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Les bagages, c’est ma spécialité. C’est toujours moi qui prépare la valise de Clive quand il doit partir quelques jours. Les hommes sont incapables de plier correctement leurs chemises. Bref, je me retrouvais à présent à faire la valise des garçons qui s’apprêtaient à s’envoler pour les espaces sauvages du Vermont rejoindre leur camp de vacances. C’était un collègue de Clive qui nous en avait parlé il y a des années ; il le tenait lui-même de l’ami d’un ami. Trois semaines d’escalade, de windsurfing, de soirées autour de feux de camp et, dans le cas de Josh, sans doute aussi trois semaines à reluquer des gamines vêtues de shorts riquiqui. C’est du moins ce que je lui avais dit tout en empilant avec soin les T-shirts, shorts, tenues de bain et pantalons dans sa valise. Il avait la mine renfrognée. « Tout ce que tu veux, c’est te débarrasser de nous », a-t-il marmonné.

Il ne s’exprime plus aujourd’hui que dans un bougonnement que j’ai du mal à saisir. Cela me donne l’impression de devenir sourde.

« Oh, Josh ! rappelle-toi que tu as adoré tes vacances de l’année dernière. Harry ne trouve pas que ce soit trop long.

— Je suis pas Harry.

— Ne me dis pas que je vais te manquer », l’ai-je taquiné.

Il m’a regardée. Il a de grands yeux brun foncé qu’il sait mettre à profit pour exprimer un reproche poignant, ce qui lui donne un peu l’air d’un malheureux baudet. J’avais remarqué combien il paraissait pâle et maigre : ses omoplates saillaient telles deux poignées de porte, ses poignets laissaient apparaître des entrelacs de tendons. Quand il a ôté sa chemise pour enfiler des vêtements propres pour l’avion, ses côtes m’ont fait penser à deux échelles grimpant le long de son corps malingre.

« Un peu d’air frais ne te fera pas de mal. Pareil pour ta chambre. Tu n’ouvres donc jamais les fenêtres ? »

Il n’a pas répondu, se contentant de jeter un regard maussade dans la rue. J’ai frappé dans les mains pour le réveiller. « Je suis pressée. Ton père t’emmène à l’aéroport dans environ une heure.

— Tu crois toujours que t’es pressée.

— Je ne vais pas me fâcher avec toi juste avant que tu partes en vacances. »

Il s’est tourné vers moi. « Pourquoi tu prendrais pas un vrai travail ?

— Où est ton déodorant ? J’ai déjà un travail. Celui d’être ta mère. Tu serais le premier à ronchonner si j’arrêtais de te conduire à tes soirées ou à tes clubs, si je ne te faisais plus le dîner et si je ne lavais plus tes affaires.

— Alors tu fais quoi pendant que Lena fait ton boulot ?

— Et puis je m’occupe de réaménager cette maison. Qui semble te satisfaire, je me trompe ? OK, qu’est-ce que tu vas faire dans le court laps de temps qui te reste avant le départ ? Pourquoi ne vas-tu pas voir Christo ? Tu vas lui manquer. »

Josh s’est assis devant son ordinateur. « Dans une seconde. Je veux d’abord regarder ce nouveau jeu. Ça vient juste de sortir.

— C’est pour cette raison que ça va te faire du bien de partir. Sans quoi tu passerais deux semaines dans le noir devant un écran. Mais pendant que tu es là tu pourrais en profiter pour enlever tes draps et les mettre devant la porte afin que Mary les récupère. » Silence. J’ai fait un pas vers le couloir, mais je me suis arrêtée. « Josh ? » Silence. « Je vais te manquer ? Oh pour l’amour du ciel, Josh ! » Je criais à présent.

Il s’est tourné, l’air morose. « Quoi ?

— Non, rien. »

Je l’ai laissé se replonger dans une espèce de combat à mains nues où chaque coup échangé faisait le bruit d’un arbre qui s’écrase.

 

J’ai serré Harry dans mes bras, même s’il semblait penser qu’à onze ans on est beaucoup trop vieux pour ce genre d’effusion, se raidissant à mon contact. C’est un enfant vivant, très loin de l’humeur maussade de son aîné, Dieu merci. Il me ressemble, il n’est pas du genre à broyer des idées noires. Cela se voit rien qu’à le regarder, avec ses cheveux châtains bouclés, son nez retroussé et ses jambes trapues. Josh faisait penser à un maigre échalas à ses côtés, avec son cou maigrichon jaillissant de sa chemise neuve trop grande. Je l’ai embrassé sur la joue. « Amuse-toi bien, Josh, je suis sûre que tout va bien se passer.

— Maman…

— Mes chéris, il faut que vous filiez, votre père vous attend dans la voiture. Soyez sages, ne faites pas de bêtises. À dans trois semaines. Au revoir mes petits chéris, au revoir. » Je suis restée sur le perron à agiter la main jusqu’à ce qu’ils aient disparu.

« Allez viens, Chris, nous allons être tout seuls tous les deux pendant les trois semaines qui viennent.

— Avec Lena.

— Oui, bien sûr, il ne faut pas oublier Lena. Au fait, Lena ne va pas tarder à t’emmener au zoo, avec ton pique-nique. Maman a beaucoup de travail aujourd’hui. »

 

J’avais beaucoup à faire pour ce misérable dîner que Clive m’avait mis sur les bras. Je ne me rappelais plus quand je m’étais retrouvée seule à la maison pour la dernière fois. C’était étrangement calme, plein d’échos. Plus de Josh ni de Harry, plus de Chris ni de Lena, plus de Clive, de Mary, de Jeremy, de Léo ou de Francis. Pas de coups de marteau, d’ouvriers qui sifflotaient en tartinant les plâtres de peinture, pas de coups de sonnette pour annoncer une livraison de gravier, de frises de papier peint ou de fil électrique. Enfin, j’étais presque seule. Lynne était toujours fourrée quelque part, comme une abeille qui venait de temps à autre bourdonner dans une pièce avant de repartir.

Cette maison était devenue un véritable chantier de construction, ce qui était déjà suffisamment désagréable. À présent, c’était un chantier abandonné : les murs de la chambre d’amis étaient à moitié tapissés, des lattes de planchers gisaient, prêtes à être posées, dans la pièce destinée un jour à devenir le salon, des bâches étalées dans la salle à manger attendaient une séance de peinture qui allait désormais tarder. Un jardin plein de mauvaises herbes et de trous. La police n’était peut-être pas capable de mettre la main sur l’homme qui m’importunait, mais en tout cas on peut dire qu’elle avait bien réussi à bloquer mes projets personnels. Et ce Dr Schilling m’avait mise dans une jolie rogne.

Elle était revenue me voir. Elle m’avait servi une nouvelle dose de cette insupportable expression grave et attentive – je parierais qu’elle s’y entraîne devant sa glace. Elle était repartie à l’assaut de ma vie sans ménagement, et que je te gratte, et que je te gratte, à propos de Clive, des hommes en général. Elle dit que ça entre dans le cadre normal de l’enquête. J’ai parfois l’impression qu’elle se fiche pas mal du coupable. Ce qu’elle voudrait vraiment, ce serait résoudre mes autres problèmes. Me transformer. Pour mettre qui à la place ? Elle, j’imagine. Je brûle de lui dire que je ne suis pas une porte qui s’ouvrira un beau jour pour révéler quelque jardin enchanté caché au fond de mon cœur. Désolée. Je suis ce que je suis, un point c’est tout : Jenny Hintlesham, femme de Clive, mère de Josh, d’Harry et de Chris. C’est à prendre ou à laisser. D’ailleurs, j’aimerais autant qu’elle me laisse, qu’elle me laisse tranquillement continuer à vivre ma vie.

 

Je n’aime pas particulièrement faire la cuisine mais j’adore préparer des dîners, enfin, si j’ai beaucoup de temps devant moi. Ce jour-là j’avais tout le temps imaginable. Lena ne serait pas de retour avant cinq heures et Clive irait directement de l’aéroport jusqu’à un terrain de golf. J’avais feuilleté mes livres de cuisine, qui se trouvent encore dans un carton sous les escaliers. À cause de la chaleur, j’avais décidé de sélectionner un vrai menu d’été : frais, croquant, sain, accompagné de généreuses rasades d’un bon vin blanc. Je réserverais les canapés aux champignons sauvages pour la dernière minute ; j’avais déjà préparé le gaspacho la veille au soir, pendant que Clive était devant la télévision. Je pouvais maintenant m’attaquer au plat principal – des rougets nappés d’une sauce à la tomate et au safran, à servir froid. J’ai commencé par la sauce, qui n’est rien d’autre qu’une riche mixture italienne, composée d’huile d’olive, d’oignon, d’herbes du jardin (au moins Francis avait eu le temps d’aménager le carré de plantes aromatiques avant que tout soit mis en stand-by), de beaucoup d’ail et de tomates pelées et épépinées. Une fois le tout réduit en une sauce bien épaisse, on ajoute du vin rouge, une goutte de vinaigre balsamique ainsi que quelques pistils de safran. J’adore le safran. J’ai déposé les six rougets dans un long plat avant de les recouvrir de la sauce. Il fallait juste qu’ils cuisent à feu moyen une petite demi-heure, suite à quoi je pourrais les mettre à refroidir dans le garde-manger.

Pour le dessert, j’avais prévu de faire une grande tarte aux abricots. Elle fait toujours très bel effet, d’autant que les abricots sont splendides à cette époque de l’année. J’ai étalé la pâte feuilletée (je l’avais achetée toute faite, il y a quand même des limites) que j’ai placée dans un plat à tarte. Puis j’ai préparé la frangipane à l’aide d’amandes pilées, de sucre glace, de beurre et d’œufs. Ceci fait, je l’ai étendue sur la pâte. Enfin, j’ai découpé les abricots en deux avant de les poser sur le dessus. Et voilà. Vingt-cinq minutes à four chaud. Ce serait parfait avec une bonne cuillerée de crème fraîche. Le vin et le champagne étaient déjà au frigo. J’avais découpé des mini cônes de beurre. Il me faudrait aller chercher les petits pains bruns dans l’après-midi. Je préparerais la salade verte juste avant que nous passions à table.

Nous allions devoir manger dans la cuisine, client important ou pas, mais j’ai ressorti le paravent chinois afin de diviser la pièce en deux. J’ai caché la table sous notre belle nappe de dentelle blanche, celle que ma cousine nous avait offerte pour notre mariage. Avec nos couverts en argent et un gros bouquet de roses orange et jaunes disposées dans un vase de verre, le résultat improvisé s’est avéré remarquable.

J’avais également invité Emma et Jonathan Barton. Dieu sait ce qu’on pouvait attendre de ce Sébastian et de sa femme. Je m’imaginais un gros banquier de la City au ventre rebondi et au nez strié de veinules brisées, accompagné d’une épouse endurcie, ambitieuse, vêtue d’un tailleur cassant, une femme aux cheveux blondis artificiellement, un peu lourde au niveau des hanches. Je n’envie pas ce genre de femmes, même si elles se montrent souvent condescendantes à mon égard.

Je voulais être belle ce soir-là. Emma Barton avait les hanches rondes, une forte poitrine, des lèvres pleines qu’elle maquille toujours d’un rouge vif, même le matin quand elle accompagne ses enfants à l’école. Elle me paraît un peu voyante, mais les hommes semblent sans conteste l’apprécier. Le problème, c’est qu’elle commence à prendre un peu de bouteille. Elle a probablement mon âge, peut-être même quelques années de plus. Or faire la moue et se tortiller sans cesse passe très bien quand on a vingt ou trente ans, mais quand arrive la quarantaine, ça devient ridicule, et à cinquante ans c’est franchement pathétique. Nous connaissons les Barton depuis toujours. Il y a dix ans, lui était plein d’attentions, terriblement possessif, mais ces derniers temps il m’était arrivé de voir son regard glisser vers des femmes ayant exactement la même allure qu’Emma à l’époque.

À six heures, j’ai pris un long bain et me suis lavé les cheveux. J’ai entendu la porte s’ouvrir en bas, puis Lena rentrer en compagnie de Chris. J’ai enfilé un peignoir avant de m’asseoir devant mon miroir. J’allais mettre beaucoup de maquillage ce soir. Pas seulement du fond de teint, mais du blush sur les pommettes, une ombre à paupières gris-vert, un eye-liner gris foncé, mon cher dissimulateur de rides, du rouge à lèvres prune, une goutte de mon parfum favori derrière les oreilles et au creux des poignets – je m’en aspergerais à nouveau plus tard. D’habitude, entre les plats, je monte dans ma chambre faire quelques retouches à mon visage et me remettre un peu de parfum. Cela me donne du courage.

J’ai choisi une longue robe noire à fines bretelles par-dessus laquelle j’ai passé un haut en dentelle bordeaux souligné de velours noir à l’encolure et aux poignets, une tunique très raffinée que j’avais achetée une petite fortune en Italie. Des escarpins à talons. Mon tour de cou et mes boucles d’oreilles en diamants. Je me suis examinée dans la glace, en tournant lentement pour me voir sous tous les angles. Personne ne pourrait croire que j’avais presque quarante ans. Cela demande beaucoup d’efforts de rester jeune.

J’ai entendu Clive rentrer. Il fallait que j’aille souhaiter une bonne nuit à Chris, m’assurer qu’il était bien installé avant que tout le monde n’arrive. Est-ce que j’avais bien pensé à mettre les chocolats sur le buffet ?

Chris avait pris un coup de soleil, il était agité. Je l’ai autorisé à écouter une cassette de Roald Dahl avec la veilleuse allumée, en priant pour qu’il ne fasse pas d’histoires pendant le dîner. Clive était sous la douche. Je suis redescendue à la cuisine enfiler un volumineux tablier par-dessus mes atours, puis j’ai étalé le pâté de champignons sur les canapés, ensuite j’ai découpé la laitue, que j’ai mise dans un saladier : juste une salade verte pour accompagner le poisson. L’élégance naît de la simplicité. Le ciel à la fenêtre avait la couleur des framboises. « Un ciel rouge en soirée fait le bonheur des bergers. » Josh et Harry étaient sans doute arrivés à leur camp à présent.

« Salut », a dit Clive. Il avait l’air bronzé et rayonnant dans son costume. Il respirait la réussite.

« Tu es beau. Mais je n’ai jamais vu cette cravate. » Je voulais qu’il me dise combien j’étais chic ce soir.

Il a vérifié son nœud de cravate du bout des doigts. « En effet, elle est nouvelle. »

La sonnette de l’entrée a retenti.

 

Ni Sébastian ni sa femme Gloria ne ressemblaient en rien à mes attentes. Sébastian était grand et arborait une calvitie bien avancée. Il aurait pu sembler distingué, dans un style ombrageux assez hollywoodien, s’il n’avait pas laissé paraître une nervosité palpable. Les manières de Clive à son égard trahissaient un vague soupçon de mépris, un rien de brutalité. Dans un éclair d’intuition, j’ai compris que Clive s’apprêtait à rouler Sébastian avec cette affreuse OPA et que ce dîner n’était qu’une mascarade cruelle pour lui faire croire à son amitié. Gloria, la chasseuse de têtes de la City, était beaucoup plus jeune que son mari. Elle n’avait pas encore trente ans, à mon avis. Et ses cheveux blonds, presque argentés, n’étaient pas le résultat d’une teinture en l’occurrence. Elle avait les yeux bleu pâle, les bras longs et bruns, les chevilles fines, dont l’une était garnie d’une fine chaîne en argent, et elle portait une robe de lin toute simple. Elle n’était pratiquement pas maquillée. À côté d’elle, je me suis sentie trop apprêtée ; quant à Emma, elle paraissait débraillée.

Les trois hommes se sont montrés très attentifs envers Gloria, se tournant légèrement vers elle tandis que nous buvions un verre de champagne dans le patio à demi achevé. Elle savait qu’elle était belle, ne cessant de baisser les cils et de distribuer des sourires énigmatiques. Son rire avait une résonance un peu argentine, comme une cloche délicate.

« Jolie cravate », a-t-elle dit à Clive, en lui adressant un de ses étranges sourires. J’aurais voulu asperger sa robe de vin.

Ils s’étaient à l’évidence déjà rencontrés. Certes, j’imagine que c’était à prévoir, étant donné leurs métiers respectifs. Sébastian, Clive, Jonathan et elle ont vite formé un groupe et discuté de l’indice Footsie, des marchés futurs, tandis qu’Emma et moi sommes restées plantées à côté comme deux bécasses.

« J’ai toujours trouvé le nom de Footsie très amusant », ai-je dit d’une voix forte, déterminée à me faire remarquer.

Gloria s’est poliment tournée vers moi. « Vous travaillez à la City ? m’a-t-elle demandé, sachant bien qu’il n’en était rien.

— Moi ! Seigneur, non. » J’ai éclaté d’un rire marqué avant de prendre une gorgée de champagne. « Je ne suis pas même capable de compter mes points au bridge. Non, Clive et moi avons décidé qu’une fois que nous aurions des enfants j’arrêterais de travailler en dehors de la maison. Vous avez des enfants ?

— Non. Que faisiez-vous auparavant ?

— J’étais mannequin.

— De mains surtout », a rectifié Emma. Une vraie amie.

« Vous avez de belles mains », a remarqué Sébastian avec une certaine raideur.

Je les ai agitées devant tout le monde. « Elles ont fait ma fortune. À l’époque je portais des gants en permanence, même pendant les repas. Parfois je ne les enlevais même pas pour aller me coucher. C’est fou, non ? » Jonathan nous a resservi du champagne. Gloria a chuchoté quelque chose à l’oreille de Clive, qui l’a regardée en souriant. À l’étage, Chris s’est mis à pleurer. J’ai avalé mon champagne d’un coup.

« Vous voudrez bien m’excuser. Continuez sans moi. Le devoir m’appelle. Je vous dirai quand le dîner sera prêt. Je vous en prie, reprenez des canapés. »

J’ai retourné la cassette de Chris, que j’ai de nouveau embrassé, puis je lui ai dit que s’il me faisait encore monter je serais fâchée. Sur ce, j’ai fait un tour dans notre chambre. Je me suis remis du rouge à lèvres, donné un coup de brosse et aspergé le décolleté d’un peu de parfum. Je me sentais légèrement grise. J’aurais voulu m’allonger sur le lit, me glisser entre les draps propres, bien repassés. Et seule, par pitié.

J’ai bu de l’eau gazeuse avec le gaspacho, mais ensuite j’ai pris un peu d’un délicieux chardonnay avec le poisson, un verre de bordeaux avec le brie, un vin sucré très agréable avec la tarte aux abricots. Le café m’a donné un petit sursaut de clarté dans les vapeurs de l’ébriété.

 

« Quelle manipulatrice », ai-je remarqué à l’attention de Clive une fois la soirée terminée, tandis que je me démaquillais à l’aide d’un coton et qu’il se brossait les dents.

Il s’est soigneusement rincé la bouche. Il m’a regardée, un œil ouvert, l’autre fermé. « Tu es saoule. »

Soudain, j’ai été prise d’un fantasme tout à fait déconcertant : j’ai eu envie de le gifler, de lui enfoncer mes ciseaux à ongles dans le ventre. « N’importe quoi ! me suis-je esclaffée. Je suis juste éméchée, mon chéri. Il me semble que tout s’est très bien passé, n’est-ce pas ? »