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À la recherche des sandales
Cet après-midi-là, avant de se diriger vers la Terre, les quatre amies firent un court arrêt à la chambre d’Aphrodite afin qu’elle puisse enfiler ses habits désignés pour « partir à la recherche de quelque chose ». Perséphone se demandait pourquoi il était nécessaire de mettre des habits différents, mais le chiton marine à motif de petits voiliers blancs était très seyant. Mais bien sûr, tout était seyant, sur Aphrodite.
En sortant du dortoir, elles attrapèrent des sandales ailées dans le bac, puis elles se précipitèrent vers le fleuve Styx. Celui-ci provenait d’une source qui se jetait en bas d’une falaise rocheuse bien au-dessus d’elles.
Malheureusement, la rumeur lancée par Pheme s’était répandue plus rapidement que du feu par une journée de grand vent. Tous les jeunes dieux et les jeunes déesses des cours de monsieur Cyclope étaient en train de chercher les sandales géantes le long du fleuve, qui constituait la frontière entre la Terre et les Enfers.
Un grand aigle plana au-dessus de la tête de Perséphone pour se poser sur la berge. Lorsque l’énorme oiseau se transforma en Arès, les jeunes déesses qui se trouvaient là hurlèrent d’extase à l’arrivée du jeune dieu séduisant. La majorité des dieux et des déesses pouvaient se transformer, car il était relativement facile de prendre la forme d’un animal à volonté. Perséphone elle-même prenait souvent la forme d’une colombe pour voler d’un endroit à l’autre.
Alors que les quatre déesses dérapaient en tentant de s’arrêter près du fleuve, un jeune dieu aux cheveux d’or et aux yeux et à la peau turquoise émergea de l’eau, arborant un sourire triomphant.
— J’en ai trouvé une ! s’exclama Poséidon en agitant son harpon à trois pointes dans les airs. Quelqu’un l’a calée sur le fond de la rivière avec une grosse pierre pour l’empêcher de flotter !
Perséphone et tous les autres jeunes dieux et déesses jetèrent un coup d’œil suspicieux à Atlas, le champion d’haltérophilie de l’Académie. C’était certainement le seul jeune dieu de toute l’école susceptible de pouvoir déplacer un tel rocher.
Atlas haussa les épaules. Pheme avait raison, pensa Perséphone. Et Atlas était certainement l’un des jeunes dieux qui avaient pris les sandales. Arès et lui pataugeaient alors dans le fleuve pour aider Poséidon à tirer celle qui était prise sous le rocher.
— Où est la deuxième ? cria Aphrodite depuis la rive.
Atlas leva les deux mains, paumes vers le ciel.
— Sais pas.
— Elle a peut-être été emportée près de la rive, dit Athéna. Pourquoi ne nous séparons-nous pas pour la chercher ?
Perséphone se dirigea vers de hautes herbes. Soudain, elle entendit un grand craquement derrière elle. Elle pivota d’un coup. Hadès ! Elle rougit comme une tomate alors qu’il émergeait du sol, monté sur son étalon.
— Salut, dit-il en sautant de cheval. Qu’est-ce que tout le monde cherche comme ça ?
— N’en as-tu pas entendu parler ?
Les bouclettes foncées d’Hadès oscillèrent d’un côté et de l’autre lorsqu’il secoua la tête.
Puis Perséphone se souvint qu’elle ne l’avait pas vu à l’école de toute la journée. Montrant du doigt la sandale que Poséidon, Arès et Atlas étaient en train de tirer vers la rive, elle l’informa de la récompense que monsieur Cyclope avait promise.
Hadès lui fit un petit sourire en coin.
— Ces choses viennent généralement par deux, n’est-ce pas ?
— Exact, dit Perséphone. As-tu vu l’autre ?
— Peut-être, la taquina Hadès.
— Montre-moi, dit Perséphone.
Hadès pencha la tête de côté.
— Et que fais-tu de ta mère ?
Perséphone soupira, ennuyée.
— Quoi, ma mère ?
— Je crois qu’elle ne m’aime pas beaucoup, dit Hadès en fronçant les sourcils. Elle ne serait probablement pas contente que tu sois avec moi, même pour récupérer la sandale d’un prof.
Perséphone plissa les lèvres d’exaspération.
— Ah ! Ma mère s’en fait toujours pour rien ! Elle pense probablement que tu m’enlèverais si tu en avais la possibilité.
Avant même qu’Hadès puisse répondre, Artémis accourut, ses chiens sur les talons.
— Oh ! Te voilà ! dit-elle à Perséphone. Est-ce que ce garçon t’embête ? demanda-t-elle en lançant un regard froid à Hadès, alors que ses chiens étaient aux aguets, babines retroussées.
— Non, qu’est-ce qui te fait croire ça ? répondit Perséphone.
Puis elle remarqua qu’Artémis serrait très fort son arc. Hadès avait également les poings serrés de chaque côté du corps, et ses pieds étaient ancrés dans le sol comme s’il s’attendait à être attaqué.
— Par tous les dieux ! s’exclama Perséphone en faisant un pas pour se mettre entre eux. Détends-toi, Hadès. Artémis est mon amie.
Puis elle se tourna vers Artémis.
— Je n’ai pas besoin de protection, enchaîna-t-elle. Hadès est aussi un ami.
— Si tu le dis, grommela Artémis.
Son poing se desserra sur son arc, mais elle n’en continuait pas moins de fixer Hadès du regard. Ses chiens grognèrent et continuèrent eux aussi à fixer le jeune dieu.
Quelques instants plus tard, Aphrodite et Athéna accoururent à leur tour. Se plaçant de part et d’autre de Perséphone, elles glissèrent chacune un bras sous les siens. Aphrodite fronça un sourcil en direction d’Hadès.
— Vraiment désolée, dit-elle d’une voix glaciale, mais Perséphone doit y aller maintenant.
Avant même que Perséphone puisse protester, les jeunes déesses la remorquèrent presque. Artémis suivit avec ses chiens. Une fois revenue de sa surprise, Perséphone commença à se débattre, mais Athéna et Aphrodite la retenaient.
— Continue à marcher, dit Aphrodite gravement.
Perséphone tourna la tête pour regarder par-dessus son épaule, mais Hadès avait déjà disparu.
— Pourquoi faites-vous ça ? demanda-t-elle d’un air mauvais à ses amies. Ne me dites pas, grommela-t-elle ensuite en plissant les yeux de suspicion. C’est ma mère qui vous a demandé de faire ça, n’est-ce pas ?