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DIX-NEUF

Trois mois plus tard…

Vendare Taloun fut exécuté. Au terme d’un procès public, il avoua le meurtre de son frère ainsi qu’un grand nombre de crimes commis alors qu’il dirigeait le cartel Taloun. Il fut traîné de force, en larmes, les vêtements souillés, sur la place de la libération, où il fut pendu au bras de la statue de l’Empereur.

Plusieurs batailles eurent lieu sur le sol de Pavonis avant que la loi impériale ne soit entièrement rétablie. La plupart de ces batailles impliquèrent des régiments des forces de défense planétaire dont l’allégeance aux cartels qui les finançaient prenait le pas sur la cause qu’ils étaient censés soutenir. Privés de leurs leaders, les membres des cartels étaient redevenus suspicieux et pleins de préjugés.

Lorsque les décès de Solana Vergen, de Taryn Honan, de Kasimir de Valtos et de Beauchamp Abrogas furent rendus public, les cartels furent paralysés par les guerres de succession.

Les chefs d’état-major qui étaient parvenus à maintenir un semblant d’ordre dans leurs unités se retranchèrent dans leurs casernes pour attendre leur châtiment. Les chars et les soldats du cartel Shonai menèrent plusieurs actions pour traduire en justice ceux qui avaient trahi leur serment.

Mais lorsque le Vae Victus eut effectué un bombardement orbital contre une base appartenant au cartel de Valtos, les rebelles déposèrent les armes. Le croiseur d’attaque Space Marine se chargea également de traquer le vaisseau eldar endommagé, qu’il détruisit alors qu’il cherchait à quitter le système de Pavonis, à la grande satisfaction du seigneur amiral Tiberius.

Quand Mykola Shonai revint sur Pavonis, elle était accompagnée de Lortuen Perjed et des Ultramarines, dont les armures avaient été réparées et les blessures pansées. Toutefois, les artificiers du chapitre ne parvinrent jamais à effacer la brûlure en forme de croix sur l’armure d’Uriel.

Lorsque Shonai reprit sa place au sénat, elle fut applaudie par l’assemblée.

Uriel était assis sur un banc de marbre dont la surface était craquelée et entaillée. C’était la seule partie des jardins du palais qui avait échappé aux bombardements et à la destruction de l’armurerie. Pasanius attendait à l’entrée du jardin, son bolter serré fermement dans son nouveau bras bionique.

La pelouse avait été tondue récemment, et son odeur rappelait à Uriel les montagnes de Macragge. Une simple pierre tombale marquait le lieu du dernier repos d’Ario Barzano. Sous son nom, une courte inscription :

Chaque homme n’est qu’une étincelle dans les ténèbres.

Puissions-nous briller autant.

Uriel l’avait gravée lui-même. Il espérait que Barzano aurait approuvé.

Il se leva quand Mykola Shonai entra dans le jardin. Les blessures qu’il avait subies lors de son dernier combat guérissaient, mais il lui faudrait des semaines avant de revenir au meilleur de sa forme.

Les cheveux de Shonai retombaient sur ses épaules ; elle tenait dans sa main une petite guirlande de fleurs.

Trois gardes l’accompagnaient, mais ils restèrent à distance quand elle s’approcha de la tombe.

Elle eut un hochement de tête à l’adresse d’Uriel et s’agenouilla à côté de la pierre tombale, où elle plaça délicatement la couronne de fleurs. Elle se redressa, épousseta ses robes et se tourna vers Uriel.

— Capitaine Ventris, je suis heureuse de vous voir, dit-elle dans un sourire. Elle s’assit sur le banc. Je vous en prie, asseyez-vous un moment.

Ils demeurèrent là sans parler pendant plusieurs minutes. Aucun d’eux ne voulait mettre un terme à ce moment de sérénité. Shonai finit par pencher la tête en direction d’Uriel.

— Vous partez aujourd’hui ?

— Oui. Notre travail est fini et il y a suffisamment de soldats de l’Imperium pour maintenir l’ordre.

— En effet, acquiesça tristement Mykola Shonai.

Des transports de la Garde Impériale s’étaient posés sur Pavonis quatre jours plus tôt. Les soldats et les chars d’assaut du 44e régiment de Hussards lavrentiens avaient transformé la ville en camp retranché. Les vaisseaux de l’Adeptus Administratum et de l’Adeptus Ministorum étaient également arrivés, pour restaurer la stabilité politique et spirituelle de Pavonis.

Prêcheurs et confesseurs avaient envahi les rues pour entendre les dévotions de la populace.

Sur recommandation de Lortuen Perjed, l’Administratum avait permis à Shonai de demeurer gouverneur, à condition qu’elle se retire de la vie politique à la fin de son mandat. Lortuen Perjed fut quant à lui nommé représentant permanent de l’Administratum sur Pavonis, en lieu et place du hautement négligent Ballion Varle, à un point criminel. Jenna Sharben l’avait fait arrêter et exécuter.

Les soldats rebelles des forces de défense planétaire arrêtés par Shonai furent embarqués de force sur une barge pénitentiaire, à destination des zones de guerre du segmentum Obscurus.

L’avenir de Pavonis était assuré, mais elle ne serait plus jamais soumise au régime autonome des cartels. Le système gouvernemental s’était avéré inefficace et serait maintenant sous la supervision constante de l’Adeptus Administratum.

Uriel comprenait la frustration de Shonai. Elle avait traversé la plus terrible épreuve de son existence et maintenant qu’ils avaient remporté la victoire finale, on lui avait tout pris.

— J’aurais voulu venir ici plus tôt, expliqua Shonai, les yeux fixés sur la tombe, mais je n’étais pas sûre de ce que j’éprouverai en venant.

— Que voulez-vous dire ?

— Je dois la survie de mon monde à vous et à Ario, mais dans d’autres circonstances, il aurait détruit Pavonis et tué tout ce à quoi je tenais.

— Oui, mais il ne l’a pas fait. Il a donné sa vie pour vous défendre vous et votre planète. C’est comme cela que vous devez vous rappeler de lui.

— C’est le cas. C’est pourquoi je suis ici aujourd’hui. J’honore sa mémoire et je vais m’assurer qu’on se souvienne de lui comme d’un héros de Pavonis.

— Je pense qu’il aurait aimé ça, dit Uriel en riant. Cela aurait flatté sa vanité démesurée.

Shonai sourit et embrassa Uriel sur la joue.

— Merci, Uriel, pour tout ce que vous avez fait pour Pavonis. Et pour moi.

Uriel acquiesça, heureux que le gouverneur voie les choses ainsi. Il remarqua son expression sérieuse.

— Que ferez-vous une fois votre mandat terminé ? demanda-t-il.

— Je ne sais pas encore, Uriel. Quelque chose de calme. Elle rit, puis se leva et offrit sa main au Space Marine. Il se releva et accepta cette main tendue, sa main enserrant ses doigts délicats.

— Au revoir Uriel. Faites bon voyage.

— Merci, gouverneur Shonai. Que l’Empereur marche à vos côtés.

Mykola Shonai sourit et quitta le jardin pour regagner son palais en ruine.

Uriel resta seul devant la tombe de Barzano et se mit au garde-à-vous.

Il salua la mémoire de l’inquisiteur et frappa sa poitrine de son poing, lui adressant le salut du guerrier.

Il se dirigea vers l’entrée du jardin où Pasanius l’attendait, exerçant les articulations de son nouveau bras mécanique. Le sergent leva les yeux à l’approche de son supérieur.

— Ça ne me paraît pas naturel, se plaigna-t-il.

— Tu t’y habitueras, mon ami.

— J’imagine, grommela Pasanius.

— Les hommes sont-ils parés pour le départ ? demanda Uriel pour changer de sujet.

— Oui. Vos guerriers sont prêts à rentrer.

Uriel sourit en entendant Pasanius dire « vos guerriers ». Il posa la main sur le pommeau de l’épée énergétique d’Idaeus et serra le poing autour du crâne en or qui l’ornait.

Une fois la rébellion matée, il avait fouillé le champ de bataille à l’extérieur de la prison et finit par trouver la lame brisée. Il avait d’abord voulu réparer l’arme, mais ne l’avait finalement pas fait. Maintenant il comprenait pourquoi.

L’arme était un symbole, qui rappelait à tous les guerriers de la 4e
compagnie qu’Idaeus avait choisi Uriel comme son successeur. Mais Uriel avait prouvé sa valeur dans le feu des combats, et il n’avait plus besoin de ce symbole. C’était le dernier présent que lui avait fait Idaeus et il savait qu’il trouverait bientôt sa place dans le reliquaire du chapitre.

Il forgerait sa propre épée, tout comme il avait forgé sa compagnie sur l’enclume de la guerre.

C’était sa compagnie maintenant. Il ne marchait plus dans l’ombre de son illustre prédécesseur, mais suivait son propre chemin.

Le capitaine Uriel Ventris des Ultramarines et son sergent tournèrent les talons. Ils se dirigèrent vers les remparts de la cité où les attendait le cuirassé Thunderhawk qui les ramènerait au Vae Victus.

— Allons mon ami. Rentrons à la maison, dit Uriel.