CHAPITRE PREMIER











Joren Lazar s’assit sur le mur à demi éboulé du jardin de la Ferme aux Lycaons. Il réprima un geste d’agacement contre une guêpe géante qui lui tournait autour depuis un moment avec une insistance rare. Roma était un monde d’insectes. Quand on acceptait les avantages économiques d’une association avec les hyménoptères, il fallait bien subir les inconvénients d’une cohabitation parfois difficile.

Joren posa les mains sur la pierre brûlante et observa la silhouette qui avançait au milieu du chemin à quelques centaines de mètres de là, entre un bosquet de parfumiers et un champ de chardons à pain. Elle grossit peu à peu et Joren reconnut la démarche balancée, un peu lourde, de Tana. C’était elle : Tana, sa compagne romaine, fille du pays, indifférente à l’histoire des planètes lointaines et des civilisations disparues, ses propres spécialités.

La guêpe revint à la charge. Joren jura. « Que Marv me… Tu vas me ficher la paix, stupide bestiole ! » L’insecte mesurait dix à douze centimètres de long. Il se tenait là immobile à moins d’un mètre de Joren. Ses ailes agitées à une vitesse folle donnaient l’illusion d’une voilure tournante. On eût dit un hélicoptère à pales de l’ancien temps. Elle vrombissait un peu fort, ce qui pouvait signifier qu’elle était en colère. « Qu’est-ce que je t’ai fait ? » Joren vivait depuis plusieurs années sur Roma, mais il était loin de connaître toutes les espèces de guêpes de la planète, ni même toutes les espèces du continent d’Adrianie. Et il ne savait pas grand-chose de leurs mœurs… La plupart pouvaient tuer un homme ; mais elles ne se montraient presque jamais hostiles. Curieuses souvent, oui. Celle-ci était peut-être étrangère…. «Comme moi ! » songea-t-il. Ou bien la chaleur la rendait nerveuse : c’était un phénomène connu.

Komo, le gros soleil jaune, flambait dans le ciel pâle. On était à la fin de l’été en Adrianie. Le silence, l’immobilité de ces jours pareils aux jours, la touffeur écrasante qui pesait sur les collines pauvres en ombrages, s’harmonisaient avec l’état d’âme de Joren, figé dans la contemplation de l’histoire et du temps : le long été de la race humaine… Ou bien était-ce déjà l’automne ?

Il mit la main en visière sur ses yeux pour observer Tana. Ne pouvant résister à l’impulsion de marcher à sa rencontre, il sauta sur le chemin et l’appela : « Eoh ! Eoh ! » Elle répondit d’un simple geste. Sa jupe grise, longue et ample, flottait jusqu’à ses pieds. On l’eût dite taillée dans un vieux poncho de nomades. Joren s’étonnait encore du goût des paysans romains pour les accoutrements misérables, les vêtements sombres et mal coupés. Pourtant, il en connaissait la raison. Sous l’ancien régime féodal, c’était pour eux une question de survie. Les jeunes paysans devaient avoir l’air mal bâtis pour échapper aux travaux forcés dans les montagnes et les mines ; les jeunes paysannes devaient paraître tristes et laides pour échapper aux harems et aux maisons de plaisir des seigneurs…


Il s’aperçut avec inquiétude que la guêpe l’avait suivi dans le chemin. Maintenant, elle le précédait, effectuant à sa hauteur, devant lui, des boucles gracieuses et des voltes acrobatiques. Il détourna les yeux, se souvenant d’une mise en garde de Tana : « Ne regarde jamais les guêpes danser en l’air. Tu pourrais être hypnotisé et… » Et quoi ? Il n’avait jamais eu connaissance d’un cas réel d’être humain tombé par l’hypnose au pouvoir des guêpes géantes. C’était sans doute un de ces vieux mythes qui ont la vie si dure.

Pourtant, ces réflexions ne rassuraient qu’à demi Joren. Il s’arrêta soudain, espérant que l’insecte allait continuer sa progression sans s’occuper de lui. Mais non. La guêpe en avait vraiment après Joren Lazar ! Elle s’arrangea pour élargir ses boucles et garder ses distances avec précision : environ deux mètres.

Joren lutta contre sa crainte et sa répulsion, indignes toutes les deux du Romain qu’il voulait être. Il observa sa visiteuse en essayant de détacher son regard des figures qu’elle traçait pour la porter sur le corps et les ailes. La voilure bourdonnait faiblement en brassant l’air sec de Roma. La guêpe émettait un autre bruit dont il ne sut déceler l’origine. Il nota une coloration générale tirant sur le jaune, un peu plus claire que celle des ouvrières du village, avec des bandes marron, en surnombre semblait-il. Il compta onze bandes entre la pointe de l’abdomen et l’étranglement du thorax. Onze ? Ce chiffre indiquait, sauf erreur, une espèce peu courante en Adrianie.

Joren s’aperçut qu’il retenait son souffle et que son visage ruisselait de sueur. Il s’était immobilisé en plein soleil. Son chapeau de toile ne le protégeait pas assez. Il n’avait jamais pu s’habituer aux vastes chapeaux de paille des paysans romains. Il s’essuya avec un mouchoir en fil d’aragne, très spongieux. Cela lui fit du bien. Ce tissu avait une telle douceur sur la peau. C’était une sensation délicieuse.

Etonné, il examina le mouchoir. C’était curieux. Bien sûr, il connaissait la sensation de la soie d’aragne sur la peau. Mais elle ne lui avait jamais paru aussi agréable et aussi… mystérieuse. Il remit le mouchoir dans la poche de son short. A regret. Il aurait aimé le garder dans la main ou contre sa joue, contre sa bouche. « Curieux », se dit-il.

Il tourna de nouveau son regard vers la guêpe danseuse. Il lui sembla qu’elle s’était un peu éloignée. Elle poursuivait son ballet compliqué, plein d’une grâce savante. Son bourdonnement avait faibli, sans doute à cause de la distance. Il pensa : « Cette histoire d’hypnose ne tient pas debout ! Encore une de ces légendes ridicules colportées par les paysans romains depuis la nuit des temps… » En tout cas, le spectacle était ravissant.

Ses longues pattes s’agitaient en cadence. Elle les frottait parfois comme si elle avait voulu les enrouler l’une sur l’autre. Ses lourdes antennes noires se balançaient suivant un rythme lent qui n’était pas tout à fait celui de la danse… La gueule semblait plus fortement armée que celle des espèces courantes d’Adrianie ; mais les mandibules avaient l’éclat du métal poli et leur brillance les rendait presque indiscernables dans la lumière du jour. De même, les ailes en mouvement, qui formaient comme une buée brune, floue, tremblante.

Le terrible dard pointait hors de sa gaine, long à peu près comme l’ongle taillé d’une jeune Romaine. Assez puissant pour tuer, même sans venin… Les yeux étaient deux diamants noirs, aux facettes nombreuses qui piégeaient chacune le soleil.

La guêpe s’était de nouveau rapprochée sans que Joren en eût conscience. Curieux… Elle se tenait maintenant en face de lui, à hauteur de son visage, distance de moins d’un mètre. Il se mit à compter les soleils sur les facettes de ses yeux.

Il avait mal à la tête. Il pensa qu’il lui fallait se mettre à l’abri de la haie de thé rouge qui bordait le chemin. Le thé offrait une protection bien maigrelette contre les rayons ardents de Komo ; c’était mieux que rien. Puis il se souvint qu’il marchait à la rencontre de Tana.

Tana, sa compagne, qui revenait de… D’où revenait donc Tana ? Il avait oublié. « Je vais l’attendre ici », décida-t-il. Sa migraine se dissipait. Il eut l’impression que la guêpe géante lui souriait. Très drôle ! Voilà une réflexion qui amuserait beaucoup Tana quand il lui raconterait. Il lui dirait : « Tu vas rire, mon amour. A un moment, j’ai cru que cette diabolique bestiole essayait de m’hypnotiser. Ha, ha ! Je sais bien que les guêpes de Roma, mêmes géantes, sont tout à fait incapables d’hypnotiser un être humain. Et incapables d’esquisser le plus petit sourire de mandibules ! »

— Tu vas rire, Tana chérie ! dit-il à haute voix.

Il remarqua soudain que la guêpe ne bourdonnait plus. « C’est curieux, se dit-il. Drôle d’insecte… » Pourtant, les ailes battaient toujours à une vitesse folie et il aurait dû entendre leur ronflement. Il porta la main à son front. « Quoi ? » Tana rirait encore plus fort quand il lui raconterait : « Je te jure que j’ai cru l’entendre dans ma tête. Je sais bien que c’est idiot. D’accord, je veux bien que tu me soignes : une double ration de gelée royale me ferait sans doute du bien ! Qu’est-ce qu’elle disait ? Oh, rien d’intéressant. Elle voulait savoir si j’étais un fonctionnaire impérial. Tu te rends compte ! »

— Mais non, fit-il sèchement. Je ne suis pas fonctionnaire de l’Empire. Je ne suis pas romain non plus, c’est vrai. Je me suis fixé sur Roma, au village d’Afbo Nao, pour me consacrer à mes recherches. Je suis vraiment tranquille ici et…

Joren se secoua. Il avait maintenant la sensation qu’une toile d’araignée lui recouvrait la tête et les épaules.

— Quelles recherches ? Mais au nom de Marv, qu’est-ce que ça peut bien vous faire ? Vous êtes venue pour m’interviewer ? Ah, c’est trop drôle. Quand je raconterai ça à Tana… Bon, mettons que je suis un spécialiste des civilisations disparues. Est-ce que ça vous suffit ?

Joren ferma les yeux et prit son visage dans ses mains. « Je délire ou quoi ? »

Il respira très fort. Ce n’était pas la première fois qu’il s’endormait en plein jour et que les rayons de Komo faisaient naître un cauchemar dans sa tête. « C’est encore arrivé, voilà tout… » Il souleva doucement les paupières. La guêpe géante avait disparu.

Disparu ? Même pas. Elle n’avait jamais existé que dans son rêve. Il était toujours assis sur le mur de pierre, à demi éboulé, de la Ferme des Lycaons. Il mit la main en visière sur ses yeux pour guetter Tana. Ne pouvant résister à l’impulsion de marcher à sa rencontre, il sauta sur le chemin et l’appela : « Eoh ! Eoh ! » Elle répondit d’un simple geste. Sa jupe grise, longue et ample, flottait jusqu’à ses pieds.


Le vrombissement de la guêpe éclata aux oreilles de Joren comme un coup de tonnerre. Elle était là ! Elle dansait et voltigeait, balançait ses antennes et frottait ses pattes. Elle émettait un bruit crissant qui perçait le crâne de Joren et pénétrait dans son cerveau. Elle se figea soudain, en face de lui, à hauteur de son visage. Il se mit à compter sur les facettes de ses yeux les minuscules soleils jaunes.

Tout à coup, il prit conscience du danger. La terreur l’envahit. Il était en train de tomber au pouvoir du petit monstre inconnu ! Seule Tana pouvait l’aider… le sauver. Elle serait là dans un instant. Il essaya de calculer : moins d’une minute. Par un effort violent, il s’arracha à la contemplation de la guêpe. Il leva les yeux et vit l’autobus rouge qui avait déposé la jeune femme au bout du chemin. Le véhicule s’éloignait lentement sur la route, plaquée au pied d’une colline rocheuse et nue, noyée sous le soleil. Puis il disparut, happé par un virage. Non, il n’y avait pas de virage à cet endroit. L’autobus ne pouvait pas… La colline entière s’effaça.

Le souffle coupé, Joren baissa les yeux. Le chemin était vide, comme si Tana venait de se volatiliser.

Le chemin et les deux haies de thé qui l’encadraient s’évanouirent à leur tour. Joren se trouvait maintenant debout au milieu d’un désert, balayé par un soleil de feu. Seul. Prisonnier de la guêpe… si c’était une guêpe.

Il comprit soudain le sens du halètement sifflant et rythmé qui perçait son cerveau. C’était un signal, un message. Un mot, un seul mot d’une syllabe. Le plus effrayant de l’Univers :


UR

ur… ur… ur… ur… ur… ur… ur… ur… ur…


Un instant, sa lucidité fut entière et il pensa avec désespoir à sa liberté perdue. Son agresseur n’était pas une guêpe de Roma. C’était une machine urue, biologique ou non. Un engin d’espionnage envoyé par le Kaerwea en avant-garde peut-être d’une armée de conquête. A la suite des derniers revers de la flotte de Grakforal, la planète n’était plus très éloignée du front. Elle appartenait au secteur militaire de North Towananda, commandé par la princesse amirale Bajjium de Yore et…

Joren comprit que l’envahisseur épelait des bribes d’information dans son cerveau. Il serra les dents, avec le puéril espoir de fermer en même temps son esprit.

Il voulut serrer les dents. Mais ses mâchoires n’obéissaient pas à sa volonté. Une onde apaisante courut le long de ses nerfs. Il la sentit s’épanouir sur sa langue, sur ses lèvres, au bout de ses doigts. Il se détendit. « Tout va bien, pensa-t-il. Le Kaerwea est le seul dieu… »

Il s’avança alors à la rencontre de Tana. Quand ils furent à quelques pas l’un de l’autre, la jeune femme s’arrêta et pencha la tête en signe de soumission. Un geste qui avait perdu son sens depuis l’émancipation de la femme romaine par Grakforal. Tana était une fille fière et libre d’une race fière et libre. Mais les paysans d’Adrianie sortaient à peine d’un long servage et ils avaient gardé leurs réflexes ancestraux d’humilité et d’allégeance. Ils vouaient à Grakforal une reconnaissance que Joren trouvait très exagérée. Et lui-même, en tant que citoyen de l’Empire, bénéficiait largement de cette gratitude. Au début, il éprouvait une certaine gêne à se voir traité par ces braves gens comme un royal invité. Car ils lui avaient offert leurs champs, leurs maisons, leurs insectes industrieux… et leurs filles magnifiques.

Lui que nul sentiment patriotique n’exaltait mettait en doute la pureté des intentions foraliennes… « Exact. Grakforal est un envahisseur. » La pensée étrangère se formait en lui. Elle ne provenait pas d’une source mentale extérieure. Et cependant, il ne l’acceptait pas tout à fait pour sienne. « Grakforal est l’ennemi… ennemi… ennemi. Le Kaerwea est le seul dieu ! »

Oui, oui. L’humble et déférente affection de ces paysans pour leurs nouveaux maîtres l’agaçait un peu. Mais il admettait leur point de vue. Les envoyés de l’Empire apportaient aux Romains une aide médicale et technologique très efficace, pour laquelle ils ne demandaient rien. Absolument rien.

« C’est faux ! pensa-t-il avec une rage soudaine. Grakforal est un nid de voleurs impérialistes. Grakforal est l’ennemi du genre humain. Seul le Kaerwea est juste… »


Tana l’observait avec une fixité gênante, comme si elle avait décelé quelque chose d’anormal dans son allure ou son comportement. Il lui rendit son examen en souriant. Elle était très belle. Ses longs cheveux noirs tombaient en désordre, avec une grâce infinie, autour de son visage ovale, mince et hâlé. L’ombre de ses cils ouvrit une seconde ses grands yeux bleu foncé… Il fit un pas vers elle pour la prendre dans ses bras. Elle recula aussitôt en soufflant de colère ou de dégoût et son regard flamboya. Puis elle se détourna.

Joren ferma la bouche par réflexe. Les Romains avaient un odorat hypersensible et l’haleine des étrangers les offusquait souvent… Elle balança son sac de son épaule comme pour se libérer et demanda d’une voix sifflante :

— Qu’est-ce que tu as ? Qu’est-ce que tu as ?

Joren prit un air étonné et innocent.

— Je n’ai rien, dit-il. Rien du tout !

Il avait conscience de jouer son rôle plutôt mal. Avec un coin de son esprit, il songeait : « Elle peut m’aider. Il faut que je… il faut que je… » Il censura furieusement cette pensée, puis s’efforça de retrouver tout son calme pour dire sur un ton doucereux :

— Je ne vois pas ce qui te choque. C’est toi qui…

Il sentit que cela sonnait faux. Il se mordit la lèvre. Il lança un appel au frelon ur. Un appel mental au secours.

— Joren ! cria Tana. Joren !

Puis elle lui jeta son sac dans les jambes et s’enfuit par le chemin. Au bout de dix mètres, elle pivota et, soulevant sa jupe à deux mains, elle bondit par-dessus un tas de cailloux et s’élança vers la Ferme des Lycaons, un chaos confus de ruines envahies par une maigre végétation épineuse. Elle courut à travers les chardons, les buissons secs, évitant les pointes acérées des yuccas.

Après une courte hésitation, Joren partit à sa poursuite, en franchissant d’un saut le mur d’enceinte éboulé. Tana tourna la tête vers lui une seconde et il put voir son visage rouge, ses traits déformés par la peur, son regard fou. Il se demanda par quel sens mystérieux elle avait pressenti le danger… Elle fit un crochet pour éviter un fourré de broussailles et d’herbes sèches. Un chien sauvage surgit devant elle en aboyant et en montrant les crocs, prêt à lui sauter à la gorge. Une chienne qui défendait ses petits. Ou plutôt une lycaone, espèce féroce avec une gueule énorme et des mâchoires en proportion.

Tana ramassa une longue barre de bois, noircie par le feu, et s’en arma. La lycaone recula et se prépara à bondir de nouveau. Un vrombissement aigu se fit entendre au-dessus de la ferme. Tana leva les yeux et vit la guêpe. D’une façon ou d’une autre, elle comprit que la principale menace venait de l’insecte géant. Les ruines ne constituaient plus un refuge sûr. Elle repartit d’un autre côté, se rapprochant ainsi de Joren. Mais celui-ci s’était arrêté en apercevant la guêpe… ou plutôt l’engin uru.

Le monstre fonçait sur Tana d’un vol tendu. Il dévia légèrement sa trajectoire pour attaquer la lycaone qui ne semblait pas l’avoir vu et qui ne se méfiait pas des paisibles insectes du pays. Ses aboiements furieux se changèrent en une longue plainte. Elle roula sur le sol où elle se tordit en geignant, aussitôt rejointe par ses deux chiots.

La guêpe-machine l’avait frappée à distance. Elle pouvait donc atteindre de la même façon la jeune Romaine en fuite. Joren souhaita qu’elle le fît. Il pensa avec haine : « Tue-la ! Tue-la ! » Mais la machine urue décrivit une courbe serrée pour rattraper Tana.

La jeune femme perdit quelques secondes à contourner les débris d’un rucher incendié. La guêpe la dépassa puis s’immobilisa à un mètre d’elle, reprenant son ballet hypnotique.

« Non, non, pensa Joren. Il faut la tuer tout de suite ! » Tana abattit son bâton sur la tête de l’insecte. La barre se brisa. La jeune femme lâcha le morceau trop court qui lui restait à la main et tenta de s’échapper vers le chemin en déchirant sa jupe aux ronces et aux buissons.

Elle se trouva alors face à Joren qui sortit un couteau de sa ceinture et lui barra le passage. Elle plongea la main dans son corsage, brandit un petit poignard à lame dentée. D’un œil, Joren surveillait la guêpe urue, qui était tombée sous le coup de Tana et bourdonnait bruyamment dans l’herbe. Elle s’éleva enfin avec lourdeur, en sifflant, une antenne pendante et une aile désynchronisée. Tana l’entendit arriver et se jeta contre Joren, poignard levé.