CHAPITRE XXI
 
Tout est bien qui finit bien

 

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FRANÇOIS était un garçon courageux, mais en cet instant-là, il se sentit vraiment très effrayé. Et que devaient penser les autres, cachés dans la petite chambre secrète ? Les cris de Julot et les coups frappés contre la porte devaient terrifier Annie. C’est alors que François eut une idée merveilleuse. Pourquoi, pourquoi n’y avait-il pas songé plus tôt ? Il pouvait ouvrir lui-même le portail aux gendarmes ! Il savait comment le faire, et le volant qui faisait fonctionner les grilles était dans la pièce » Une fois le portail ouvert, il ne faudrait pas plus de quelques minutes aux gendarmes pour arriver devant la maison.

François courut vers le volant et le tourna de toutes ses forces. Un bourdonnement se fit entendre, puis un grincement : les grilles s’ouvraient !

Julot donnait toujours des coups terribles contre la porte avec une chaise. Il avait déjà brisé un des panneaux. Mais quand il entendit le bruit du mécanisme qui ouvrait et refermait le portail, il s’arrêta, pris de panique. Les grilles s’ouvraient ! Les gendarmes allaient arriver et le faire prisonnier !

Il oublia les belles histoires qu’il avait eu l’intention de raconter à la police, il oublia les projets qu’il avait faits avec ses complices. Bref, il oublia tout, sauf qu’il devait se cacher ! Il jeta la chaise sur le sol et prit la fuite.

François s’assit dans un fauteuil, le cœur battant comme s’il avait longtemps couru. Les grilles étaient ouvertes. Julot avait fui, la police allait arriver ! Déjà, il pouvait entendre, dans l’allée, le grondement de moteurs puissants. Puis, les voitures s’arrêtèrent et leurs portières s’ouvrirent. Quelqu’un se mit à tambouriner contre la porte d’entrée de la maison.

« Ouvrez, au nom de la loi ! » cria une voix forte.

Personne ne vint ouvrir. François entrebâilla la porte de la bibliothèque et regarda dans le hall. Il était vide.

Il courut vers la porte d’entrée, tira le verrou, défit la lourde chaîne, craignant à chaque instant que les gendarmes n’enfoncent le battant pendant ce temps-là. Mais ils n’en firent rien.

Enfin, les gendarmes, au nombre de huit, pénétrèrent dans le hall. Ils parurent surpris d’y trouver un jeune garçon.

« Qui êtes-vous ? demanda le brigadier.

— François Gauthier, monsieur. Je suis bien content de vous voir. Les choses commençaient à mal tourner pour nous.

— Où sont les suspects ?

— Je n’en sais rien, dit François.

— Trouvez-les », ordonna le brigadier à ses hommes qui se dispersèrent. Mais avant qu’ils aient pu ouvrir une porte, une voix calme se fit entendre au fond du hall.

« Puis-je vous demander ce que tout cela signifie ? » C’était M. Bertaud, fumant une cigarette d’un air parfaitement tranquille, devant la porte du salon. « Depuis quand la police entre-t-elle ainsi chez les gens, sans raison aucune ? interrogea-t-il.

— Où sont les autres ? répliqua le brigadier.

— Ici, dit Bertaud. Nous étions en train de discuter et nous vous avons entendus frapper contre 1a porte. Vous avez donc pénétré dans le parc ? Cela vous coûtera cher. »

Le brigadier s’avança dans le salon et y jeta un coup d’œil.

« Ah ! ah !... Voici notre ami Julot, dit-il aimablement. Il n’y a pas deux jours que tu es sorti de prison, et tu refais déjà des bêtises. Où est Vannier ?

— Je ne sais pas ce que vous voulez dire, répondit Julot d’un ton rogue. Comment est-ce que je saurais où il est ? Il était en prison, la dernière fois que j’ai entendu parler de lui.

— Oui, mais il s’est échappé, dit le brigadier. Et quelqu’un l’y a aidé. Quelqu’un a organisé son évasion — des amis à toi — et quelqu’un sait où se trouvent les diamants qu’il a volés. Mon opinion, c’est que Vannier t’a donné ta part du butin pour te remercier de l’avoir fait évader. Où est Vannier, Julot ?

— Je vous répète que je n’en sais rien, dit Julot. Il n’est pas ici, si c’est là votre idée. Vous pouvez fouiller la maison de fond en comble. Bertaud vous le permet, n’est-ce pas, Bertaud ? Cherchez les diamants aussi, pendant que vous y êtes. Je ne sais rien là-dessus.

— Bertaud, il y a longtemps que nous avons l’œil sur vous », dit le brigadier, se tournant vers M. Bertaud qui fumait toujours tranquillement. « Nous pensons que vous êtes responsable de toutes ces évasions. C’est à cause de cela que vous avez acheté cette maison solitaire, n’est-ce pas ? Pour pouvoir travailler sans être dérangé ? Vous organisez les évasions, vous procurez des vêtements civils et une cachette au prisonnier échappé jusqu’à ce qu’il puisse quitter le pays.

— Des histoires, tout ça ! fit Bertaud.

— Et vous n’aidez que les malfaiteurs qui ont fait un cambriolage important et qui ont caché le produit du vol avant d’être arrêtés, poursuivit le brigadier d’une voix coupante. De sorte que vous gagnez gros à ce jeu-là. Bertaud, je suis certain que Vannier est ici... avec les diamants. Où est-il ?

— Ni Vannier, ni les diamants ne sont ici, répondit Bertaud. Vous pouvez les chercher. Je ne crains rien, je suis innocent. »

François avait écouté cet entretien avec stupéfaction. Ils étaient vraiment tombés dans un repaire de voleurs et de bandits ! Eh bien, lui, François, savait où se trouvaient Vannier et les diamants ! Il fit un pas en avant.

« Nous vous écouterons plus tard, mon garçon, dit le brigadier. Nous avons du travail pour le moment.

— Monsieur, je peux vous faire gagner du temps ! s’écria François. Je sais où se trouve le prisonnier évadé... et aussi les diamants ! »

Julot poussa une exclamation et Bertaud jeta à François un regard menaçant.

« Vous ne savez rien du tout » cria Julot. Vous n’êtes arrivé ici qu’hier ! »

Le brigadier considérait François d’un air grave. Ce garçon bien élevé, aux yeux francs, lui plaisait.

« Me dites-vous la vérité ? demanda-t-il.

— Oh oui ! répondit François. Venez avec moi, monsieur. »

Il sortit de la pièce, suivi du brigadier et des bandits. Mais trois gendarmes avaient pris soin de fermer la marche, derrière Julot et son complice.

François les conduisit à la bibliothèque. Le visage de Julot prit une teinte écarlate, mais Bertaud lui fit signe de se taire. François commença à retirer les livres du rayon qui dissimulait le panneau mobile.

Julot poussa un cri et se précipita vers François.

« Arrêtez ! Qu’est-ce que vous faites ? »

Les gendarmes tirèrent immédiatement Julot en arrière. François pesa sur la poignée et le panneau s’ouvrit sans bruit...

De la chambre secrète, quatre paires d’yeux regardèrent les gendarmes et, pendant un moment, personne ne dit rien. Les enfants et l’homme étaient surpris de voir un groupe si important de gendarmes, et ceux-ci étaient stupéfaits de trouver tous ces enfants dans cette pièce minuscule.