CHAPITRE XV
Après être tombé de la ceinture de Lowie, DTM mit plusieurs secondes à étalonner ses senseurs. Il avait rebondi d’une branche à l’autre jusqu’à atterrir dans un enchevêtrement de lianes suspendues à quelques mètres du sol.
— Maître Lowbacca, revenez ! hurla-t-il en portant ses circuits vocaux à leur volume sonore maximal. Ne me laissez pas ici ! Oh, mon Dieu ! Je savais que c’était une mauvaise idée !
Il régla ses senseurs optiques pour mieux y voir dans la pénombre. Il était entouré de bosquets presque inaccessibles, même pour quelqu’un d’aussi grand qu’un Wookie.
— À l’aide ! Au secours ! brailla-t-il sans la moindre dignité.
Il décida qu’il serait plus efficace de répéter ses appels toutes les quarante-cinq secondes : le temps nécessaire pour qu’une personne à portée de voix l’entende et vienne à son secours.
Incapable de bouger, DTM estima qu’il se trouvait à une vingtaine de mètres de hauteur. Il espéra que le vent ne se déchaînerait pas, le délogeant de sa position précaire. Le sol de la jungle était jonché de roches volcaniques sur lesquelles son boîtier risquait de se casser. Si ses circuits s’éparpillaient par terre, personne n’arriverait jamais à le remonter correctement. Rien que d’y penser, il en frétillait d’horreur.
Quarante-cinq secondes s’étant écoulées, il appela de nouveau. Il poursuivit son manège pendant une heure et onze minutes avec l’espoir de plus en plus ténu d’attirer l’attention de quelqu’un.
Quand ses vœux furent exaucés, il regretta de ne pas avoir cassé ses circuits vocaux en tombant.
Un groupe de woolamandres se déplaçaient sous la voûte feuillue, faisant craquer les branches sur leur passage. Ces créatures poilues très agiles étaient dotées d’un sens de l’équilibre exceptionnel. Pour l’heure, elles semblaient faire un concours de cris et de hurlements. Mais malgré le vacarme, l’une d’elles réussit à entendre DTM.
Le droïde ne possédait pas beaucoup de données sur la faune de Yavin 4. Il savait simplement que les woolamandres étaient curieuses et sociables. Celles qui l’avaient entendu ne mirent pas longtemps à repérer son boîtier brillant parmi les lianes. Elles se précipitèrent toutes ensembles vers lui.
— Oh, non, gémit DTM. Pas vous. S’il vous plaît. J’appelais quelqu’un d’autre…
Les woolamandres s’approchèrent, leur fourrure violette hérissée, une expression à la fois méfiante et ravie sur la gueule.
— Allez-vous-en ! Bouh ! s’écria DTM.
Les woolamandres poussèrent un long cri de victoire pour célébrer leur découverte. Un gros mâle arracha le droïde miniaturisé à son nid de lianes.
— Reposez-moi, ordonna DTM. J’exige que vous me lâchiez immédiatement.
Le mâle le lança à sa compagne, qui entreprit de le secouer et essaya d’introduire ses doigts dans les trous brillants.
— C’est mon œil, protesta DTM. Ôtez vos pattes de là ! Ah, non ! Maintenant, vous me tenez à l’envers !
La femelle l’agita en tous sens pour voir s’il produirait d’autres sons amusants. Elle saisit une grosse branche, le posa devant elle et s’apprêta à abattre sur lui ce gourdin improvisé, comme pour faire éclater un fruit. DTM déclencha ses alarmes et les poussa au volume maximal. La femelle lâcha son bâton pour porter les mains à ses oreilles.
Un des plus jeunes du groupe en profita pour lui subtiliser le droïde. Il s’éloigna en bondissant dans les arbres, brandissant son trophée bien haut au-dessus de sa tête. DTM recommença à appeler au secours. Les autres woolamandres se lancèrent à la poursuite du kidnappeur.
DTM était en proie à une telle panique que ses circuits menaçaient de lâcher. Il n’eut pas d’autre choix que de se mettre en veille pour ne pas voir ce qui allait lui arriver.
Plus tard dans la nuit, il s’activa de nouveau et s’aperçut qu’il n’y voyait plus rien : ses senseurs optiques étaient obstrués par une épaisse fourrure.
Il détecta un léger mouvement, puis une respiration. Le jeune woolamandre s’agita dans son sommeil, ce qui permit au droïde de faire le point. Il était dans la fourche d’un arbre, serré contre la poitrine de son ravisseur.
Autour d’eux, les autres créatures reposaient paisiblement, avec des ronflements plus ou moins sonores. DTM résista à l’envie d’appeler de nouveau à l’aide. Une seule chose le rassérénait : quoi qu’il lui arrive le lendemain, ça pourrait difficilement être pire qu’aujourd’hui.