MESSAGES PERSONNELS

 

La sonnerie du téléphone tira Millman de son sommeil. Il battit des paupières en reprenant ses esprits. Le téléphone sonnait toujours. « Ça va, ça va », grogna-t-il.

Son bras s’extirpa de sous les couvertures et partit vers la table de chevet, à la recherche du combiné. Ses doigts se refermèrent dessus et il le porta à son oreille. « Oui ? » marmonna-t-il.

Il écouta la tonalité quelques secondes, puis raccrocha brutalement avec une grimace d’irritation.

Ses yeux s’écarquillèrent devant l’appareil.

La sonnerie persistait.

Il étendit le bras et tâtonna pour trouver l’interrupteur. L’ayant actionné, il se détourna de l’aveuglante lumière, puis décrocha de nouveau pour coller l’écouteur à son oreille.

Rien que la tonalité.

Millman contempla le combiné avec stupeur. Il continuait d’entendre une sonnerie de téléphone.

Il lui fallu un bon moment pour se rendre compte que le téléphone sonnait dans sa tête.

« J’ai les résultats des examens », lui dit le docteur Vance.

Millman attendait anxieusement.

« Au début, j’avais pensé à un genre d’acouphène, un bourdonnement interne, continua Vance, mais on ne constate aucun signe d’infection de l’oreille moyenne, aucune douleur, aucune fièvre ou sensation de pression dans les oreilles.

— Alors quoi ? interrogea Millman.

— Vous affirmez que ça ne sonne pas tout le temps ?

— Seulement la nuit. Ça me réveille.

— Ce ne serait pas le cas avec un bourdonnement d’oreille. Celui-ci n’aurait pas de cesse. »

Inquiet, Millman observait le médecin en silence.

« Ne dites à personne que le conseil vient de moi, poursuivit celui-ci, mais essayez l’ostéopathie. J’avais un ami qui souffrait de ce qui était, pour le coup, un problème d’acouphène. Une petite manipulation de la nuque, et ça a disparu.

— Et si ça ne marche pas ?

— Essayez d’abord », dit le médecin.

Millman se retourna sur son lit avec un grognement irrité.

Le téléphone sonnait à nouveau.

D’un geste vif, il décrocha de la main gauche et porta le combiné à son oreille.

Puis raccrocha, furieux. « Saloperie ! » lança-t-il.

Étendu sur le lit, les traits altérés par l’angoisse, il écouta le téléphone sonner dans sa tête.

« Vous avez procédé à tous les examens ? s’enquit le docteur Palmer.

— Ça oui, répondit Millman, désespéré. Aucun signe de fracture ou de commotion. Rien d’anormal du côté des vertèbres. Pas de corps étranger non plus. Pas d’excroissance ni de tumeur, rien. Même l’ostéopathie n’a eu aucun effet.

— Et ça se produit tous les soirs ?

— Oui.

— À la même heure ?

— Trois heures du matin. Je n’arrive plus à dormir. Je reste allongé à attendre que ça recommence.

— Et vous affirmez que cela ressemble à une sonnerie de téléphone.

C’est une sonnerie de téléphone, s’énerva Millman.

— Et si vous y répondiez ? » proposa le docteur Palmer.

Couché dans le noir, Millman écoutait la sonnerie dans sa tête. Il avait désespérément envie que ça s’arrête. Mais il était troublé par la suggestion du docteur Palmer. Une suggestion plutôt étrange de la part d’un psy.

Et pourtant…

Toujours cette sonnerie. Un terrible envie de décrocher le démangeait. Mais il savait que la sonnerie ne provenait pas du chevet.

Cédant à une impulsion, il se représenta sa main gauche en train de décrocher le combiné. « Allô, dit-il tout haut.

— Enfin ! » fit une voix masculine.

Millman se ratatina au creux du matelas, son cœur battant soudain à tout rompre. « Bon Dieu, lâcha-t-il.

— Doucement, fit la voix. Ne vous emportez pas. Il y a une explication toute simple. »

Millman avait l’impression de ne plus pouvoir respirer. « Vous êtes toujours là ? »

Millman déglutit. Il inspira non sans peine et murmura : « Oui.

— Très bien. »

Cela paraissait insensé, mais Millman se sentit obligé de demander : « Qui êtes-vous ?

— Mon nom n’a pas d’importance. De toute façon, je ne suis pas autorisé à vous le divulguer.

— C’est quoi, cette histoire ? articula péniblement Millman.

Du calme. Il n’y a aucune raison de s’énerver. Je vous ai dit qu’il y avait une explication toute simple.

Laquelle ? s’emporta Millman.

— Bon. Voilà ce qui se passe. Il s’agit d’un projet gouvernemental. Top secret, cela va sans dire. Il faudra tenir votre langue. Question de sécurité nationale. »

La mâchoire inférieure de Millman s’affaissa. Sécurité nationale ?

« Je n’entrerai pas dans les détails, poursuivit la voix. Vous savez où en est la situation internationale. Notre gouvernement entretient en permanence tout un réseau d’espionnage. Il nous faut connaître les agissements de l’autre bord.

— Mais…

— Contentez-vous de m’écouter. Nous avons dans le monde entier des agents qui nous tiennent informés. Mais la transmission de leurs messages a toujours présenté des risques. Tôt ou tard, quels que soient les moyens qu’ils utilisent, ils se font repérer. C’est pourquoi nous expérimentons la communication intracérébrale.

Intracérébrale… ?

— C’est cela. Une méthode qui permettra à nos agents de transmettre leurs informations sans aucun risque d’interception. Je ne parle pas de télépathie ou de quoi que ce soit de ce genre. Il s’agit d’un implant microscopique. »

Millman se raidit. « Hein ?

— Ne vous affolez pas. Si c’est assez minuscule pour avoir échappé à vos examens médicaux, ce n’est pas cela qui va vous tracasser. »

Millman essaya de parler mais ne put émettre un son.

« Vous vous demandez sans doute pourquoi vous avez été choisi pour cette expérience, continua la voix. En fait, vous n’êtes pas le seul. Impossible de vous dire combien vous êtes, mais c’est considérable. Quant à la façon dont vous avez été choisi, c’était mathématique. Un système de recherche aléatoire.

Je ne comprends pas.

— Pour être tout à fait franc, vous êtes peu nombreux jusqu’ici à avoir répondu à notre appel. Les autres sont encore convaincus de souffrir d’un mal physique et vont de médecin en médecin. Nous vous félicitons d’avoir eu assez d’imagination pour répondre à la sonnerie — car c’est bien d’une sonnerie de téléphone qu’il s’agit. »

Millman rassembla son courage. « Mais…

— Nous ne vous avons pas demandé votre avis, acheva la voix à la place de Millman. Exact. Et nous nous excusons que cela vous ait perturbé. Mais… compte tenu des circonstances, il était délicat de solliciter votre accord. Quoi qu’il en soit, nous ne vous dérangerons plus autant maintenant que nous avons établi le contact.

Ça va durer longtemps ?

— Désolé. La décision ne m’appartient pas. »

Dans sa tête, Millman perçut le bruit caractéristique d’un combiné remis en place.

Il retomba sur son oreiller ; il était resté appuyé sur son coude tout le temps de sa conversation avec l’homme. Malgré sa détresse, il était soulagé de ne plus entendre la sonnerie.

Il ne tarda pas à sombrer dans un profond sommeil.

Millman fut réveillé en sursaut par la sonnerie qui retentissait dans sa tête. Les yeux grands ouverts, il se retourna dans son lit. « Non », dit-il. Cinq jours s’étaient écoulés depuis sa conversation avec l’homme. Il s’était mis à espérer que c’était fini ; qu’il ne recevrait plus d’appel ou qu’il avait rêvé tout cela.

Avec une grimace, il décrocha le combiné imaginaire. « Oui ? »

La sonnerie persista.

Désarçonné, Millman visualisa le téléphone aussi nettement que possible, souleva le combiné et le porta à son oreille. « Allô ? » articula-t-il.

Encore et toujours la sonnerie. Était-ce parce qu’elle n’avait pas retenti depuis cinq jours qu’elle lui paraissait si douloureusement stridente ?

Il se représenta sa main en train d’empoigner le combiné. « Allô ! »

Toujours la sonnerie. Millman gémit. Le bruit lui vrillait le cerveau. Il serra les dents, grimaçant de douleur.

Et le téléphone de s’obstiner à sonner. Millman répétait mentalement le geste de décrocher. « Allô ! »

Soudain la voix de l’homme répondit : « Inutile de hurler.

— Ça, par exemple !

— Du calme.

— Du calme ? Ça fait dix minutes que le téléphone sonne dans ma tête !

— Cinq, corrigea l’autre.

— Mais pourquoi ?

— Du boulot par-dessus la tête, dit l’homme avec humeur. Vous n’êtes pas la seule ligne dont je m’occupe, vous savez.

— Excusez-moi, fit Millman d’une voix mal assurée. Mais vous… » Il s’interrompit pour se renfrogner. « Pourquoi ces sonneries incessantes alors ?

— Ah, je sonnais ? Je ne m’en rendais pas compte. » Abasourdi, Millman entendit le déclic qui mettait fin à la conversation.

Quelques secondes plus tard, le téléphone se remit à sonner.

Malgré ses tentatives répétées pour y répondre, il n’entendit personne.

La sonnerie se prolongea pratiquement jusqu’à l’aube. Les yeux écarquillés, les dents serrées, Millman s’agrippait aux draps.

« Je m’inquiétais de votre sort », lui dit le docteur Palmer. Millman inspira avec peine. « Je pensais tenir la solution, mais jusque là je préférais la garder pour moi.

— Quelle solution ? »

Quand Millman eut achevé son récit, le docteur Palmer l’observa sans dire mot.

Millman déglutit nerveusement. « Je commets sans doute une erreur en vous en parlant, dit-il, incapable de supporter le silence. Mais ce type me rend fou, à m’appeler toutes les nuits de trois à six sans jamais se manifester. »

Le docteur Palmer ouvrit la bouche, hésita, puis lâcha : « Vous croyez à cette histoire ? »

Millman le regarda sans comprendre.

« Vous croyez à cette histoire de projet gouvernemental secret ?

— Eh bien… » Millman se tut, embarrassé. « C’est ce qu’il dit. Il… »

L’expression du docteur Palmer l’arrêta. « David, est-ce que ça vous paraît tenir debout ? »

Millman chercha une réponse. « Je… » Un temps. Il rassembla son courage. « J’entends le téléphone sonner. J’y réponds. La voix me parle. Je n’invente rien.

— David, soupira Palmer, réfléchissez. Un projet secret du gouvernement ? Des citoyens choisis au hasard ? Des téléphones microscopiques implantés à leur insu dans leur tête ? Des agents des services secrets des États-Unis transmettant leurs informations de cette façon ? » Il jeta un regard de défi à Millman.

Celui-ci lui rendit son regard. Il lui semblait qu’une chape de plomb pesait sur ses épaules. Dieu du ciel, pensa-t-il.

Il combattit cette impression d’écrasement. « Mais j’entends cette sonnerie, insista-t-il. J’entends la voix de cet homme.

— David, sans vouloir vous alarmer, répliqua le docteur Palmer, entendre des voix dans sa tête est un symptôme vieux comme le monde. »

Ce soir-là, Millman termina son repas par du café noir. Il tenait à rester lucide.

Allongé dans l’obscurité, bien calé sur les oreillers de la tête de lit, il attendait que la sonnerie du téléphone se déclenche.

Tout en repensant aux paroles du docteur Palmer.

Son allusion aux voix dans la tête l’avait mis en colère. Palmer insinuait-il qu’il était fou ?

« Pas du tout, l’avait-il rassuré. Simplement vous subissez une sorte de pression mentale. Et votre esprit cherche un moyen de rétablir l’équilibre.

— En imaginant cette histoire de projet gouvernemental top secret ? s’était raidi Millman.

— Les moyens mis en œuvre par le cerveau humain pour réagir à des problèmes intimes sont innombrables », lui avait expliqué Palmer.

Pas un bruit dans la pièce. Millman n’entendait que le bourdonnement du réveil électrique sur la table de chevet.

Palmer avait-il raison ?

Que le gouvernement se donne tant de peine pour un projet aussi extravagant, voilà qui paraissait en effet plutôt tiré par les cheveux.

Mais d’un autre côté…

Millman grimaça de colère. De toute façon, tout cela était hors de propos. Si, comme c’était le cas depuis une semaine, l’homme ne répondait plus, qu’est-ce que cela changeait ? Palmer était peut-être convaincu que la voix allait de nouveau lui parler parce qu’elle en éprouvait le besoin, mais il n’allait certainement pas…

Millman faillit s’étrangler et sa tête alla cogner contre la tête de lit au moment où retentit la sonnerie. Son regard fila vers le réveil. Trois heures.

Il laissa sonner pendant trente secondes avant de décrocher mentalement. « Oui ?

Nous sommes très mécontents de vous, dit la voix d’un ton qui glaça Millman. On vous avait demandé de ne rien dire de ce projet, non ? »

Millman déglutit péniblement. « Non ? claqua la voix.

— Si, mais…

— On vous avait dit que c’était une question de sécurité nationale, le coupa l’autre. Et pourtant, vous en avez parlé à votre médecin. »

Millman, oppressé, avait la respiration sifflante. « Comment le savez-vous ? demanda-t-il avec un filet de voix.

— Devinez. Si nous entendons votre voix quand vous nous parlez… »

Il laissa sa phrase en suspens. Millman frissonna. Tout ? pensa-t-il, en plein désarroi. Tout ce que je dis ?

Il s’efforça de faire front. « Alors vous savez ce qu’il pense à votre sujet.

Naturellement, fit l’homme avec mépris. Je ne suis pas l’agent 25409-J. Je ne suis pas William J. Lonsdale. Je ne suis pas marié, père de trois enfants. Je ne travaille pas pour la C.I.A. Je suis votre foutu subconscient. Grand Dieu, Millman. Qu’est-ce qui vous prend ? »

Il n’avait pas de réponse prête. Immobile, il avait le regard perdu dans le noir. Il crut percevoir la respiration de l’homme à l’autre bout de la ligne.

« Écoutez, reprit celui-ci. On va essayer de vous débrancher du circuit. Ça fait une semaine qu’on s’y emploie, ce qui explique notre silence. Cela devient priorité maintenant que vous avez craché le morceau à votre médecin. Bon sang, Millman ! »

Il entendit raccrocher.

Violemment.

« Mais vous ne voyez pas ? dit Palmer avec un sourire. Votre subconscient s’est fâché de voir sa ruse percée à jour. Nous progressons, David.

— Il a dit qu’il allait me mettre hors circuit. »

Le docteur Palmer secoua la tête sans se départir de son sourire. « Il n’en fera rien. Il a des choses à dire.

Et si je ne veux plus l’entendre ?

— David. David. Réfléchissez. Vous bénéficiez d’une occasion incroyable : celle de dialoguer avec votre propre subconscient.

— Et si la voix continue de me harceler ? »

Le médecin eut un geste désinvolte. « Vous raccrochez. »

Quand le téléphone retentit dans sa tête, Millman hésita à décrocher. L’écho strident de la sonnerie lui mettait les nerfs à vif. Mais il la préférait au ton agressif de l’homme.

Il resta immobile sur le lit, plein de réticence.

Pouvait-il lui raccrocher au nez ?

Pouvait-il ensuite laisser le téléphone invisible décroché, rendant ainsi tout appel impossible ? Il imaginait la tonalité dans sa tête, puis la voix d’une opératrice lui conseillant de raccrocher s’il voulait composer un appel.

Millman fronça les sourcils. Voilà qu’il commençait vraiment à penser comme un type qui perdait la boule.

Brusquement, il se saisit du combiné imaginaire. « Allô ? dit-il.

— Merci de répondre », fit l’homme.

Millman se contracta. Qu’est-ce qu’il y a encore ?

« Excusez-moi d’avoir manqué de tact lors de notre dernier entretien, continua l’autre. C’était déplacé.

C’est le moins qu’on puisse dire, lui décocha Millman.

— J’en suis navré. » Et sans attendre de réponse, l’homme enchaîna : « Écoutez, je vais être franc avec vous. »

Les yeux de Millman s’étrécirent. Tiens donc ?

« Cette histoire de secret d’État, continua la voix. C’est un bobard. »

Sans réfléchir, Millman éleva sa main gauche à hauteur de ses yeux et la contempla comme s’il tenait effectivement un combiné.

« Il n’existe rien de tel, avoua l’homme. Votre docteur Palmer avait raison. Cela n’a aucun sens. Des téléphones microscopiques implantés secrètement dans la tête des gens ? Incroyable que vous ayez marché. »

Millman en bafouilla d’indignation.

« Je vais vous expliquer de quoi il retourne. Mon nom restera secret au cas où me dénonceriez à la police. Ils m’enfermeraient et jetteraient la clé s’ils savaient.

— Qu’est-ce que ça va être cette fois ? explosa Millman, furieux.

— Je suis un inventeur. J’ai conçu un appareil émetteur d’ondes courtes qui pénètrent le cerveau de quiconque en est la cible et permettent d’établir le dialogue. Vous êtes le premier. »

Millman n’aurait su dire ce qui l’emportait en lui de la fureur ou de l’horreur. Le choc des émotions continuait de le laisser sans voix.

« C’est aussi dur à avaler que cette histoire de projet gouvernemental, je sais. Les autorités adorerait mettre la main sur cette invention, croyez-moi. Mais je la détruirai avant. Je tremble à l’idée de ce qu’en ferait le pouvoir. Jamais je ne… »

Millman ne le laissa pas finir. « Pourquoi me faire ça à moi ? s’emporta-t-il.

— Comme je vous le disais, répondit l’autre patiemment, vous êtes mon premier sujet. Comme je n’avais pas le cran de vous expliquer ce qui se passait en réalité, j’ai inventé cette histoire de projet gouvernemental, mais pendant tout ce temps… »

Millman ne put se contenir. « Foutaises ! explosa-t-il. Je ne crois pas plus à cette histoire qu’à la première ! Vous n’êtes pas inventeur ! Mon psy a raison depuis le début ! Vous êtes mon propre…

Imbécile ! Pauvre imbécile ! »

Millman tenta de riposter mais les mots restèrent bloqués dans sa gorge.

« Tu ne peux pas t’en tenir là, hein ? persifla l’homme. Tu ne peux pas me laisser agir à ma guise. Non ! Pas toi ! Monsieur est bien trop malin pour ça ! »

L’ébauche de réplique de Millman se perdit dans les vociférations bestiales de l’autre. « Eh bien, non, tu n’es pas malin ! Loin de là ! Tu es un abruti ! Tu l’as toujours été ! Un abruti et un imbécile ! Tu es un crétin, Davie ! »

Millman sursauta en attendant raccrocher avec fracas.

Il resta muet de stupeur, le souffle court.

Il connaissait cette voix.

Le docteur Palmer l’observait en silence.

Millman inspira avec difficulté. « Il faut que je vous confie quelque chose sur ma famille, dit-il. Quelque chose que je ne vous ai jamais raconté.

— Oui ?

— Ma mère souffrait de double vue. Je veux dire qu’elle était médium. Je n’entrerai pas dans les détails, mais elle l’a prouvé à maintes reprises.

— Ah ? fit Palmer sans se compromettre.

— Je pense avoir hérité de ses dons. »

Le médecin eut du mal à réprimer son agacement. « Vous suggérez…

— Je vous informe, coupa Millman avec irritation. Vous aviez raison. Ce n’est ni un projet secret du gouvernement ni ce qu’a soutenu l’homme hier soir.

— Mais plutôt…, l’encouragea Palmer.

— C’est mon père. »

Le médecin ne fit aucun commentaire. Il se frotta les paupières du pouce et de l’index gauches. Millman éprouva une pointe de rancœur.

Palmer ouvrit les yeux. « Vous croyez qu’il communique avec vous de l’au-delà ? »

Millman acquiesça, les traits durs. « C’est ça. »

Le médecin soupira. « Très bien. Parlons-en. »

Dès la première sonnerie, Millman décrocha le combina imaginaire. « C’est moi.

— Quelle promptitude, fit la voix.

— Je sais qui vous êtes.

— Ah bon. »

Millman eut la vision fugitive d’un sourire narquois sur le visage de son père. « Parfaitement. Bonsoir, papa.

— Ainsi tu m’as démasqué », gloussa l’homme. Millman ne put réprimer un sanglot. « Pourquoi fais-tu ça ?

Pourquoi ? s’étonna la voix. Pourquoi j’ai envie de parler à mon fils unique ? C’est toi qui demandes ça, Davie ? C’est donc si difficile à comprendre ? »

Et voilà que Millman pleurait. Des larmes ruisselaient sur ses joues, mouillant la taie d’oreiller. « P’pa, murmura-t-il.

— À présent, écoute-moi », continua la voix de son père. La poitrine de Millman était secouée de sanglots.

« Tu m’écoutes ?

— Oui. » Millman se frotta les yeux d’une main tremblante.

« Si je t’appelle, c’est parce qu’il m’a semblé que tu devais être informé de certaines choses.

— Lesquelles ?

— Tu ne vois pas ?

— Non », renifla Millman en passant un doigt sous son nez qui coulait.

Son père poussa un profond soupir. « Dans ce cas, il faut que tu saches. »

Millman patienta.

« Tu es un raté, fit la voix du père.

Quoi ?

— Tu veux des explications ? Tu y tiens vraiment ? Très bien. Alors pas de quartier. Tu as épousé une garce. Tu l’as laissée te saigner à blanc. Monter tes deux fils contre toi. Te prendre jusqu’à ta chemise lorsque vous avez divorcé. Tu l’as laissée te déposséder de ta virilité.

» Et puis, tu es un raté dans ton travail. Tu te laisses marcher sur les pieds par ton crétin de patron. Tu te frottes à ses jambes et le laisses te traiter comme une merde. Une merde, Davie ! Pas la peine de nier ! Tu sais que c’est vrai ! Tu as tout raté dans ta vie et tu le sais ! »

Millman se sentait comme paralysé dans son corps et dans son âme.

« Peux-tu nier une seule de mes paroles ? » le défia son père.

Millman sanglota. « Papa, murmura-t-il plaintivement.

— Pas de papa qui tienne, pauvre raté ! lui retourna son père d’une voix cinglante. J’ai honte que tu sois mon fils ! Dieu merci, je suis mort et je n’ai pas à te voir jouer les punching-balls à longueur de journée !

— Papa, non ! » éclata Millman, au supplice.

Le docteur Palmer quitta son fauteuil et se dirigea vers la fenêtre. Millman, qui ne l’avait jamais vu faire cela, le regarda, mal à l’aise, tout en tamponnant ses yeux rougis à l’aide d’un mouchoir détrempé. Le médecin se campa devant la fenêtre, le dos tourné, et s’absorba dans la contemplation de la rue.

Un moment plus tard, il regagna son fauteuil et s’y laissa tomber avec un soupir exténué. Il scruta Millman en silence. Qu’y avait-il dans ce regard ? se demanda celui-ci. De la compassion ?

Ou de la lassitude ?

« Je ne procède pas ainsi habituellement, commença Palmer. Vous connaissez ma méthode : vous laisser trouver les réponses vous-même. Cependant… » Il exhala longuement et croisa les mains sous son menton. « Je ne me sens pas autorisé à laisser les choses se poursuivre de la sorte. J’ai quelque chose à vous dire. Et c’est… » Il grimaça. « …arrêtez, Davie. »

Millman fixa un regard ahuri sur le psy.

« Je ne crois pas – pas plus que je ne crois à ces histoires de projet gouvernemental secret ou d’inventeur — que votre père communique avec vous par-delà la tombe. Je crois, et cela depuis le début, que votre subconscient a trouvé un moyen audible de s’adresser à vous. Qu’il essaie de trouver un moyen de résoudre vos problèmes psychologiques.

— Mais c’est sa voix, insista Millman.

— David… » La voix de Palmer s’était raffermie. « Vous avez cru que cette voix était celle de l’agent secret 25409-J. Puis, quoique brièvement, celle d’un inventeur. Vous ne voyez pas que votre subconscient peut adopter n’importe quelle voix de son choix ? »

David nageait en plein désarroi. Il savait qu’il ne supporterait plus le flot d’insultes déversé par son père. Et en même temps l’idée de rompre le contact avec lui le rendait malade.

« Que dois-je faire ? demanda-t-il d’une voix éteinte.

Faites face, l’encouragea Palmer. Refusez de souffrir en silence et répliquez. Contre-attaquez. Exigez des réponses, des explications. Défendez-vous. C’est votre subconscient, David. Écoutez-le, mais ne le laissez pas vous harceler. Prenez l’initiative. »

Millman se sentait épuisé. « Si seulement je pouvais dormir, murmura-t-il.

— Pour ça, j’ai ce qu’il vous faut. »

Ce soir-là, il n’eut pas la force d’affronter la voix. Il suivit les prescriptions du docteur Palmer et avala deux comprimés. Il dormit d’un sommeil de plomb. Si le téléphone sonna dans sa tête, il n’entendit rien.

Sa nuit de repos lui fut bénéfique. Le lendemain, au bureau, il en vint à trouver M. Finch presque supportable. Un instant, il faillit même lui répondre mais réussit à se contenir. Inutile de perdre son travail par-dessus le marché.

Dans la soirée, il pensa à Elaine et aux gosses.

Cette voix — dont peu importait à qui elle appartenait — avait-elle dit la vérité ? Elaine était-elle bien une garce qui avait monté ses fils contre lui ? Cela expliquait-il pourquoi ils se montraient si distants quand ils venaient le voir ? Il avait pensé que cela était dû à la rareté de leurs retrouvailles ; qu’il était pratiquement devenu un étranger pour eux.

Et s’il y avait autre chose ?

Vrai, le divorce avait été prononcé de telle façon qu’il le laissait sans grandes ressources. Mais cela avait été son choix. Rien ne l’avait obligé à être aussi conciliant.

À force de ruminer, Millman se retrouva remonté comme un ressort, prêt à affronter la voix.

À trois heures du matin, lorsque la sonnerie retentit dans sa tête, il porta prestement le combiné imaginaire à sa tempe. « J’écoute.

Vraiment, Davie ? fit la voix de son père, méprisante.

— Tu peux laisser tomber.

— Laisser tomber quoi, mon petit ? » Le ton était moqueur.

Millman rassembla son courage. Il lui fallut faire appel à tout ce qu’il possédait de volonté pour affronter cette voix qui l’avait intimidé durant toute son enfance et son adolescence.

« Tu n’es pas mon père », dit-il.

Silence.

Puis la voix lâcha : « Vraiment ?

— Non, fit Millman d’un ton qu’il voulait ferme.

— Qui suis-je alors ? Le roi de Siam ? »

Une vague bouffée de colère fit tressaillir Millman. « Je ne sais pas, concéda-t-il. Mais pas mon père.

— Tu es un petit imbécile. Tu as toujours été un petit imbécile.

— Je te mets au défi ! coupa Millman. Tu n’es pas mon père !

— Alors qui ?

— Moi ! Mon subconscient !

Ton subconscient ? » Et la voix de partir d’un rire explosif, dément, un rire de détraqué.

« Arrête ça. »

Le rire continuait, incontrôlable, enragé. Millman se représenta un visage livide et déformé, les yeux fixes et fous.

« Arrête ça ! » répéta-t-il.

Le rire gagna en hauteur et en intensité. Commença à résonner dans sa tête.

Il dut s’y reprendre à trois fois pour raccrocher mentalement et y mettre fin.

Les mains prises de tremblote, il avala deux comprimés.

Lorsque le téléphone se remit à sonner, il s’efforça de l’ignorer et, les nerfs tendus, attendit de sombrer dans un sommeil de plomb.

La petite femme brune ouvrit à Millman et le considéra d’un air inquisiteur. Elle ne faisait pas son âge.

« Je vous ai appelé cet après-midi, dit-il. Je suis le fils de Myra Millman.

— Ah, oui. » Un sourire découvrit les fausses dents de Mme Danning tandis qu’elle s’effaçait devant lui.

Une odeur d’encens flottait dans le salon plongé dans la pénombre. Millman remarqua les croix et les icônes sur les murs en se dirigeant vers la chaise que lui désignait le petit bout de femme. Il s’assit en espérant qu’il ne commettait pas une erreur. Il imagina un instant la réaction du docteur Palmer. À cette pensée, il sentit sa gorge se parcheminer.

Mme Danning se percha sur une chaise en face de lui et lui demanda de répéter son histoire.

Millman lui raconta tout, du début jusqu’au rire de dément. À la mention de ce rire, Mme Danning hocha la tête et déclara : « C’est peut-être là un indice. »

Que voulait-elle dire ? Anxieux, il la regarda fermer les yeux et prendre de longues inspirations, les mains sur les genoux, les paumes vers le haut.

Au bout de quelques minutes, les traits de la femme se figèrent en une expression de mépris. « Alors maintenant tu vas voir un médium. » Mme Danning découvrait tellement ses dents que Millman pouvait voir ses gencives blêmes. « Tu ne veux rien entendre, hein ? Il faut que tu t’obstines dans tes recherches. Pauvre petit con ! »

Millman tressaillit sur sa chaise, les yeux rivés sur le médium. Elle s’était mise à se balancer d’arrière en avant, un vague bourdonnement montait du fond de sa gorge. « Oui, dit-elle enfin. Oh, oui. » Elle répéta ces mots tant de fois que Millman finit par en perdre le compte.

Au bout d’une dizaine de minutes, elle rouvrit les yeux et regarda Millman. Il fit mine de parler mais elle l’arrêta d’un signe de la main. Elle prit un verre d’eau sur la table voisine et le but jusqu’à la dernière goutte.

Soupir. Puis : « Je crois qu’on y est », dit-elle.

« Bon sang, David ! » s’écria Palmer.

Millman n’avait jamais perçu un tel accent de reproche dans la voix du psy. « Je ne voulais pas revenir, dit-il, sur la défensive. Je ne voulais pas vous en parler. Mais j’ai pensé que vous seriez compréhensif.

— À propos de ce que cette femme vous a raconté ? se scandalisa Palmer. Comme quoi vous seriez possédé par un… un… » Il eut un geste excédé.

« Un esprit égaré, s’obstina Millman. Une âme désincarnée retenue sur terre par le magnétisme des vivants et prête à tout pour…

— David, David. » Palmer semblait partagé entre l’exaspération et le désespoir. « On régresse. Chacune de nos séances nous entraîne un peu plus bas.

L’esprit n’est pas en paix, s’entêta Millman. Il veut renouer avec la vie. Alors il envahit mon esprit…

— David ! l’interrompit le psy. Je vous en prie ! »

Millman se leva brusquement. « Oh, et puis à quoi bon ? marmonna-t-il.

— Asseyez-vous », lui enjoignit Palmer. Millman hésita, debout devant sa chaise.

« S’il vous plaît », ajouta calmement le médecin.

Millman resta d’abord immobile, puis il se rassit. Une sourde rancune se lisait sur ses traits. « Je ne crois pas que vous vous rendiez compte…

— Je me rends compte que vous êtes soumis à rude épreuve, trancha le docteur Palmer.

— Mais vous ne croyez pas un mot de ce que je dis.

— Enfin, David, réfléchissez. Pensiez-vous qu’il en serait autrement ? »

Soupir de lassitude. « Non, pas vraiment », concéda-t-il.

Jamais il n’avait été aussi partagé – aussi déchiré entre le désir et la crainte.

D’un côté, il avait envie que le téléphone sonne dans sa tête afin d’élucider cette folie.

De l’autre, il était terrifié par ce qui risquait d’arriver s’il répondait.

C’était facile pour Palmer d’affirmer que tout cela relevait de son subconscient.

Mais s’il se trompait ?

Millman remâchait cette idée pour la centième fois lorsque le téléphone se mit à sonner dans sa tête.

Il prit une longue inspiration, emplissant puis vidant méthodiquement ses poumons. Très bien, se dit-il.

Le moment était venu.

Il se représenta le téléphone. Sa main gauche qui décrochait. Sentit presque le combiné contre sa joue. « Oui, dit-il tout haut.

— C’est ton père.

— Non, fit Millman.

— Qu’est-ce que tu as dit ? » L’image mentale de son père lui apparut — les lèvres pincées, l’air sévère.

« Tu n’es pas mon père.

— Qui suis-je alors ?

Je n’en sais rien, déplora Millman. Tout ce que je sais, c’est que tu n’es pas mon père. » Curieusement, il en avait à présent la conviction.

« Tu as raison », reconnut la voix.

Millman sursauta. Un nouveau stratagème ? « Dans ce cas, qui es-tu ?

— Il s’agit d’un projet gouvernemental top secret, je suis l’agent 25409-J..., commença la voix.

— Halte-là, dit Millman entre ses dents. Ne remets pas ça. Je ne marche plus.

— Je suis un inventeur. J’ai créé un appareil qui permet…

— Inutile d’aller plus loin.

— Bon, je suis ton père.

Assez, merde ! cria Millman.

— Très bien. Je suis un esprit enchaîné à la terre qui a pris possession de toi.

— Bon sang, y en a marre ! » explosa Millman, dont le cœur battait désormais à tout rompre.

« Très bien. Ici Krol. Je vous parle de la planète Mars.

— Je raccroche. » Et Millman de s’imaginer en train de s’y employer.

« C’est trop tard. Tu ne pourras pas. »

Millman se raidit. « Mais si. » Il renouvela sa tentative.

« Puisque je te le dis ! Tu ne peux plus. »

Millman étouffa un cri de terreur et essaya encore.

« Tu as raison d’avoir peur, fit la voix. Car je vais te tuer. »

Un frisson parcourut Millman. Il plaqua le combiné sur sa fourche imaginaire.

« Je vais te tuer, répéta la voix.

— Fiche le camp !

— N’y compte pas. » D’un ton ou perçait un amusement cruel. « Tu es à moi, mon petit goret. Tu ne sais pas qui je suis en réalité ?

Fichez le camp ! » Un trémolo traversa la voix de Millman.

— C’est bon. Je vais te dire qui je suis. J’ai plusieurs noms. L’un d’eux est le Prince des Menteurs. N’est-ce pas drôle, ça ? »

Millman secoua la tête, les dents serrées, bataillant toujours pour raccrocher le combiné.

« Tu perds ton temps, mon petit goret. C’est moi qui commande à présent. Tu veux entendre d’autres noms ? Seigneur de la Vermine. Prince des Pécheurs. Serpent. Bouc. Le Malin. Le diable ! Elle est bien bonne celle-là, non ?

— Va-t-en ! hurla Millman. Je ne t’écoute plus !

— Oh, que si ! Désormais tu m’appartiens et je vais te tuer ! » Et le rire de dément d’éclater de nouveau.

Millman s’empara du flacon de comprimés.

« C’est inutile, jubila l’autre. Tu ne peux plus m’échapper. »

Millman ne prit pas la peine de répondre. En proie à un tremblement incontrôlable, il décapsula le flacon et fit tomber deux comprimés dans sa paume.

« Deux ? Ce n’est pas la moitié de ce qu’il faudrait, mon vieux. Tu ne m’échapperas pas. Tu es à moi et je vais te tuer. »

Le rire résonna de nouveau dans quelque caverne de son esprit.

Millman avala les deux comprimés sans se soucier de l’eau qui lui dégoulinait sur le menton.

« Même pas la moitié de ce qu’il faudrait ! » exulta la voix entre deux éclats de rire déments.

Millman avala un autre comprimé, puis un autre, les fit descendre d’une gorgée d’eau.

« Même pas la moitié ! hurlait la voix. Tu m’as laissé t’habiter trop longtemps ! »

À présent, Millman enfournait les comprimés, les faisant suivre d’une gorgée d’eau. Son verre fut bientôt vide. Tant pis. Il avala les derniers à sec, le visage transformé en un masque de terreur.

« Projet secret ! braillait la voix. Inventeur ! Père ! Esprit enchaîné ! Krol depuis Mars ! Le diable ! Prends un autre comprimé, David ! »

Millman, désormais couché en chien de fusil, était secoué de tremblements. Mon Dieu, je vous en supplie, tirez-moi de là, priait-il en sanglotant.

Tes désirs sont des ordres », dit enfin la voix.

Le téléphone sonna à l’intérieur de sa tête.

Allongé sur son lit, les mains sous la nuque, il eut un grand sourire.

Puis, laissant échapper un gloussement, il décrocha mentalement. « Ouiiiii, modula-t-il.

— S’il te plaît, implora la voix.

— S’il te plaît ? fit-il comme s’il ne comprenait pas. S’il te plaît quoi ?

S’il te plaît, laisse-moi revenir.

— Pas question, gronda-t-il. Après tout le mal que je me suis donné ? À t’occuper au point que tu n’as rien vu venir ? Après toute cette peine, tu veux que je te laisse revenir ? »

Son visage se transforma en un masque d’animosité féroce.

« Jamais, pauvre con. Tu es hors-jeu pour de bon.

— Non ! » cria la voix.

Il ricana. « Bon, faut que j’y aille, coco. »

Il raccrocha avec un petit rire de gorge en imaginant l’expression effarée de Davie. Il essaierait encore, le pauvre nul, c’était sûr.

En attendant, il dressa ses plans pour le lendemain.

D’abord, appeler Elaine. Plus un sou à cette garce. Et qu’elle dise aux deux crétins qu’elle a pondus de me foutre la paix.

Quant à Fitch — ses yeux s’allumèrent — quelle joie ce serait de lui balancer son poing dans sa sale gueule et de plaquer ce boulot qui ne menait nulle part.

Et puis rigoler. Voyager. Des femmes. Prendre du bon temps. Des femmes.

Il penserait à l’argent une fois à sec.

Quant à Palmer — il éclata de rire — il avait tout bon depuis le début, l’enfoiré.

Mais qu’il essaie de présenter sa facture !

Il riait tout seul à cette idée lorsque le téléphone se mit à sonner dans sa tête.

Avec un sourire mauvais, il se concentra pour arracher tous les fils. La sonnerie cessa aussitôt. Et voilà, se dit-il.

Il n’avait plus besoin de cette ligne.

La Touche Finale
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