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QUATORZE

Mélopées

I

Il fallut quatre heures de plus pour sécuriser Hinzerhaus. Une poignée de soldats du Pacte du Sang, incapables de se replier avec le gros de leurs forces, s’étaient retranchés dans des pièces inutilisées et au bout de couloirs isolés, et résistèrent jusqu’au bout aux équipes qui les découvrirent. Aucun d’eux ne mourut sans s’être battu. De toutes les pertes subies par les Fantômes en ce jour, c’étaient les plus cruelles, pensait Rawne. La bataille était terminée et ses hommes mouraient encore.

Ses hommes. Cette idée lui donnait le tournis. Après tout ce temps, ils étaient ses hommes.

II

Quand la nuit tomba, les féroces vents de Jago commencèrent à hurler autour de la maison et provoquèrent la pire tempête de poussière que cet horrible caillou eût infligée aux Fantômes jusque-là. La poussière s’insinua à travers la moindre fissure des volets, malgré les efforts déployés pour les colmater. Les bourrasques gémissaient dans les couloirs et les galeries, chassaient la fumée, faisaient frissonner les troupes. Elles gémissaient, comme affligées d’un terrible chagrin, le gémissement de désespoir d’une veuve ou d’un orphelin.

Quelque part au milieu de ce vacarme, tard la nuit, une cornemuse de Tanith retentit. Hark entendit sa musique, plaintive et nette. Son lit avait été déplacé dans une pièce latérale lorsque le dispensaire avait atteint sa capacité maximale. La douleur avait fini par avoir raison de lui : il était resté debout trop longtemps. La chair de son dos palpitait.

Lorsqu’il entendit la cornemuse, il essaya de se lever. Une main légère se posa sur son épaule et une voix lui ordonna de rester tranquille.

— J’entends de la musique, protesta-t-il.

— C’est Caober, dit Ana Curth.

— Caober ne joue pas, dit Hark. Plus personne ne joue de la cornemuse de Tanith.

— Caober en avait une vieille, et il en joue en ce moment même.

Hark tendit l’oreille et se rendit compte que ce n’était pas la mélodie qui l’avait hanté. Le cornemuseux était du reste très médiocre, à en juger par ses fausses notes et l’irrégularité du tempo. Apparemment, c’était quelqu’un qui n’avait pas joué depuis très longtemps.

Il jouait ce vieil air, la chanson de marche traditionnelle des Tanith, mais si lentement que ça en devenait une plainte, une mélopée.

— Ils savent, dit Hark.

— Tout le monde sait, répondit Curth.

III

Rawne entra dans la pièce qui avait été les quartiers de Gaunt. Des cartes étaient étalées sur le bureau, et le paquetage du Colonel-commissaire reposait contre un mur. Quelques objets personnels émaillaient l’ensemble : une plaque de données, une brosse à boutons, une boîte d’huile à polir, un quart en étain. Un sac de couchage était soigneusement étalé sur le lit étroit. Une paire de chaussettes en grand besoin de rafistolage avait été abandonnée près d’un des pieds du lit.

Rawne posa l’épée énergétique sur le bureau et se laissa tomber sur la chaise. Il s’empara du quart et le posa devant lui. Il sortit sa gourde, dévissa le bouchon, et remplit le récipient jusqu’à mi-hauteur.

Ils avaient de l’eau, désormais, une petite victoire passée presque inaperçue parmi les horreurs de la journée. Ludd et Beltayn étaient si fiers de leur réussite ; Rawne n’avait pris aucun plaisir à gommer leur sourire et à piétiner leur triomphe.

Les équipes de Fantômes avaient mis trois heures à rapatrier les barils dans la maison. Une partie de la cargaison était perdue, mais il y avait assez d’eau pour des rations complètes, assez pour laver les blessures et nettoyer les corps, assez pour diluer la poudre contraseptique qui soulagerait les yeux irrités ou aveuglés par la poussière.

Rawne prit une gorgée d’eau. Elle avait le goût du désinfectant, des barils du Munitorum, aucun goût. Quelqu’un frappa à la porte.

— Entrez.

Baskevyl passa la tête dans l’embrasure.

— Les rapports de compagnie arrivent, Major, dit-il. Listes des pertes et rapports des défenses.

— Rassemblez-les pour moi, je vous prie, et apportez-les-moi.

Baskevyl hocha la tête. Il n’avait pas évoqué Gaunt de toute la nuit, ni fait de commentaire sur la promotion de Rawne. Dans n’importe quelles autres circonstances, Baskevyl aurait été un candidat plus que valable. Mais Rawne savait que Baskevyl comprenait : ce devait être Rawne. Le nouveau commandant devait être un Tanith.

— Berenson voudrait vous parler, ajouta Baskevyl.

— Demandez-lui de patienter.

— Bien, Major.

Baskevyl referma la porte derrière lui.

Rawne prit une nouvelle gorgée d’eau. Il était comme engourdi, mais douloureusement conscient qu’il n’avait pas la moindre idée de ce qu’il était censé faire. Il avait du mal à réfléchir.

— Merci beaucoup, lança-t-il à l’épée énergétique posée sur le bureau, comme s’il s’agissait de Gaunt. Merci beaucoup de me laisser tout ce merdier à gérer.

Rawne était incapable d’entrevoir une issue heureuse à leur situation. Un autre assaut comme celui qu’ils venaient d’essuyer, et c’en serait fini. Gaunt lui avait transmis les instructions de Van Voytz. Occupez-les. Autrement dit : Mourez sur place.

Quelqu’un frappa, encore.

— Pas maintenant ! cria Rawne.

Hlaine Larkin entra en boitant et referma la porte.

— Tu es sourd ? grogna Rawne.

Larkin secoua la tête.

— Seulement désobéissant, répondit-il.

Il gagna le bureau et s’assit en face de Rawne. Sa prothèse le faisait visiblement souffrir ; il cillait à chaque pas, et soupira en s’asseyant.

— Finissez votre eau, dit-il.

Rawne hésita, puis avala le fond de son quart.

— Tu es venu pour une raison particulière ? demanda-t-il.

— Une raison particulière ? Non. La faute à un ange ? C’est ce que je me dis. Vous et moi, Eli. Il n’y en a plus beaucoup des comme nous, à présent. De moins en moins à chaque jour qui passe. Vous vous souvenez des champs de la Fondation, près de Tanith Magna ?

— Oui.

— On dirait que c’était il y a très longtemps, dit Larkin en sortant son quart de sa poche.

C’était il y a longtemps, pauvre crétin.

Larkin s’esclaffa.

— Cette rangée de tentes. Il y avait moi et Bragg, et vous, Feygor, Corbec. Tous embarqués pour une vie dans la Garde. Jeunes, stupides, pleins d’énergie et de connerie. Prêts à voir la galaxie brûler.

Rawne eut un léger sourire.

— Prêts à voir la galaxie brûler et à suivre un connard d’étranger appelé Gaunt. Et maintenant, regardez-nous. Bragg est parti depuis très longtemps, Feygor, ce cher vieux Colm, qui donnait toujours l’impression qu’il vivrait pour toujours. Merde, moi-même, je ne suis plus tout à fait là, pas autant que je le voudrais en tout cas.

Le sourire de Rawne s’élargit.

— Juste cette petite rangée de tentes, continua Larkin en tirant quelque chose d’autre de sa poche. Et on est tout ce qu’il en reste. Ça fait de nous des veinards, ou tout le contraire ?

— Je parierais sur le contraire.

Larkin hocha la tête et ouvrit la petite flasque qu’il venait de produire. Il versa une mesure du liquide qu’elle contenait dans leurs quarts respectifs.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda Rawne.

— Du très bon, voilà ce que c’est, répondit Larkin.

Rawne prit son quart et le renifla avec suspicion.

— C’est du sacra, constata-t-il.

— Pas seulement du sacra. Goûte.

Rawne but une gorgée. Un sourire hanté se figea sur son visage.

— Vieux salaud, dit-il. Tout ce temps-là, tu as gardé une bouteille de la cuvée de Bragg !

— Non, répondit Larkin, mais tu ne me croirais pas si je te disais d’où elle vient vraiment.

Il but une gorgée à son tour.

— C’est une cuvée spéciale, pour une occasion spéciale.

Larkin se leva. Un toast traditionnel de Tanith se faisait toujours en trois parties.

— Aux vieux Fantômes, dit-il.

Ils trinquèrent et burent.

— À notre survie, dit Rawne.

Ils trinquèrent encore. L’alcool descendait tout seul, comme du velours et de la glace liquide.

Larkin et Rawne se regardèrent.

— À Ibram Gaunt, dirent-ils au même moment.

— Puisse l’Empereur protéger son âme immortelle, ajouta Larkin.

Ils trinquèrent une dernière fois et vidèrent leurs quarts.

IV

Rawne dormait sur le lit qui avait été celui de Gaunt. Il ne remua même pas lorsqu’Eszrah se glissa dans la pièce. Le Nihtgane gagna le bureau et s’assit. Il fixa l’épée énergétique posée sur le bureau.

C’était les dernières heures de la nuit, le calme qui précède l’aube. Le vent tourbillonnait dans la forteresse. Nahum Ludd, les yeux rouges et larmoyants, avait soigneusement expliqué à Eszrah ce qu’il s’était passé, usant des bribes de l’archaïque langue du partisan qu’il avait studieusement apprises.

Eszrah s’était contenté de hocher la tête sans autre réaction. Après quoi, il s’était éloigné doucement, laissant Ludd à son malheur.

Les Somnambules ne trahissaient jamais leurs émotions. Cela faisait partie de leurs traditions. Il n’y avait ni larmes, ni chagrin, ni deuil pour un Nihtgane de Géréon. C’eut été une perte de temps.

Eszrah ap Niht comprit qu’il avait échoué. Il n’avait pu obéir aux dernières instructions que son père lui avait données. L’homme à qui son père l’avait donné était mort parce qu’il n’avait pas réussi à le protéger.

Par conséquent, Eszrah était mort, lui aussi. Il n’était plus qu’un paria humilié, déshonoré. Il ne comprenait pas pourquoi les autres Fantômes continuaient à lui adresser la parole, ni à tenir compte de sa présence. Ils avaient pourtant constaté sa disgrâce et compris que la seule chose qui attendait Eszrah, désormais, était le daeda waeg, la Voie des Cadavres. Sa vie n’avait plus aucun but, hormis celui de faire pénitence pour les torts qu’il avait laissé se produire.

Eszrah passa les doigts sur la lame de l’épée énergétique. Il savait ce qu’il devait faire : retrouver le corps pour l’enterrer et venger sa mort au décuple.

Il ôta les lunettes que Varl lui avait données bien des mois plus tôt et les posa sur le bureau. Il allait avoir besoin de voir clairement, comme un chat en chasse dans les ténèbres. Il prit son reynbow et, après réflexion, l’épée énergétique. Eszrah n’avait rien d’un bretteur, mais la nature de l’arme et son propriétaire tenaient une part importante dans le rituel. Il fallait que ce fût l’arme du mort.

Rawne renifla dans son sommeil et se retourna. Il ouvrit les yeux.

Il était seul dans la pièce.

V

— Je ne te demande qu’une chose, souffla Dalin dans un murmure. Ne meurs pas. S’il te plaît, ne meurs pas toi aussi.

Il était assis au chevet de Tona Criid, la tête appuyée contre la sienne. Elle ne bougeait pas.

— Reviens-moi. Caff ne reviendra pas, je le sais, mais toi, tu peux. Merde, oui, tu peux.

Tona demeurait inerte, la bouche mollement ouverte.

Des bruits retentirent dans le dispensaire. Les médecins étaient encore à l’œuvre et s’occupaient des derniers patients, ceux dont les blessures étaient les moins graves. Des infirmiers couraient de-ci, de-là, chargés de matériel, de pansements propres et de cuvettes d’eau.

— Ça ira, Dalin, dit une voix masculine. Elle va s’en tirer.

Dalin leva les yeux pour découvrir le major Kolea, debout à côté de lui.

— Major, dit-il en faisant mine de se lever.

— Repos, petit, dit Kolea.

Dalin savait que le Major était proche de sa mère et de Caff. Il y avait chez lui quelque chose de rassurant, mais aussi d’inquiétant. Kolea traitait Dalin bizarrement, pas comme Meryn et les autres trous du cul, qui respectaient trop ostensiblement le souvenir de Caffran. Kolea rappelait à Dalin quelqu’un qu’il avait connu sur Verghast, avant la guerre, un oncle ou un ami de la famille.

— Est-ce que ma mère vous connaissait, Major ? demanda-t-il.

— Quoi ?

— Ma mère naturelle, pas Tona. À Vervun, là où je suis né. Vous êtes verghastite. Vous connaissiez ma famille ?

Kolea haussa les épaules.

— Oui.

— Vraiment ?

— Je la connaissais très bien.

— Pourquoi ne pas m’en avoir parlé plus tôt, Major ? Je n’ai que des souvenirs flous de cette époque, mais si vous les connaissiez…

— Ça fait longtemps, Dalin, dit Kolea d’une voix grave. Tona a été ta mère le temps qu’il a fallu.

— Je sais, mais… Comment étaient-ils, ma mère et mon père ? Vous les connaissiez. Comment étaient-ils ?

Kolea se détourna, mais ne partit pas.

— Ils t’aimaient, dit-il. Toi et Yoncy, très fort. Et ils seraient fiers de savoir qu’une femme comme Tona s’est occupée de vous et vous a protégés.

— Ils sont morts pendant la guerre, n’est-ce pas ? Mes parents. Ils sont morts pendant la guerre de Vervun ?

— Ils sont morts pendant la guerre, répondit Kolea.

VI

La onzième aube se leva en catimini. La violence de la tempête de poussière éclipsait la lumière du soleil et prolongeait la nuit. Le gémissement sifflant, presque vrombissant du vent et de la poussière bourdonnait dans les couloirs et les tunnels.

— Au moins, ils ne vont pas revenir au milieu de ça, remarqua Berenson en acceptant la tasse de caféine que lui tendait Baskevyl.

— Parce que ? demanda ce dernier.

Berenson haussa les épaules, oubliant un instant qu’il avait un bras en écharpe, et cilla de douleur.

— Il n’y a aucune visibilité. Ce serait de la folie.

— Aviez-vous déjà affronté les hommes du Pacte du Sang, Major ? demanda Baskevyl en sirotant sa tasse sans cesser d’étudier les transcriptions que son ordonnance lui avait remises.

— C’était la première fois, reconnut Berenson.

— Et avez-vous surpris, chez eux, quelque chose qui laisserait penser qu’ils sont sains d’esprit ?

Berenson ne répondit pas.

— Ils peuvent revenir à tout moment, tempête ou non, poussière ou non, poursuivit Baskevyl. Contrairement à nous, ils ne laisseront rien les arrêter.

— Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? demanda Berenson.

— Je veux dire que vos renforts sont censés arriver dans les deux jours qui viennent, dit Rawne en les rejoignant dans le hall principal. Mais cette tempête va forcément les ralentir.

Berenson fronça les sourcils. L’expression ressemblait de manière inquiétante à celle qu’adoptait Caffran lorsqu’on mettait en doute son honneur.

— Oh, détendez-vous, dit Rawne en se servant un peu de caféine. Je ne voulais pas insulter la réputation ou l’efficacité de votre régiment. La poussière va ralentir toute progression mécanisée. Aucun commandant impérial n’accepterait d’avancer à l’aveuglette. Pas s’il est sain d’esprit.

— Je vous renvoie à ma précédente remarque, glissa Baskevyl à Berenson.

Kolea, Mkoll, Daur, Theiss et Kolosim arrivèrent dans le hall principal, suivis de près par Sloman, Kamori et Meryn. Rawne attendit quelques minutes, jusqu’à ce que tous les chefs de compagnie fussent réunis autour de lui.

— Commençons, dit-il. Munitions ?

— Pas terrible, Major, dit Arcuda. Il nous reste à peu près 48 % de nos réserves. Pour l’instant, on ne manque pas de cellules standards, et on peut en bricoler si besoin. Mais hier, nous n’avons pas lésiné sur les munitions solides, les charges et les roquettes.

— On va manquer de canons pour les long-las, aussi, intervint Larkin.

— Demande un ravitaillement, dit Rawne à Beltayn, qui prenait des notes. Sois très précis sur ce dont nous avons besoin.

— Les cargos ne nous trouveront jamais au milieu de cette tempête, dit sombrement Kamori.

— Et s’ils nous trouvent… commença Kolea.

— S’ils nous trouvent, quoi ? demanda Rawne.

Kolea fit la grimace.

— Larguer de l’eau dans la cour était une chose. Mais des munitions ? Des charges et des explosifs ? Ça pourrait rapidement tourner à la putain de mauvaise idée.

— Tout comme rester sur nos culs sans armes d’appui ni puissance de feu lourde, rétorqua Rawne, et c’est ce qui arrivera si on subit une autre attaque comme celle d’hier. Les fusils et les lames ne suffiront pas à décourager un nouvel assaut.

— Peut-être peut-on trouver une ZA alternative ? proposa Daur. Du moment que la tempête cesse, bien sûr.

— Commencez à plancher sur la meilleure façon de récupérer des munitions en toute sécurité, conclut Rawne. Beltayn, demande le ravitaillement.

— Oui, Major.

— Que donnent les transmissions radio, au fait ?

— Pour l’instant, on n’arrive pas à joindre Elikon, ni… ni qui que ce soit. Les conditions atmosphériques sont trop mauvaises. Je vais continuer à essayer.

— C’est ça, dit Rawne. Et essaye de joindre les troupes mécanisées du major Berenson, aussi, je te prie. Une estimation de leur heure d’arrivée serait appréciable.

— Oui, Major.

Rawne prit une autre gorgée de caféine, savourant cette première boisson chaude depuis des jours, puis s’éclaircit la gorge.

— L’ordre du jour est de sécuriser et tenir. Nous devons rester vigilants à tout prix. Vous connaissez tous votre place et votre poste. Je veux que la moindre ouverture, la moindre meurtrière et la moindre cave de cette putain de maison soient fermées. Tout contact et toute tentative d’intrusion doivent être repoussés avec notre manque de tolérance habituel. Un autre assaut direct nous ferait beaucoup de mal, mais j’ai le pressentiment qu’ils peuvent tenter d’entrer à la sournoise.

Les officiers hochèrent la tête.

— Relayez à vos hommes. Que ça soit limpide, continua Rawne. Je sais que l’ambiance n’est pas à la joie, mais il va falloir être deux fois plus dur, maintenant. Je ne veux pas d’excuses. Veillez à ce que vos soldats comprennent bien que tout manquement aujourd’hui signifiera que Gaunt est mort pour rien.

Il y eut un silence gêné. Varl inspira une bouffée d’air entre ses dents pour marquer sa désapprobation.

— Vous pensez que je manque de tact ? demanda Rawne. Alors, c’est qu’aucun de vous ne me connaît bien. Je ne perdrai pas de temps parce qu’eux non plus ne perdront pas de temps. Et avant que quelqu’un ne me pose la question, c’est ce qu’il aurait voulu.

Mkoll hocha la tête.

— J’en doute pas un instant, glissa-t-il.

— Bien, dit Rawne. Qui sécurise le nouveau secteur ?

— La compagnie deux, sous mes ordres, répondit Baskevyl.

— Je le veux nettoyé et verrouillé d’ici trois heures, dit Rawne.

— À moins, bien sûr, qu’on ne trouve de nouveaux secteurs au-delà de ce nouveau secteur, répondit Baskevyl.

— Évidemment. Prenez Beltayn. Je veux un rapport complet sur la bibliothèque et l’arsenal, je vous prie.

Baskevyl acquiesça.

— Alors, au travail, dit-il.

Les officiers hésitèrent un instant. Rawne les dévisagea et soupira.

— Ah, et l’Empereur vous garde et vous allez vivre pour toujours et tout le tintouin… dit-il en agitant la main. Je ne suis pas là pour vous remonter le moral ou vous motiver. Rompez.

Les officiers firent mine de partir.

— Une dernière chose, avant que j’oublie, ajouta Rawne.

Tous se retournèrent vers lui.

— Quelqu’un a pris l’épée de Gaunt dans mon bureau, la nuit dernière. Un amateur de souvenirs, j’imagine, ou un crétin sentimental. Je veux la récupérer. Pas d’excuses. Et il y aura des sanctions lourdes pour le coupable.

— Je m’en occupe, Major, dit Hark.

Il s’était glissé au dernier rang du petit groupe au cours de la réunion. Il était en uniforme, gabardine incluse, et s’appuyait sur une béquille faite d’un montant de civière. Il était pâle et souffreteux.

— C’est normal que vous soyez debout ? s’étonna Rawne.

— Non, dit Hark, mais je le suis. La situation ne va pas attendre que je guérisse. Curth m’a administré assez d’analgésiques pour que j’aie l’impression de me retrouver au milieu d’une bande de bons copains bien souriants. Ça ne durera pas, je n’en doute pas. N’attendez pas de discours de ma part, non plus, mais le major Rawne a raison. Il faut faire ce qu’il y a à faire aujourd’hui, et demain, et le surlendemain, sans nous apitoyer sur nous-mêmes. Gaunt aurait détesté que tout aille à vau-l’eau. Ça réduirait à néant tout ce à quoi il a consacré sa vie.

— Tout le monde a pigé ? demanda Rawne. Bien. Rompez.

[Les fantômes de Gaunt - Cycle 3-04] Seule la mort
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