HUIT
Le sénat était en émoi. Ils étaient nombreux à s’être préparés aux paroles de Taloun, mais cela restait tout de même un choc. Une centaine de cris se firent entendre, et Uriel remarqua que le gouverneur restait calme et immobile, comme lorsque survient un événement longtemps redouté.
Taloun se tenait maintenant silencieusement au centre de la chambre, le sceptre brandi comme une arme. Le modérateur appelait au calme tandis que les huissiers se déplaçaient parmi les sénateurs, calmant les plus agités à coups de bâton.
Taloun leva la main pour obtenir le silence et les cris se calmèrent peu à peu pour être remplacés par un murmure excité. Il frappa le sol du bout de son sceptre et demanda.
— Qui parmi les dirigeants des familles soutiendra ma motion ?
Kasimir de Valtos se leva, un sourire vengeur barrant ses traits, les mains posées sur la rambarde en bronze. Uriel remarqua que celles-ci aussi étaient recouvertes de peau synthétique et il salua le courage de l’homme qui avait pu échapper à ses tortionnaires.
— Moi, Kasimir de Valtos, je soutiens la motion de l’honorable Taloun.
— Je vous en remercie, guildeur de Valtos, répondit Taloun en s’inclinant humblement.
Des huées et des quolibets se firent entendre depuis les bancs placés derrière le gouverneur.
Le modérateur reprit son sceptre et l’agita au-dessus de sa tête pendant que Taloun regagnait sa place. Il frappa le sol avec de façon répétée.
— Une motion de censure a été proposée et approuvée par deux membres. Il revient aux dirigeants des cartels d’indiquer s’ils soutiennent ou non le vote de cette motion.
Le modérateur regagna son propre siège et tira sur un long cordon de soie. Il fit apparaître un grand écran, dissimulé par un rideau de velours placé à l’arrière de la chambre.
— C’est là que ça devient intéressant, déclara Barzano. On va enfin savoir qui est avec qui.
Peu à peu, les icônes des différents cartels apparurent sur l’écran.
Barzano poussa Perjed du coude pour qu’il recopie les résultats sur une tablette de données. Sans surprise, les icônes des cartels Taloun et de Valtos apparurent en premier en faveur du vote, tandis que celle de Shonai, opposée à la motion, suivit de peu. L’icône du Honan apparut ensuite, suscitant de nouveaux éclats de rire dans les niveaux supérieurs.
L’assemblée eut un mouvement de surprise quand elle se rendit compte que le Vergen était en faveur du vote. Dès que l’icône apparut, les hommes placés derrière Solana Vergen s’adressèrent à la jeune héritière, dans le fol espoir de lui faire entendre raison.
— Eh bien, souffla Perjed, en voilà une surprise.
— Comment cela ? demanda Barzano.
— Le cartel Vergen est allié au Shonai depuis près de dix ans, depuis qu’ils ont ravi le pouvoir au Taloun. Selon la rumeur, Leotas Vergen et le gouverneur Shonai étaient très bons amis, si vous voyez ce que je veux dire. Il semblerait que sa fille ne souhaite pas prolonger cette amitié.
Le gouverneur fixait le visage souriant de Solana Vergen sans prendre la peine de dissimuler sa fureur.
Quelqu’un derrière lui écrasa son agenda sur la tête de Beauchamp Abrogas et il sortit de sa torpeur, pour presser un bouton au hasard. L’icône du cartel Abrogas apparut à côté de celle du gouverneur, et ses membres eurent un soupir d’exaspération collectif devant la bêtise de leur leader.
Les participants les plus influents ayant voté, les cartels mineurs choisirent à leur tour leur camp. Ceci fait, le résultat du scrutin était clair : le cartel Shonai avait perdu.
Lortuen Perjed hocha la tête tandis qu’il reportait les derniers votes dans sa tablette de données.
— Le gouverneur a perdu cette manche et l’affaire va être maintenant décidée par le vote de l’ensemble du sénat, mais il ne s’agit que d’une formalité, car je doute que les autres membres des cartels votent à l’encontre de la décision de leurs maîtres commerciaux.
— Alors le gouverneur planétaire a été renversé ? Comme ça, d’un coup ? demanda Uriel.
— Pas tout à fait, dit Barzano dans un sourire, avant de se lever de son siège.
— Que faites-vous ? s’enquit Lortuen Perjed.
— Je vais exercer un petit peu mon autorité. Suivez-moi, Uriel.
— Ce n’est pas une attitude convenable de la part d’un membre de l’Adeptus Administratum, siffla Perjed en saisissant Barzano par la manche de sa robe.
— Exactement, rétorqua Barzano, un sourire malicieux sur les lèvres.
Uriel accompagna l’adepte Barzano alors qu’il descendait les dernières marches menant au sol de la chambre, écartant aisément les huissiers qui tentèrent vainement de leur barrer la route. Stupéfait, le modérateur des transactions restait immobile à côté de l’écran, le visage empourpré par la colère.
Il était si excédé de voir la procédure perturbée de la sorte qu’il en perdit tout sens commun et s’avança vers Barzano pour lui signifier son indignation.
— Monsieur, c’est inacceptable ! Vous ne pouvez pas outrepasser les règles qui président à notre assemblée.
— Bien sûr que je le peux, rétorqua Barzano dans un sourire.
Il sortit de sous ses robes le sceau rouge de l’Administratum, qu’il leva bien haut afin que tous puissent le voir. Dans le même temps, Uriel gardait un œil sur les huissiers, manifestement peu enclins à faire respecter les règles du sénat cette fois-ci.
Barzano rangea le symbole de l’Administratum sous ses vêtements, puis s’adressa aux membres du sénat.
— Bonjour à tous. Je m’appelle Ario Barzano et je suis venu ici au nom du divin Empereur de l’Humanité. Je suis chargé de remettre ce monde sur le droit chemin et de mettre un terme à la corruption et au trouble qui y règnent. Les plus hautes instances m’ont ordonné de faire appliquer la volonté de l’Adeptus Administratum.
Uriel remarqua les regards inquiets que s’échangèrent plusieurs chefs de cartel à la mention du mot « corruption ». Barzano étendit les bras, comme pour embrasser le sénat tout entier.
— Considérez le vote comme suspendu, messieurs. Et mesdames, ajouta Barzano en adressant un hochement de tête à Solana Vergen, qui lui rendit son salut par un battement de cils dénué de toute ambiguïté. Quelques voix s’élevèrent pour protester, mais elles se turent rapidement lorsque Barzano se rapprocha de la forme massive du capitaine Space Marine. Maintenant, mes chers amis, si vous voulez bien m’excuser, le gouverneur de Pavonis et moi-même avons beaucoup de choses à nous dire. Bonne journée.
Sur ce, il s’inclina et fit signe à Lortuen Perjed. Le vieil homme s’empressa de rejoindre Barzano et Uriel. Son visage était rouge de colère et lorsqu’il l’atteignit, il agrippa le bras de l’adepte.
— Cette intervention était tout à fait inappropriée.
— Je sais, se contenta de répondre Barzano. Il se libéra de l’étreinte de Perjed pour s’approcher du gouverneur.
Mykola Shonai était visiblement sidérée par cet événement inattendu. Elle se leva mécaniquement de son siège.
— Je vous remercie, adepte Barzano. Je n’attendais votre arrivée que dans la soirée.
Il lui fit un clin d’œil et se pencha vers elle.
— J’aime soigner mes entrées, gouverneur Shonai, mais ne me remerciez pas encore, car vous n’êtes pas tirée d’affaire. Ce n’est qu’un sursis.
Le gouverneur acquiesça, comprenant parfaitement sa situation, mais néanmoins reconnaissante pour ce répit.
— Soyez-en tout de même remercié.
— Fort bien. Maintenant, et avant que votre modérateur des transactions ne succombe à une attaque, je suggère que nous nous retirions à l’abri des regards indiscrets.
Ario Barzano et Lortuen Perjed étaient assis dans les appartements du gouverneur, tandis qu’Uriel se tenait au repos derrière eux. Mykola Shonai était installée à son bureau, flanquée d’Almerz Chanda et de Leland Corteo. La fumée de la pipe de ce dernier se répandait paresseusement sous le plafond, aidée en cela par un ventilateur.
— Je dois vous dire, adepte, commença le gouverneur, que je ne m’attendais pas à être maintenue en place.
— Tout peut encore arriver, gouverneur. Je n’ai pas encore pris de décision.
— Alors pourquoi ne m’avez-vous pas laissé perdre le vote demandé par Taloun ?
Almerz Chanda se pencha vers elle.
— Gouverneur, ce qui importe le plus à l’heure actuelle, c’est de savoir qu’il ne l’a pas fait, n’est-ce pas ?
— Non, Almerz, cela ne suffit pas. Eh bien, adepte ? Pourquoi ?
— Parce que vous m’avez bien plu, et je suis sûr qu’Uriel aussi vous aime bien, expliqua Barzano. Uriel pensait que son appréciation des qualités du gouverneur n’était pas si évidente et il en conçut davantage de respect pour les capacités d’observation de l’envoyé de l’Adeptus Administratum. De plus, ma chère, d’après ce que j’ai pu voir des autres candidats, vous étiez la moins…
— Immonde, veule et indigne de confiance ? suggéra-t-elle.
— Quelque chose comme ça, répondit Barzano en riant. Mais plus sérieusement, nous n’aimons pas déstabiliser un monde si nous pouvons l’éviter. Vous remplacer maintenant n’aurait eu aucun intérêt.
— En d’autres termes, cela n’est qu’un arrangement temporaire ?
— Exactement. Je vais être direct, gouverneur. Vous n’avez pas rempli votre mission de commandant impérial. Vous n’avez pas payé les taxes qui reviennent de droit à l’Empereur. Et votre incapacité à maintenir l’ordre est la raison de ma présence ici, pour rectifier la situation.
— Il est vrai que nous avons eu beaucoup de problèmes, mais les circonstances passées ont fait que…
— Les « circonstances passées » ne m’intéressent pas, gouverneur Shonai, l’interrompit sèchement Barzano, et Uriel fut surpris de la violence de son ton. Perjed aussi le remarqua et se pencha en avant sur son siège tandis que Barzano reprit. Ce qui m’intéresse, en revanche, c’est votre manque de progrès notables pour éliminer cette Église des Temps Anciens, une organisation qui ressemble à mon avis un peu trop à un culte. Ce qui m’intéresse également, c’est l’incapacité des vaisseaux de défense de votre système à détruire les pirates qui ont attaqué nos navires et causé la mort de nombreux serviteurs de l’Empereur. Mais ce qui m’intéresse le plus est le fait que vous n’ayez pas estimé nécessaire de signaler tout cela à l’Imperium. Une explication de ces circonstances-là me semble nécessaire.
— Que voulez-vous que je vous dise, adepte ? L’Adeptus Arbites et nos propres forces de sécurité ont essayé d’en finir avec l’Église des Temps Anciens, mais ce sont des ombres, nous ne savons pas où ils se procurent leurs armes, répondit Shonai, la colère perceptible dans sa voix. En ce qui concerne les eldars, nos vaisseaux sont bons pour la retraite, aucun d’eux n’a moins de deux mille ans. Comment voulez-vous les combattre avec ça ?
Barzano sourit quand Shonai eut fini sa tirade et se renfonça dans sa chair, apparemment satisfait de sa réponse.
Mykola Shonai posa les deux mains sur son bureau.
— J’admets qu’il a été maladroit de ma part de ne pas avoir signalé ces problèmes plus tôt, mais je pensais pouvoir les régler en interne. Si je dois être coupable de quelque chose, c’est d’avoir surestimé mes propres capacités dans la gestion de cette crise.
— C’est vrai, mais je ne pense pas que votre gouvernement soit complètement perdu. Je propose que nous laissions de côtés les erreurs passées pour le moment, et que nous nous occupions des troubles actuels aussi vite que possible. Cela vous convient ?
— Bien sûr ! s’empressa de répondre le gouverneur. Que voulez-vous que je fasse ?
— La première étape de toute opération repose sur la collecte d’informations. Pour faciliter mes recherches, j’ai besoin d’un accès complet aux données contenues dans les machines logiques et les cogitateurs du palais. Et bien entendu, cela inclut vos dossiers privés.
— C’est scandaleux ! s’indigna Almerz Chanda. Vous outrepassez vos droits, monsieur !
— Vraiment ? Il y a des choses que vous ne voulez pas que je voie dans ces fichiers, monsieur Chanda ? Des archives mentionnant des pots-de-vin, des contacts illégaux avec des extraterrestres, peut-être ? plaisanta Barzano. Uriel se demanda brièvement où sa blague s’arrêtait.
— Certainement pas, tempêta Chanda. Mais c’est une grave atteinte au protocole que d’inspecter les fichiers personnels du gouverneur comme s’il s’agissait d’un vulgaire criminel.
Mykola Shonai posa la main sur le bras de Chanda pour le calmer.
— Tout va bien, Almerz, je n’ai rien à cacher. Vous aurez tout ce que vous demandez, adepte. Que vous faut-il d’autre ?
— Comme je ne veux pas avoir l’air de choisir mon camp en acceptant d’être hébergé par un des cartels, qui vont certainement s’empresser de me faire des offres en ce sens, je demande une suite dans le palais pour ma suite. Ils attendent à l’heure actuelle sur une plate-forme d’atterrissage en dehors de la cité. J’aimerais beaucoup qu’ils soient prévenus et qu’un transport les rapatrie au palais.
— Ce sera fait immédiatement, lui assura le gouverneur en faisant un signe de tête à Chanda. Il parut fâché de se voir confier cette tâche subalterne, mais s’inclina et quitta la pièce. Il vous faut quelque chose d’autre ?
— Oui. Comme je vais sans doute avoir affaire aux forces de sécurité locales durant mon enquête, j’aurai besoin d’une liaison avec l’Adeptus Arbites. Contactez-les et demandez-leur de m’assigner un officier.
— Ils ne vont guère aimer cela, fit remarquer Leland Corteo.
— Ce n’est pas mon problème. Assurez-vous seulement qu’ils font ce que je demande.
Corteo cilla devant le ton ferme de Barzano, mais il acquiesça tout de même et écrivit quelque chose sur son calepin.
— Bon. Voilà pour les affaires locales. Passons maintenant à ces pirates eldars. Je propose que le Vae Victus commence des opérations de patrouille dans le système aussi tôt que possible. Uriel ? Je pense que vous êtes le plus à même d’expliquer au gouverneur ce dont vous avez besoin.
Uriel se mit au garde-à-vous et fit un pas en avant.
— Pour être pleinement efficaces, nous avons
besoin des dossiers complets concernant les localités pillées et
les vaisseaux attaqués, avec un décompte
précis des équipages et des cargaisons. De même, une carte du
système sur laquelle figure la date et le lieu précis de chaque
assaut nous sera très utile pour mettre en place un circuit de
patrouille efficace.
— Je m’en occupe personnellement, capitaine Ventris.
Uriel fit un signe de la tête et recula d’un pas.
— Quand pourrez-vous commencer, Uriel ?
— Les techmarines effectuent les réparations sur notre croiseur en ce moment même et nous pourrons entamer les opérations dès que les informations auront été transmises au Vae Victus.
Barzano se gratta pensivement le menton.
— Excellent. Je veux que vous retourniez au vaisseau pour traquer ces déviants. Je ne saurai trop insister sur l’importance de cette tâche, capitaine.
— Retourner au vaisseau ? Adepte, le seigneur Calgar en personne m’a confié votre sécurité et je lui ai juré sur mon honneur qu’il ne vous arriverait rien.
— Il ne m’arrivera rien, mon cher, car vous allez me laisser Learchus et son escouade comme gardes du corps. À moins que vous n’ayez des réserves à formuler sur leurs capacités à assurer ma protection ?
— Bien sûr que non. Learchus est un vétéran qui a participé à de nombreuses campagnes. J’ai une confiance absolue en lui.
— Alors moi aussi.
Uriel se rendit soudain compte de la maestria avec laquelle Barzano l’avait manœuvré. Learchus était un grand guerrier qui préférerait mourir plutôt que de voir l’adepte être blessé, et le relever de ses obligations serait le déshonorer. Uriel avait juré devant Marneus Calgar de protéger Barzano, mais rester avec l’adepte signifiait que ses hommes iraient au combat sans leur commandant. Uriel admit à contrecœur qu’en tant que capitaine de la 4e compagnie, il devait faire confiance à ses subordonnés. Il s’inclina devant Barzano.
— Le sergent Learchus et ses hommes sont les meilleurs gardes du corps que vous puissiez souhaiter. Il est issu d’une famille honorable et il ne faillira point.
— Vous ne faillerez pas non plus, Uriel. J’en suis certain.
— Pas tant que je vivrai, affirma le Space Marine.
Ario Barzano se frotta les yeux et s’appuya contre le dossier de sa chaise. Il souffrait d’un début de migraine. Ses recherches avaient été fructueuses, mais il était las du catalogue sans fin de trahison, de duplicité et de bassesse humaine qu’il avait exhumé ces deux derniers jours. Il recula son siège et se servit un verre d’uskavar, l’alcool local.
Les appartements que lui avait alloués le gouverneur étaient mal éclairés, car les chandelles s’étaient presque entièrement consumées. Il entreprit de les remplacer avant de déguster son verre et se demanda comment il allait bien pouvoir combattre l’Église des Temps Anciens. Mykola Shonai n’avait pas menti en disant que ses membres étaient des ombres. En fait, attraper une ombre aurait sans doute posé moins de problèmes que de retracer les activités de ce groupe.
La secte était apparue sept ans auparavant, quand une explosion frappa un des manufactoria du Honan. L’incendie qui s’ensuivit détruisit complètement les entrepôts et causa des dégâts considérables. L’incident avait été attribué à des mesures de sécurité insuffisantes jusqu’à ce qu’un communiqué parvienne au bureau des gouverneurs, dénonçant la corruption des dirigeants de la planète et promettant de nouveaux attentats.
Rapidement, tous les cartels souffrirent de ces attentats, tandis que les forces de sécurité s’avérèrent incapables de mettre un terme aux activités criminelles du groupe. Ce qui ne surprenait guère Barzano, car il avait vite compris que celle-ci n’était qu’une armée fantoche. Fondées par les cartels, les forces de sécurité n’étaient que des milices privées chargées de protéger les intérêts de leurs employeurs et de veiller à ce que les ouvriers marchent droit. Les petites garnisons de l’Adeptus Arbites étaient trop peu nombreuses pour faire respecter la loi impériale en dehors des villes. Dans les bidonvilles et les quartiers ouvriers qui entouraient les manufactoria, seule la loi des cartels comptait.
Et pour Barzano, ces derniers n’étaient que des bandes de criminels. En vérité, il avait rarement vu un tel nid de vipères, à part au sein de sa propre organisation, remarqua-t-il en souriant vicieusement. Chacun de ces cartels s’était à un moment ou à un autre allié avec un autre cartel pour engranger des bénéfices à court terme, avant de trahir son engagement pour soutenir un autre cartel. Cela leur semblait parfaitement normal sur Pavonis, et Barzano regrettait que, alors que le quarante et unième millénaire touchait à sa fin, l’humanité ne soit pas encore capable de mettre de côté ses différends, alors que quasiment toutes les races de la galaxie cherchaient à l’anéantir.
Dans presque tous les systèmes planétaires, les orks massacraient et pillaient tout ce qui se trouvait sur leur route. Il essaya d’oublier ce qu’il avait vu sur le monde déchiré par la guerre d’Armageddon. Il savait aussi que, si loin dans la bordure orientale, l’empire en expansion des Tau n’attendrait pas longtemps avant d’atteindre Pavonis.
Oui, la galaxie était un lieu hostile, et seule l’unité apportée par l’Imperium de l’Humanité pouvait garantir la survie du genre humain. Toute autre façon de faire n’était que pure folie et il avait juré de garantir la stabilité de l’Imperium. Et qu’avaient fait les dirigeants de Pavonis pour préserver le domaine de l’Empereur ?
Il retourna à son siège et alluma son écran. Une icône indiquait qu’il avait reçu un nouveau message mais il l’ignora, sachant qu’il s’agissait d’une nouvelle invitation à profiter de l’hospitalité d’un des cartels. Des invitations à dîner, à chasser, à boire ou à s’adonner à d’autres passe-temps moins avouables lui avaient été adressées de la part de toutes les maisons commerciales. Il les avait toutes déclinées poliment.
Il parcourut l’ensemble des informations qu’il avait collectées depuis deux jours.
Il n’avait rien trouvé de particulier chez les petits cartels, en dehors des habituelles alliances, contre alliances et ruptures de serments. Mais les leaders des plus gros cartels étaient un tout autre genre de fripouilles.
Beauchamp Abrogas passait son temps à dilapider la fortune familiale et à détruire son système nerveux à coups de drogues illégales.
Taryn Honan était un imbécile obèse qui dépensait des sommes astronomiques pour se payer des prostitués et qui n’arrivait pas même pas à surveiller une pièce remplie de serviteurs lobotomisés.
Il ne savait pas grand-chose de Solana Vergen, mais il avait senti que son chagrin n’était pas sincère. De plus, changer le vote du cartel de façon aussi spectaculaire indiquait une personnalité pour le moins instable.
De Valtos passait la plupart de son temps sur ses terres, quand il n’explorait pas le système à la recherche d’antiquités. Même un aveugle aurait perçu la haine et l’amertume qu’il concevait à l’égard du gouverneur. Toutefois, Barzano n’était pas parvenu à en trouver la cause, ce à quoi il se promit de remédier. Le lien entre de Valtos et les eldars noirs était évident, mais ce n’était pas le genre de lien qui pousse à la coopération. Il avait été pratiquement torturé à mort à bord du vaisseau extraterrestre et avait survécu malgré cela.
Barzano avait disculpé Mykola Shonai dès le début de ses investigations. Il n’avait rien trouvé de suspect à son sujet lors de leur premier entretien. De plus, son second mandat de six ans en tant que gouverneur planétaire touchait à sa fin et la constitution de Pavonis lui interdisait d’en briguer un troisième. Elle n’avait rien à gagner et tout à perdre à prolonger la situation actuelle. Barzano savait que ce fait ne suffisait pas à prouver son innocence ; il avait en effet découvert des traîtres qui avaient encore moins de raisons d’agir qu’elle. Cependant, comme il avait l’habitude de telles affaires, il se targuait de pouvoir aisément débusquer un menteur et, selon lui, Mykola Shonai n’en était pas un.
À vrai dire, il admirait cette femme. Elle avait fait tout ce qu’elle avait pu pour sa planète. Mais il savait bien que faire de son mieux ne suffisait pas. Les efforts devaient être suivis de résultats et les résultats sur Pavonis étaient éloquents.
Quant au Taloun…
C’était une autre histoire. Vaincu deux fois ces dix dernières années aux élections par la coalition des cartels Shonai et Vergen, Vendare avait tout à gagner. Chaque fois qu’il avait des situations telles que celle-ci à régler, Ario Barzano commençait par se poser la même question : qui a le plus à y gagner ? Dans le chaos causé par les attaques terroristes, les raids des pirates xenos et l’instabilité politique, le cartel de Taloun sortait du lot.
Il avait moins souffert que les autres des attentats, à l’exception peut-être du Shonai, et Barzano ne croyait plus depuis longtemps aux coïncidences. L’arrivée simultanée des eldars et de l’Église des Temps Anciens indiquait que quelqu’un orchestrait tout cela. Taloun avait déjà donné la preuve de son habileté et, selon Barzano, il était tout à fait capable de fomenter ce genre de conspiration.
Il s’éloigna de l’écran et finit son verre. Il devait se lever tôt le lendemain et se demanda brièvement ce qu’il allait encore découvrir. Il avait dit à son officier de liaison de l’Adeptus Arbites de s’habiller en civil et il n’était pas sûr qu’elle possède ce type de vêtement. Elle avait l’air d’être quelqu’un qui ne vivait que pour sa vocation et il prit conscience qu’en cela elle lui ressemblait beaucoup.
Il entendit ses gardes du corps Ultramarines parler à voix basse dans le couloir et eut une pensée pour le capitaine Ventris. Il était désolé de ne pas pouvoir lui dire la vérité, mais s’il l’avait fait, il aurait sans doute eu des problèmes avec le Space Marine.
Il regarda dans la direction du coffre-fort caché dans le mur, derrière le portrait d’un homme appelé Forlanus Shonai, où il avait placé la boîte.
Il résista à l’envie de l’ouvrir pour en examiner le contenu et, pour le salut de Pavonis, il pria pour ne jamais avoir à s’en servir.
Uriel voyait bien qu’avoir un pilote local à bord de son navire irritait le seigneur amiral Tiberius, mais il savait également que l’homme avait suffisamment de bon sens pour accepter cette nécessité. L’itinéraire le plus rapide qu’avaient calculé Uriel et Tiberius pour atteindre Caernus IV, site de l’attaque eldar la plus récente, leur faisait traverser une ceinture d’astéroïdes. Et sans l’aide d’un pilote local connaissant les routes les plus sûres, ils auraient sans doute eu des ennuis.
Cela faisait six heures que l’homme les guidait à travers le dédale des énormes astéroïdes, six heures qu’Uriel priait Guilliman, l’Empereur et tous les saints qu’ils en sortent rapidement et en un seul morceau.
La carte indiquant l’emplacement des raids eldars, fournie par le gouverneur Shonai, s’était révélée très utile. Uriel n’avait pas mesuré l’ampleur du fléau avant de l’avoir sous les yeux. En effet, les eldars avaient frappé un peu plus de cent fois en six ans. Chaque village attaqué avait été entièrement détruit, chaque vaisseau gravement endommagé, l’équipage massacré jusqu’au dernier. Uriel admirait d’autant plus Kasimir de Valtos, qui avait fait preuve d’un grand courage et d’une détermination sans faille pour échapper à un ennemi aussi diabolique.
— Gouvernail, mettez le cap au zéro-deux-cinq, trente degrés vers le bas.
Uriel leva le nez de la carte un instant pour voir par la baie d’observation et il devint blanc lorsqu’il vit le passage étroit que visait le pilote. Il retint son souffle alors que le Vae Victus passait entre deux gigantesques masses rocheuses de plusieurs millions de tonnes qui tournoyaient dans le vide. Il vit que Tiberius s’agrippait solidement à son pupitre de capitaine, les jointures blanches et le visage marqué par l’inquiétude. S’il avait fini par accepter la présence d’un pilote étranger au vaisseau, il avait refusé de lui laisser son poste.
— Vous êtes obligé de voler aussi près de ces fichus cailloux ? aboya Tiberius, finalement à bout de patience. Si vous ne faites qu’effleurer l’un d’entre eux, on se retrouvera en morceaux avant de comprendre ce qui nous arrive.
Le pilote, un natif des forges d’Altemaxa qui s’appelait de Krivorn, sourit de tous ses chicots jaunis.
— Ça ? se moqua-t-il. Ha ! Là, je vous ménage, les gars. C’est le chemin le plus facile. J’aurais pu vous faire passer par le chemin des épaves, et là vous en auriez vu, du pilotage, j’vous l’dis !
— Le chemin des épaves ? demanda Uriel. Ce n’est pas inscrit sur votre carte.
— Nan, c’est moi qui ai trouvé ce nom-là après y avoir presque perdu un vaisseau.
— « Presque perdu un vaisseau ! » explosa Tiberius.
— Ouais, mais c’était pas ma faute, protesta Krivorn. On volait tranquillement, contents comme des orks dans une grotte à champignons quand, d’un seul coup, cette foutue épave déboule de nulle part ! J’vous jure, une minute avant y avait rien, et puis juste après on se retrouve avec les systèmes en rade, à faire machine arrière en virant à tribord !
— Je suppose que vous avez fait une erreur de navigation, pilote.
— Moi ? Non messire ! Je vérifiais les instruments une seconde avant et il n’y avait rien à cet endroit. Gouvernail, mettez le cap à trois-deux-quatre, trente degrés vers le haut.
— Dans ce cas, qu’est-ce que c’était ? demanda Uriel, agacé par les directives de pilotage nonchalantes de Krivorn.
— Ma foi ! J’l’ai jamais su, mais je crois que c’était un de ces space hulks dont on n’entend tout le temps parler, répondit Krivorn. Et j’suis pas le premier à l’avoir vu. Beaucoup de navigateurs disent l’avoir vu dans le système de Pavonis. Le croissant de lune, qu’il l’appelle, rapport à sa forme. Gouvernail, mettez le cap à zéro-zéro-zéro, en avant toute.
Uriel avait déjà entendu parler de tels navires. Des épaves perdues dans le Warp, vouées à devenir des vaisseaux fantômes parcourant sans fin les profondeurs de l’espace.
Personne ne pouvait prévoir leurs mouvements, leurs apparitions étaient complètement aléatoires : il suffisait qu’un destin capricieux se décide à les vomir de l’Immaterium. Penser qu’un tel appareil se trouvait à proximité emplit l’officier Space Marine de dégoût.
— Bon, assez de ces bêtises, intervint Tiberius. Combien de temps encore pour traverser cette ceinture d’astéroïdes et atteindre Caernus IV ?
Krivorn sourit à nouveau et s’inclina devant Tiberius.
— Nous venons de franchir la ceinture, monseigneur. Selon notre cap et notre vitesse actuels, nous serons en orbite autour de la planète dans moins d’une heure. De rien.
Kasimir de Valtos sentit son estomac se contracter encore une fois et il régurgita une matière visqueuse teintée de sang dans un bol placé sur la commode. Son front était couvert de sueur et la douleur enserrait ses tripes dans son étreinte implacable. Sa vision se troubla alors qu’un nouveau flot de vomi noir chemina le long de sa gorge, pour finir dans le récipient en métal.
Maudits soient ces extraterrestres. Il ne se passait pas un jour sans que son corps ne se révolte contre les toxines qu’ils lui avaient administrées. Seules des infusions quotidiennes de puissants purgatifs pouvaient en contrer les effets, et le remède était presque aussi terrible que le mal.
Il se leva de sa cabine d’ablution et enfila un peignoir pour couvrir sa maigre carcasse. Il se passa de l’eau sur le visage, attendant que cessent les derniers spasmes. De Valtos but ensuite une longue gorgée d’eau glaciale dans l’espoir de faire passer le goût acide de la bile, puis il se sécha avec une serviette de soie avant de coiffer ses cheveux blancs.
Il se regarda dans le miroir et se demanda comment il en était arrivé là. La réponse était simple. Tout avait commencé le jour où son expédition avait découvert les cavernes sous les ruines de Cthelmax, où se trouvaient les inscriptions de l’abbé hérétique Corteswain. Si seulement il ne les avait pas traduites. Si seulement il n’avait pas suivi cette sinistre prophétie.
Si seulement il n’avait pas rencontré les eldars.
Mais il avait suivi les prédictions, et elles l’avaient mené là où il en était à présent. Il leva sa main pâle pour pousser du bout des doigts la chair synthétique blafarde qui recouvrait son crâne. Seule son image dans le miroir pouvait lui indiquer qu’il la touchait effectivement. Jadis, il était beau et courtisé par les plus belles femmes de Pavonis, mais c’était terminé. La lame d’un tortionnaire y avait veillé.
Il avait plusieurs fois envisagé de se suicider après cette rencontre fatale, mais le courage lui avait manqué. Les écrits de Corteswain étaient riches de promesses bien trop tentantes, et il se dit avec amertume que l’espoir était la malédiction de la race humaine.
Car c’était bel et bien l’espoir qui le poussait à continuer sur cette route.
De Valtos jeta la serviette de côté et entra dans sa chambre. La pièce, dépourvue de miroirs, était d’apparence assez spartiate, sans aucun des raffinements que l’on pourrait s’attendre à trouver chez un homme issu d’une famille aussi riche. Il retira son peignoir et pénétra dans son dressing-room, pour y prendre son costume favori, bleu nuit avec des revers étroits et un col haut. Il l’enfila, les cicatrices infligées par le tortionnaire eldar sur le torse et les bras lui tirant douloureusement. Son invité allait bientôt arriver et il ne voulait pas être en retard.
Peu importait qu’il le méprisât, lui et les choses futiles auxquelles il croyait.
Et peu importait si quelques années plus tôt, il y croyait lui aussi.
Les temps avaient bien changé et ses responsabilités dépassaient maintenant les pertes et les profits, la production et le travail. Il choisit une paire de chaussures noires en peau de carnodon et s’assit sur son lit souillé de sang pour les mettre. Ceci fait, il se leva et rajusta la veste de son costume.
Il entendit un tintement depuis le vestibule et sut que son invité était arrivé. Pile à l’heure, comme d’habitude. Entièrement habillé, de Valtos alla jusqu’à la tête du lit et ramassa les couteaux ensanglantés abandonnés distraitement sur le cadavre mutilé qui gisait sur le matelas, en prenant soin d’éviter les mares de sang qui s’étaient amassées.
Il rangea ses instruments de torture dans une trousse en cuir noire qu’il cacha sous le lit et ressentit une déception familière à la vue du cadavre. Celui-là ne lui avait même pas permis de satisfaire ses pulsions. Il aurait bientôt besoin de se procurer un nouveau support pour exorciser ses démons, pensa-t-il.
Il imagina Solana Vergen sur le lit et sentit son pouls accélérer.
De Valtos quitta ses appartements privés, pour descendre rejoindre son invité dans le vestibule.
Il le vit qui attendait en bas des escaliers, en dansant nerveusement d’un pied sur l’autre.
Almerz Chanda leva la tête lorsqu’il entendit les bruits de pas.
Kasimir de Valtos sourit.
Jenna Sharben se sentait
peu à l’aise sans son uniforme de l’Adeptus Arbites. Pour la
centième fois, elle regretta que Virgil Ortega lui ait demandé de
veiller cet adepte infernal. Elle portait une tunique bleue serrée
avec d’amples manches et un pistolet automatique dans un holster
dissimulé sous son
aisselle gauche. Elle se tenait debout dans les quartiers de
l’adepte, qu’elle examinait avec curiosité.
Elle se vantait de pouvoir cerner le caractère d’un homme d’après la façon dont il vivait : ce qu’il aimait, ce qu’il détestait, s’il avait une vie ordonnée ou au contraire s’il s’accommodait d’un certain désordre.
Pourtant, les
appartements de l’émissaire de l’Adeptus Administratum lui
envoyaient toutes sortes de signaux contradictoires. Une dizaine de
livres empilés sur le bureau étaient classés par ordre alphabétique
alors qu’ils ne semblaient pas appartenir au mobilier de la pièce,
et des vêtements froissés reposaient en tas sur les couvertures du
lit. Un casier en métal gris, fermé par un cadenas à géno-clé,
avait été posé au pied de celui-ci. Un cahier contenant toutes les
notes manuscrites de l’adepte était posé, ouvert, sur le bureau.
Une carafe d’uskavar à moitié vide et un verre sale en cristal
avaient été
abandonnés juste à côté.
Quelle sorte d’homme était cet adepte ?
— Vous en avez assez vu ? s’enquit une voix à l’autre bout de la pièce. Elle sursauta et porta machinalement la main à son pistolet. Un homme en combinaison de travail tachée, arborant les couleurs du Taloun, était appuyé contre le mur et chiquait du tabac. Il avait l’air peu commode et sa barbe de trois jours n’arrangeait rien.
Jenna allait demander à l’homme ce qu’il faisait là lorsqu’elle reconnut l’adepte à qui elle s’était présentée la veille. Le changement était remarquable.
— Maintenant oui, répondit-elle alors que l’homme s’avançait vers elle. Barzano sourit.
— Aujourd’hui, je serai Gulyan Korda, technicien secundus de la fonderie trois-six-deux du Taloun. Qu’est-ce que vous en dites ?
Jenna en restait sans voix. Si elle n’avait pas su la vérité, elle aurait juré qu’elle avait devant elle un natif de Pavonis. Il avait l’accent, les vêtements et même cette démarche apathique que les ouvriers des manufactoria prenaient. Il avait plaqué ses cheveux en arrière et elle voyait que ses joues étaient plus pleines.
Comme s’il avait lu dans ses pensées, Barzano retira deux morceaux de coton de ses joues et lui fit un clin d’œil avant de les remettre en place.
— Vous pensez que j’arriverai à passer pour un type du coin ?
— Sans aucun doute, lui assura Jenna. Mais pourquoi le voudriez-vous ?
— Eh bien, vu le climat actuel et l’impopularité du gouvernement, je ne pense pas que beaucoup de gens parleront à un étranger, surtout s’il vient de la part de l’Adeptus Administratum. Vous me suivez ?
Il n’avait pas tout à fait tort, se dit Jenna, et elle comprit soudain pourquoi il avait insisté pour qu’elle vienne en civil. Il voulait se mêler aux travailleurs et elle serait son garde du corps. Ou son guide. Ou les deux ?
— Que comptez-vous faire exactement, adepte Barzano ?
— Simplement faire un tour du côté des quartiers ouvriers, en dehors de la cité. Rien de trop stressant, je vous le promets.
Barzano indiqua de la tête les livres et le terminal de données.
— Collecter des informations avec ça est certes intéressant, mais je reste persuadé que rien ne vaut une bonne visite sur le terrain, pas vous ? Donc aujourd’hui, Gulyan Korda, récemment licencié par le Taloun, va se mêler à d’autres mécontents pour discuter de la situation déplorable dans laquelle le gouvernement nous a mis.
— Et quel sera mon rôle ?
— Vous, ma chère, vous serez mon garde du corps, murmura Barzano, qui semblait adorer son nouveau rôle. Voyez-vous, quand Gulyan a été viré, il est parti avec des documents plutôt compromettants.
— Vraiment.
— Je crois, oui. En fait, je suis certain que c’est le cas.
— Et quelle pourrait être la nature de ces informations compromettantes ?
— Aucune idée, répondit Barzano en riant. Quelque chose de juteux en tout cas.
— Et les Space Marines ? Vous aurez du mal à passer inaperçu avec deux types en armure qui vous suivent partout.
— Oh, je sais bien. C’est pour ça qu’ils ne viennent pas.
— Et comment allez-vous sortir du palais sans qu’ils s’en rendent compte ?
— Facile. Ils ne me verront pas, promit Barzano. Ils vous verront vous et un type louche en combinaison quitter le palais et croiront que l’adepte fainéant est encore à l’intérieur. C’est encore plus facile que vous ne le croyez.
Jenna Sharben secoua la tête.
— Je pense que ce n’est vraiment pas une bonne idée, dit-elle.