucune réponse.
– Vous croyez pas ? Pourquoi on aurait une chance pareille ?
Pourquoi ? Oui, ce pouvait être n’importe qui d’autre. N’importe quelle autre tragédie. Winter regardait droit devant lui sur la route. Bergenhem conduisait vite et bien. Ils seraient bientôt arrivés.
– Y a un rapport avec les autres meurtres, je le sens, déclara Ringmar. Tout est lié. Sinon, on ne serait pas tous ensemble ici.
– C’est loin de la route ? demanda Halders.
– Deux cents mètres, répondit Winter. On prend un raccourci.
– Comment ça ?
– On peut prendre un sentier qui part de l’autre côté. De la place de l’Espace. Mais en voiture, c’est plus court d’arriver par ici.
– Comment tu sais tout ça ?
– Je suis déjà venu, expliqua Winter. Il y a longtemps.
Il était venu dans le bois, avait pris ce sentier des années auparavant. Après avoir été obligé de se battre sur la grande place. Ça l’avait rendu dingue. Il faut absolument qu’on évite les reporters cette nuit. Même si on a des circonstances atténuantes. Bertil : en coulisses. Il a dû boire un verre de trop. Dodo dans la bagnole. Lars restera le surveiller le temps qu’on revienne.
– On y est, annonça Lars.
Ils voyaient déjà les gyrophares tourner comme des mélangeurs à jus dans la nuit de juin. C’était presque irréel, cette lumière agressive dans la douceur de l’air, mais ils ne rêvaient pas. Winter pensa au rêve qu’il venait de faire, celui qui ne déformait pas la réalité mais la restituait telle qu’elle était. Le songe d’une nuit de plein été.

La patrouille arrivée la première sur place avait installé un périmètre de sécurité assez large. Winter vit Öberg s’activer en compagnie d’un homme de dos qu’il ne reconnaissait pas encore. Le technicien leva les yeux et leur fit un signe de la main.
L’homme décédé dans ce bois sortait à peine de l’adolescence.
Il avait une blessure ouverte.
Il fixait le ciel au-dessus de lui avec une expression de stupeur. Il n’aurait pas dû se retrouver là.
– On sait qui c’est ? demanda Halders.
Öberg secoua la tête :
– Il n’avait pas de papiers sur lui. Rien. Pas de portefeuille.
– En tout cas, c’est pas Hussein Hussein, assura Ringmar. Correspond pas au signalement.
– Il est beaucoup plus jeune, ajouta Winter.
– Mais il a une tête d’Arabe, fit Halders.
L’expert le regarda comme s’il avait lancé une injure raciste, méprisante, du genre « péquenot » ou « connard de Scanien ».
– C’est la cause du décès ? s’enquit l’inspecteur en désignant la gorge de l’homme.
– Pour autant que je puisse en juger, répondit Öberg. On en saura plus quand le médecin légiste sera là.

L’endroit était éclairé comme en plein jour. Sans beaucoup de lampes. Öberg et son équipe passaient le terrain au peigne fin. Il y avait des traces de pas dans la mousse, trop nombreuses. L’endroit était pas mal fréquenté. Durant tout ce temps, Winter percevait des bruits de voix dans les alentours. Le bois vivait. Il se réveillait progressivement et les oiseaux commencèrent même à chanter, comme dans la jungle.
– Qui a donné l’alarme ? demanda Halders.
– Un type qui faisait de la course d’orientation de nuit, répondit Winter qui venait de passer différents coups de fil, notamment au commissariat central.
– De la course de quoi ?
– Tu cours la nuit avec une boussole, voire une lampe sur le front. Mais il n’en avait sans doute pas besoin.
– Course d’orientation la nuit de la Saint-Jean, faut être pervers, commenta Halders.
– Choisis tes mots, le reprit Ringmar.
– Il s’est dépêché de rentrer pour donner l’alerte. Je lui ai dit de rester chez lui. On le verra plus tard.
– Alors à qui est-ce qu’on a affaire ? s’interrogea Halders en examinant de nouveau le cadavre.
Le visage restait marqué par la stupeur. Ça pouvait se comprendre. Halders ignorait quel visage avaient fait les victimes de la supérette au moment de mourir, les meurtriers en avaient décidé autrement. Mais peut-être que Jimmy, Hiwa et Saïd n’avaient pas été si surpris ?
– J’en connais un qui pourrait avoir la réponse, fit Winter.
Quelqu’un approchait à travers les fourrés. Un petit écho renvoyait le bruit de ses pas, à peine perceptible.
– Le voici, je crois.

Il ne fallut guère de temps au Frangin, à peine quelques secondes. L’homme des contacts discrets marmonna quelque chose d’indistinct sur un ton bourru. Il sentait vaguement l’alcool, et ce n’était pas le seul autour du lieu de découverte, qui s’identifiait sans doute avec la scène du crime.
– Le con ! s’écria-t-il, en passant outre le respect dû aux morts. Je l’avais prévenu. (Il leva les yeux et se tourna vers Winter.) Vraiment.
– Prévenu de quoi ? Qui est-ce ?
– Il s’appelle Hama. Hama Ali Mohammad.
– Marko ?
Le Frangin opina sans un mot.
– Une mini pointure. Vol, came à toute petite échelle. Maquereau. Fainéant. Ou chômeur, comme on dit maintenant.
– Maquereau ?
– À ce qu’il prétendait. Il restait en marge. Il essayait d’entrer dans le business, mais ça ne marchait pas trop bien. Il en savait un peu quand même.
Le Frangin contemplait le visage d’Hama. Il paraissait se dire oui, t’as l’air ahuri, mais je te l’avais bien dit.
– Il te tuyautait ? intervint Halders.
– Oui, répondit l’inspecteur, le regard toujours fixé sur le visage d’Hama. Mais ça n’a plus d’importance, tout ça.
– De quoi tu l’avais prévenu ? l’interrogea Winter.
– D’éviter de se brûler les ailes.
– Ah bon ? (Winter vit passer devant ses yeux l’image d’un bois en flammes.) Mais ce n’est pas le but ? Que les informateurs se rapprochent du feu le plus possible ?
L’autre resta muet.
– Le Frangin ?
– Il commençait à faire dans les armes aussi. Il était genre coursier, intermédiaire, je ne sais pas exactement. Là, on était en train de placer des pions intéressants. Du coup, j’ai dit à Hama de se tenir en dehors.
– Les putes, mais pas les pétoires, résuma Halders.
– On avait d’autres indics mieux introduits dans les milieux de la vente d’armes que ce pauvre petit, répondit le Frangin en baissant le ton.
Hama avait maintenant atterri à la périphérie du monde, même s’il resterait encore un petit moment le centre de leur attention à tous.
– On apprécierait quand même qu’ils nous filent quelques tuyaux, siffla Halders.
Le Frangin eut un sursaut.
– Tu peux répéter ?
– On cherche toujours les armes du crime et on se demande quel chemin elles ont pris pour arriver à la boutique de Jimmy, et pour en repartir.
– Tu crois pas que je fais ce que je peux ? Qu’on fait tout ce qu’on peut ?
Halders garda le silence.
Le Frangin parut vouloir ajouter quelque chose, mais il ravala sa rancœur.
– Comment Hama se trouve-t-il mêlé à notre enquête ? demanda Winter comme pour lui-même.
– S’il a été tué, y a une raison, répondit le Frangin. Il n’en faut pas beaucoup parfois, mais en général y a une raison là-dessous.
– Il en savait trop ?
– Oui.
– Sur les armes ?
– Franchement, Winter, j’en sais rien. Faut que je revoie la question. Même si ça fait un moment que je suis là-dedans, jusqu’au cou.
– Hama connaissait-il l’une des victimes ?
– Pas que je sache. Mais tu vas pouvoir interroger dans cette direction maintenant. Interroger la famille.
– Il habitait où ?
– À Gårdsten.
– Est ou ouest ?
– Est de l’ouest, si tu veux. Rue de la Sauge, non, de la Muscade. T’es familier de l’endroit ?
– Oui, à peu près. Je connais mieux les alentours de la place Cannelle.
– Eh… oui, bien sûr. Ils ont fait dans les épices quand ils ont construit ce quartier. Ils devaient savoir ce qui viendrait trente ou quarante ans plus tard.
– Que faisait-il ici ? (Winter fit un geste du bras.) Précisément ici.
– On a dû lui donner rencart. Ou l’inverse.
– Il venait souvent à Bergsjö ?
Le Frangin haussa les épaules.
– Il circulait un peu partout.
– Il connaissait Hussein Hussein ? lança Winter dans l’air tiède et pesant.
– Possible, répondit le Frangin.

Öberg était penché au-dessus d’une parcelle de terre dans le bois.
– C’est ici que le meurtre a eu lieu, annonça-t-il en levant les yeux. Trop de sang pour qu’on puisse admettre une autre hypothèse.
– Mmm.
– Fallait être costaud.
– Effectivement, jugea Winter. Hama Ali était jeune, mais ce n’était pas une demi-portion. Il aurait dû opposer une forme de résistance. Et pourtant aucune blessure sur les mains, les bras ou les épaules, à ce que j’ai pu voir.
– Non.
– Alors comment a-t-il pu se faire surprendre ?
– Il tournait sans doute le dos à la personne, répondit l’expert. Cette incision semble avoir été faite de derrière.
Winter resta silencieux.
Le corps d’Hama Ali serait bientôt chargé dans un fourgon funéraire. Les questions qu’ils se posaient trouveraient peut-être leur réponse à l’autopsie, mais ce n’était pas sûr. La réponse pouvait se trouver ici, sur le sol, dans la mousse et les brindilles. Il s’en dégageait une odeur de terre, et de sang. Une odeur de fer.
– On a pas mal trotté par ici ces derniers jours, constata Öberg.
– J’imagine que ce ne sera pas évident de retrouver le tracé des pas.
– Non… mais il est possible que le meurtrier n’ait pas été seul. Vu la surprise du gars. Ils auraient pu être deux, voire plus évidemment.
– J’y pensais, fit Winter. Mais il n’y a qu’une blessure.
– Un tiers pouvait retenir son attention, non ?
– Et s’ils avaient tous les deux été surpris ?
– Ça n’aura pas empêché le meurtrier de frapper.
– Sans hésitation, compléta Winter.
– Pas de demi-mesure, effectivement.
– Hama a été attiré ici pour être tué.
– C’est toi qui le dis, Winter.
– Il faisait confiance à son meurtrier.
– Il n’avait peut-être pas le choix. Il était aux abois.
– Dans quel sens, Torsten ?
– Financièrement sans doute. Je ne sais pas. C’est à toi de voir ça, avec tes collaborateurs. Vous n’avez pas votre méthode, Bertil et toi ? Je vous ai déjà entendus causer. Une sorte de brainstorming, une course aux idées, non ?
Bertil, en l’occurrence, n’était plus vraiment dans la course. Il était rentré chez lui. Le visage tout gris dans le petit matin, il s’était contenté d’un « C’est plus de mon âge », sans que Winter comprenne exactement à quoi il faisait allusion.
Le commissaire commença à s’éloigner, suivi d’Öberg.
– Pourquoi ici ? s’interrogea-t-il en jetant un regard circulaire. C’est un peu à l’écart du sentier, mais ce n’est pas l’endroit le plus reculé dans cette zone.
– Ce n’était peut-être pas le but, suggéra l’expert.
– Qu’est-ce que tu veux dire ?
– Ils ne cherchaient pas un coin trop paumé. Il fallait que ça reste… visible.
Winter ne répondit pas.
– Quelqu’un veut nous dire quelque chose, poursuivit Öberg.
– Ou le dire à quelqu’un d’autre, compléta Winter. Le destinataire de cet avertissement.
La médecin légiste était arrivée depuis un petit moment et avait commencé son travail. Un nouveau visage pour Winter. Elle ne paraissait pas beaucoup plus âgée que le gamin auprès duquel elle s’était agenouillée. Elle se relevait maintenant et se dirigeait vers les deux hommes.
– Je sais que c’est difficile à dire, mais avez-vous déjà une idée de l’heure du crime ? lui demanda le commissaire.
– Non, pas encore.
– Vous pensez qu’il est là depuis plus de vingt-quatre heures ?
Elle regarda de nouveau le corps. Il semblait se reposer sur la mousse. Comme si le jeune homme était juste allé se coucher.
– D’après ce que je vois pour l’instant…, finit-elle par avancer d’une voix lente, ça demandera un examen plus approfondi, mais je dirais… à peine plus d’une journée.