CHAPITRE XVII

Soudain, le bombardement cessa.

Accroupie près de la foreuse, Mara étendit ses perceptions. L’air était saturé de fumée âcre, et elle entendit des flammes crépiter en trois endroits au moins. Mais les turbolasers s’étaient tus.

Elle ignorait ce qui lui valait ce répit, mais elle devait en profiter. Contournant les gravats, elle retourna dans le couloir. Le piège de feu que Caaldra leur avait concocté avait presque fini de se consumer, formant un autre nuage toxique qui lui piqua les yeux. Clignant des paupières, elle gagna l’endroit où elle avait laissé Tannis.

Il n’avait pas bougé.

— Tannis ? dit-elle, fourrant son sabre laser dans sa ceinture et s’asseyant sur les talons près de lui.

Il ne répondit pas, mais il était toujours en vie. Elle évalua ses blessures – principalement des brûlures – puis retourna au centre de contrôle détruit pour y chercher le kit d’urgence.

Mara n’avait pas le temps de soigner ses plaies alors que leurs assaillants devaient se préparer pour le second round. Elle sélectionna des analgésiques et des stimulants et les injecta dans le bras de Tannis. Moins d’une minute plus tard, il revenait à lui.

— Comment vous sentez-vous ? demanda Mara.

— Comme un mourant, répondit-il d’une drôle de voix. Que s’est-il passé ?

— Caaldra nous a laissé une surprise, répondit-elle, évitant de parler du bombardement. Vous vous sentez d’attaque pour une petite balade ?

— Je l’ignore. Pour aller où ?

— Je pense m’arrêter à votre bunker de secours une minute, puis regagner le Happer’s Way pour vous mettre dans une capsule médicale.

— Je vais essayer.

Il plaqua une main au sol et poussa. En vain.

— Aucun problème, dit Mara, utilisant la Force pour l’aider à se lever. Je peux vous soutenir.

— J’avais oublié, sourit-il. Où sommes-nous ?

— À l’extérieur du principal centre de contrôle.

— C’est vrai, fit Tannis. Par ici.

Il montra le couloir dans la direction qu’ils avaient prise avant l’attaque. Mara passa un bras autour du pirate blessé et ils se mirent en route.

La base était détruite. Au moins cinq des bâtiments avaient été entièrement détruits. Deux brûlaient encore, alors que les autres n’étaient déjà plus que des débris fumants. Il y avait des corps partout. Au début, Mara se demanda comment ils avaient pu être si mal préparés – ils devaient forcément être équipés de senseurs ! Puis elle comprit que les hommes que Gilling et Brock avaient tués avaient donné l’alerte. Les deux BSI n’avaient pas vu les assaillants arriver, ou bien avaient-ils préféré les ignorer.

Ou alors ils les attendaient.

Sinon les autres finiront le travail. Ils seront bientôt là, avait dit Brock.

— Là, murmura Tannis en tendant l’index.

De la construction, il ne restait qu’une grande pièce dans l’un des coins du rez-de-chaussée.

— Bien, lâcha Mara, soupirant lourdement en découvrant le champ de ruines qui les en séparait – ça ne va pas être facile.

Tannis devait penser la même chose, car il dit :

— Laissez-moi ici. Allez chercher cette information, je vous attends.

— Pas question, répondit-elle, changeant de prise autour de sa taille.

Le barrage pouvait recommencer d’un instant à l’autre. Elle refusait de l’abandonner à découvert. Surtout pas à cinquante mètres de l’endroit le plus sûr du complexe.

Ils repartirent prudemment, Mara soutenant presque tout le poids de Tannis, qui malgré cela se déplaçait à grand-peine. Elle finit par utiliser la Force pour le faire planer au-dessus des obstacles, comme un sac de fruits. Tous les sens en alerte, elle espérait que personne ne leur tirerait dessus alors qu’elle était trop chargée et trop occupée pour réagir vite.

La salle qu’elle avait repérée de loin n’était en fait que l’accès au bunker, deux étages au-dessous. Apparemment, le Commodore avait pris la menace d’une attaque très au sérieux.

Non que cela lui ait servi. Son corps brisé était affalé devant la console de communication.

— C’est fini, murmura Tannis, tandis que Mara l’aidait à s’asseoir. Tout est terminé.

— On dirait, répondit-elle sobrement.

Je vais commencer par la com, décida-t-elle. À moins que le Commodore et son mystérieux allié n’aient été assez paranoïaques pour conduire toutes leurs affaires en personne, HoloNet aurait enregistré leurs communications. Elle déplaça doucement le cadavre, avec la chaise. Le Commodore avait essayé de lancer une dernière transmission quand son corps l’avait trahi. Mara ne connaissait ni le numéro ni la fréquence. Le système de destination, en revanche, lui apprit tout ce qu’elle devait savoir.

Shelkonwa. La capitale du secteur Shelsha.

— Mais ! croassa Tannis. Écran tac… là.

Mara se tourna vers l’écran tactique, au-dessus des contrôles des défenses. Sept triangles rouges – des combattants ennemis – fondaient sur la base. Le second round allait commencer.

Cette fois, pourtant, il y aurait deux camps !

Mara s’assit aux commandes et étudia ses options. Les lasers principaux pouvaient viser trois cibles en même temps, et il y avait plusieurs lance-missiles, l’arme préférée des BloodScars, en réserve. Les canons étaient déjà prêts. Elle les activa et prit les manches de tir.

Les attaquants étaient presque à distance optimale quand ils rompirent leur formation. Mara haussa les épaules – mentalement. Finalement, on pouvait traduire « optimale » par « préférée ». Elle accrocha deux des cibles et fit feu.

Les lasers les transformèrent instantanément en nuages de shrapnels. Alors qu’elle en visait d’autres, Mara se demanda quel gang rival était assez imprudent ou confiant pour envoyer des chasseurs sans bouclier. Elle tira de nouveau, et deux autres disparurent de son écran.

Peut-être pensaient-ils leur échapper grâce à leur manœuvrabilité ? Ils étaient certes vifs et zigzaguaient comme des poissons ivres quand elle les coinçait. Et d’ailleurs, l’un d’eux réussit à lui échapper.

Mais Mara n’avait pas besoin de ce genre de gadget technologique. Elle avait la Force, et rien dans l’univers ne pouvait rivaliser avec cela. Mettant le canon sur manuel, elle continua à détruire froidement et méthodiquement les ennemis. Puis elle s’avisa que les senseurs avaient capté un autre vaisseau, plus gros, de la taille d’un cargo. Tant pis, il arriverait bien trop tard pour sauver ses amis.

Les deux derniers chasseurs attaquaient. Mara entendit le crépitement de leurs rayons alors qu’ils arrosaient désespérément le bunker. Utilisant la Force, elle capta un frisson d’anticipation en prévision d’une manœuvre. Une seconde plus tard, il ne restait qu’un seul ennemi dans le ciel.

Mara visa… et marqua une pause. Les rapports sur ces appareils seraient mis à sa disposition après la bataille, mais un contact visuel avait parfois du bon. Bien sûr, détourner son attention du dernier assaillant maintenant pouvait lui coûter cher, mais elle jeta néanmoins un bref coup d’œil au moniteur.

Les senseurs avaient été lourdement endommagés par la première vague de bombardements, aussi la qualité était-elle très mauvaise. Mais il n’y avait qu’un seul chasseur de cette forme dans la galaxie.

La base des pirates était pilonnée par des TIE.

Son regard resta rivé sur l’image, son cerveau refusant d’admettre l’évidence. C’était impossible. L’attention de l’Empire était entièrement focalisée sur la Rébellion, les problèmes intérieurs et l’agitation croissante des non-humains. Sur ordre direct de l’Empereur, les pirates relevaient désormais des gouvernements des systèmes. Il ne pouvait s’agir d’une opération officielle contre les BloodScars.

Elle visait donc Mara elle-même.

Elle sentit ses traits se durcir tandis qu’elle se tournait de nouveau vers l’ennemi et détruisait le dernier TIE. C’était donc cela. Cela n’avait rien à voir avec une bande de pirates qui en recrutait d’autres. Ou qui entretenait des relations avec la Rébellion. Cette affaire remontait tout en haut de la hiérarchie impériale.

Elle étudia l’écran tactique. Le cargo inconnu était encore trop loin pour constituer une menace. Il était temps qu’ils partent.

Tannis était effondré dans son siège, la respiration rapide et légère.

— Vous pouvez encore faire un petit effort ? demanda-t-elle en s’accroupissant près de lui.

— Je vais essayer, répondit-il faiblement. Vous avez trouvé ce que vous cherchiez ?

— Oui, acquiesça-t-elle, le soulevant aussi délicatement que possible. Encore quelques minutes, ajouta-t-elle tandis qu’ils passaient la porte, et vous serez dans la capsule médicale du Happer’s Way…

Elle se tut quand il lui saisit l’épaule.

— Si je ne m’en sors pas, dit-il d’une voix rauque, la regardant de sous ses paupières lourdes, enterrez-moi dans l’espace. Promis ?

— Vous allez vous en tirer, mentit-elle avec assurance, luttant contre sa frustration.

Elle connaissait des techniques d’autoguérison, mais aucune capable de soigner autrui.

Mais tant qu’il y avait de la vie, il y avait de l’espoir.

— Tenez bon, dit-elle, gagnant l’escalier.

Ils avaient traversé le champ de gravats et étaient presque arrivés au poste de contrôle quand Mara entendit un appareil décoller.

Le Happer’s Way était monté des ruines et tournait sur lui-même, comme si le pilote voulait observer une dernière fois la base. Puis il partit.

Mara le regarda disparaître, le cœur serré. Puis elle baissa les yeux et les incendies lui apprirent qu’il ne restait sans doute plus un seul vaisseau intact.

Tannis et elle étaient cloués au sol.

Il y avait bien ce cargo en approche. Si l’équipage était assez bête pour se poser au milieu des champs de ruines, elle le forcerait à les emmener.

À moins qu’il ne représente le troisième round. Auquel cas, elle les tuerait tous.

— Pourquoi nous sommes-nous arrêtés ? demanda Tannis.

Mara écouta sa respiration laborieuse et regarda son visage brûlé. Elle n’avait pas le temps d’attendre le cargo. Le pirate avait besoin d’aide maintenant.

Puis elle sut ce qu’elle devait faire.

Presque tous les bâtiments étaient détruits, mais les tunnels où Caaldra avait disparu étaient intacts. La poussière de l’assaut avait recouvert ses traces à l’entrée, mais elle ne tarda pas à trouver une empreinte récente. Ils continuèrent dans le noir sur un sol égal qui descendait en pente douce. Deux détours plus loin, ils se retrouvèrent dans une zone chichement éclairée, et Mara trouva ce qu’elle avait espéré : un petit appareil de secours, un Chercheur Starfeld Z-10 prêt à décoller – apparemment, Caaldra avait prévu de l’utiliser pour s’enfuir. Puis il lui avait préféré le Happer’s Way.

Elle mit Tannis dans la capsule médicale, entrant un programme de traitement d’urgence, puis elle enclencha les répulseurs et s’engagea dans la galerie.

 

Les feux étaient presque éteints quand Yan et les autres traversèrent la base en ruines.

— C’est bon de voir que l’Empire s’occupe de nouveau des pirates, observa-t-il.

— Ça n’avait aucun rapport, Solo, fit LaRone d’un ton sombre. Il s’agissait de couvrir un complot.

Yan fronça les sourcils. Il s’était bien dit que ça ne pouvait pas être si simple.

— Quel genre de complot ? demanda Luke.

— Quelqu’un recrute des pirates, répondit Marcross. Quelqu’un avec des connexions haut placées dans l’Empire. Très haut placées.

— Qui ?

— C’est justement ce que nous voulons découvrir, dit LaRone. Quiller ?

— Rien ne bouge, répondit le pilote. Le cargo que nous avons vu décoller devait emmener les derniers survivants.

— Aucun signe du Faucon ? s’enquit Yan.

— Négatif. Mais il n’y a pas de raison de s’inquiéter. Il a dû vouloir s’assurer que le Représailles serait loin quand il reviendrait.

Yan grimaça. Oui, c’était sans doute ce que ce grand imbécile de Wookie était en train de faire.

— Quand il arrivera, signalez-le-moi.

— Promis, répondit Quiller. LaRone, il y a des tunnels souterrains droit devant. Impossible de savoir s’il y a des armes ou des gens là-dedans.

— Eh bien, aussi longtemps qu’ils restent dans leur trou, ils ne me dérangent pas. Tu as la carte ?

— Elle est en train de sortir. Le seul endroit qui ait encore du courant se trouve au nord-est de l’épicentre de l’attaque. Une seule pièce, avec un complexe plus large dessous. Sans doute un bunker.

Il s’agissait effectivement d’un bunker. Un étroit escalier menait à une large salle de contrôle, avec des portes s’ouvrant dans trois de ses murs. Un cadavre reposait dans un fauteuil, non loin de la console de communication.

— Les lasers sont encore en stand-by, dit Grave.

— Un baraquement, annonça Brightwater, jetant un coup d’œil dans l’une des pièces adjacentes. Mais personne n’a défait les lits. Le Représailles les a pris par surprise.

— Que cherchons-nous ? demanda Yan, regardant dans une autre.

C’était une petite armurerie avec des étagères croulant sous les grenades et les blasters, au cas où un ennemi en aurait assez de les bombarder de l’espace et se poserait.

— Essayons d’apprendre à qui ils ont parlé en dernier, suggéra Marcross.

— Bonne idée, acquiesça Yan.

Les soldats de choc se rassemblaient autour de Marcross, assis à l’ordinateur. Yan capta le regard de Luke, lui indiqua la pièce située dans son dos, puis se dirigea vers le groupe.

Luke eut l’air surpris, mais il approcha discrètement de l’armurerie.

— Vous avez trouvé quelque chose ? demanda Yan.

— Les données de leur dernière transmission, répondit LaRone, dont la voix résonnait étrangement à cause du casque.

— Eh bien ? insista Yan.

— Ça ne vous regarde pas ! cracha Marcross, en éteignant l’écran.

Mais Yan eut le temps de lire le nom du système. C’était Shelkonwa, la capitale de Shelsha. L’endroit même où Leia était prise au piège.

— Prochaine étape, Shelkonwa ? fit-il.

— Nous allons à Shelkonwa, corrigea Marcross. Vous allez où vous voulez.

— Vous pourrez partir dès le retour de votre vaisseau, ajouta LaRone. Merci encore pour le coup de main.

— Aucun problème.

Et dans un torrent d’émotions, il comprit que si Leia était clouée sur Shelkonwa, Chewie, le petit et lui ne pouvaient rien faire. Les Impériaux devaient déjà avoir déclaré la planète zone interdite, et le Faucon n’arriverait pas à pénétrer ce genre de blocus. Tous les capitaines impériaux n’étaient pas aussi stupides que celui du Représailles.

Leia était seule, mais elle était intelligente et pleine de ressources. Chivkyrie et les siens veillaient certainement sur elle en attendant que Mon Mothma et le général Rieekan la sortent de là. Ensuite, ils l’expédieraient dans une autre planque à l’autre bout de la galaxie, et Yan ne la reverrait jamais plus.

Du coup, il n’aurait plus aucune raison de rester avec les Rebelles.

Il était libre. Le temps de déposer Luke chez ses nouveaux amis, et il pourrait régler son différend avec Jabba et retourner à sa vie d’avant sa rencontre avec le petit et le vieux Ben Kenobi, dans la cantina de Mos Eisley. Il n’y aurait personne à ses trousses, personne qui lui donnerait des ordres.

C’était fini… du moins s’il le souhaitait.

Il regarda autour de lui et vit Luke revenir de l’armurerie, tenant un blaster contre sa cuisse.

Yan soupira. Non, ce n’était pas terminé. Luke et Leia étaient ses amis… et s’il ne se sentait pas prêt à s’engager envers la Rébellion, il ne pouvait pas laisser tomber ses amis.

— En fait, nous pensions aller à Shelkonwa, dit-il à LaRone. Alors nous pouvons faire route ensemble.

— Et pourquoi ne prendriez-vous pas votre vaisseau ? demanda l’autre.

Mieux valait cracher le morceau maintenant, plutôt que pendant le trajet vers Makrin City.

— Une amie à nous est là-bas et elle a des ennuis. La planète entière doit être bouclée.

— La capitale du secteur est bouclée ? répéta Brightwater. Votre amie a dévalisé le gouverneur ou quoi ?

— Elle n’a rien fait, répondit-il, espérant que c’était la vérité. Mais vous êtes des soldats de choc – vous réussirez sûrement à passer les barrages. Nous, nous n’y arriverions pas.

Pendant un instant, le silence régna.

— C’est donc ça, dit finalement LaRone, comme s’il avait enfin la réponse à sa question. Vous êtes des Rebelles.

— Nos liens avec eux sont très lâches, corrigea Yan.

— Ce qui fait de vous des traîtres à moitié ? demanda Grave, acide.

— Et vous vous êtes des déserteurs, riposta Luke.

C’était la chose à ne pas dire. Les soldats se raidirent, et Yan imagina sans peine leur expression.

— Ne nous traitez plus jamais de ça, siffla Grave. À moins de vouloir utiliser ce blaster.

— Pose-le, Luke, ordonna Yan, se demandant si le gamin apprendrait jamais à la fermer. Ça n’a pas d’importance.

— Si, rétorqua LaRone alors que Luke laissait le pistolet sur une table. Peu importe notre situation actuelle, nous demeurons au service de l’Empire.

— Et nous avons juré de protéger son peuple contre les gens comme vous, ajouta Brightwater.

— Oui, je sais quel serment vous avez fait, dit Yan en se redressant. J’ai fait le même, autrefois.

Le blaster de LaRone trembla un peu.

— Vous avez été dans l’armée ?

— Académie de Caridan, répondit-il, des souvenirs doux-amers remontant à la surface. J’ai été diplômé avec les honneurs. J’avais une belle carrière devant moi.

— Que s’est-il passé ? demanda LaRone.

Yan grimaça.

— J’ai vu comment l’Empire traitait les gens. Surtout les non-humains.

Cette fois, ils hésitèrent tous.

— Nous aussi, marmonna Grave.

— Quand l’avez-vous… quittée ? fit Brightwater.

— Je n’en suis pas parti. J’ai été fichu dehors. Fin de l’histoire.

Il y eut une autre pause. À les voir, ils avaient déjà dû avoir cette conversation.

— Vous, les Rebelles, vous essayez de détruire l’ordre et la discipline, lança LaRone. Tout ce pour quoi nous avons travaillé si dur depuis la Guerre des Clones.

— Nous aimons l’ordre et la discipline, le détrompa Yan. Nous voulons juste débarrasser l’Empire des parties gangrénées.

— Et pourquoi ne pas les guérir de l’intérieur ?

— Parce que les responsables ne le souhaitent pas. (Yan montra le plafond.) Mon partenaire, Chewie, était esclave.

Vous pensez que les gouverneurs et les Moffs veulent que ça change ?

— Les Wookies sont peut-être chanceux, murmura Grave.

— Vous voulez dire ça à Chewie ?

— Non. Je voulais simplement dire qu’ils pourraient connaître pire sort.

— Nous avons quitté le Représailles après une opération sur Teardrop, expliqua Brightwater, les mots sortant avec difficulté. Un raid sur une cellule rebelle. C’est l’une des raisons de notre départ.

Yan échangea un regard avec Luke. N’était-ce pas la planète où ils avaient échappé à des pirates et aux Impériaux ?

— Les Rebelles étaient partis longtemps avant que vous n’arriviez, déclara-t-il aux soldats de choc.

Soudain, la tension remonta.

— Vous en êtes sûr ? demanda LaRone, son ton indiquant qu’il n’était pas certain de vouloir connaître la réponse.

— Oui, confirma Yan. Luke et moi emmenions les derniers quand vous avez fait votre apparition.

— Qu’est-il arrivé ? demanda Luke.

LaRone leur tourna le dos.

— Ils… Nous avons reçu l’ordre de les tuer. Tous.

— Tous les habitants, ajouta Grave. (Il hésita, puis il ajouta :) À commencer par les non-humains.

— Oh, non, souffla Luke. Mais vous… vous ne l’avez pas fait, n’est-ce pas ?

LaRone ne répondit pas.

Yan regarda Luke, les tripes nouées. Mais après Alderaan, qu’espéraient-ils ?

— Et vous pensez vraiment qu’on peut guérir ce mal de l’intérieur ?

— Nous ne sommes pas ici pour soigner la galaxie, Solo, fit Grave. Nous ne sommes que des soldats.

— Je ne suis pas sûr que nous le soyons encore, marmonna Brightwater.

— Moi non plus, je ne nous crois pas capables de sauver la galaxie, répondit Yan, choisissant ses mots avec soin, car il comprenait comment ces hommes fonctionnaient. Juste un petit coin par-ci, par-là. (Il montra les étoiles.) Et j’entends faire ça en sauvant mon amie.

— Nous avons prêté serment à l’Empereur.

— Peut-être, mais à mon avis, un soldat doit protéger le peuple.

— Nous n’avons pas besoin de vous pour nous rappeler notre devoir, dit calmement Marcross. (C’était la première fois qu’il intervenait depuis que la conversation avait pris ce nouveau tour.) Et nous perdons du temps.

— Vous avez raison, acquiesça Yan. Alors ?

Le comlink à sa ceinture bipa.

— LaRone, le Faucon est de retour. En bon état, ajouta Quiller. Vous avez fini ?

Yan aurait souhaité voir le visage de LaRone.

— Ça dépend de vous.

L’intéressé regarda ses compagnons à tour de rôle, puis se tourna à contrecœur vers Yan.

— Quiller, dis au Wookie que nous les emmenons, lui et ses amis, sur Shelkonwa. Qu’il planque son vaisseau quelque part, au cas où le Représailles reviendrait. Quand ce sera fait, qu’il te donne les coordonnées et nous irons le chercher.

— Ou bien Luke et moi nous montons à bord avec vous, et Chewie nous suit avec le Faucon, suggéra Yan. Nous pouvons nous retrouver dans le système.

— Ça marche. Quiller ?

— Je lui transmets. Vous avez trouvé quelque chose ?

LaRone coula un regard à Marcross.

— Oh, oui, dit celui-ci. Tout ce qu’il nous faut.

— Nous serons de retour dans dix minutes. (Il pivota vers Yan.) Nous vous emmenons sur Shelkonwa, mais une fois là-bas, vous vous retrouverez seuls. Si nous le pouvons, nous vous ramènerons au Faucon. Mais c’est tout ce que nous ferons pour vous et votre amie rebelle.

— Compris, dit le Corellien.

— Et vous pouvez laisser ce blaster ici, ajouta LaRone à l’intention de Luke. Nous en avons de bien meilleurs à bord.

— Sûr, fit le jeune homme, échangeant un regard patient avec son ami.

Yan haussa les épaules.

— Tu as entendu le monsieur. Allons-y.

 

La sortie du tunnel se trouvait à dix kilomètres au nord de la base. Alors que Mara décollait, elle vit que le cargo s’était posé à l’emplacement laissé vacant par le Happer’s Way.

Un instant, elle fut tentée de faire demi-tour pour l’abattre pendant qu’il était vulnérable. Mais non. Elle n’avait aucune preuve qu’il ait participé à l’attaque, et elle n’avait pas de temps à perdre. Entrant les coordonnées du système le plus proche pourvu d’un hôpital dans l’ordinateur de bord, elle quitta Gepparin.

Une heure plus tard, elle sortit de l’hyperespace pour respecter les dernières volontés de Tannis.

L’Empereur méprisait les cérémonies, surtout lorsqu’il s’agissait de dire quelques mots sur un camarade tombé au combat. Mara le fit néanmoins, se rappelant des paroles entendues dans son enfance, avant de confier le corps du pirate au vide de l’espace.

Quand elle se rassit aux commandes, ce fut l’âme emplie d’une colère sombre et glacée. Des TIE et des turbolasers… un destroyer stellaire était dans le coup. Et d’après le capitaine Norello, il n’y en avait qu’un dans le secteur : le Représailles.

Le capitaine Ozzel n’était certainement pas de mèche avec les BloodScars. Il était pompeux et ambitieux, mais il n’aurait jamais osé prendre ce genre de risque. Somoril, en revanche, c’était une autre histoire. Il n’avait néanmoins pas l’autorité nécessaire pour ordonner à Ozzel de frapper une planète. En fait, à part Mara elle-même et quelques autres, seul un gouverneur de secteur pouvait donner des ordres à un capitaine de la Flotte.

Et dans le bunker, elle avait découvert que le dernier appel du Commodore était pour Shelkonwa.

Avec un dernier regard au corps enveloppé, Mara mit le cap sur ce système. Le gouverneur Choard avait envoyé le Représailles pour massacrer les BloodScars et couvrir ses arrières. C’était un traître.

Et Mara comptait bien le lui faire payer.