Il fait soleil
Il fait soleil, j’ai la gueule de bois, la tête vide, et le chien gratte le dessus-de-lit. Le radioréveil marque onze heures moins cinq. Je me lève, traverse le couloir en me tenant aux murs. La gardienne a déposé sur le paillasson le courrier et les journaux. Je suis dans Le Parisien, au bras de Talia. Le type a dû écrire son article en regardant les infos : je retrouve les vacheries de la députée et le soutien du président. Un triangle noir clignote sur l’écran de mon téléphone, signalant que la messagerie est saturée. Je la laisse comme ça. Autant croire encore un peu que Talia a fait la fête toute la nuit avec ses collègues, et que je serai le premier à lui apprendre avec qui elle s’est affichée.
Douche, café, croquettes. C’est étonnant de voir l’appétit de Nelson. Peut-être qu’il a pris sur lui, pendant la nuit, qu’il a absorbé mes cauchemars, et le désespoir ça creuse. Je commande un taxi pour arriver à l’heure. Avant de quitter l’appartement, je glisse dans ma poche la photo de Homes Direct, mon allée de platanes à moi, comme un porte-bonheur pour diminuer le malentendu avec Talia.
Je la retrouve devant le Muséum. Elle fait la gueule, adossée aux grilles, entre les affiches de squelettes.
— Fermé le mardi, fait-elle en montant dans le taxi.
Elle donne au chauffeur une adresse. Je lui demande si elle a vu la presse. Elle ne répond pas. Au premier feu rouge, je lui tends Le Parisien. Elle le repousse.
— Tu lis les journaux, toi ?
Je réponds oui. Pour être au courant.
— Et ça t’avance à quoi ?
Elle abaisse l’accoudoir entre nous. Je cherche une transition, lui dis qu’en tout cas elle a eu de bons articles sur sa Victoire. Elle m’attrape les mains et les plaque sur la banquette.
— Écoute, Roy Dirkens, j’ai pas attendu ce matin pour savoir qui tu es. Rudi, mon petit voisin du rez-de-chaussée, t’a reconnu le soir où tu es venu chez moi. Il m’a montré ta vignette dans son album. Il m’a raconté tes trente-huit buts au club Ajax, ton prix d’achat, ton match contre Nantes, l’émeute qu’on a provoquée, ta mise à l’écart… Rudi n’a que le foot dans sa vie, il sait qu’il est malade comme son père, qu’il deviendra obèse et qu’un jour il ne pourra plus bouger ; tu es le premier joueur qu’il rencontre et j’ai essayé de te faire passer son message, de toutes les manières que j’ai pu : reviens, Roy, bats-toi, montre-leur qui tu es. Mais tu as jamais saisi la perche, tu t’es jamais confié. D’abord j’ai cru que tu te méfiais, que tu avais peur que je m’accroche à toi pour ton fric, que c’était de la délicatesse. Tu avais envie d’être à égalité avec moi pour qu’on soit vraiment copains. Au début, j’ai adoré. Jamais quelqu’un s’était donné autant de mal pour moi, même si c’était pour me mentir. Et puis ça m’a fait peur. Quand on joue trop bien, Roy, ça déteint. J’ai senti que pour me suivre tu allais tomber encore plus bas que moi, alors j’ai essayé de te relever. Pourquoi tu crois que je t’ai emmené aux Victoires ? Rudi est monté me réveiller, ce matin : tu es redevenu une vedette, tu es engagé demain contre l’équipe de Rome et il est fou de joie, voilà. Toi aussi ?
Je ferme les yeux contre l’appui-tête. C’est dingue de vivre une histoire aussi sincère alors que tout est faux dès le départ, que chacun a menti à l’autre et s’est trompé sur lui. Je vais pour lui raconter quelle est ma situation réelle ce matin, à cause d’elle, et puis je me dis que ça serait un moyen trop minable de reprendre l’avantage. Je rentre l’accoudoir dans le dossier, elle appuie sa tête sur mon épaule.
— Pourquoi je suis triste, Roy ? Tu as une deuxième chance qui t’attend, et moi j’ai décroché hier soir le job de mes rêves : je commence demain sur Internet, mille euros la semaine. Je ne ferai plus l’amour que toute seule devant des invisibles ; je les ferai juter en trois minutes et après on discutera, ils raconteront leur vie… Fais-moi confiance pour les garder un max en ligne : je me suis négocié un pourcentage sur ce que nous reverse France Télécom. Pourquoi je suis triste ?
— Un rêve qui se réalise, c’est un rêve de moins.
— Tu le crois vraiment ?
— J’aimerais bien que non.
Le taxi s’arrête devant un bâtiment marron et jaune, avec des stores à rayures. « Maison de retraite médicalisée Sainte-Croix ».
— C’est quand même pas là que tu vas bosser ?
Elle sourit, redevient triste. Je paie la course et elle enfonce ses ongles dans mon blouson, sur le trottoir.
— Ce que je veux te montrer, Roy, c’est ce qui me retient dans cette vie. Pourquoi j’en suis là et pourquoi j’ai pas le choix et pourquoi je suis plus forte que tout ce qui devrait me salir. Après tu verras si tu as envie ou pas de continuer quelque chose avec moi. Viens.
On traverse un hall qui sent la soupe froide et le désinfectant. Dans l’ascenseur des feuilles imprimées, collées sur le miroir, annoncent des ateliers coiffure, chanson française et pâtisserie.
Au troisième étage, les portes s’ouvrent sur une exposition de vieux, fauteuils roulants tournés vers l’ascenseur comme si c’était une fenêtre, comme si le soleil venait de là. Talia passe entre les roues en disant bonjour d’une voix joyeuse, et je l’imite, le plus gaiement que je peux. Aucune réponse. Ils continuent à fixer l’ascenseur qui se referme.
Au fond du couloir, elle entre dans une chambre à deux lits, et lance du même ton heureux :
— Bonjour madame Ménard, bonjour Baba.
Une petite momie sous perfusion est attachée dans un fauteuil bleu, tête en avant, bouche entrouverte. En face, couchée sur le dos avec les bras le long du corps, une grande femme au visage de statue regarde le plafond avec les yeux fixes, un maquillage de cinéma muet et un brushing impeccable. Talia lui embrasse le front, lui caresse la joue, lui demande de ses nouvelles, puis lui tourne la tête dans ma direction.
— Baba, je te présente Roy Dirkens dont je t’ai parlé. Roy, ma grand-mère.
— Bonjour madame, dis-je en tendant la main.
Talia m’abaisse le poignet. Au-dessus du lit est accrochée dans un cadre une photo en noir et blanc, montrant une jeune femme à la beauté impressionnante, encore plus fine que Talia et l’air beaucoup plus allumeuse. Mon regard va du portrait à la statue couchée en dessous. Quarante ou cinquante ans les séparent, et on ne reconnaît que le maquillage. Je ne peux pas croire que Talia ait eu cette idée. C’est monstrueux, ce côté « avant » et « après ». Ou alors c’est un aide-mémoire. Pour que les infirmières pensent à l’être humain d’autrefois quand elles s’occupent du légume.
— Elle est comme ça depuis presque un an. Quand j’ai eu les moyens de lui payer le voyage, elle m’a fait une attaque, le jour de son arrivée. Je sais pas si c’est ma faute, si c’est la joie ou le choc en voyant ce qu’est devenu Paris… Les médecins disent que le cerveau est mort. Je suis pas d’accord. Et tant que je paye, c’est moi qui ai raison.
Elle se penche sur le lit, décolle lentement les morceaux de scotch qui maintiennent les yeux grand ouverts. Les paupières retombent à moitié.
— Tu vois, c’est ce qui m’énerve le plus, ça. Le temps gagné. Ils lui mettent des gouttes trois fois par jour, alors ils laissent le scotch. Si je venais pas, ça serait toujours le même. Et à sa mort, ils le décolleraient pour le coller vers le bas.
— Arrête, dis-je en détournant la tête.
— Quoi ? Ça te dégoûte ? C’est pas la mort qui est dégueulasse, Roy, c’est les économies. Gratter dix secondes sur quelqu’un qui n’a plus que les gestes des autres pour bouger !
Je vais appuyer le front à la fenêtre. Près de moi, le fauteuil bleu de l’autre dame a une étiquette sur le dossier : Nettoyé le 24-6-00. Un aide-soignant entre au pas de charge, avec un toc-toc sur la porte ouverte. Il fonce vers le lit en lançant d’une voix dynamique :
— Température, Votre Altesse !
Talia me rejoint à la fenêtre. On regarde les péniches se croiser sur la Seine, entre les tours en verre. Je murmure :
— Pourquoi il se fout d’elle ?
— Non, il pousse un peu le protocole, mais ça fait de mal à personne. C’est réservé aux princes du sang, le titre d’altesse : je les ai briefés, maintenant ils font comme ils veulent. Y en a que ça flatte, d’autres qui se marrent. Mais la plupart le font gentiment, si jamais Baba les entend. On a même une Antillaise qui lui fait la révérence avant de lui mettre ses couches.
J’attends que l’aide-soignant soit reparti, je lui demande :
— Mais c’est qui exactement, ta grand-mère ?
— Princesse Irina Stovetzkine, dit-elle en désignant la photo. C’était le soir de ses vingt ans à l’Opéra de Paris, quand elle a brisé le cœur de ses parents. Des Russes blancs réfugiés en France à la révolution d’Octobre, qui l’avaient mise au monde boulevard Saint-Germain, élevée chez les bonnes sœurs, inscrite à la chorale de Notre-Dame… Et le jour où elle tombe amoureuse, elle choisit qui ? Le troisième secrétaire de l’ambassade soviétique. Coup de foudre à l’entracte, le soir du Casse-Noisette de Tchaïkovski. Marié, trois enfants, liaison cachée pendant douze ans, et puis il est appelé au Kremlin par Brejnev. Pas question de laisser sa chérie à Paris : il l’emmène avec un faux passeport diplomatique, l’installe dans une datcha, vient la voir cinq ou six fois et puis il se fait purger : direction la Sibérie, et Baba va se planquer à Kiev pour accoucher de maman. Voilà. C’est elle qui m’a appris le français, qui m’a mis Paris dans la tête, qui a écrit pour moi aux agences de mannequins. Ma mère a tout fait pour me couper de sa mauvaise influence, pour que j’aie un métier sérieux : elle m’a foutue trois fois en usine, Baba allait me reprendre ; alors elle m’a fait embarquer comme femme de ménage sur un cargo, chaperonnée par sa meilleure amie qui me sous-louait aux marins, et pendant ce temps Baba continuait d’envoyer mes photos, de m’inscrire aux castings…
Je regarde la gisante aux yeux déscotchés sous sa photo de jeunesse, j’imagine l’énergie, l’espoir obstiné, la fierté de se sacrifier pour une vocation… Tout ce que j’aurais tant voulu continuer à partager avec maman.
— Elle est transportable ?
— Pourquoi ? Y a pas mieux comme endroit. T’imagines pas la liste d’attente : heureusement que le directeur espère me sauter. Le jour où j’aurai une maison et de quoi payer une infirmière à domicile, je verrai.
Je la prends dans mes bras. Je lui dis que la vie est courte. Elle me répond que ce n’est pas une raison. Je l’embrasse de toutes mes forces, j’ai envie d’elle comme jamais et j’ai tellement envie surtout d’être autre chose pour elle. Autre chose qu’un paumé du ballon, un amant de passage, un copain. Elle me repousse avec une douceur ferme.
— J’aimerais que tu nous laisses, maintenant, Roy. Je voudrais lui raconter ce qui nous arrive… Je voudrais sentir ce qu’elle pense de toi.
J’avale ma salive, approuve, me détache d’elle pour m’approcher de la princesse. Je soulève la vieille main décharnée, la porte jusqu’à mes lèvres.
— Hé, d’où tu sors, toi ? Jamais on ne fait le baisemain à une demoiselle !
J’arrête mon geste. Et je reste sérieux, parce qu’il n’y a aucun humour dans sa voix, juste du reproche indulgent, de l’état civil et du temps figé. Je repose le bras sur le drap. Talia me prend l’autre main et on passe quelques instants immobiles, à regarder au-delà du corps échoué, de l’épave repeinte.
— C’est toi qui la maquilles ?
Elle acquiesce, chasse une mèche d’un coup de menton.
— Souvent. Chaque fois que je peux, je reviens le soir et je la démaquille.
On observe le regard qui nous passe au travers.
— Monseigneur dit qu’elle est consciente… ailleurs… Que l’activité de son cerveau continue, mais autrement…
Le choc me tombe sur la nuque. Il me faut plusieurs secondes pour arriver à prononcer les mots qui me sont venus tout seuls.
— Il me disait quoi, son message ?
— « Je vous remercie pour Natalia. » Ça ne t’engage pas, tu sais. Ce n’est pas un fantôme qui te commande quelque chose, c’est juste une grand-mère qui se fait du souci…
On se regarde. Je suis au bord d’y croire, et je sens qu’elle, bizarrement, elle se force. Elle voudrait en être sûre, mais elle a dû tellement se battre contre la raison des médecins, se battre avec pour seuls arguments son corps de rêve et son refus de la réalité ; elle fait tellement semblant d’avoir des certitudes pour être la plus forte que lorsqu’elle est en confiance avec quelqu’un, elle doute. Ou alors c’est elle qui m’a envoyé le Texto, pour les mêmes raisons qui lui ont fait accrocher la photo au-dessus du lit : pour qu’on traite sa grand-mère comme un être vivant.
Je me retourne vers la vieille dame, souris dans le regard vide.
— C’est moi qui vous remercie. C’est la femme de ma vie, et je vais vous le prouver.
Je détache mes doigts de ceux de Natalia et je pars sans me retourner, dans l’écho de ce que j’ai dit.
— Je viens voir Etienne Demazerolles.
— Vous êtes ?
— Pressé.
La secrétaire pince les lèvres, me redemande mon nom. Certain qu’elle a reçu l’ordre de me refouler, je le lui balance d’un ton agressif, prêt à forcer la porte. Elle me l’ouvre aussitôt, en disant d’un air épanoui qu’elle cherche à me joindre depuis ce matin.
— Monsieur Dirkens ! annonce-t-elle avec fierté.
— Enfin ! rugit mon agent.
Il bondit de son fauteuil, en bras de chemise, court vers moi tout en jetant au type assis en face de son bureau qu’il le verra plus tard. Et il m’embrasse en m’écrasant contre sa graisse, m’assied sur le fauteuil en cuir à la place du visiteur que la secrétaire escamote dans la salle d’attente.
— Ça tombe bien, très très bien, Roy : j’ai des tonnes de choses à te dire.
— Moi j’en ai qu’une : tu achètes cette maison avec l’argent de mes sociétés aux Bahamas, et tu la mets au nom de Natalia Stovetzkine : je t’ai tout marqué derrière.
— Sans problème, fait-il en posant sur son bureau la page découpée dans Homes Direct. C’est son vrai nom ? Joli.
— Merci, dis-je en me relevant.
— Ho, attends ! rigole-t-il en sortant d’un minibar en faux livres une bouteille de champagne. Faut qu’on trinque à ce qui t’arrive.
Je le dévisage, consterné, lui demande s’il a eu mon entraîneur au téléphone, ce matin.
— J’ai eu le président, corrige-t-il en posant deux flûtes à côté de la bouteille. Bon, je commence par le début : tu connais le contentieux qu’il a avec le président de la Ligue nationale.
— Non.
— Tu sais quand même que ton club négocie lui-même ses droits de diffusion, sans passer par l’intermédiaire de la Ligue.
— C’est plus mon problème.
— Mais tu as entendu parler de la DNCG ?
— Non.
Il pousse un soupir, renonce à ouvrir sa bouteille et vient s’asseoir dans le fauteuil près du mien, se rapproche en articulant avec lenteur :
— Le club est dans le rouge de plusieurs millions,
Roy, ce qui est tout à fait normal vu la masse des achats : en valeur additionnée des joueurs au cours actuel, il est largement bénéficiaire…
— Je m’en fous.
— Et tu as raison. Seulement la Direction nationale du contrôle de gestion vient de fondre un fusible : maintenant elle oblige les clubs à présenter des comptes annuels équilibrés, sinon ils sont relégués en deuxième division, et là c’est la mort. Le président est très très mal, vu que tous ses joueurs vedettes – même toi – ont une clause libératoire en cas de descente en D2. Et donc il doit déstocker d’urgence, pendant que vous êtes encore à lui, et la logique implique de vendre en priorité les extracommunautaires au sommet de leur cote, ce qui est ton cas depuis ce matin.
— Parce que je sors avec une actrice ?
— Parce que tu as les médias sur toi. Que ce soit pour tes qualités sur le terrain ou au plumard, ça revient au même : ce qui compte c’est que d’un coup tu suscites l’intérêt et tu crées la demande. Consigne sera donnée à l’équipe de concentrer les passes décisives sur toi pour te faire marquer, ton prix montera à chaque but et, après le match, tu seras vendu à la Lazio, ce qui réglera ton problème d’identité puisque l’Italie n’applique pas les quotas communautaires.
Je serre mes accoudoirs pour éviter de l’étrangler.
Et je prends un air apitoyé en m’efforçant de lui sourire.
— C’est con pour ta comm’, Étienne, mais je suis pas près d’être vendu. Je te signale que Kopic m’a rayé de la feuille de match.
— Y a plus de Kopic, répond-il avec un revers de main. Ce con nous faisait chier avec ses états d’âme, le président l’a viré ce matin pendant la réunion. Il paraît qu’il a pris ta défense d’une façon grandiose : il a dit qu’un entraîneur n’avait pas à juger un joueur sur sa vie privée, que c’était une faute professionnelle et que demain, ça serait avec toi ou sans lui. Kopic a balancé sa dém’ et je peux te faire tripler tes primes de but : jamais on a vu Rouffach monter au créneau pour défendre un joueur ! Tu es devenu la priorité absolue, Roy !
Je laisse retomber mes mains, effondré. À quoi tient la valeur d’un homme ? Qu’ai-je à foutre dans un monde où les entraîneurs sont virés pour honnêteté morale, où le sort des footballeurs dépend des coups qu’ils tirent ?
— Tiens, regarde. C’est la villa d’Olivares, que je suis en train de transférer de la Lazio au Bayern. Deux hectares à Ostie, la banlieue chic de Rome au bord de la mer, piscine, tennis et jacuzzi. Ça te branche ?
Je ne réponds pas. Je le fixe et la décision que je viens de prendre durcit dans son regard.
— Écoute, fait-il en rangeant sa photo, moi je suis là pour gérer ta carrière, pas tes prises de tête, OK ? File à l’entraînement, t’as une seule chose à quoi penser maintenant : être au top demain et mettre une branlée à ton futur club. Je m’occupe du reste, conclut-il en faisant sauter le bouchon de champagne. Ça marche ?
— Ça marche.
Je me lève avec un sourire positif, lui serre la main comme on casse une noix.
— Pour la maison de ta copine, je négocie ?
— Non. Tu conclus aujourd’hui, à n’importe quel prix, et tu fais porter les papiers chez ma gardienne.
— Compte sur moi.
Je le laisse trinquer tout seul à ma carrière, et je pars à pied dans la rue de Rivoli pour respirer un peu d’air pur. Je ne sais pas si mon vieux maître Chaka Natzulu est encore vivant, mais, dans le doute, je bombarde le ciel de prières pour qu’il me donne la force et la chance d’écraser les Romains demain soir. Ma vengeance sera complète.