Épilogue

L'orchestre entama un air de jazz langoureux. Dehors, une foule bruyante envahissait les rues, mais Bryan, conscient que Jessica n’était jamais plus heureuse que quand la ville reprenait vie, n’y prêta pas attention. Pour la première fois depuis très longtemps, peut–être depuis toujours, il se sentait entièrement détendu.

Quelle importance si c’était un loup–garou qui offrait les bières et si une bonne moitié de ses nouveaux amis étaient des vampires ? Quelques–uns, au moins, étaient entièrement humains.

Jessica regardait l’orchestre en souriant. Big Jim lui rendit son sourire. Barry Larson aussi, rayonnant d’une assurance toute neuve.

Personne de leur petite équipe n’avait trouvé la mort en Ecosse. Bryan jugeait cela miraculeux, mais ceux qui s’étaient battus à ses côtés estimaient simplement avoir fait du bon boulot. Les autorités locales, après avoir déniché une bande de jeunes hallucinés errant sur la lande, avaient conclu aux méfaits de la drogue.

Certains de ces jeunes gens n’oublieraient jamais ce qui s’était passé réellement. D’autres, sans doute, en tireraient la leçon. D’autres encore devraient suivre une thérapie toute leur vie. Au moins, ils avaient tous survécu.

Dans le cas de Mary, plus épineux, Bryan avait fini par reconnaître qu’elle souhaitait réellement se vouer au Bien. Ils avaient alors mis un plan au point : la théorie de l’erreur médicale avait été évoquée et elle s’était présentée un jour dans un commissariat, en prétendant être devenue amnésique. Elle expliqua qu’elle s’était enfuie de la morgue, horrifiée qu’on ait pu la croire morte et qu’elle ne s’était rappelé son identité qu’en voyant sa photo à la télévision.

Sean, assis entre Jessica et Maggie, avait l’air pensif, presque malheureux.

— Qu’est–ce qui t’arrive ? lui demanda sa femme.

— Nous avons perdu deux très bons flics, répondit–il tristement. C'est irréparable.

Jessica fronça les sourcils.

— Ce n’est pas ta faute, Sean. Je t’interdis de le penser !

Au même instant, le loup–garou réapparut avec les bières.

— Dis donc, Jessica, il serait temps que tu commences à dessiner ta robe de mariée ! dit Maggie.

Jessica faillit s’étouffer avec sa bière.

— Mais, Maggie, personne ne m’a demandée en mariage !

Maggie regarda Bryan, l’air entendu.

Il tourna la tête vers Jessica, un sourire aux lèvres.

— Qu’en pensez–vous ? murmura–t–il. Pensez–vous qu’un guerrier et une vampire puissent trouver le bonheur, à notre époque ?

Elle soutint son regard, l’air grave.

— Je ne sais pas. Quel est votre avis ?

Il se leva et la prit par la main.

— Je ne sais pas non plus. Mais il est bon, parfois, de tenter de nouvelles expériences, non ?

Il l’attira dans ses bras.

— Je sais, en tout cas, que je vous aimerai pour l’éternité…

Elle l’embrassa sur les lèvres.

Le jazz jouait en sourdine.

C'était La Nouvelle–Orléans, après tout.