VIII

M. DE MALESHERBES [526]

Un des chapitres de l'Essai sur les Révolutions (Seconde partie, chapitre XVII) a pour titre: M. de Malesherbes. Exécution de Louis XVI. Sur cet exécrable attentat, sur ce crime que la postérité, faisant écho à Joseph de Maistre, appellera, comme lui, Le Grand Crime [527], Chateaubriand a des paroles éloquentes, celle-ci, par exemple: «Fions-nous en à la postérité, dont la voix tonnante gronde déjà dans l'avenir; à la postérité qui, juge incorruptible des âges écoulés, s'apprête à traîner au supplice la mémoire pâlissante des hommes de mon siècle.» Dans une note de ce chapitre, le jeune émigré, le beau-frère de la petite-fille de Malesherbes, parle en ces termes du défenseur de Louis XVI:

Ce que l'on sent trop n'est pas trop toujours ce que l'on exprime le mieux, et je ne puis parler aussi dignement que je l'aurais désiré du défenseur de Louis XVI. L'alliance qui unissait ma famille à la sienne me procurait souvent le bonheur d'approcher de lui. Il me semblait que je devenais plus fort et plus libre en présence de cet homme vertueux qui, au milieu de la corruption des cours, avait su conserver dans un rang élevé l'intégrité du cœur et le courage du patriote. Je me rappellerai longtemps la dernière entrevue que j'eus avec lui. C'était un matin: je le trouvai par hasard seul chez sa petite-fille. Il se mit à me parler de Rousseau avec une émotion que je ne partageais que trop. Je n'oublierai jamais le vénérable vieillard voulant bien condescendre à me donner des conseils, et me disant: «J'ai tort de vous entretenir de ces choses-là; je devrais plutôt vous engager à modérer cette chaleur d'âme qui a fait tant de mal à votre ami (J. S.). J'ai été comme vous, l'injustice me révoltait; j'ai fait autant de bien que j'ai pu, sans compter sur la reconnaissance des hommes. Vous êtes jeune, vous verrez bien des choses; moi j'ai peu de temps à vivre.» Je supprime ce que l'épanchement d'une conversation intime et l'indulgence de son caractère lui faisait alors ajouter. De toutes ses prédictions une seule s'est accomplie, je ne suis rien, et il n'est plus. Le déchirement de cœur que j'éprouvai en le quittant me semblait dès lors un pressentiment que je ne le reverrais jamais.

M. de Malesherbes aurait été grand si sa taille épaisse ne l'avait empêché de le paraître. Ce qu'il y avait de très étonnant en lui, c'était l'énergie avec laquelle il s'exprimait dans une vieillesse avancée. Si vous le voyiez assis sans parler, avec ses yeux un peu enfoncés, ses gros sourcils grisonnants et son air de bonté, vous l'eussiez pris pour un de ces augustes personnages peints de la main de Le Sueur. Mais si on venait à toucher la corde sensible, il se levait comme l'éclair, ses yeux à l'instant s'ouvraient et s'agrandissaient: aux paroles chaudes qui sortaient de sa bouche, à son air expressif et animé, il vous aurait semblé voir un jeune homme dans toute l'effervescence de l'âge; mais à sa tête chenue, à ses mots un peu confus, faute de dents pour les prononcer, vous reconnaissiez le septuagénaire. Ce contraste redoublait les charmes que l'on trouvait dans sa conversation, comme on aime ces feux qui brûlent au milieu des neiges et des glaces de l'hiver.

M. de Malesherbes a rempli l'Europe du bruit de son nom; mais le défenseur de Louis XVI n'a pas été moins admirable aux autres époques de sa vie que dans les derniers instants qui l'ont si glorieusement couronnée. Patron des gens de lettres, le monde lui doit l'Émile, et l'on sait que c'est le seul homme de cour, le maréchal de Luxembourg excepté, que Jean-Jacques ait sincèrement aimé. Plus d'une fois il brisa les portes des bastilles; lui seul refusa de plier son caractère aux vices des grands, et sortit par des places où tant d'autres avaient laissé leur vertu. Quelques-uns lui ont reproché de donner dans ce qu'on appelle les principes du jour. Si par principes du jour on entend haine des abus, M. de Malesherbes fut certainement coupable. Quant à moi, j'avouerai que s'il n'eût été qu'un bon et franc gentilhomme, prêt à se sacrifier pour le roi, son maître, et à en appeler à son épée plutôt qu'à sa raison, je l'eusse sincèrement estimé, mais j'aurais laissé à d'autres le soin de faire son éloge.

Je me propose d'écrire la vie de M. de Malesherbes, pour laquelle je rassemble depuis longtemps des matériaux. Cet ouvrage embrassera ce qu'il y a de plus intéressant dans le règne de Louis XV et de Louis XVI. Je montrerai l'illustre magistrat mêlé dans toutes les affaires des temps. On le verra patriote à la cour, naturaliste à Malesherbes, philosophe à Paris. On le suivra au conseil des rois et dans la retraite du sage. On le verra écrivant d'un côté aux ministres sur des matières d'état, de l'autre entretenant une correspondance de cœur avec Rousseau sur la botanique. Enfin, je le ferai voir disgracié par la cour pour son intégrité, et voulant porter sa tête sur l'échafaud avec son souverain.»

IX

LA CLÉRICATURE DE CHATEAUBRIAND [528]

Il est parfaitement exact que Chateaubriand, en vue d'obtenir son agrégation à l'ordre de Malte, s'est fait donner par l'évêque de Saint-Malo la première tonsure cléricale. Sur un registre de l'ancien évêché de Saint-Malo, destiné à enregistrer les dispenses, démissions, lettres d'ordre, synodes, délibérations du clergé du diocèse et généralement les expéditions quelconques du secrétariat de l'évêché, on trouve à la date du 16 décembre 1788, cette mention: Lettre de tonsure pour M. de Chateaubriand. Suit le texte de la lettre:

Gabriel Cortois de Pressigny miseratione divina et sanctæ sedis apostolicæ gratia Episcopus Macloviensis, etc. Notum facimus quod nos die datæ præsentium in sacello palatii nostri dilectum nostrum nobilem Franciscum-Augustum-Renatum de Chateaubriand, filium Renati-Augusti et dame Apollinæ-Joannæ-Suzannæ de Bedée conjugum, ex parochia et civitate Macloviensi laïcum de legitimo matrimonio procreatum, examinatum capacem et idoneum repertum, ad primam tonsuram clericalem promovendum duximus et promovimus. Datum maclovii sub signo sigilloque nostris et secretarii nostri suscriptione, anno Domini millesimo septingentesima octogesimo die vero decembris decima sexta.

G. Epus Macloviensis.

De Mandato.

Met, secrét.

Voici la traduction:

Gabriel Cortois de Pressigny, par la miséricorde divine et la grâce du Saint-Siège apostolique, évêque de Saint-Malo, etc.

Nous faisons connaître que le jour de la date de ces présentes lettres nous avons promu et nous promouvons à la première tonsure cléricale, dans la chapelle de notre palais, notre cher fils noble François-Auguste-René de Chateaubriand, fils de René-Auguste et de dame Apolline-Jeanne-Suzanne de Bedée, son épouse, laïque de la ville, et paroisse de Saint-Malo, procréé de légitime mariage, examiné et trouvé capable et idoine.

Donné à Saint-Malo sous notre seing et notre sceau et sous la signature de notre secrétaire, l'an du Seigneur mil sept cent quatre-vingt-huit, le 16e jour de décembre.

Signé: G., évêque de Saint-Malo.

Par Mandement:

Met, secrétaire.

X

LE BARON BILLING ET L'AMBASSADE DE LONDRES [529]

En 1834, à l'époque où, dans le salon de madame Récamier, eurent lieu les lectures des Mémoires, le baron de Billing était chargé d'affaires de France à Naples. C'est de cette ville qu'après avoir lu, dans la Revue de Paris, le premier article de Jules Janin; il lui écrivit pour lui signaler un de ces actes de générosité dont Chateaubriand fut coutumier toute sa vie, aux jours de sa détresse comme aux heures de sa prospérité. Parce qu'il a plu à Chateaubriand de toujours se taire sur ces actes-là, ce nous est peut-être une raison d'en faire connaître au moins quelques-uns. Par l'anecdote qu'elle rappelle, par les détails qu'elle contient, la lettre de M. Billing est, d'ailleurs, comme une page tombée des Mémoires; il sied, je crois, de la leur restituer.

Voici cette lettre.

Naples, ce 30 avril 1834.

Monsieur Jules JANIN, à PARIS,

Vous nous avez donné, dans la Revue de Paris, un admirable article sur M. de Chateaubriand; vous nous en promettez un second, et c'est à cette occasion que je vous adresse la présente lettre.....

Vous savez donc que, par un bonheur inespéré, lors de son ambassade à Londres, M. de Chateaubriand voulut bien non seulement m'honorer d'un intérêt, dont j'ai plus tard éprouvé les effets, mais qu'il daigna m'accorder quelque part dans sa confiance. Connaissant ma longue habitude du pays où il venait représenter la France, il avait coutume de remettre entre mes mains, souvent même presque sans examen, les lettres qu'il recevait de l'intérieur de l'Angleterre. Un jour, parmi celles qui composaient cette correspondance pour ainsi dire quotidienne, il s'en trouva une dont l'écriture, la forme même, excitèrent particulièrement mon attention; un certain parfum de femme me fit hésiter longtemps d'en pénétrer le contenu, car je craignais quelque distraction de la part de celui dont la tête, comme celle du père Aubry, n'avait pas toujours été chauve. Enfin, il me sembla que ce papier respirait une odeur de pureté et d'innocence. Je l'ouvris: c'était une de ces lettres charmantes telle que Clarisse l'aurait écrite avant d'avoir rencontré Lovelace. Elle était adressée à M. de Chateaubriand par une jeune femme qu'il avait connue enfant, qu'il avait entièrement perdue de vue depuis lors, mais qui néanmoins (heureux privilège du génie!) conservait encore le nom poétique, dont il l'avait baptisée en badinant. Elle lui rappelait ces jours charmants de sa joyeuse enfance et lui racontait comment, depuis cette époque, elle avait grandi et venait de contracter avec un jeune Clergyman une union qui faisait la félicité de son existence. Elle lui demandait la grâce de paraître devant lui pour lui présenter son mari, mais surtout pour remercier, au nom de ses vieux parents, l'ambassadeur du puissant roi de France, des bienfaits dont l'auteur pauvre, et alors ignoré, de l'Essai sur les Révolutions, les avait jadis comblés: «Vous ne pouvez avoir oublié, disait-elle, que sachant mes parents dans la détresse, vous avez compati à des maux que vous éprouviez vous-même, au point d'abandonner généreusement à vos humbles hôtes tout le produit de l'ouvrage que vous veniez de mettre au jour!»

Quand je rapportai cette lettre à M. de Chateaubriand, et que je lui demandai quel était le jour que je devais indiquer à cette jeune femme pour qu'elle accomplit le devoir dont elle avait à s'acquitter envers lui, sa physionomie se couvrit de cette confusion enfantine que vous lui connaissez: il était confus que même l'un de ses plus sincères admirateurs eût surpris un nouveau trait de son admirable caractère!

Je n'oublierai jamais, monsieur, cette entrevue qui eut lieu peu de jours après, où la jeune Anglaise, pleine de cette chaste assurance de la vertu, remplissant un devoir, portait des yeux calmes et confiants sur le timide représentant d'un grand empire, rougissant de cette sorte de flagrante delicto, où il se trouvait pris. Puis, le mari de la jeune femme, sérieux comme son saint ministère, appelant gravement la bénédiction divine sur le bienfaiteur de la famille de sa femme. Enfin, M. de Chateaubriand, homme alors puissant et entouré des pompes diplomatiques, troublé, éperdu, balbutiant quelques mots d'anglais, de cette voix dont je n'ai retrouvé l'harmonie que dans la bouche de Canning et dans celle de mademoiselle Mars; pour étouffer ce souvenir du bien qu'il avait fait, alors que pauvre, obscur, isolé, il avait généreusement secouru une famille plus pauvre, plus obscure, plus isolée encore que lui!

Je ne sais, monsieur, si ce petit incident inaperçu dans un drame admirable, par une distraction bien naturelle à M. de Chateaubriand, n'aura pas été omis des Mémoires, dont il est si fort question, en ce moment, dans le monde; mais il m'a semblé que c'était surtout à vous qu'il appartenait de réparer cet oubli. Quel parti, si vous le voulez bien, ne saurez-vous pas tirer de tout ce que cette anecdote renferme, à mon gré, de touchant!

Pour mon compte, je serais trop heureux si en la voyant figurer dans le prochain article que nous attendons de vous, j'avais, en la tirant de l'oubli, témoigné à l'homme illustre qui en est l'objet combien la reconnaissance que sa conduite envers moi m'a inspirée, est plus vive aux jours de ce que le monde appelle son infortune, qu'alors qu'il était assis parmi les puissants de la terre!

Recevez, monsieur, l'assurance de mon dévouement et de mes sentiments tout particuliers.

A. Billing.

XI

FRANCIS TULLOCH [530]

Il y a de tout dans l'Essai sur les Révolutions, «cette tour de Babel», comme l'appelle quelque part Chateaubriand [531]. Les Trente Tyrans d'Athènes y coudoient les membres du Comité de salut public et du Comité de sûreté générale. Critias y donne la main à Marat, et Tallien y donne la réplique à Théramènes. Aux massacres d'Eleusine répondent les massacres de Septembre. La campagne de 1792 fait suite à la campagne de l'an III de la soixante-douzième olympiade, et la campagne de 1794 est comme un décalque de la campagne de l'an 479 avant notre ère. Voici pêle-mêle la bataille de Marathon et celle de Jemmapes, le combat de Salamine et celui de Maubeuge, la victoire de Platée et la victoire de Fleurus. Voici, accouplés à tout bout de champ, Miltiade et Dumouriez, Mardonius et le prince de Cobourg, Darius et l'empereur Léopold, Agis et Louis XVI, Pisistrate et Robespierre, Lycurque et Saint-Just, le second chant de Tyrtée et l'Hymne des Marseillais, Épiménide et M. de Flins! Au milieu de ce chaos, traversé par des éclairs de génie, il y a des pages de Mémoires; l'une d'elles est relative à ce Francis Tulloch, que Chateaubriand rencontra sur le navire qui le transportait en Amérique. Cette page, qui confirme d'ailleurs pleinement le récit des Mémoires d'Outre-tombe, est des plus intéressantes, et il me semble bien qu'elle a ici sa place marquée. Racontant, au chapitre LIV de sa seconde partie, son voyage aux Açores, Chateaubriand s'exprime en ces termes:

Manquant d'eau et de provisions fraîches, et nous trouvant au printemps de 1791 par la hauteur des Açores, il fut résolu que nous y relâcherions. Dans le vaisseau sur lequel je passais alors en Amérique, il y avait plusieurs prêtres français qui émigraient à Baltimore, sous la conduite du supérieur de St..., M. N... (l'abbé Nagot). Parmi ces prêtres se trouvaient quelques étrangers, en particulier M. T... (Francis Tulloch), jeune Anglais d'une excellente famille, qui s'était nouvellement converti à la religion romaine.

Et ici, en note, vient l'histoire du jeune Anglais et de ses relations avec le futur auteur du Génie du christianisme, qui, passionnément épris, à cette date, des idées philosophiques de Rousseau, cherche à le mettre en garde contre «les prêtres» et s'efforce de le détacher de «la religion romaine». L'épisode est curieux. On va le lire:

L'histoire de ce jeune homme est trop singulière pour n'être pas racontée, surtout écrivant en Angleterre, où elle peut intéresser plusieurs. J'invite le lecteur à la parcourir avant de continuer la lecture du chapitre.

M. T... était né d'une mère écossaise et d'un père anglais, ministre, je crois, de W. (quoique j'aie fait en vain des démarches pour trouver celui-ci, et que je puis d'ailleurs avoir oublié les vrais noms). Il servait dans l'artillerie, où son mérite l'eût sans doute bientôt fait distinguer. Peintre, musicien, mathématicien, parlant plusieurs langues, il réunissait aux avantages d'une taille élevée et d'une figure charmante les talents utiles et ceux qui nous font rechercher de la société.

M. N..., supérieur de Saint..., étant venu à Londres, je crois, en 1790, pour ses affaires, fit la connaissance de T... A l'esprit rusé d'un vieux prêtre, M. N... joignait cette chaleur d'âme qui fait aisément des prosélytes parmi des hommes d'une imagination aussi vive que celle de T... Il fut donc résolu que celui-ci passerait à Paris, renverrait de là sa commission au duc de Richmond, embrasserait la religion romaine, et, entrant dans les ordres, suivrait M. N... en Amérique. La chose fut exécutée; et T..., en dépit des lettres de sa mère, qui lui tiraient des larmes, s'embarqua pour le Nouveau-Monde.

Un de ces hasards qui décident de notre destinée m'amena sur le même vaisseau où se trouvait ce jeune homme. Je ne fus pas longtemps sans découvrir cette âme, si mal assortie avec celles qui l'environnaient; et j'avoue que je ne pouvais cesser de m'étonner de la chance singulière qui jetait un Anglais, riche et bien né, parmi une troupe de prêtres catholiques. T..., de son côté, s'aperçut que je l'entendais; il me recherchait, mais il craignait M. N..., qui marquait de moi une juste défiance, et redoutait une trop grande intimité entre moi et son disciple.

Cependant notre voyage se prolongeait, et nous n'avions pu encore nous ouvrir l'un à l'autre. Une nuit, enfin, nous restâmes seuls sur le gaillard, et T... me conta son histoire. Je lui représentai que, s'il croyait la religion romaine meilleure que la protestante, je n'avais rien à dire à cet égard; mais que d'abandonner sa patrie, sa famille, sa fortune, pour aller courir à l'autre bout du monde avec un séminaire de prêtres, me paraissait une insigne folie dont il se repentirait amèrement. Je l'engageai à rompre avec M. N...: comme il lui avait confié son argent, et qu'il craignait de ne pouvoir le ravoir, je lui dis que nous partagerions ma bourse; que mon dessein était de voyager chez les sauvages aussitôt que j'aurais remis mes lettres de recommandation au général Washington; que, s'il voulait m'accompagner dans cette intéressante caravane, nous reviendrons ensemble en Europe; que je passerais par amitié pour lui en Angleterre, et que j'aurais le plaisir de le ramener moi-même au sein de sa famille. Je me chargeai en même temps d'écrire à sa mère, et de lui annoncer cette heureuse nouvelle. T..... me promit tout, et nous nous liâmes d'une tendre amitié.

T... était comme moi, épris de la nature. Nous passions les nuits entières à causer sur le pont, lorsque tout dormait dans le vaisseau, qu'il ne restait plus que quelques matelots de quart; que, toutes les voiles étant pliées, nous roulions au gré d'une lame sourde et lente, tandis qu'une mer immense s'étendait autour de nous dans les ombres, et répétait l'illumination magnifique d'un ciel chargé d'étoiles. Nos conversations alors n'étaient peut-être pas tout à fait indignes du grand spectacle que nous avions sous les yeux; et il nous échappait de ces pensées qu'on aurait honte d'énoncer dans la société, mais qu'on serait trop heureux de pouvoir saisir et écrire. Ce fut dans une de ces belles nuits, qu'étant à environ cinquante lieues des côtes de la Virginie, et cinglant sous une légère brise de l'ouest, qui nous apportait l'odeur aromatique de la terre, il composa, pour une romance française, un air qui exhalait le sentiment entier de la scène qui l'inspira. J'ai conservé ce morceau précieux, et lorsqu'il m'arrive de le répéter dans les circonstances présentes, il fait naître en moi des émotions que peu de gens pourraient comprendre.

Avant cette époque, le vent nous ayant forcés de nous élever considérablement dans le Nord, nous nous étions trouvés dans la nécessité de faire une seconde relâche à l'île de Saint-Pierre [532]. Durant les quinze jours que nous passâmes à terre, T... et moi nous allions courir dans les montagnes de cette île affreuse; nous nous perdions au milieu des brouillards dont elle est sans cesse couverte. L'imagination sensible de mon ami se plaisait à ces scènes sombres et romantiques: quelquefois, errant au milieu des nuages et des bouffées de vent, en entendant les mugissements d'une mer que nous ne pouvions découvrir, égarés sur une bruyère laineuse et morte, au bord d'un torrent rouge qui roulait entre des rochers, T... s'imaginait être le barde de Cona; et, en sa qualité de demi-Écossais, il se mettait à déclamer des passages d'Ossian pour lesquels il improvisait des airs sauvages, qui m'ont plus d'une fois rappelé le «'t was like the memory of joys that are past, pleasing and mournful to the soul.» Je suis bien fâché de n'avoir pas noté quelques-uns de ces chants extraordinaires, qui auraient étonné les amateurs et les artistes. Je me souviens que nous passâmes toute une après-midi à élever quatre grosses pierres en mémoire d'un malheureux célébré dans un petit épisode à la manière d'Ossian [533]. Nous nous rappelions alors Rousseau s'amusant à lever des rochers dans son île, pour regarder ce qui était dessous: si nous n'avions pas le génie de l'auteur de l'Émile, nous avions du moins sa simplicité. D'autres fois nous herborisions.

«Mais je prévis dès lors que T... m'échapperait. Nos prêtres se mirent alors à faire des processions et voilà mon ami qui se monte la tête, court se placer dans les rangs, et se met à chanter avec les autres. J'écrivis aussi de Saint-Pierre à la mère de T... Je ne sais si ma lettre lui aura été remise, comme le gouverneur me l'avait promis; je désire qu'elle ait été perdue, puisque j'y donnais des espérances qui n'ont pas été réalisées.

Arrivé à Baltimore, sans me dire adieu, sans paraître sensible à notre ancienne liaison, à ce que j'avais fait pour lui (m'étant attiré la haine des prêtres), T... me quitta un matin et je ne l'ai jamais revu depuis. J'essayai, mais en vain, de lui parler; le malheureux était circonvenu, et il se laissa aller. J'ai été moins touché de l'ingratitude de ce jeune homme que de son sort: depuis ma retraite en Angleterre, j'ai fait de vaines recherches pour découvrir sa famille. Je n'avais d'autre envie que d'apprendre qu'il était heureux, et de me retirer; car, quand je le connus, je n'étais pas alors ce que je suis: je rendais alors des services, et ce n'est pas ma manière de rappeler des liaisons passés avec des riches, lorsque je suis tombé dans l'infortune. Je me suis présenté chez l'évêque de Londres et, sur les registres qu'on m'a permis de feuilleter, je n'ai pu trouver le nom du ministre T... Il faut que je l'orthographie mal. Tout ce que je sais, c'est que T... avait un frère et que deux de ses sœurs étaient placées à la cour. J'ai peu trouvé d'hommes dont le cœur fût mieux en harmonie avec le mien que celui de T...; cependant mon ami avait dans les yeux une arrière pensée que je ne lui aurais pas voulu.»

Lorsque Chateaubriand publia, en 1826, une nouvelle édition de l'Essai, il fit suivre la note qu'on vient de lire des lignes suivantes:

Il n'y a de passable dans cette note que mes descriptions comme voyageur. Il fallait bien, au reste, puisque j'étais philosophe, que j'eusse tous les caractères de ma secte: la fureur du propagandisme et le penchant à calomnier les prêtres. J'ai été plus heureux comme ambassadeur que je ne l'avais été comme émigré. J'ai retrouvé à Londres, en 1822, M. T..., il ne s'est point fait prêtre: il est resté dans le monde; il s'est marié; il est devenu vieux comme moi; il n'a plus d'arrière-pensée dans les yeux: son roman, ainsi que le mien, est fini.

XII

JOURNAL DE VOYAGE [534]

Dans son Voyage en Amérique (Œuvres complètes, tome VI), Chateaubriand a donné quelques fragments de son Journal de route. Ce sont de simples notes, mais où se révèle déjà le grand peintre qu'il sera plus tard. «Rien, dit Sainte-Beuve (Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, t. I, p. 126), rien ne rend mieux l'impression vraie, toute pure, à sa source; ce sont les cartons du grand peintre, du grand paysagiste, dans leur premier jet.»

Voici quelques-unes de ces notes.

Le ciel est pur sur ma tête, l'onde limpide sous mon canot qui fuit devant une légère brise. A ma gauche sont des collines taillées à pic et flanquées de rochers d'où pendent des convolvulus à fleurs blanches et bleues, des festons de bignonias, de longs graminées, des plantes saxatiles de toutes les couleurs; à ma droite règnent de vastes prairies. A mesure que le canot avance, s'ouvrent de nouvelles scènes et de nouveaux points de vue; tantôt ce sont des vallées solitaires et riantes, tantôt des collines nues; ici c'est une forêt de cyprès dont on aperçoit les portiques sombres; là c'est un bois léger d'érables, où le soleil se joue comme à travers une dentelle.

Liberté primitive, je te retrouve enfin! Je passe comme cet oiseau qui vole devant moi, qui se dirige au hasard, et n'est embarrassé que du choix des ombrages. Me voilà tel que le Tout-Puissant m'a créé, souverain de la nature, porté triomphant sur les eaux, tandis que les habitants des fleuves accompagnent ma course, que les peuples de l'air me chantent leurs hymnes, que les bêtes de la terre me saluent, que les forêts courbent leur cime sur mon passage. Est-ce sur le front de l'homme de la société, ou sur le mien, qu'est gravé le sceau immortel de notre origine? Courez vous enfermer dans vos cités, allez vous soumettre à vos petites lois; gagnez votre pain à la sueur de votre front, ou dévorez le pain du pauvre; égorgez-vous pour un mot, pour un maître; doutez de l'existence de Dieu, ou adorez-le sous des formes superstitieuses: moi j'irai errant dans mes solitudes; pas un seul battement de mon cœur ne sera comprimé, pas une seule de mes pensées ne sera enchaînée; je serai libre comme la nature; je ne reconnaîtrai de souverain que celui qui alluma la flamme des soleils, et qui d'un seul coup de sa main fit rouler tous les mondes.

Sept heures du soir.

Nous nous sommes levés de grand matin pour partir à la fraîcheur; les bagages ont été rembarques; nous avons déroulé notre voile. Des deux côtés nous avions de hautes terres chargées de forêts; le feuillage offrait toutes les nuances imaginables: l'écarlate fuyant sur le rouge, le jaune foncé sur l'or brillant, le brun ardent sur le brun léger; le vert, le blanc, l'azur, lavés en mille teintes plus ou moins faibles, plus ou moins éclatantes. Près de nous c'était toute la variété du prisme; loin de nous, dans les détours de la vallée, les couleurs se mêlaient et se perdaient dans des fonds veloutés. Les arbres harmonisaient ensemble leurs formes; les uns se déployaient en éventail, d'autres s'élevaient en cônes, d'autres s'arrondissaient en boule, d'autres étaient taillés en pyramide: mais il faut se contenter de jouir de ce spectacle sans chercher à le décrire.

Midi.

Il est impossible de remonter plus haut en canot: il faut maintenant changer notre manière de voyager; nous allons tirer notre canot à terre, prendre nos provisions, nos armes, nos fourrures pour la nuit, et pénétrer dans les bois. Trois heures.

Qui dira le sentiment qu'on éprouve en entrant dans ces forêts aussi vieilles que le monde, et qui seules donnent une idée de la création telle qu'elle sortit des mains de Dieu? Le jour, tombant d'en haut à travers un voile de feuillage, répand dans la profondeur du bois une demi-lumière changeante et mobile qui donne aux objets une grandeur fantastique. Partout il faut franchir des arbres abattus, sur lesquels s'élèvent d'autres générations d'arbres. Je cherche en vain une issue dans ces solitudes; trompé par un jour plus vif, j'avance à travers les herbes, les mousses, les lianes, et l'épais humus composé des débris des végétaux; mais je n'arrive qu'à une clairière formée par quelques pins tombés. Bientôt la forêt redevient plus sombre; l'œil n'aperçoit que des troncs de chênes et de noyers qui se succèdent les uns aux autres, et qui semblent se serrer en s'éloignant: l'idée de l'infini se présente à moi.

Six heures.

J'avais entrevu de nouveau une clarté et j'avais marché vers elle. Me voilà au point de lumière: triste champ plus mélancolique que les forêts qui l'environnent! Ce champ est un ancien cimetière indien. Que je me repose un instant dans cette double solitude de la mort et de la nature: est-il un asile où j'aimasse mieux dormir pour toujours.

Sept heures.

Ne pouvant sortir de ces bois, nous y avons campé. La réverbération de notre bûcher s'étend au loin; éclairé en dessous par la lueur scarlatine, le feuillage parait ensanglanté, les troncs des arbres les plus proches s'élèvent comme des colonnes de granit rouge, mais les plus distants, atteints à peine de la lumière, ressemblent, dans l'enfoncement du bois, à de pâles fantômes rangés en cercle au bord d'une nuit profonde.

Minuit.

Le feu commence à s'éteindre, le cercle de sa lumière se rétrécit. J'écoute; un calme formidable pèse sur ces forêts; on dirait que des silences succèdent à des silences. Je cherche vainement à entendre dans un tombeau universel quelque bruit qui décèle la vie. D'où vient ce soupir? d'un de mes compagnons: il se plaint, bien qu'il sommeille. Tu vis, donc, tu souffres: voilà l'homme.

Minuit et demie.

Le repos continue: mais l'arbre décrépit se rompt: il tombe. Les forêts mugissent; mille voix s'élèvent. Bientôt les bruits s'affaiblissent; ils meurent dans des lointains presque imaginaires; le silence envahit de nouveau le désert.

Une heure du matin.

Voici le vent: il court sur la cime des arbres; il les secoue en passant sur ma tête. Maintenant c'est comme le flot de la mer qui se brise tristement sur le rivage.

Les bruits ont réveillé les bruits. La forêt est toute harmonie, Est-ce les sons graves de l'orgue que j'entends, tandis que des sons plus légers errent dans les voûtes de verdure? Un court silence succède: la musique aérienne recommence; partout de douces plaintes, des murmures qui renferment eux-mêmes d'autres murmures; chaque feuille parle un langage différent, chaque brin d'herbe rend une note particulière.

Une voix extraordinaire retentit: c'est celle de cette grenouille qui imite les mugissements du taureau. De toutes les parties de la forêt les chauves-souris accrochées aux feuilles élèvent leurs chants monotones: on croit ouïr des glas continus, ou le tintement funèbre d'une cloche. Tout nous ramène à quelque idée de la mort, parce que cette idée est au fond de la vie.

 

TABLE DES MATIÈRES.

 
 

INTRODUCTION.

V
 

PRÉFACE TESTAMENTAIRE.

XLIII
 

AVANT-PROPOS.

LILI
 

PREMIÈRE PARTIE.

 
 

LIVRE PREMIER.

 
  Naissance de mes frères et sœurs. -- Je viens au monde. -- Plancoët. -- Vœu. -- Combourg. -- Plan de mon père pour mon éducation. -- La Villeneuve. -- Lucile. -- Mesdemoiselles Couppart. -- Mauvais écolier que je suis. -- Vie de ma grand'mère maternelle et de sa sœur, à Plancoët. -- Mon oncle, le comte de Bedée, à Monchoix. -- Relèvement du vœu de ma nourrice. -- Gesril. -- Hervine Magnon. -- Combat contre les deux mousses. 1
 

LIVRE II.

 
  Billet de M. Pasquier. -- Dieppe. -- Changement de mon éducation. -- Printemps en Bretagne. -- Forêt historique. -- Campagnes Pélagiennes. -- Coucher de la lune sur la mer. -- Départ pour Combourg. -- Description du château. -- Collège de Dol. -- Mathématiques et langues. -- Trait de mémoire. -- Vacances à Combourg. -- Vie de château en province. -- Mœurs féodales. -- Habitants de Combourg. -- Secondes vacances à Combourg. -- Régiment de Conti. -- Camp à Saint-Malo. -- Une abbaye. -- Théâtre. -- Mariage de mes deux sœurs aînées. -- Retour au collège. -- Révolution commencée dans mes idées. -- Aventures de la pie. -- Troisièmes vacances à Combourg. -- Le charlatan. -- Rentrée au collège. -- Invasion de la France. -- Jeux. -- L'abbé de Chateaubriand. -- -Première communion. -- Je quitte le collège de Dol. -- Mission à Combourg. -- Collège de Rennes. -- Je retrouve Gesril. -- Moreau. -- Limoëlan. -- Mariage de ma troisième sœur. -- Je suis envoyé à Brest pour subir l'examen de garde de marine. -- Le port de Brest. -- Je retrouve encore Gesril. -- Lapeyrouse. -- Je reviens à Combourg. 63
 

LIVRE III.

 
  Promenade. -- Apparition de Combourg. -- Collège de Dinan. -- Broussais. -- Je reviens chez mes parents. -- Vie à Combourg. -- Journées et soirées. -- Mon donjon. -- Passage de l'enfant à l'homme. -- Lucile. -- Dernières lignes écrites à La Vallée-aux-Loups. -- Révélations sur le mystère de ma vie. -- Fantôme d'amour. -- Deux années de délire. -- Occupations et chimères. -- -Mes joies de l'automne. -- Incantation. -- Tentation. -- Maladie. -- Je crains et refuse de m'engager dans l'état ecclésiastique. -- Un moment dans ma ville natale. -- Souvenir de la Villeneuve et des tribulations de mon enfance. -- Je suis rappelé à Combourg. -- Dernière entrevue avec mon père. -- J'entre au service. -- Adieux à Combourg. 123
 

LIVRE IV.

 
  Berlin. -- Potsdam. -- Frédéric. -- Mon frère. -- Mon cousin Moreau. -- Ma sœur, la comtesse de Farcy. -- Julie mondaine. -- Dîner. -- Pommereul. -- Mme de Chastenay. -- Cambrai. -- Le régiment de Navarre. -- La Martinière. -- Mort de mon père. -- Regrets. -- Mon père m'eût-il apprécié? -- Retour en Bretagne. -- Séjour chez ma sœur aînée. -- Mon frère m'appelle à Paris. -- Premier souffle de la muse. -- Manuscrit de Lucile. -- Ma vie solitaire à Paris. -- Présentation à Versailles. -- Chasse avec le roi. 169
 

LIVRE V.

 
  Passage en Bretagne. -- Garnison de Dieppe. -- Retour à Paris avec Lucile et Julie. -- Delisle de Sales. -- Gens de lettres. -- Portraits. -- Famille Rosambo. -- M. de Malesherbes. -- Sa prédilection pour Lucile. -- Apparition et changement de ma Sylphide. -- Premiers mouvements politiques en Bretagne. -- Coup d'œil sur l'histoire de la monarchie. -- Constitution des États de Bretagne. -- Tenue des États. -- Revenu du roi en Bretagne. -- Revenu particulier de la province. -- Le Fouage. -- J'assiste pour la première fois à une réunion politique. -- Scène. -- Ma mère retirée à Saint-Malo. -- Cléricature. -- Environs de Saint-Malo. -- Le revenant. -- Le malade. -- États de Bretagne en 1789. -- Insurrection. -- Saint-Riveul, mon camarade de collège est tué. -- Année 1789. -- Voyage de Bretagne à Paris. -- Mouvement sur la route. -- Aspect de Paris. -- Renvoi de M. Necker. -- Versailles. -- Joie de la famille royale. -- Insurrection générale. Prise de la Bastille. -- Effet de la prise de la Bastille sur la cour. -- Têtes de Foullon et de Bertier. -- Rappel de M. Necker. -- Séance du 4 août 1789. -- Journée du 5 octobre. -- Le roi est amené à Paris. -- Assemblée constituante. -- Mirabeau. -- Séances de l'Assemblée nationale. -- Robespierre. -- Société. -- Aspect de Paris. -- Ce que je faisais au milieu de tout ce bruit. -- Mes jours solitaires. -- Mlle Monet. -- J'arrête avec M. de Malesherbes le plan de mon voyage en Amérique. -- Bonaparte et moi, sous-lieutenants ignorés. -- Le marquis de la Rouërie. -- Je m'embarque à Saint-Malo. -- Dernières pensées en quittant la terre natale. 213
 

LIVRE VI.

 
  Prologue. -- Traversée de l'océan. -- Francis Tulloch. -- Christophe Colomb. -- Camoëns. -- Les Açores. -- Île Graciosa. -- Jeux marins. -- Île Saint-Pierre. -- Côtes de la Virginie. -- Soleil couchant. -- Péril. -- J'aborde en Amérique. -- Baltimore. -- Séparation des passagers. -- Tulloch. -- Philadelphie. -- Le général Washington. -- Parallèle de Washington et de Bonaparte. -- Voyage de Philadelphie à New-York et à Boston. -- Mackensie. -- Rivière du nord. -- Chant de la passagère. -- M. Swift. -- Départ pour la cataracte de Niagara avec un guide hollandais. -- M. Violet. -- Mon accoutrement sauvage. -- Chasse. -- Le carcajou et le renard canadien. -- Rate musquée. -- Chiens pêcheurs. -- Insectes. -- Montcalm et Wolfe. -- Campement au bord du lac des Onondagas. -- Arabes. -- Course botanique. -- L'Indienne et la vache. -- Un Iroquois. -- Sachem des Onondagas. -- Velly et les Franks. -- Cérémonie de l'hospitalité. -- Anciens grecs. -- Voyage du lac des Onondagas à la rivière Genesee. -- Abeilles, défrichements. -- Hospitalité. -- Lit. -- Serpent à sonnettes enchanté. -- Cataracte de Niagara. -- Serpent à sonnettes. -- Je tombe au bord de l'abîme. -- Douze jours dans une hutte. -- Changement de mœurs chez les sauvages. -- Naissance et mort. -- Montaigne. -- Chant de la couleuvre. -- Pantomime d'une petite Indienne, original de Mila. -- Incidences. -- Ancien Canada. -- Population indienne. -- Dégradation des mœurs. -- Vraie civilisation répandue par la religion. -- Fausse civilisation introduite par le commerce. -- Coureurs de bois. -- Factoreries. -- Chasses. -- Métis ou Bois-brûlés. -- Guerres des compaynies. -- Mort des langues indiennes. -- Anciennes possessions françaises en Amérique. -- Regrets. -- Manie du passé. -- Billet de Francis Conyngham. -- Manuscrit original en Amérique. -- Lacs du Canada. -- Flotte de canots indiens. -- Ruines de la nature. -- Vallée du tombeau. -- Destinée des fleuves. -- Fontaine de Jouvence. -- Muscogulges et Siminoles. -- Notre camp. -- Deux Floridiennes. -- Ruines sur l'Ohio. -- Quelles étaient les demoiselles Muscogulges. -- Arrestation du roi à Varennes. -- J'interromps mon voyage pour repasser en Europe. -- Dangers pour les États-Unis. -- Retour en Europe. -- Naufrage. 315
 
 

APPENDICE.

 
I. La tombe du Grand-Bé. 441
II. Le manuscrit de 1826. 448
III. Le comte Louis de Chateaubriand et son frère Christian. 451
IV. Le comte René de Chateaubriand, armateur. 454
V. Chateaubriand et le collège de Dinan. 456
VI. Récits de la Veillée. 457
VII. Le cousin Moreau et sa mère. 460
VIII. M. de Malesherbes. 465
IX. La cléricature de Chateaubriand. 468
X. Le baron Billing et l'ambassade de Londres. 469
XI. Francis Tulloch. 472
XII. Journal de voyage. 476
-- Table. 481


Paris. -- E. Kapp, imprimeur, 83, rue du Bac.

Note 1: Revue de Paris, t. III, mars 1834.(retour)

Note 2: L'analyse de M. Nisard sert de préface au volume intitulé: Lectures des Mémoires de M. de Chateaubriand (juillet 1834). -- Les articles d'Alfred Nettement parurent dans l'Écho de la jeune France, numéros de mai et juin 1834.(retour)

Note 3: Un volume in-8. à Paris, chez Lefèvre, libraire, rue de l'Éperon, n° 6, 1834.(retour)

Note 4: Mémoires d'Outre-tombe, t. X. p. 418.(retour)

Note 5: Mémoires, t. III, p. 159.(retour)

Note 6: Cité par Alfred Nettement, La Mode, 5 décembre 1844.(retour)

Note 7: La Mode, t. IV, p. 408.(retour)

Note 8: Souvenirs et Correspondance tirés des papiers de Mme Récamier, par Mme Charles Lenormant. t. II. p. 489 et suiv.(retour)

Note 9: Mme de Chateaubriand était morte le 9 février 1848. Mme Récamier mourut le 11 mai 1849.(retour)

Note 10: Le samedi 23 septembre.(retour)

Note 11: La Presse, on l'a vu plus haut, avait versé, en 1841, une somme de 80,000 francs qui, avec les intérêts, représentait, en effet, en 1848, 96,000 francs.(retour)

Note 12: Les onze premiers volumes renferment le texte des Mémoires; le douzième volume était formé d'appendices. Les douze volumes parurent de 1848 à 1850.(retour)

Note 13: Tome XI, p. 358.(retour)

Note 14: Tome XI, p. 360.(retour)

Note 15: Causeries du Lundi, tome I, p. 406 et tome II. p. 138 et 565.(retour)

Note 16: Le Correspondant, livraisons des 25 octobre et 10 novembre 1850.(retour)

Note 17: L'Opinion publique, des 7 mai 1850, 16 et 22 février, 2, 9 et 16 mars 1851.(retour)

Note 18: Les Géorgiques, liv. IV.(retour)

Note 19: Mémoires, tome VI. p. 411.(retour)

Note 20: Portraits contemporains, tome I, p. 17.(retour)

Note 21: A. Vinet, tome I, p. 352.(retour)

Note 22: Dans la Revue des Deux-Mondes, du 15 mars 1834. -- Cette préface, très belle, très élégante, ne figure dans aucune des éditions des Mémoires; on la trouvera dans l'édition actuelle.(retour)

Note 23: Tome X, p. I.(retour)

Note 24: Le manuscrit de 1826 a été publié, en 1874, par Mme Charles Lenormant, sous ce titre: Souvenirs d'enfance et de jeunesse de Chateaubriand. -- 1 vol. in-16, Michel Lévy frères, éditeurs.(retour)

Note 25: Lectures des Mémoires de M. de Chateaubriand, p. 269.(retour)

Note 26: La brochure De Buonaparte et des Bourbons. Elle parut, non le 30 mars 1814, comme le dit M. de Lescure, p. 93, ni le 3 avril, comme le dit M. Henry Houssaye, à la page 570 de son remarquable ouvrage sur 1814, mais le mardi 5 avril. (Voyez le Journal des Débats des 4 et 5 avril 1814.)(retour)

Note 27: Beaucoup d'autres passages des Mémoires ne sont pas moins formels. Voyez notamment tome I, p. 182 et 347; tome II, p. 131; tome III p. 147, 246 et 350; tome VII, p. 328.(retour)

Note 28: Je dois la connaissance de cette lettre à une obligeante communication de M. Charles de Lacombe.(retour)

Note 29: Chateaubriand et son temps, par le comte de Marcellus, ancien ministre plénipotentiaire. 1 vol. in-8º, 1859. -- Préface, page 19.(retour)

Note 30: Revue de Paris, tome IV, avril 1834.(retour)

Note 31: Jules Janin, loc. cit. -- Revue de Paris, mars 1834.(retour)

Note 32: Mémoires d'Outre-tombe, tome IV. page 70.(retour)

Note 33: Tome IV, page 71.(retour)

Note 34: Esprit des lois, liv. X, chap. XIII.(retour)

Note 35: Malherbe. liv. 1. ode IX.(retour)

Note 36: Deux vol. in-8º. 1838.(retour)

Note 37: A. Vinet. Études sur la littérature française au dix-neuvième siècle, tome I, page 432.(retour)

Note 38: Le Correspondant, livraison du 25 janvier 1857. Article sur la nouvelle édition de Saint-Simon. Réimprimé dans les Œuvres de Montalembert, tome VI, p. 405 et 507.(retour)

Note 39: Causeries du Lundi, tome I, p. 408, 424.(retour)

Note 40: Tomes V et VI des Mémoires; édition de 1849.(retour)

Note 41: Tome VIII, p. 203.(retour)

Note 42: Causeries du lundi, tome I, p. 420.(retour)

Note 43: Lettre de George Sand, citée par Sainte-Beuve, Causeries du lundi, tome I, p. 421. -- Si sévère qu'elle se montre ici pour Chateaubriand et ses Mémoires, George Sand ne peut s'empêcher de terminer sa lettre par ces lignes: «Et pourtant, malgré tout ce qui me déplaît dans cette œuvre, je retrouve à chaque instant des beautés de forme grandes, simples, fraîches, de certaines pages qui sont du plus grand maître de ce siècle, et qu'aucun de nous, freluquets formés à son école, ne pourrions jamais écrire en faisant de notre mieux.»(retour)

Note 44: Mme Swetchine, sa vie et ses œuvres, par le comte de Falioux, tome I, p. 339. -- Extrait d'une note de Mme Swetchine sur les Mémoires d'Outre-tombe.(retour)

Note 45: Lettre du 7 octobre 1880.(retour)

Note 46: Cette Préface manque dans toutes les éditions précédentes.(retour)

Note 47: Îlot situé dans la rade de Saint-Malo. Ch.(retour)

Note 48: Voir à l'Appendice le nº 1: La Tombe du Grand-Bé.(retour)

Note 49: Chateaubriand, Discours de réception à l'Académie française, écrit au mois d'avril 1811. Napoléon ne permit pas qu'il fût prononcé.(retour)

Note 50: 18 avril 1802.(retour)

Note 51: La première édition, qui comprenait les deux épisodes d'Atala et de René, formait cinq volumes in-8°. Le cinquième se composait uniquement des Notes et éclaircissements.(retour)

Note 52: Portraits littéraires, par Léon Gautier, p. 14. -- 1868.(retour)

Note 53: Revue des Deux-Mondes du 1er juillet 1862.(retour)

Note 54: Lettres sur Ducis, par Campenon, de l'Académie française.(retour)

Note 55: D. Nisard, t. IV, p. 500.(retour)

Note 56: Livraison de mars 1804.(retour)

Note 57: Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, t. I, p. 396.(retour)

Note 58: Préface des Récits mérovingiens, 1840.(retour)

Note 59: Le Roman historique à l'époque romantique, par Louis Maigron.(retour)

Note 60: Voyage en Orient.(retour)

Note 61: Villemain, M. de Chateaubriand, sa vie, ses écrits, son influence littéraire et politique sur son temps, page 200. -- 1858.(retour)

Note 62: Il avait publié, en l'an IX, des Observations critiques sur le roman intitulé: Atala.(retour)

Note 63: Voici le passage auquel Napoléon fait allusion, et qui se trouve, non dans un discours à la Chambres des pairs, mais dans un article du Conservateur, celui du 17 novembre 1818:

«Jeté au milieu des mers où Camoëns plaça le génie des tempêtes, Buonaparte ne peut se remuer sur son rocher sans que nous ne soyons avertis de son mouvement par une secousse. Un pas de cet homme à l'autre pôle se ferait sentir à celui-ci. Si la Providence déchaînait encore son fléau; si Buonaparte était libre aux États-Unis, ses regards attachés sur l'océan suffiraient pour troubler les peuples de l'ancien monde: sa seule présence sur le rivage américain de l'Atlantique forcerait l'Europe à camper sur le rivage opposé.»(retour)

Note 64: Mémoires pour servir à l'Histoire de France sous Napoléon, par M. de Montholon, t. IV, p. 248.(retour)

Note 65: Le 17 août 1815.(retour)

Note 66: M. Villemain, la Tribune moderne, p. 324.(retour)

Note 67: Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, t. I, p. 126.(retour)

Note 68: Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, t. II, p. 2.(retour)

Note 69: Études littéraires sur le XIXe siècle par Émile Faguet, de l'Académie française. -- «Les premiers livres des Natchez, dit M. Faguet, sont écrits dans la manière d'une épopée en prose, ton que l'auteur ne possédait pas encore. Mais ensuite c'est le livre le plus naturel et le plus varié qu'ait écrit Chateaubriand. Sa verve s'y abandonne en inventions charmantes, en rêveries merveilleuses, en tableaux d'une grandeur achevée. C'est, avec René, le vrai livre de Chateaubriand jeune, sans système, sans thèse, sans attitude, sans prétention, enivré de liberté, de solitude, d'ironie sincère, de naïve et magnifique désespérance. Il ne faut pas oublier que des pages sublimes du Génie (la forêt d'Amérique sous la lune, par exemple), sont tout simplement empruntées aux Natchez, et que René et Atala en étaient, en leur forme primitive, des fragments. C'est là qu'est la source vive, fraîche, délicieusement jaillissante et libre, déjà épurée, non encore entourée de constructions un peu artificielles, d'où devait naître ce fleuve si abondamment et magnifiquement épanché pendant quarante ans.»(retour)

Note 70: Mélanges de philosophie, d'histoire et de littérature, par Ch.-M. de Féletz, de l'Académie française, t. III, p. 304.(retour)

Note 71: ArticleSur le «Voyage pittoresque et artistique de l'Espagne», par M. Alexandre de Laborde. -- Cet article fit supprimer le Mercure.(retour)

Note 72: Études sur la littérature française au XIXe siècle, par A. Vinet, t. I, p. 321.(retour)

Note 73: Portraits littéraires, par Léon Gautier, p. 13.(retour)

Note 74: Causeries et méditations, par Charles Magnin, t. I, p. 447.(retour)

Note 75: Phèdre, acte II, scène V.(retour)

Note 76: Études sur la littérature française au XIXe siècle, par Alexandre Vinet, t. I, p. 433.(retour)

Note 77: Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, t. II, p. 435.(retour)

Note 78: Édition de 1898-1900. Librairie de MM. Garnier frères.(retour)

Note 79: Portraits littéraires, p. 6.(retour)

Note 80: Histoire de la littérature française, t. IV, p. 503.(retour)

Note 81: Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, t. II, p. 424.(retour)

Note 82: Ce livre a été écrit, à la Vallée-aux-Loups, près d'Aulnay, d'octobre 1811 à juin 1812.(retour)

Note 83: Horace, Odes, liv. Ier, XI.(retour)

Note 84: Voltaire n'est pas né le 20 février 1694, et il n'est pas né à Châtenay. Il y a là une double erreur, qui était du reste acceptée par tout le monde à la date où écrivait Chateaubriand. Chacun tenait alors pour exact le dire de Condorcet, dans sa Vie de Voltaire: «François-Marie Arouet, qui a rendu le nom de Voltaire si célèbre, naquit à Châtenay le 20 de février 1694. M. A. Jal, en 1864 (Dictionnaire critique de biographie et d'histoire, page 1283 et suivantes), a établi d'une façon certaine, à l'aide des registres de la paroisse de Saint-André-des-Arts, que Voltaire était né à Paris le dimanche 21 novembre 1694. Voltaire, du reste, avait dit lui-même, dans sa lettre du 17 juin 1760 à M. de Parcieux: «Que puis-je faire, sinon plaindre la ville où je suis né?... Je vous remercie en qualité de Parisien, et quand mes compatriotes cesseront d'être Welches, je les louerai tant que je pourrai.» L'année suivante, dans son Épître à Boileau, il disait à l'auteur des Satires:

Dans la cour du Palais je naquis ton voisin.(retour)

Note 85: Le 4 octobre, l'Église célèbre la fête de saint François d'Assises. Chateaubriand avait reçu au baptême les prénoms de François-René. -- Il était entré à Jérusalem le 4 octobre 1806. (Itinéraire de Paris à Jérusalem, tome I, p. 286.)(retour)

Note 86: Voir, à l'Appendice, le Nº II: Le Manuscrit de 1826.(retour)

Note 87: Ce paragraphe que nous empruntons au Manuscrit de 1826, nous a paru devoir être préféré à celui qui se trouve dans toutes les éditions des Mémoires et dont voici le texte: «De la naissance de mon père et des épreuves de sa première position, se forma en lui un des caractères les plus sombres qui aient été. Or, ce caractère a influé sur mes idées en effrayant mon enfance, contristant ma jeunesse et décidant du genre de mon éducation.» Selon la très juste remarque du comte de Marcellus (Chateaubriand et son temps, p. 6), ces lignes interrompent plus qu'elles n'aident le récit. «C'était sans doute, ajoute M. de Marcellus, un de ces feuillets supplémentaires dont l'auteur, aux derniers moments de sa vie, renversait continuellement l'ordre, de telle façon qu'il ne s'y reconnaissait plus lui-même, comme il le disait à son dernier secrétaire, M. Daniélo.» (Voir, Tome XII de la première édition des Mémoires d'outre-tombe, les pages auxquelles M. J. Daniélo a donné pour titre: M. et Mme de Chateaubriand; quelques détails sur leurs habitudes, leurs conversations.)(retour)

Note 88: Cette généalogie est résumée dans l'Histoire généalogique et héraldique des Pairs de France, etc., par M. le chevalier de Courcelles, Ch.(retour)

Note 89: Bernard Chérin (1718-1785), généalogiste et historiographe des Ordres de Saint-Lazare, de Saint-Michel et du Saint Esprit.(retour)

Note 90: La terre de la Guerrande était située, non dans le Morbihan, mais dans la paroisse de Hénan-Bihen, aujourd'hui l'une des communes du canton de Matignon, arrondissement de Dinan (Côtes-du-Nord).(retour)

Note 91: Sur le comte Louis de Chateaubriand et sur son frère Christian, voir l'Appendice, Nº III.(retour)

Note 92: Jean de Tinténiac, le héros du combat des Trente, était fils d'Olivier, IIIe du nom, seigneur de Tinténiac, et d'Eustaice de Chasteaubrient, seconde fille de Geoffroy, VIe du nom, baron de Chasteau-brient, et d'Isabeau de Machecoul. (Le P. Aug. Du Paz, Histoire généalogique de plusieurs maisons illustres, de Bretagne.)(retour)

Note 93: Voyez cette note à la fin de ces Mémoires. Ch.(retour)

Note 94: Les éditions précédentes portent, toutes, «comme un grand terrier du moyen-âge». Chateaubriand avait dû certainement écrire terrien. Le Dictionnaire de Furetière (1690) porte: «Terrien. -- Qui possède grande étendue de terre. -- Le roy d'Espagne est le plus grand terrien du monde depuis la découverte des Indes occidentales. -- Cette duchesse est grande terrienne en Bretagne, elle y possède beaucoup de terres.» -- Littré dit aussi: «Grand terrien, seigneur qui possède beaucoup de terres.»(retour)

Note 95: Grand'mère paternelle de Chateaubriand. Les actes de l'état civil où elle figure lui donnent tous pour premier prénom, au lieu de Pétronille, celui de Perronnelle. Ce dernier nom était très fréquent en Bretagne: on le traduisait en latin par Petronilla, d'où il arrivait que, dans les familles, on écrivait indifféremment Pétronille ou Perronnelle, sans y attacher d'importance.(retour)

Note 96: Avant d'être recteur de Saint-Launeuc et de Merdrignac, il avait été prieur de Bécherel (en 1747).(retour)

Note 97: Le Manuscrit de 1826 entrait ici, sur François-Henri de Chateaubriand, seigneur de la Villeneuve, dans les détails qui suivent: «Ce singulier curé fut adoré par ses paroissiens. Son nom, illustre en Bretagne, excitait d'abord l'étonnement; ensuite son caractère joyeux, le culte que cette autre espèce de Rabelais avait voué aux Muses dans un presbytère attirait à lui, on venait le voir de toutes parts; il donnait tout ce qu'il avait, et n'était, à la lettre, pas maître chez lui; il mourut insolvable, et ma grand'mère n'osa prendre sa chétive succession que sous bénéfice d'inventaire. Les paysans s'assemblèrent, déclarèrent qu'on faisait injure à la mémoire de leur curé, et se chargèrent d'acquitter ses dettes; en conséquences, ils l'enterrèrent à leurs frais, liquidèrent sa succession et envoyèrent à sa famille le peu qu'il avait laissé.»(retour)

Note 98: Chateaubriand a francisé ici un vers de Shakespeare, qui a dit dans un de ses sonnets:

When you entombed, in men' eyes, shall lie
Your monument shall be my gentle verse.(retour)

Note 99: Louis-Robert-Hippolyte de Bréhan, comte de Plélo, né à Rennes le 28 mars 1699, était le petit-neveu de Mme de Sévigné. Sa vie a été écrite par M. Edmond Rathery, sous ce titre: Le comte de Plélo, un volume in-8°, 1876.(retour)

Note 100: Voir, à l'Appendice, le Nº IV: le comte René de Chateaubriand armateur.(retour)

Note 101: Pierre-Marie-Anne de Chateaubriand, seigneur du Plessis et du Val-Guildo, né en 1727. Il commanda plusieurs des navires de son frère. (Voir à l'Appendice le Nº IV.) Le 12 février 1760, il épousa Marie-Jeanne-Thérèse Brignon fille de Nicolas-Jean Brignon, seigneur de Laher, négociant, et de Marie-Anne Le Tondu. Incarcéré pendant la Terreur, il mourut dans la prison de Saint-Malo, le 3 fructidor an II (20 août 1794).(retour)

Note 102: Les éditions précédentes portent toutes: 1810. C'est une erreur. Armand de Chateaubriand fut fusillé le vendredi saint (31 mars) de l'année 1809. Lorsque Chateaubriand reviendra plus tard avec détails sur ce douloureux épisode, il aura bien soin de lui donner sa vraie date.(retour)

Note 103: Ceci était écrit en 1811 (note de 1831, Genève). Ch.(retour)

Note 104: Le mariage des parents de Chateaubriand fut célébré à Bourseul. Bourseul est aujourd'hui l'une des communes du canton de Plancoët, arrondissement de Dinan (Côtes-du-Nord). -- Voici l'extrait de l'acte de mariage, relevé sur les registres paroissiaux de Bourseul: -- «Du troisième de juillet 1753, j'ay administré la bénédiction nuptiale à haut et puissant René-Auguste de Chateaubriand, chevalier seigneur du Plessis, fils majeur de haut et puissant François de Chateaubriand, chevalier seigneur de Villeneuve, et de dame Perronnelle-Claude Lamour de Lanjegu, dame de Chateaubriand, son épouse, domiciliée de la paroisse de Guitté en ce diocèse, d'une part; et à très noble demoiselle Apolline-Jeanne-Suzanne de Bedée, dame de la Villemain, fille de haut et puissant seigneur Ange-Annibal de Bedée, chevalier seigneur de la Bouëtardays et autres lieux, et de dame Bénigne-Jeanne-Marie de Ravenel du Boistilleul, son épouse, d'autre part... Ont été présents à la cérémonie: messire Ange-Annibal de Bedée et dame Bénigne-Jeanne-Marie de Ravenel, père et mère de l'épouse; demoiselle Anne de Bedée et demoiselle Suzanne-Apolline de Ravenel, tantes de l'épouse; messire Théodore-Jean-Baptiste de Ravenel de Boistilleul, cousin germain de l'épouse, conseiller au Parlement de Bretagne, et autres soussignants. -- Suivent les signatures: Apoline de Bedée de Vilmain, B. de Chateaubriand, Bénigne J.-M. de Ravenel de la Bouëtardaye, de Bedée de la Bouëtardaye, Suzanne de Ravenel, Anne de Bedée, Angélique Bedée du Boisrioux, Jeanne Le Mintier du Boistilleul, Marie-Antoine de Bedée, Théodore J.-B. de Ravenel du Boistilleul, du Breil pontbriand, F. de Chateaubriand, frère de l'époux, et Guillemot, curé de Bourseul.(retour)

Note 105: Ange-Annibal de Bedée, seigneur de la Bouëtardais de la Mettrie et de Boisriou, né à la Bouëtardais, en Bourseul, le 11 septembre 1696, était fils de Jean-Marc de Bedée de la Bouëtardais, seigneur des mêmes lieux, et de Jeanne de Bégaignon. Il mourut le 14 janvier 1761 et fut inhumé dans l'église de Bourseul. La famille de Bedée, qui a compté des branches nombreuses, tire son nom d'une paroisse aujourd'hui commune du canton et de l'arrondissement de Montfort (Ille-et-Vilaine). La seigneurie de Bedée a cessé depuis longtemps d'appartenir à la famille de ce nom: au siècle dernier, elle était aux mains des Visdelou, qui se qualifiaient de marquis de Bedée.(retour)

Note 106: Bénigne-Jeanne-Marie (et non Marie-Anne) de Ravenel du Boisteilleul, née à Rennes, en la paroisse Saint-Jean, le 15 octobre 1698 (et non le 16 octobre), était fille de écuyer Benjamin de Ravenel, seigneur de Boisteilleul, et de Catherine-Françoise de Farcy. Elle avait épousé, le 24 février 1720, en l'église de Toussaint, à Rennes, Ange-Annibal de Bedée. -- Je dois ces indications, ainsi que la plupart de celles qui vont suivre et qui ont trait aux parents de Chateaubriand, à M. Frédéric Saulnier, conseiller à la Cour d'appel de Rennes. Sans son utile et si dévoué concours, je n'aurais pu mener à bonne fin cette partie de mon travail.(retour)

Note 107: Chateaubriand fixe à dix le nombre des enfants issus du mariage de ses père et mère. Les registres de la ville de Saint-Malo n'en accusent que neuf:

1º Geoffroy-René-Marie, né le 4 mai 1758 (mort au berceau).

2º Jean-Baptiste-Auguste, né le 23 juin 1759 (celui qui sera le petit-gendre de Malesherbes).

3º Marie-Anne-Françoise, née le 4 juillet 1760 (plus tard Mme de Marigny).

4º Bénigne-Jeanne, née le 31 août 1761 (qui épousera plus tard M. de Québriac, puis M. de Châteaubourg).

5º Julie-Marie-Agathe, née le 2 septembre 1763 (plus tard Mme de Farcy).

6º Lucile-Angélique, née le 7 août 1764 (plus tard Mme de Caud).

7º Auguste, né le 28 mai 1766 (mort au bout de quelques mois).

8º Calixte-Anne-Marie, née le 3 juin 1767 (morte en bas âge).

9º François-René, né le 4 septembre 1768 (l'auteur du Génie du christianisme).

Le chiffre de dix enfants, donné par Chateaubriand, n'en est pas moins exact. Un dixième enfant -- qui fut en réalité le premier -- était né à Plancoët, où M. et Mme de Chateaubriand habitèrent pendant quelque temps à la suite de leur mariage. Ce premier enfant, né et mort à Plancoët, n'a pu figurer sur les registres de Saint-Malo. (Recherches sur plusieurs des circonstances relatives aux origines, à la naissance et à l'enfance de M. de Chateaubriand, par M. Ch. Cunat, 1850.)(retour)

Note 108: Le texte complet de l'acte de baptême de Chateaubriand est ainsi conçu:

«François-René de Chateaubriand, fils de haut et puissant René de Chateaubriand, chevalier, comte de Combourg, et de haute et puissante dame, Apolline-Jeanne-Suzanne de Bedée, dame de Chateaubriand, son épouse, né le 4 septembre 1768, baptisé le jour suivant par nous, Messire Pierre-Henry Nouail, grand chantre et chanoine de l'Église cathédrale, official et grand vicaire de Monseigneur l'évêque de Saint-Malo. A été parrain haut et puissant Jean-Baptiste de Chateaubriand, son frère, et marraine haute et puissante dame Françoise-Marie-Gertrude de Contade, dame et comtesse de Plouër, qui signent et le Père. Ont signé: Jean-Baptiste de Chateaubriand, Brignon de Chateaubriand, Contades de Plouër, de Chateaubriand, Nouail, vicaire général(retour)

Note 109: Vingt jours avant moi, le 15 août 1768, naissait dans une autre île, à l'autre extrémité de la France, l'homme qui a mis fin à l'ancienne société, Bonaparte. Ch.(retour)

Note 110: On lit, dans l'Itinéraire de Paris à Jérusalem, tome I, p. 295: «Tandis que j'attendais l'instant du départ, les religieux se mirent à chanter dans l'église du monastère. Je demandai la cause de ses chants et j'appris que l'on célébrait la fête du patron de l'ordre. Je me souvins alors que nous étions au 4 octobre, jour de la Saint-François, jour de ma naissance et de ma fête. Je courus au chœur et j'offris des vœux pour le repos de celle qui m'avait autrefois donné la vie à pareil jour.»(retour)

Note 111: «Je fus nommé François du jour où j'étais né, et René à cause de mon père.» Manuscrit de 1826. -- Atala, le Génie du christianisme, les Martyrs et l'Itinéraire sont signés: François-Auguste de Chateaubriand. En supprimant ainsi, en tête de ses premiers ouvrages, l'appellation de René, Chateaubriand voulait éviter les fausses interprétations de ceux qui auraient été tentés de le reconnaître dans l'immortel épisode de ses œuvres qui ne porte d'autre titre que ce nom.(retour)

Note 112: En 1768, les parents de Chateaubriand habitaient rue des Juifs (aujourd'hui rue de Chateaubriand) une maison appartenant à M. Magon de Boisgarein. On la distinguait alors sous le nom d'Hôtel de la Gicquelais, nom du père de M. Magon.(retour)

Note 113: En 1780, M. Magon de Boisgarein vendit cette maison à M. Dupuy-Fromy, et peu de temps après elle fut occupée par M. Chenu, qui en fit une auberge. Sa destination, depuis plus d'un siècle, n'a pas changé. L'un des trois corps de logis dont est actuellement composé l'Hôtel de France et de Chateaubriand, celui qui est le plus avancé dans la rue, est la maison natale du grand écrivain.(retour)

Note 114: Françoise-Gertrude de Contades, fille de Louis-Georges-Erasme de Contades, maréchal de France, et de Nicole Magon de la Lande. Elle avait épousé en 1747 Jean-Pierre de la Haye, comte de Plouër, colonel de dragons.(retour)

Note 115: Chateaubriand n'a point imaginé cette tempête romantique, qui éclate pourtant si à propos à l'heure même de sa naissance. M. Charles Cunat, le savant et consciencieux archiviste de Saint-Malo, confirme de la façon la plus précise, dans son écrit de 1850, l'exactitude de tous les détails donnés par le grand poète: «En effet, dit-il, une pluie opiniâtre durait depuis près de deux mois; plusieurs coups de vent qu'on avait éprouvés n'avaient pas changé l'état de l'atmosphère; ce temps pluvieux jetait l'alarme dans le pays; ce fut dans la nuit de samedi à dimanche, à l'approche du dernier quartier de la lune, qu'eut lieu la tempête horrible qui accompagna la naissance de Chateaubriand et dont les terribles effets se firent sentir dans le pays, et notamment à la chaussée du Sillon.» Cette nuit du samedi au dimanche, où la tempête fut particulièrement horrible, était précisément celle du 3 au 4 septembre, et c'est le 4 septembre que naquit Chateaubriand. -- La continuité et la violence des tempêtes, en ces premiers jours de septembre 1768, furent telles que l'évêque et le chapitre firent exposer pendant neuf jours, comme aux époques des plus grandes calamités, les reliques de Saint Malo dans le chœur de la cathédrale; les voûtes de l'antique basilique ne cessèrent de retentir des chants de la pénitence et des appels à la miséricorde divine. Enfin, l'orage s'apaisa, le ciel reprit sa sérénité, et, le dimanche 18 septembre, on porta processionnellement les restes du saint à travers les rues de la ville et autour des remparts, au milieu d'un concours immense de la population. Les reliques, précédées du clergé, étaient portées par des chanoines et suivies par Mgr. Jean-Joseph Fogasse de la Bastie, évêque du diocèse. (Ch. Cunat, op. cit.)(retour)

Note 116: Il n'y eut jamais à Plancoët d'abbaye de Bénédictins. Il existait seulement, au hameau de l'Abbaye, une maison de Dominicains, dont les bâtiments, aujourd'hui transformés en ferme, joignent la partie nord-est de la modeste chapelle où le futur pèlerin de Paris à Jérusalem fut relevé de son premier vœu.(retour)

Note 117: Longtemps encore après Froissart, on a continué d'écrire Combour, ce qui était suivre l'ancienne forme du nom, Comburnium. C'est seulement de 1660 à 1680 que le g a été ajouté.(retour)

Note 118: Emmanuel-Félicité de Durfort, duc de Duras (1715-1789), pair et maréchal de France, premier gentilhomme de la Chambre, membre de l'Académie française. Choisi par le roi pour aller commander en Bretagne au milieu des troubles qu'avait fait naître l'affaire de La Chalotais, il réussit à concilier les esprits et à rétablir la tranquillité.(retour)

Note 119: Louise-Françoise-Maclovie-Céleste de Coëtquen, mariée en 1736 au duc de Duras, décédée le 17 nivôse an X (7 janvier 1802).(retour)

Note 120: Hallay-Coëtquen (Jean-Georges-Charles-Frédéric-Emmanuel, marquis du), né le 5 octobre 1799, mort le 10 mars 1867. Il avait été, sous la Restauration, capitaine au 1er régiment de grenadiers à cheval de la garde royale et gentilhomme ordinaire de la chambre du roi. Le marquis du Hallay a eu une grande réputation comme juge du point d'honneur et arbitre en matière de duel. Il a publié des Nouvelles et Souvenirs, Paris, 1835 et 1836, 2 tomes en 1 vol. in-8°.(retour)

Note 121: Le comte du Hallay-Coëtquen, frère cadet du précédent, a été page de Louis XVIII en 1814, puis garde du corps de Monsieur, et lieutenant au 4e régiment de chasseurs à cheval.(retour)

Note 122: Pierre-Louis Moreau de Maupertuis (1698-1759); membre de l'Académie des sciences et de l'Académie française; président perpétuel de l'Académie des sciences et belles-lettres de Berlin. Il était né à Saint-Malo.(retour)

Note 123: Nicolas-Charles-Joseph Trublet (1697-1770); parent et ami de Maupertuis et, comme lui, né à Saint-Malo. Il avait été reçu membre de l'Académie française le 13 avril 1761.(retour)

Note 124: C'est un souvenir du voyage de l'auteur en Palestine et de son séjour au couvent de Saint-Saba: «On montre aujourd'hui dans ce monastère trois ou quatre mille têtes de morts, qui sont celles des religieux massacrés par les infidèles. Les moines me laissèrent un quart d'heure tout seul avec ces reliques: ils semblaient avoir deviné que mon dessein était de peindre un jour la situation de l'âme des solitaires de la Thébaïde. Mais je ne me rappelle pas encore sans un sentiment pénible qu'un caloyer voulut me parler de politique et me raconter les secrets de la cour de Russie. «Hélas! mon père, lui dis-je, où chercherez-vous la paix, si vous ne la trouvez pas ici?» Itinéraire de Paris à Jérusalem, tome I, p. 313.(retour)

Note 125: Lucile avait, non pas deux ans, mais quatre ans de plus que son frère. Elle était née le 7 août 1764. -- Voir son acte de naissance à la page 7 de la remarquable étude de M. Frédéric Saulnier sur Lucile de Chateaubriand et M. de Caud, d'après des documents inédits, 1885. M. Anatole France s'est donc trompé, lui aussi, lorsque, dans son petit volume, d'ailleurs si charmant, sur Lucile de Chateaubriand, sa vie et ses œuvres, il l'a fait naître «en l'an 1766».(retour)

Note 126: [Grec: Ἀχὼρ], gourme. Ch.(retour)

Note 127: «Dans les jardins en terrasse de cette maison, qui sert maintenant de presbytère à la paroisse de Nazareth, se voit encore la fontaine entourée de saules, où l'aïeule de Chateaubriand venait respirer le frais en tricotant au milieu de ses enfants et petits-enfants.» Du Breil de Marzan, Impressions bretonnes sur les funérailles de Chateaubriand et sur les Mémoires d'outre-tombe, 1850.(retour)

Note 128: Suzanne-Émilie de Ravenel, demoiselle du Boisteilleul, sœur cadette de madame de Bedée de la Bouëtardais, née à Rennes le 12 mai 1700.(retour)

Note 129: La véritable orthographe du nom des trois vieilles filles était: Loisel de la Villedeneu. (Du Breil de Marzan, op. cit.)(retour)

Note 130: Marie-Antoine-Bénigne de Bedée, comte de la Bouëtardais, baron de Plancoët, fils de Ange-Annibal de Bedée et de Bénigne-Jeanne-Marie de Ravenel de Boisteilleul, frère de madame de Chateaubriand et d'un an plus jeune qu'elle; il était né dans la paroisse de Bourseul, le 5 avril 1727. Il mourut à Dinan, le 24 juillet 1807.(retour)

Note 131: Le château de Monchoix, dans la paroisse de Pluduno, aujourd'hui l'une des communes du canton de Plancoët, arrondissement de Dinan, Monchoix est actuellement habité par M. du Boishamon, arrière-petit-fils du comte de Bedée.(retour)

Note 132: Le comte de Bedée avait eu huit enfants, dont quatre morts en bas âge. Chateaubriand n'a donc connu que les quatre dont il parle: 1º Charlotte-Suzanne-Marie (celle qu'il appelle Caroline), née en la paroisse de Pluduno, le 24 avril 1762, décédée à Dinan, non mariée, le 28 avril 1849; -- 2º Marie-Jeanne-Claude ou Claudine, née le 21 avril 1765, mariée en émigration à René-Hervé du Hecquet, seigneur de Rauville. Revenue en France, elle s'est fixée à Valognes et a dû y mourir. Ce sont ses héritiers qui ont hérité de la Bouëtardais. -- 3º Flore-Anne, née le 5 octobre 1766, mariée au château de Monchoix, le 28 octobre 1788, à Charles-Augustin-Jean-Baptiste Locquet, chevalier de Château-d'Assy, d'une famille d'origine malouine; elle est décédée, veuve, à Dinan, le 7 janvier 1851. -- 4º Marie-Joseph-Annibal de Bedée, comte de la Bouëtardais, conseiller au Parlement de Rennes. Il fut, à Londres, le compagnon d'émigration de Chateaubriand et nous renvoyons à ce moment les détails que nous aurons à fournir sur lui.(retour)

Note 133: Marie-Angélique-Fortunée-Cécile Ginguené, fille de écuyer François Ginguené et de dame Thérèse-Françoise Jean. Elle était née à Rennes le 23 novembre 1729. Mariée, le 23 novembre 1756, à Marie-Antoine-Bénigne de Bedée. Décédée à Dinan, le 22 novembre 1823.(retour)

Note 134: «C'était la première fois de ma vie que j'étais décemment habillé. Je devais tout devoir à la religion, même la propreté, que saint Augustin appelle une demi-vertu.» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 135: A propos de cette expression et de quelques autres (me jouer emmi les vagues qui se retiraient; -- à l'orée d'une plaine; -- des nuages qui projettent leur ombre fuitive, etc.), Sainte-Beuve écrivait, dans son article du 15 avril 1834, après les premières lectures des Mémoires: «L'effet est souvent heureux de ces mots gaulois rajeunis, mêlés à de fraîches importations latines. (Le vaste du ciel, les blandices des sens, etc.) et encadrés dans des lignes d'une pureté grecque, au tour grandiose, mais correct et défini. Le vocabulaire de M. de Chateaubriand dans ces Mémoires comprend toute la langue française imaginable et ne la dépasse guère que parfois en quelque demi-douzaine de petits mots que je voudrais retrancher. Cet art d'écrire qui ne dédaigne rien, avide de toute fleur et de toute couleur assortie, remonte jusqu'au sein de Ducange pour glaner un épi d'or oublié, ou ajouter un antique bleuet à la couronne.» Portraits contemporains, I, 30.(retour)

Note 136: La chapelle de Notre-Dame de Nazareth n'était aucunement un édifice gothique. Elle datait du milieu du XVIIe siècle et avait été fondée par dame Catherine de Rosmadec, épouse de Guy de Rieux, comte de Châteauneuf, qui en fit don au couvent des religieux dominicains de Dinan. La première pierre fut posée, en présence de Ferdinand de Neufville, évêque de Saint-Malo, le 2 mai 1649, et, à cette date, on ne construisait plus, même en Bretagne, ni églises ni chapelles gothiques. (Voir Dictionnaire d'Ogée, article Corseul, et l'Histoire de la découverte de la Sainte image de Notre Dame de Nazareth, copiée sur l'ancien original du père Guillouzou, et publiée par M. L. Prud'homme, de Saint-Brieuc).(retour)

Note 137: «La religion, qui ne connaît pas les rangs et qui donne toujours des leçons, ne voyait dans cette cérémonie que la pauvre femme qui m'avait sauvé de la mort, et l'enfant qui avait sucé le même lait que moi; la grande dame ma mère était à la porte, la paysanne dans le sanctuaire.» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 138: «Quand cela fut fait, on acheva de célébrer la messe; ma mère communia après le prêtre, et très certainement ses vœux cherchèrent à détourner sur moi les grâces que cette communion devait répandre sur elle. Combien il est essentiel de frapper l'imagination des enfants, par des actes de religion! Jamais dans le cours de ma vie je n'ai oublié le relèvement de mon vœu. Il s'est présenté à ma mémoire au milieu des plus grands égarements de ma jeunesse; je m'y sentais attaché comme à un point fixe autour duquel je tournais sans pouvoir me déprendre. Depuis l'exhortation du bénédictin, j'ai toujours rêvé le pèlerinage de Jérusalem et j'ai fini par l'accomplir. Il est certain que la plupart des actes religieux, nobles par eux-mêmes, laissent au fond du cœur de nobles souvenirs, nourrissent l'âme de sentiments élevés et disposent à aimer les choses belles et touchantes; que de droit la religion n'avait-elle donc pas sur moi! Ne devait-elle pas me dire: «Tu m'as été consacré dans ta jeunesse, je ne t'ai rendu à la vie que pour que tu devinsses mon défenseur. La dépouille de ton innocence, trempée des larmes de ta mère, repose encore sur mes autels; ce ne sont pas tes vêtements qu'il faut suspendre à mes temples, ce sont tes passions. Consacre-moi ton cœur et tes chagrins, je bénirai ta nouvelle offrande.» Sainte religion, voilà ton langage; toi seule pourrais remplir le vide que j'ai toujours senti en moi, et guérir cette tristesse qui me suit. Tout sujet m'y replonge ou m'y ramène; je n'écris pas un mot qu'elle ne soit prête à déborder comme un torrent: je ne suis occupé qu'à la renfermer, pour ne pas me rendre ridicule aux hommes. Mais dans cet écrit qui ne paraîtra qu'après moi, que j'ai entrepris pour me soulager, pour donner une issue aux sentiments qui m'étouffent, pourquoi me contraindrais-je? Rassasions-nous de nos peines secrètes, que mon âme malade et blessée puisse à son gré repasser ses chimères et se noyer dans ses souvenirs!» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 139: Dante, Le Paradis, Chant XVII.(retour)

Note 140: «Au mois d'octobre de l'année 1775, nous retournâmes à Saint-Malo.» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 141: Saint Aaron vivait bien au VIe siècle, mais on ignore absolument la date à laquelle il s'établit sur le rocher qui porte aujourd'hui la ville de Saint-Malo. La date de 507, donnée ici par Chateaubriand, ne repose sur aucune autorité sérieuse. On ne la trouve même pas dans l'ouvrage, plus légendaire qu'historique, du P. Albert Le Grand, la vie, gestes, mort et miracles des saints de la Bretagne-Armorique.(retour)

Note 142: Cette date de 541, que Chateaubriand a prise cette fois dans Albert Le Grand (édition de 1680, p. 583), n'est rien moins qu'exacte. Malo fut bien le premier titulaire de l'évêché d'Aleth, fondé par Judaël, roi de Domnonée, mais cette fondation eut lieu, non en 541, mais près d'un demi-siècle plus tard. Né vers 520 dans la Cambrie méridionale, Malo ne passa en Armorique que vers 550. Il aborda dans l'île de Césembre, avec une trentaine de disciples et se mit aussitôt à évangéliser les campagnes aléthiennes et curiosolites. Il comptait déjà dans la péninsule armoricaine, et spécialement dans le pays d'Aleth, quarante ans d'apostolat, lorsqu'il fut honoré de la dignité épiscopale, vers 585-590. Saint Malo mourut en Saintonge, le dimanche 16 décembre 621, âgé d'environ cent ans. (Voir l'Histoire de Bretagne, par Arthur de la Borderie, tome I, p. 421, 465, 475.)(retour)

Note 143: Anson (Georges), amiral anglais, né en 1697, mort en 1762.(retour)

Note 144: La Chalotais (Louis-René de Caradeuc de), procureur-général au Parlement de Bretagne, né à Rennes le 6 mars 1701, mort le 12 juillet 1785. -- Le premier Mémoire, écrit sous le nom de M. de La Chalotais, et reconnu par lui comme son œuvre se terminait par ces lignes: «Fait au château de Saint-Malo, 15 janvier 1766, écrit avec une plume faite d'un cure-dent, et de l'encre faite avec de le suie de cheminée, du vinaigre et du sucre, sur des papiers d'enveloppe de sucre et de chocolat.» La vérité est que La Chalotais, dans sa prison, avait tout ce qu'il faut pour écrire et qu'il écrivait par toutes les postes à sa famille. Voir, dans l'ouvrage de M. Henri Carré, La Chalotais et le duc d'Aiguillon (1803), la correspondance du chevalier de Fontette, commandant du château de Saint-Malo, et en particulier la lettre du 28 avril 1766.(retour)

Note 145: Jacques Cartier naquit à Saint-Malo le 31 décembre 1494, l'année même où Christophe Colomb découvrait la Jamaïque. On ne sait pas exactement la date de sa mort. Le savant annaliste de Saint-Malo, M. Ch. Cunat, croit pouvoir la fixer aux environs de 1554.(retour)

Note 146: René Dugay-Trouin, né le 10 juin 1673; mort le 27 septembre 1736.(retour)

Note 147: Robert Surcouf, le célèbre corsaire (1773-1827). M. Ch. Cunat a écrit son Histoire.(retour)

Note 148: Bertrand-François Mahé de La Bourdonnais (1699-1753).(retour)

Note 149: Julien Offraye de La Mettrie, né à Saint-Malo le 19 décembre 1709, mort le 11 novembre 1751 à Berlin, où ses ouvrages ouvertement matérialistes lui avaient valu d'être nommé lecteur du roi. Frédéric II a composé son Éloge.(retour)

Note 150: Hugues-Félicité Robert de La Mennais, né le 19 juin 1782, mort le 27 février 1854. Presque tous ses biographes le font naître dans la même rue que Chateaubriand. C'est une erreur. L'hôtel de la Mennais, où naquit l'auteur de l'Essai sur l'Indifférence, était situé, non rue des Juifs, mais rue Saint-Vincent.(retour)

Note 151: François-Joseph-Victor Broussais (1772-1832). Comme son compatriote La Mettrie, mais avec plus d'éclat et de talent, il se montra dans tous ses ouvrages, un ardent adversaire des doctrines psychologiques et spiritualistes.(retour)

Note 152: Pierre-Louis-Auguste Ferron, comte de La Ferronnays, né le 17 décembre 1772. Il émigra avec son père, lieutenant général des armées du roi, servit sous le prince de Condé et devint aide de camp du duc de Berry. Maréchal de camp (4 juin 1814); pair de France (17 août 1815), ministre à Copenhague en 1817; ambassadeur à Saint-Pétersbourg en 1819; ministre des Affaires étrangères du 4 janvier 1828 au 14 mai 1829; ambassadeur à Rome du mois de février au mois d'août 1830. Il mourut en cette ville le 17 janvier 1842, laissant une mémoire honorée de tous les partis.(retour)

Note 153: Peu d'années après la naissance de Chateaubriand, sa famille avait quitté l'hôtel de la Gicquelais et était venue habiter le premier étage de la belle maison de M. White de Boisglé, maire de Saint-Malo, maison située sur la rue et la place Saint-Vincent, presque en face de la porte Saint-Vincent. (Ch. Cunat, op. cit.)(retour)

Note 154: De ces six enfants, cinq figurent sur les registres de naissance de Saint-Malo: Adélaïde, née en 1762; Émilie-Thérèse-Rosalie, née le 12 septembre 1763; Pierre, né en 1767; Armand-Louis-Marie, né le 16 mars 1768; Modeste, née en 1772.(retour)

Note 155: Ici encore, dans toutes les éditions, on a imprimé à tort: 1810.(retour)

Note 156: Il a laissé un fils, Frédéric, que je plaçai d'abord dans les gardes de Monsieur, et qui entra depuis dans un régiment de cuirassiers. Il a épousé, à Nancy, mademoiselle de Gastaldi, dont il a eu deux fils, et s'est retiré du service. La sœur aînée d'Armand, ma cousine, est, depuis de longues années, supérieure des religieuses Trappistes. (Note de 1831, Genève.) Ch. -- Frédéric de Chateaubriand, dont il est parlé dans cette note, était né à Jersey le 11 novembre 1798. Il est mort le 8 juin 1849, au château de la Ballue, près Saint-Servan, laissant un fils, Henri-Frédéric-Marie-Geoffroy de Chateaubriand, né à la Ballue le 11 mai 1835 et marié en 1869 à Françoise-Madeleine-Anne Regnault de Parcieu.(retour)

Note 157: Gesril du Papeu (Joseph-François-Anne) avait un an de moins que son ami Chateaubriand; il était né à Saint-Malo le 23 février 1767. Entré dans la marine, comme garde, à quatorze ans, il prit part à la guerre de l'Indépendance américaine et fit ensuite une campagne de trois ans dans les mers de l'Inde et de la Chine. Lieutenant de vaisseau, le 9 octobre 1789, il ne tarda pas à émigrer, fit la campagne des Princes en 1792, comme simple soldat, et se rendit ensuite à Jersey. Le 21 juillet 1795, il était à Quiberon, cette fois comme lieutenant de la compagnie noble des élèves de la marine, dans le régiment du comte d'Hector. L'épisode dont il fut le héros dans cette tragique journée suffirait seul à prouver que Sombreuil et ses soldats n'ont mis bas les armes qu'à la suite d'une capitulation. Ceux qui nient l'existence de cette capitulation l'ont bien compris: ils ont essayé de contester l'acte même de Gesril et son généreux sacrifice. Mais ce sacrifice et les circonstances qui l'accompagnèrent sont attestés par trop de témoins pour qu'on puisse les mettre en doute. Ces témoins sont de ceux dont la parole ne se peut récuser: En voici la liste: 1º Chaumereix; 2º Berthier de Grandry; 3º La Bothelière, capitaine d'artillerie; 4º Cornulier-Lucinière; 5º La Tullaye; 6º Du Fort; 7º le contre-amiral Vossey; 8º le baron de Gourdeau; 9º le capitaine républicain Rottier, de la légion nantaise. Le fait, d'ailleurs, est consigné dans une lettre écrite des prisons de Vannes par Gesril du Papeu à son père. Le jeune héros fut fusillé à Vannes, le 10 fructidor (27 août 1796).(retour)

Note 158: «Je pense avec orgueil que cet homme a été mon premier ami, et que tous les deux, mal jugés dans notre enfance, nous nous liâmes par l'instinct de ce que nous pouvions valoir un jour, et que c'est dans le coin le plus obscur de la monarchie, sur un misérable rocher, que sont nés ensemble et presque sous le même toit deux hommes dont les noms ne seront peut-être pas tout à fait inconnus dans les annales de l'honneur et de la fidélité.» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 159: J'avais déjà parlé de Gesril dans mes ouvrages. Une de ses sœurs, Angélique Gesril de La Trochardais, m'écrivit en 1818 pour me prier d'obtenir que le nom de Gesril fut joint à ceux de son mari et du mari de sa sœur: j'échouai dans ma négociation. (Note de 1831, Genève.) Ch.

Gesril avait trois sœurs; Mmes Colas de la Baronnais, Le Roy de la Trochardais et Le Metaër de la Ravillais. Les deux dernières seules ont laissé des enfants; la famille Gesril se trouve éteinte et fondue dans le Metaër et, par Le Roy, dans Boisguéhéneuc et du Raquet.(retour)

Note 160: Le comte d'Artois vint, en effet, à Saint-Malo le 11 mai 1777 et y séjourna trois jours. De grandes fêtes eurent lieu en son honneur. (Ch. Cunat, op. cit.)(retour)

Note 161: Ce livre a été écrit à Dieppe (septembre et octobre 1812), et à la Vallée-aux-Loups, (décembre 1813 et janvier 1814). Il a été revu en juin 1846.(retour)

Note 162: C'était précisément le jour anniversaire de la naissance de Chateaubriand.(retour)

Note 163: Étienne-Denis Pasquier (1767-1842). Il était préfet de police depuis le 14 octobre 1810. Chateaubriand et M. Pasquier devaient se retrouver à la Chambre des pairs et à l'Académie française.(retour)

Note 164: Cet incendie eut lieu dans la nuit du 16 au 17 février 1776. Le feu prit dans les magasins qui occupaient le rez-de-chaussée de la maison de M. White, dont le premier étage, ainsi que nous l'avons dit, était habité par la famille Chateaubriand. Ces magasins servaient d'entrepôt à un marchand épicier et renfermaient beaucoup de matières combustibles. Les progrès du feu furent rapides, et la maison toute entière serait sans doute devenue la proie des flammes, si le cocher du Carrosse public, qui partait cette nuit-là pour Rennes, n'avait heureusement donné l'alarme. (Ch. Cunat, op. cit.)(retour)

Note 165: Le roman de Rou (Rollon, duc de Normandie), fut composé au XIIe siècle par le trouvère normand Robert Wace. L'immense forêt qui couvrait la partie centrale de la péninsule armoricaine y est, en effet, appelée la forêt de Brecheliant. Chez d'autres poètes du moyen-âge, ce nom devient Brécilien ou Brecelien, Breseliand, Bersillant, ou plus généralement Broceliande. L'un d'eux en donne cette explication:

E ce fut en Broceliande,
Une broce (une forêt) en une lande.

(Voir Brocéliande et ses chevaliers, par M. Baron du Taya, p. 6, et Histoire de Bretagne, par Arthur de la Borderie, tome I, p. 44, 45.)(retour)

Note 166: A la suite de la lecture d'une partie de ses Mémoires, faite en 1834 chez Mme Récamier, Chateaubriand communiqua aux journaux divers fragments de son ouvrage. Les pages sur le Printemps en Bretagne furent publiées dans le Panorama littéraire de l'Europe (tome II, IVe livraison; avril 1834). Les deux paragraphes qu'on a lus plus haut n'en formaient alors qu'un seul, dont le texte, assez différent du texte actuel, mérite d'être conservé. Voici cette première version:

«L'aspect du pays, entrecoupé de fossés boisés, est celui d'une continuelle forêt, et rappelle l'Angleterre. Des vallons étroits et profonds où coulent, parmi des saulaies et des chenevières, de petites rivières non navigables, présentent des perspectives riantes et solitaires. Les futaies à fond de bruyères et à cépées de houx, habitées par des sabotiers, des charbonniers et des verriers tenant du gentilhomme, du commerçant et du sauvage; les landes nues, les plateaux pelés, les champs rougeâtres de sarrasin qui séparent ces vallons entre eux, en font mieux sentir la fraîcheur et l'agrément. Sur les côtes se succèdent des tours à fanaux, des clochers de la renaissance, des vigies, des ouvrages romains, des monuments druidiques, des ruines de châteaux: la mer borde le tout.»] (retour)

Note 167: «J'ai vu dans l'île de Céos un bas-relief antique qui représentait les Néréides attachant des festons au bas de la robe de Cérès.» Manuscrit de 1834. (retour)

Note 168: «Quelques fenêtres grillées, d'un goût mauresque...» Manuscrit de 1826 et Manuscrit de 1834.(retour)

Note 169: «L'arrivée de sa famille dans un lieu où il vivait selon ses goûts...» Manuscrit de 1826. -- «La réunion de la famille dans le lieu de son choix...» Manuscrit de 1834.(retour)

Note 170: «Cette cour était formée par le corps de logis d'entrée, par un autre corps de logis parallèle, qui réunissait également deux tours plus petites que les premières, et par deux autres courtines qui rattachaient la grande et la grosse tour aux deux petites tours. Le château entier avait la figure d'un char à quatre roues.» Manuscrits de 1826 et de 1834.(retour)

Note 171: «Mme de Sévigné vantait en 1669 ces vieux ombrages.» -- Manuscrit de 1826.(retour)

Note 172: «On apercevait le haut clocher de la paroisse et les maisons confuses de Combourg...» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 173: Le château qui fut comme la seconde patrie de Chateaubriand appartient toujours à sa famille. Mme la comtesse de Chateaubriand, née Bernon de Rochetaillée, veuve du comte Geoffroy de Chateaubriand, petit-neveu de l'auteur du Génie du Christianisme, habite Combourg la plus grande partie de l'année et y conserve avec un soin pieux tout ce qui rappelle la mémoire du grand écrivain.(retour)

Note 174: Urbain-René De Hercé, né à Mayenne le 6 février 1726, sacré évêque de Dol le 5 juillet 1757. Il fut fusillé, le 28 juillet 1795, non à Quiberon, dans le Champ du martyre, mais à Vannes, sur la promenade de la Garenne, en même temps que Sombreuil et quatorze autres victimes, parmi lesquelles était son frère, François de Hercé, grand-vicaire de Dol, né à Mayenne, le 8 mai 1733. (Voir les Débris de Quiberon, par Eugène de la Gournerie, p. 13. -- Consulter aussi, dans l'Histoire de la persécution révolutionnaire en Bretagne, par l'abbé Tresvaux, la notice sur Mgr. de Hercé. Il était le cinquième des dix-neuf enfants vivants de Jean-Baptiste de Hercé et de Françoise Tanquerel.)(retour)

Note 175: Après avoir cité ce passage, M. de Marcellus ajoute: «J'ai eu bien des fois l'occasion de constater l'exactitude de ces traits si habilement tirés du caractère de M. de Chateaubriand, si justes et si vrais sous sa main, qu'on croirait impossible de les dessiner soi-même.» (Chateaubriand et son temps, p. 15.)(retour)

Note 176: «Depuis que j'ai acquis une malheureuse célébrité, il m'est arrivé de passer des jours, des mois entiers avec des personnes qui ne se souvenaient plus que j'avais fait des livres; moi-même je l'oubliais, si bien que cela nous paraissait à tous une chose de l'autre monde. Écrire aujourd'hui m'est odieux, non que j'affecte un sot dédain pour les lettres, mais c'est que je doute plus que jamais de mon talent, et que les lettres ont si cruellement troublé ma vie que j'ai pris mes ouvrages en aversion.» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 177: Le Manuscrit de 1826 renferme ici une courte description du jeu de la quintaine. «Tous les nouveaux mariés de l'année dans la mouvance de Combourg étaient obligés, au mois de mai, de venir rompre une lance de bois contre un poteau placé dans un chemin creux qui passait au haut du grand mail; les jouteurs étaient à cheval; le baillif, juge du camp, examinait la lance, déclarait qu'il n'y avait ni fraude ni dol dans les armes; on pouvait courir trois fois contre le poteau, mais au troisième tour, si la lance n'était pas rompue, les gabeurs du tournoi champêtre accablaient de plaisanteries le joutier maladroit, qui payait un petit écu au seigneur.»(retour)

Note 178: Dans cette peinture de la petite société de Combourg, Chateaubriand a été scrupuleusement exact, comme il le sera du reste en toute circonstance, ainsi qu'on le verra de plus en plus en avançant dans la lecture des Mémoires. -- Noble Me François-Jean-Baptiste Potelet, seigneur de Saint-Mahé et de la Durantais, après avoir servi dans la marine de la compagnie des Indes, épousa, le 6 octobre 1767, à Combourg, Marie-Marguerite de Lormel. Sa fille aînée, Marie-Marguerite, née en 1768, la même année que Chateaubriand, se maria en 1789 à Pierre-Emmanuel-Vincent-Marie de Freslon de Saint-Aubin, président des requêtes au Parlement de Bretagne.(retour)

Note 179: Gilles-Marie de Launay, sieur de la Biliardière, d'abord procureur fiscal de Bécherel, puis sénéchal des juridictions du Vauruffier, de la vicomté de Besso et du marquisat de Caradenc, était devenu plus tard entreposeur des fermes du roi à Combourg. Né à Bécherel, il avait épousé à Bain, le 17 juillet 1750, Marie-Anne Nogues, dont étaient nés, de 1752 à 1769, treize enfants (et non douze), cinq garçons et huit filles. David, le compagnon de jeux de Chateaubriand, était bien, comme il le dit, le plus jeune des fils.(retour)

Note 180: J'ai retrouvé mon ami David: je dirai quand et comment. (Note de Genève, 1832.) Ch.(retour)

Note 181: Jean-Baptiste Gesbert, Sr de la Noé-Sécho, sénéchal de la juridiction seigneuriale de Combourg, originaire de Rostrenen, marié à Bécherel, le 22 octobre 1782, à Marie-Jeanne Faisant de la Gantraye.(retour)

Note 182: Me René Petit, né à la Guerche, procureur fiscal du comté de Combourg. Il devint en 1791 juge au district de Dinan. Son fils René-Marie Lucil, né le 29 mars 1783, a été tenu sur les fonts baptismaux par Lucile de Chateaubriand.(retour)

Note 183: Me Julien Corvaisier ou le Corvaisier, notaire et procureur de la juridiction.(retour)

Note 184: L'abbé Chalmel (Jean-François), chapelain du château de Combourg, était petit-fils de Me Noël Chalmel, notaire à Rennes.(retour)

Note 185: Jean Anne Pinot du Petitbois, né à Rennes le 10 janvier 1737, était le fils aîné de Maurille-Anne Pinot, écuyer, seigneur du Petitbois, et de Jeanne-Perrine Guybert. D'abord sous-aide major au régiment de la Reine, puis capitaine de dragons au régiment de Belzunce, il habitait le château du Grandval en Combourg et y mourut, le 10 octobre 1789, en grande odeur de piété (acte d'inhumation). Il avait épousé en Saint-Aubin de Rennes, le 7 mars 1769, Anne-Marc de la Chénardais, décédée à Rennes le 26 vendémiaire an III (17 octobre 1794). -- Le château du Grandval est encore habité aujourd'hui par la famille du Petitbois.(retour)

Note 186: Michel-Charles Locquet, comte de Château-d'Assis, né à Saint-Malo le 14 janvier 1748. Il appartenait à une famille très honorée dans le pays malouin: sa mère était une Trublet. Marié en 1774 à Jeanne-Anne Joséphine de Boisbaudry, il demeurait au château de Triaudin, en Combourg, qui est aujourd'hui habité par le vicomte Roger du Petitbois.(retour)

Note 187: Des Tinténiac, en résidence momentanée chez des amis habitant le pays, auront sans doute fait au château de Combourg des visites dont Chateaubriand avait gardé le souvenir; mais il n'y avait pas de Tinténiac établis à Combourg ou dans les paroisses environnantes.(retour)

Note 188: Nicolas-Pierre Philippes, seigneur de Trémaudan, ancien officier de dragons au régiment de la Ferronnais, était né à Pontorson le 19 septembre 1749, fils d'écuyer Pierre Philippes, seigneur de Villeneuve Torrens, et d'Augustine de Lantivy. Il avait épousé, à Saint-Malo, le 24 janvier 1769, Marie-Louise Mazin, dont il eut plusieurs enfants nés à Combourg de 1770 à 1786.(retour)

Note 189: René-Malo Sévin fut nommé recteur de la paroisse de Combourg en 1776. Il refusa de prêter serment à la constitution civile du clergé, et passa à Jersey en 1792. Rentré en 1797, il fut réinstallé en 1803 à la cure de Combourg et y mourut en 1817.(retour)

Note 190: Claude-Anne, vicomte, puis marquis, puis duc de Saint-Simon, de la branche de Montbléru, fils de Louis-Gabriel, marquis de Saint-Simon, et de Catherine-Marguerite-Jaquette Pineau de Viennay, naquit au château de la Faye (Charente). Entré très jeune au service militaire, il fut nommé, le 3 janvier 1770, brigadier, puis, le 29 juin 1775, colonel du régiment de Touraine. Il prit part à la guerre d'Amérique, fut élu, en 1789, par le bailliage d'Angoulême, député de la noblesse aux États-Généraux, émigra en Espagne, y prit du service et devint capitaine-général de la Vieille-Castille. Le roi Charles IV le nomma grand d'Espagne en 1803. En 1808, lors de la prise de Madrid par les Français, il fut blessé et fait prisonnier; condamné à mort par un conseil de guerre, il obtint une commutation de peine et fut enfermé dans la citadelle de Besançon, où il resta jusqu'à la chute de l'Empire. Il retourna alors en Espagne et fut créé duc par Ferdinand VII. Il mourut à Madrid le 3 janvier 1819.(retour)

Note 191: J'ai éprouvé un sensible plaisir en retrouvant, depuis la Restauration, ce galant homme, distingué par sa fidélité et ses vertus chrétiennes. (Note de Genève, 1831.) Ch.

Cette note de 1831, relative au marquis de Causans, remplace les lignes suivantes du Manuscrit de 1826, écrites au lendemain de l'ordonnance du 5 septembre 1816, qui prononçait la dissolution de la Chambre introuvable: «J'ai éprouvé un sensible plaisir en retrouvant ce dernier, distingué par ses vertus chrétiennes, dans cette chambre des députés qui fera à jamais l'honneur et les regrets de la France, quand le temps des factions sera passé et celui de la justice venu; dans cette Chambre que la Providence avait envoyée pour sauver la France et l'Europe, qui n'a pu être cassée que par un véritable crime politique, et dont la gloire survivra à la renommée des misérables ministres qui s'en firent les persécuteurs.» -- Causans de Mauléon (Jacques-Vincent, marquis de), né le 31 juillet 1751, était colonel du régiment de Conti, lorsqu'il fut élu député de la noblesse aux États-Généraux pour la principauté d'Orange. Le 17 avril 1790, il fut promu maréchal de camp. La Restauration le nomma lieutenant-général le 23 août 1814. Élu député de Vaucluse à la Chambre introuvable, le 24 août 1815; réélu le 4 octobre 1816; éliminé au renouvellement par cinquième de 1819, renvoyé à la Chambre des députés le 24 avril 1820, il y siégea jusqu'à sa mort, arrivée le 24 avril 1824.(retour)

Note 192: Wignacourt (Antoine-Louis, marquis de), fils de Louis-Daniel, marquis de Wignacourt, et de Marie-Julie de Maizières, né le 22 janvier 1753. Il est porté sur l'État militaire de la France pour 1784 comme mestre de camp lieutenant-colonel en second du régiment de Conti, chevalier de Saint-Louis.(retour)

Note 193: François-Placide Maillard, seigneur de la Morandais, marié en 1757 à Gillette Dastin et père de quinze enfants, dont le dernier, né à Combourg en 1777, eut pour parrain M. de Chateaubriand, père du grand écrivain. Les Maillard de la Morandais étaient d'ancienne noblesse, et de la même famille que les Maillard de Belestre et des Portes, de l'évêché de Nantes, qui ont été maintenus en 1670, après avoir fait preuve de huit générations nobles. Seulement, ceux qui s'étaient établis à Combourg avaient singulièrement dérogé, à raison de leur pauvreté. Les actes paroissiaux qui les concernent ne leur donnent que des qualifications bourgeoises. François-Placide de la Morandais est décédé à Combourg le 30 août 1779.(retour)

Note 194: Le prince Eugène de Savoie-Carignan, né le 22 septembre 1753, était le fils cadet du prince Louis-Victor de Savoie Carignan et de la princesse Christine-Henriette de Hesse-Rheinfelds-Rothembourg. Frère de la princesse de Lamballe, il entra au service de France sous le nom de comte de Villefranche (Villafranca) et fut placé à la tête du régiment de son nom. Le 22 septembre 1781, il épousa, dans la chapelle du château du Parc, en la paroisse de Saint-Méloir-des-Ondes, à quelques lieues de Saint-Malo, Élisabeth-Anne Magon de Boisgarein, fille de Jean-François-Nicolas Maçon, seigneur de Boisgarein et de Louise de Karuel. Ce mariage fut annulé par le Parlement, à la requête des parents du prince. Celui-ci lutta désespérément pour faire reviser cet arrêt. Les tristesses de cette lutte abrégèrent sans doute ses jours, car une mort prématurée l'enleva, le 30 juin 1785. -- Un fils était né de cette union, le 30 septembre 1783: il se fit soldat sous Napoléon et fut nommé, pendant la campagne de Russie, colonel d'un régiment de hussards. Des lettres-patentes de 1810 lui conférèrent le titre de baron. Louis XVIII, en 1814, lui rendit son ancien titre de comte de Villefranche. Il devint officier-général et mourut le 15 octobre 1825. -- Il avait épousé, le 9 octobre 1810, Pauline-Antoinette Bénédictine-Marie de Quélen d'Estuer de Caussade, fille du duc de la Vauguyon; le fils issu de ce mariage, Eugène-Emmanuel-Joseph-Marie-Paul-François, reprit le rang de ses ancêtres, lorsque la branche de Carignan monta sur le trône de Sardaigne avec le roi Charles-Albert, petit-neveu du mari de Mlle de Boisgarein. Le petit-fils de cette dernière, par décret royal du 18 avril 1834, fut reconnu héritier présomptif de la couronne, en cas d'extinction de la branche régnante. A plusieurs reprises, pendant que le roi était à la tête de son armée, lors des guerres de l'indépendance italienne, le prince Eugène de Savoie-Carignan remplit les fonctions de lieutenant-général du royaume. Il est mort le 15 décembre 1886, laissant de son mariage morganatique avec Dlle Félicité Crosic, contracté le 25 novembre 1863, six enfants, dont trois fils, qui sont aujourd'hui les derniers descendants par les mâles du mariage romanesque célébré, le 22 septembre 1781, dans la chapelle du château du Parc. Le roi d'Italie leur a accordé, en 1888, le nom de Villafranca-Soissons, avec le titre de comte.(retour)

Note 195: Lacretelle (Pierre-Louis) dit l'Aîné (1751-1824), membre de l'Académie française. Avocat à Metz, puis à Paris, il plaida peu, mais ses mémoires judiciaires lui valurent une assez grande célébrité.(retour)

Note 196: Le Père de famille, de Diderot, imprimé dès 1758, ne fut représenté à la Comédie Française que le 18 février 1768. Le succès du reste fut médiocre. La pièce n'eut que sept représentations.(retour)

Note 197: Le double mariage des deux sœurs aînées de Chateaubriand eut lieu le 11 janvier 1780. Marie-Anne-Françoise épousait Jean-Joseph Geffelot, comte de Marigny. Bénigne-Jeanne épousait Jean-François-Xavier, comte de Québriac, seigneur de Patrion.(retour)

Note 198: Maître Noël Le Lavandier, apothicaire, marié à Dingé, près de Combourg, le 7 juillet 1751, était originaire de la paroisse de Vieuvel, où sa famille, venue de Normandie, s'était établie au XVIIe siècle.(retour)

Note 199: De Buonaparte et des Bourbons. (Note de Genève, 1831.) Ch.(retour)

Note 200: Charles-Hilaire de Chateaubriand, né en 1708, successivement recteur de Saint-Germain-de-la-mer au diocèse de Saint-Brieuc, de Saint-Étienne de Rennes en 1748, de Bazouge-du-Désert en 1767, et de Toussaint de Rennes en 1770. Il résigna en 1776 et mourut au Val des Bretons en Pleine-Fougères, le 12 août 1782. (Pouillé de Rennes, IV, 120; V, 557, 655, 658; Paris-Jallobert, Bazouge, p. 27, Pleine-Fougères, p. 15 et 55.)(retour)

Note 201: Génie du christianisme, première partie, livre I, chapitre VII: De la Communion.(retour)

Note 202: «De tout ce que j'ai planté à Combourg, une croix seule est restée debout, comme si je ne pouvais rien créer de durable que pour la douleur, ni marquer mon passage sur la terre autrement que par des monuments de tristesse.» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 203: Geoffroy (Julien-Louis), né à Rennes le 17 août 1743, mort à Paris le 24 février 1814. Créateur du feuilleton littéraire, il fut de 1808 à 1814, le prince des critiques. Ses articles ont été réunis en six volumes, sous le titre de Cours de littérature dramatique. Il avait été élève du collège de Rennes, de 1750 à 1758. -- Geoffroy et la critique dramatique sous le Consulat et l'Empire, par Charles-Marc Des Granges, un vol. in-8° 1897.(retour)

Note 204: Ginguené (Pierre-Louis), né à Rennes le 25 avril 1748, mort à Paris le 16 novembre 1816. Placé au collège de Rennes, il y commença ses études sous les jésuites et les termina, après leur expulsion (en 1762), sous les prêtres séculiers qui leur succédèrent. Son ouvrage le plus important est l'Histoire littéraire d'Italie (Paris, 1811-1824, 9 vol. in-8°).(retour)

Note 205: Parny (Evariste-Désiré De Forges de), né à l'île Bourbon le 6 février 1753, mort à Paris le 5 décembre 1814. A l'âge de 9 ans, il fut envoyé en France et mis au collège de Rennes; il y fit ses études avec Ginguené, lequel plus tard a publiquement payé sa dette à ses souvenirs par une agréable épître de 1790, et par son zèle à défendre la Guerre des Dieux dans la Décade. (Sainte-Beuve, Portraits contemporains et divers, tome III, p. 124.)(retour)

Note 206: Le Collège de Rennes était un des plus importants de France. Il avait été fondé par les Jésuites en 1607. Lorsqu'ils le quittèrent, en 1762, un collège communal, aussitôt organisé, fut installé dans les bâtiments qu'ils venaient de quitter. C'est encore dans le même local qui se trouve aujourd'hui le lycée de Rennes, mais l'étendue en a été fort réduite. Il faut, pour avoir une idée de ce qu'était, au XVIIIe siècle, ce collège qui semblait «un monde» à Chateaubriand, consulter les plans que l'autorité royale fit dresser pendant sa procédure contre les Jésuites, plans qui furent envoyés à la cour de Rome et dont le Cabinet des Estampes possède un double, en 5 vol. in-f°. En 1761, le collège de Rennes comptait 4,000 élèves. Histoire de Rennes, par Ducrest et Maillet, p. 229. -- Rennes ancien et moderne, par Ogée et Marteville, tome I, p. 204, 235, 237. -- Geoffroy, par Charles-Marc Des Granges, p. 3 et suivantes.(retour)

Note 207: «... Saint-Riveul, jeune gentilhomme qui eut l'honneur d'être la première victime de la Révolution. Il fut tué dans les rues de Rennes en se rendant avec son père à la Chambre de la noblesse.» Manuscrit de 1826. -- André-François-Jean du Rocher de Saint-Riveul, née à Plénée, fils de Henri du Rocher, comte de Saint-Riveul, et de Anne-Bernardine Roger. Il n'était âgé que de 17 ans, lorsqu'il fut tué, le 27 janvier 1789.(retour)

Note 208: Jean Desmarest, avocat général au Parlement de Paris, décapité en 1383. On l'accusait d'avoir encouragé par sa faiblesse, l'année précédente, la révolte et les excès des Maillotins.(retour)

Note 209: Moreau Jean-Victor, né à Morlaix le 11 août 1763, mort à Lauen le 2 septembre 1813.(retour)

Note 210: Joseph-Pierre Picot de Limoëlan de Clorivière était exactement du même âge que Chateaubriand. Il était né à Broons le 4 novembre 1768. Après avoir été camarades de collège à Rennes, ils se retrouvèrent à l'école ecclésiastique de la Victoire à Dinan. Entré dans l'armée à l'âge de quinze ans, Limoëlan était officier du roi Louis XVI lorsqu'éclata la Révolution. Il émigra, puis rentra bientôt en Bretagne, chouanna dans les environs de Saint-Méen et de Gaël et devint adjudant-général de Georges Cadoudal. En 1798, il remplaça temporairement Aimé du Boisguy dans le commandement de la division de Fougères. A la fin de 1799, alors que la plupart des autres chefs royalistes se voyaient contraints de déposer les armes, il refusa d'adhérer à la pacification et vint à Paris. Il était à la veille d'épouser une charmante jeune fille de Versailles, Mlle Julie d'Albert, à laquelle il était fiancé depuis plusieurs années, lorsqu'eut lieu, rue Saint-Nicaise, l'explosion de la machine infernale (3 nivôse an VIII -- 24 décembre 1799). Limoëlan avait été l'un des principaux agents du complot. Grâce au dévouement de sa fiancée, il put échapper aux recherches de la police, gagner la Bretagne et s'embarquer pour l'Amérique. Son premier soin, en arrivant à New-York, fut d'écrire à la famille de Mlle d'Albert, lui demandant de venir le rejoindre aux États-Unis, où le mariage serait célébré. La réponse fut terrible pour Limoëlan. Mlle d'Albert, au moment où il courait les plus grands dangers, avait fait vœu de se consacrer à Dieu, si son fiancé parvenait à s'échapper. Fidèle à sa promesse, elle le suppliait d'oublier le passé pour ne songer qu'à l'avenir éternel. Le jeune officier entra en 1808 au séminaire de Baltimore. Commençant une vie nouvelle, il abandonna le nom de Limoëlan pour prendre celui de Clorivière, sous lequel il est uniquement connu aux États-Unis. Il fut ordonné prêtre au mois d'août 1812 et devint curé de Charleston. Lorsque, deux ans plus tard, l'abbé de Clorivière apprit la restauration des Bourbons, le chef royaliste se retrouva sous le prêtre, et il entonna avec enthousiasme dans son église un Te Deum d'actions de grâces. En 1815, il se rendit en France, mais dans l'unique but de liquider ce qui lui restait de sa fortune, afin d'en rapporter le produit en Amérique et de l'employer tout entier à l'avantage de la religion. En 1820, il fut nommé directeur du couvent de la Visitation de Georgetown. Ce couvent avait été fondé, en 1805, par une pieuse dame irlandaise, miss Alice Lalor, et un assez grand nombre de saintes filles y avaient pris le voile à son exemple. Mais, en 1820, l'établissement, privé de toutes ressources financières, végétait péniblement, et les bonnes sœurs se voyaient menacées chaque année d'être dispersées. L'abbé de Clorivière se chargea d'assurer l'avenir de cette utile fondation. Il construisit à ses frais un pensionnat pour l'éducation des jeunes personnes, et une élégante chapelle, dédiée au Sacré-Cœur de Jésus. Il contribua aussi par de larges donations à l'établissement d'un externat gratuit pour les enfants pauvres. C'est dans le monastère même dont il est le second fondateur que l'abbé de Clorivière mourut, le 20 septembre 1826, laissant une mémoire qui est encore en vénération aux États-Unis. -- Mlle Julie d'Albert lui survécut longtemps. Elle resta fidèle à son vœu de célibat et refusa les nombreux partis qui se présentèrent à elle dans sa jeunesse. Mais elle ne se sentit pas la vocation d'entrer au couvent, et après plusieurs tentatives, qui montrèrent que la vie religieuse ne lui convenait pas, elle obtint, à l'âge de cinquante ans, du pape Grégoire XVI, d'être relevée du vœu imprudent qu'elle avait formé. Elle est morte à Versailles, dans un âge avancé, après une vie consacrée tout entière à l'exercice de la piété et de la charité. -- L'abbé de Clorivière avait écrit, sur les événements auxquels il avait pris part en France, de volumineux mémoires. Arrivé à la fin de la relation de chaque année, il cachetait le cahier et ne l'ouvrait plus. «Ces cahiers, dit-il plus d'une fois aux bonnes sœurs de Georgetown, contiennent beaucoup de faits intéressants et importants pour l'histoire et la religion.» Par son testament, il ordonna de brûler ses cahiers. Cette clause a été fidèlement observée à sa mort, et on doit le regretter vivement pour l'histoire. Au moment de mourir, l'abbé de Clorivière ne voulait pas qu'il restât rien de ce qui avait été Limoëlan. Limoëlan pourtant vivra. Dans le temps même où il donnait l'ordre de détruire ses Mémoires. Chateaubriand écrivait les siens et assurait ainsi l'immortalité à son camarade de collège. Voir dans la Revue de Bretagne et de Vendée, tome VIII, p. 343, la notice sur l'Abbé de Clorivière, par C. de Laroche-Héron (Henry de Courcy.)(retour)

Note 211: Chateaubriand glisse ici sur cette petite aventure de collège; dans le Manuscrit de 1826, il avait un peu plus appuyé, n'omettant aucun détail. Voici cette première version: «Un quart d'heure après, voici venir le préfet sur la pointe du pied. Comme avec raison nous lui étions fort suspects, il s'arrête à notre porte, écoute, regarde, n'aperçoit point de lumière, croit le trou bouché, y enfonce imprudemment le doigt... Qu'on juge de sa colère? «Qui a fait cela?» s'écrie-t-il en se précipitant dans la chambre. Limoëlan d'éclater de rire et Gesril de dire en nasillant avec un air moitié niais, moitié goguenard: «Qu'est-ce donc, monsieur le préfet?» Quand nous sûmes ce que c'était, nous voilà, Saint-Riveul et moi, à nous pâmer de rire comme Limoëlan, à nous boucher le nez et à nous coucher sous nos couvertures, tandis que Gesril, se levant en chemise, offrit gravement au préfet sa cuvette et son pot à l'eau.»(retour)

Note 212: Le mariage de la troisième sœur de Chateaubriand avec Annibal Pierre-François de Farcy de Montavalon eut lieu en 1782. Le comte de Farcy était capitaine au régiment de Condé, infanterie.(retour)

Note 213: Il s'agit ici de Thérèse-Josèphe de Moëlien, fille de Sébastien-Marie-Hyacinthe de Moëlien, chevalier seigneur de Trojolif (et non Tronjoli), Kermoisan, Kerguelenet et autres lieux, conseiller au Parlement de Bretagne, et de Périnne-Josèphe de la Belinaye. Elle était née à Rennes le 14 juillet 1759. Elle avait donc vingt-trois ans, lorsque Chateaubriand la vit à Combourg. Quand il écrivit ses Mémoires, il la revoyait encore avec ses yeux de collégien; mais les témoignages contemporains s'accordent à dire qu'elle n'était ni belle ni jolie. Les mots du texte: et intime amie du marquis de la Rouërie, ne se trouvent pas dans le Manuscrit de 1826. Chateaubriand ici a trop facilement accepté un bruit sans fondement. Thérèse de Moëlien aimait -- non la Rouërie -- mais le major américain Chafner, qu'elle devait épouser, si elle survivait à la conspiration, où tous deux jouaient un rôle si actif. Le courageux Chafner, en apprenant les dangers dont le trône de Louis XVI était entouré, était accouru d'Amérique pour mettre son dévouement au service du roi qui avait assuré l'indépendance de sa patrie. Thérèse de Moëlien, traduite devant le tribunal révolutionnaire de Paris, avec vingt-six autres accusés, impliqués, comme elle, dans ce qu'on appela la Conjuration de Bretagne, fut guillotinée, le 18 juin 1793. Le major Chafner, qui n'avait pu être arrêté, se trouvant à Londres au moment où la conspiration fut découverte, revint en Bretagne et périt à Nantes, sous le proconsulat de Carrier, après avoir, au milieu des Vendéens, bravement vengé la mort de Mlle de Moëlien. (Biographie bretonne, tome II, article La Rouërie; -- Crétineau-Joly, Histoire de la Vendée militaire, tome III, chapitre II; -- Théodore Muret, Histoire des guerres de l'Ouest, tome III; -- Frédéric de Pioger, la Conspiration de La Rouërie: -- G. Lenotre.)(retour)

Note 214: Allusion au titre des hymnes mystiques d'Orphée qui s'appelaient parfums (Thymiamata). (Comte de Marcellus, Chateaubriand et son temps, p. 17.)(retour)

Note 215: Ravenel du Boisteilleul (Jean-Baptiste-Joseph-Eugène de), fils de messire Théodore-François de Ravenel, seigneur du Boisteilleul, du Boisfaroye, etc., et de dame Angélique-Julie de Broise, né à Amanlis (diocèse de Rennes) le 13 septembre 1738, décédé à Rennes le 20 juin 1815. Il fut promu capitaine de vaisseau le 13 mars 1779. L'année suivante, dans un combat près le Cap Français (capitale de l'île Saint-Domingue) contre la frégate anglaise l'Unicorn, il réussit à s'emparer de ce bâtiment. Il se retira du service, pour cause de santé, non avec le grade de chef d'escadre, mais avec celui de capitaine de vaisseau, brigadier des armées navales. (Archives du Ministère de la Marine.) Cousin-germain de la mère de Chateaubriand, le comte de Ravenel du Boisteilleul était par conséquent l'oncle à la mode de Bretagne du grand écrivain. Il avait épousé à Saint-Germain de Rennes, le 11 avril 1780, Demoiselle Marie-Thérèse Mahé de Kerouan, fille d'un ancien capitaine au régiment de Piémont, qui lui survécut de longues années et mourut à Rennes le 25 avril 1837.(retour)

Note 216: Hyacinthe-Eugène-Pierre de Ravenel du Boisteilleul, né le 17 mars 1784, capitaine d'artillerie, décoré sur le champ de bataille de Smolensk, décédé à la Tricaudais en Guichen le 13 juin 1868.(retour)

Note 217: Pauline-Zoé-Marie de Farcy de Montavallon, née à Fougères le 15 juin 1784, mariée le 16 novembre 1814 à Hyacinthe de Ravenel du Boisteilleul, décédée à Rennes le 24 décembre 1850.(retour)

Note 218: Charles-Jean, comte d'Hector, né à Fontenay-le-Comte, en Poitou, le 22 juillet 1722. Chef d'escadre le 4 mai 1779, après les plus glorieux services de mer, il fut nommé, l'année suivante, commandant du port de Brest et remplit ces hautes fonctions jusqu'au mois de février 1791. Obéissant à la voix des princes qui l'appelaient à Coblentz, il se rendit près d'eux et reçut le commandement du Corps de la marine royale, exclusivement composé d'officiers de marine. A la fin de la campagne, ce corps fut licencié; mais il fut réorganisé deux ans plus tard, en Angleterre, et le comte d'Hector en fut de nouveau nommé colonel, ce qui fit donner à ce régiment, formé tout entier d'officiers de marine, comme en 1792, le nom de régiment d'Hector. Nous avions vu, dans la note sur Gesril, que ce dernier en faisait partie. Lorsque ce régiment fut appelé à faire partie de l'expédition de Quiberon, il se trouva que les intrigues de Puysaie avaient fait écarter le comte d'Hector. Ses instances furent telles qu'à la fin il lui fut accordé d'aller rejoindre son poste de combat. Mais comme il faisait route pour la Bretagne, il apprit le désastre de l'expédition (21 juillet 1795). D'Hector avait alors 73 ans, et il lui fallait renoncer à l'espoir qu'il avait eu de mourir sur le champ de bataille; il se renferma dans la retraite, près de la ville de Reading, à treize lieues de Londres, et c'est là qu'il mourut, le 18 août 1808, à l'âge de 86 ans. -- Le comte d'Hector a laissé des Mémoires, encore inédits, mais qui, nous l'espérons, verront bientôt le jour.(retour)

Note 219: La Pérouse (Jean-François de Galaup, comte de), né au Gua, près d'Albi, en 1741, mort près de l'île Vanikoro à une époque incertaine, mais vraisemblablement dans le courant de l'année 1788. C'est à Brest qu'il prit la mer, le 1er août 1785, avec les frégates la Boussole et l'Astrolabe, emportant les instructions que Louis XVI, d'une main savante, avaient rédigées pour lui. Tous deux, hélas! allaient périr et disparaître presque à la même heure: le marin au sein de la nuit et des tempêtes de l'Océan, le roi au milieu des orages plus terribles encore de la Révolution.(retour)

Note 220: Ce livre a été composé au château de Montboissier (juillet-août 1817) et à la Vallée-aux-Loups (novembre 1817). -- Il a été revu en décembre 1846.(retour)

Note 221: Le château de Montboissier est situé dans la commune de Montboissier, canton de Bonneval, arrondissement de Châteaudun (Eure-et-Loir).(retour)

Note 222: La comtesse de Colbert-Montboissier était la petite-fille de Malesherbes. Fille du marquis de Montboissier, l'un des gendres du défenseur de Louis XVI, elle avait épousé, en 1803, le comte de Colbert de Maulevrier (Édouard-Charles-Victornien), descendant du comte de Maulevrier, lieutenant-général des armées du roi, l'un des frères du grand Colbert. Capitaine de vaisseau en 1791, le comte de Colbert avait émigré l'année suivante et avait pris part à l'expédition de Quiberon. La Restauration le fit capitaine des gardes du pavillon amiral (1814). Retiré avec le grade de contre-amiral à Montboissier, il fut élu député d'Eure-et-Loir, le 22 août 1815, et fit partie de la majorité de la Chambre introuvable. Il mourut à Paris le 2 février 1820.(retour)

Note 223: «Il acheta bientôt une charge de maître des requêtes, que M. de Malesherbes le força de vendre pour entrer au service, comme la véritable carrière d'un homme de son nom, lorsqu'il épousa mademoiselle de Rosambo.» Manuscrit de 1826. -- Le mariage du frère de Chateaubriand avec Aline-Thérèse Le Peletier de Rosambo eut lieu en novembre 1787.(retour)

Note 224: M. de La Luzerne, qui prit possession de l'ambassade de Londres au mois de janvier 1788, comptait, en effet, parmi les secrétaires attachés à son ambassade, André de Chénier, alors âgé de vingt-cinq ans seulement. Le poète, qui prenait d'ailleurs de fréquents congés, revint définitivement à Paris au mois de juin 1791. (Notice sur André de Chénier, par M. Gabriel de Chénier, p. 11. -- André Chénier, sa vie et ses écrits politiques, par L. Becq de Fouquières, p. 12.)(retour)

Note 225: Mirabeau écrivait à son ami Mauvillon, le 3 décembre 1789: «Ce qu'on vous avait dit relativement au Bosphore (c'est-à-dire à l'ambassade de Constantinople) a été vrai, et beaucoup d'autres choses plus belles encore; mais tout cela n'était qu'un honorable exil, et c'est ici que je suis nécessaire, si je suis nécessaire à quelque chose.» -- Voir les Mirabeau, par Louis de Loménie, tome V, page 31.(retour)

Note 226: Sur l'abbé Duhamel et le séjour de Chateaubriand à Dinan, voir à l'Appendice, le n° V: Chateaubriand et le collège de Dinan.(retour)

Note 227: Duclos (Charles Pinot, sieur), historiographe de France et secrétaire perpétuel de l'Académie française, né à Dinan le 12 février 1704, mort le 26 mars 1772. Maire de sa ville natale, de 1741 à 1750, il s'occupa avec sollicitude de ses intérêts et de son embellissement, encore bien qu'il résidât habituellement à Paris. C'est à lui qu'on doit les deux promenades des Grands et des Petits-Fossés, qui longent les anciennes fortifications de Dinan.(retour)

Note 228: «Broussais fut envoyé au collège de Dinan, où il fit un séjour de huit années.» Notice sur Broussais, par le Dr de Kergaradec, membre de l'Académie de Médecine.(retour)

Note 229: «On sait l'effroyable abus que Broussais et son école ont fait de la diète et des sangsues.» Dr de Kergaradec, op. cit.(retour)

Note 230: François-Jean Raphaël de Brunes, comte (et non marquis) de Montlouet, commissaire des États de Bretagne, né à Pleine-Fougères le 13 août 1728, mort à Bains-les-Bains en Lorraine le 2 août 1787.(retour)

Note 231: Luc-Jean, comte de Gouyon-Beaufort (et non Goyon), chevalier de Saint-Louis, né le 15 février 1725. Il fut guillotiné à Paris le 2 messidor an II (20 juin 1794). Sur les listes de MM. Campardon et Wallon, dans leurs Histoires du Tribunal révolutionnaire, il figure sous le nom de Guyon de Beaufort.(retour)

Note 232: «Les cavaliers turcs, dit l'abbé de Marolles, battus par l'armée chrestienne, près de Komorre, laissèrent neuf cornettes en la puissance des victorieux avec un bon nombre de chevaux, entre lesquels se trouvèrent quatre belles cavales d'une blancheur de poil extraordinaire, qui furent envoyées à ma mère avec un petit carrosse à la mode de ce pays-là, dont elle se servit assez longtemps pour aller à l'église de la paroisse qui estait à une petite lieue de notre maison, ou faire quelques visites dans le voisinage, et quand elle nous menait avec elle, ce nous estait une joye nompareille, parce qu'avec ce qu'elle nous estait la meilleure du monde, et que nous estions ravis de la voir, ce nous estait une réjouyssance nompareille de sortir et de nous aller promener.» Les Mémoires de Michel de Marolles, abbé de Villeloin, tome 1, p. 7. -- 1656.(retour)

Note 233: «Un seul incident variait ces soirées qui figureraient dans un roman du XIe siècle: Il arrivait que mon père, interrompant sa promenade, venait quelquefois s'asseoir au foyer pour nous faire l'histoire de la détresse de son enfance et des traverses de sa vie. Il racontait des tempêtes et des périls, un voyage en Italie, un naufrage sur la côte d'Espagne.

«Il avait vu Paris; il en parlait comme d'un lieu d'abomination et comme d'un pays étranger. Les Bretons trouvaient que la Chine était dans leur voisinage, mais Paris leur paraissait au bout du monde. J'écoutais avidement mon père. Lorsque j'entendais cet homme si dur à lui-même regretter de n'avoir pas fait assez pour sa famille, se plaindre en paroles courtes mais amères de sa destinée, lorsque je le voyais à la fin de son récit se lever brusquement, s'envelopper dans son manteau, recommencer sa promenade, presser d'abord ses pas, puis les ralentir en les réglant sur les mouvements de son cœur, l'amour filial remplissait mes yeux de larmes; je repassais dans mon esprit les chagrins de mon père, et il me semblait que les souffrances endurées par l'auteur de mes jours n'auraient dû tomber que sur moi.» Manuscrit de 1826.(retour)

Note 234: Voir, à l'Appendice, le n° VI: Histoires de voleurs et de revenants.(retour)

Note 235: «Je composai alors la petite pièce sur la forêt: Forêt silencieuse, que l'on trouve dans mes ouvrages» Manuscrit de 1826. A son retour de l'émigration, en 1800, Chateaubriand fit insérer ces vers dans le Mercure de France, que dirigeait son ami Fontanes. Ils reparurent, en 1828, au tome XXII des Œuvres complètes.(retour)

Note 236: Voyez mes Œuvres complètes. (Paris, note de 1837.) Ch.(retour)

Note 237: Sous ce titre: Lucile de Chateaubriand, ses contes, ses poèmes, ses lettres, précédés d'une Étude sur sa vie, M. Anatole France a publié, en 1879, un exquis petit volume. On y trouve, à la suite des trois petits poèmes insérés ici dans les Mémoires, -- L'Aurore, A la lune, l'Innocence, -- deux contes publiés dans le Mercure, du vivant de Lucile, mais contre son gré: L'Arbre sensible, conte oriental, et l'Origine de la Rose, conte grec. Viennent ensuite trois lettres à M. de Chênedollé, deux lettres à madame de Beaumont, onze lettres ou fragments de lettres à son frère. C'est peu de chose sans doute, assez pourtant pour que le nom de Lucile de Chateaubriand soit immortel.(retour)

Note 238: Malfilâtre (Alexandre-Henri de), né le 19 février 1757. Pourvu d'un office de conseiller non originaire au Parlement de Bretagne, par lettres du 3 mars 1785, il fut reçu le 3 mai suivant. Pendant l'émigration, il entra dans les ordres et mourut à Somers-town, près Londres, le 18 mars 1803. (Lucile de Chateaubriand et M. de Caud, par Frédéric Saulnier, p.7.) M. Saulnier ajoute: «Il était, croyons-nous, d'origine normande, et peut-être parent du poète du même nom. Au XVIIIe siècle, il y avait des Malfilâtre aux environs de Falaise.»(retour)

Note 239: Vers la fin de 1793, Lucile fut arrêtée et enfermée à Rennes, au couvent du Bon-Pasteur, devenu la prison de la Motte, où se trouvaient déjà sa sœur, madame de Farcy, et sa belle-sœur, madame de Chateaubriand. Un document émané du Comité de surveillance de la commune de Rennes relate ainsi les causes de leur incarcération:

«Séance du 8 pluviôse an II (27 janvier 1794) de la République une et indivisible.

«Le Comité de surveillance et révolutionnaire de la commune de Rennes a arrêté d'envoyer au district les motifs qui ont déterminé les incarcérations et arrestations des personnes suivantes:

«1º Julie Chateaubriand, femme Farcy, ex-noble, âgée de 27 ans, envoyée à la maison de réclusion de Rennes, le 21 octobre 1793 (vieux stile), par le Comité de surveillance de Fougères, sans autres motifs;

«2º Lucille Chateaubriand, ex-noble, âgée de 25 ans, regardée comme suspecte aux termes de la loi du 17 septembre (vieux stile);

«3º Céleste Buisson, femme Chateaubriand, ex-noble, âgée de 18 ans, envoyée de Fougères le 21 octobre 1793, même motif

Il ressort de cette pièce que Lucile n'a pas été envoyée de Fougères à Rennes, le 21 octobre 1793, bien qu'à cette époque elle vécût, dans la première de ces deux villes, avec sa sœur et sa belle-sœur. Il est probable qu'elle fut, à ce moment, laissée en liberté, et qu'elle provoqua elle-même son incarcération, pour ne pas quitter la jeune femme, son amie, dont elle avait promis de ne pas se séparer. On lit, en effet, dans une lettre de Lucile, la dernière qu'elle ait écrite à son frère: «Lorsque tu partis pour la seconde fois de France, tu remis ta femme entre mes mains, tu me fis promettre de ne m'en point séparer. Fidèle à ce cher engagement, j'ai tendu volontairement mes mains aux fers, et je suis entrée dans ces lieux destinés aux seules victimes vouées à la mort.» (retour)

Note 240: Lucile, madame de Farcy et leur jeune belle-sœur recouvrèrent la liberté après le 9 thermidor. Elles sortirent de la prison de la Motte le 15 brumaire an III (5 novembre 1794).(retour)

Note 241: Le mariage de Lucile et de M. de Caud eut lieu à Rennes le 15 thermidor an IV (2 août 1796). Le chevalier de Caud (Jacques-Louis-René), fils de Pierre-Julien Caud, sieur du Basbourg, avocat au Parlement, et de dame Jeanne-Rose Baconnière, était né à Rennes le 19 juin 1727. Sur l'État militaire de France pour l'année 1787, il figure avec les qualifications suivantes: «M. le chevalier de Caud, lieutenant-colonel, chevalier de Saint-Louis, commandant le bataillon de garnison du régiment de Monsieur (Troupes provinciales)». Il était, à la même date, commandant pour S. M. des ville et château de Fougères. En 1796, il n'est plus, sur son acte de mariage, que «Jacques-Louis-René Decaud, vivant de son bien». Le jour des épousailles, Lucile avait 31 ans; M. de Caud était presque septuagénaire: il avait 69 ans passés. «Il laissa sa femme, dit Chateaubriand, veuve au bout d'un an.» Il fit même mieux: il la laissa veuve au bout de sept mois et demi. Le 26 ventôse an V (16 mars 1797), l'officier public de Rennes enregistrait le décès de «Jacques-Louis-René Decaud, vivant de son bien, âgé de soixante-dix ans, décédé en sa demeure, rue de Paris, ce matin, environ six heures.» Voir l'étude si intéressante et si complète de M. Frédéric Saulnier sur Lucile de Chateaubriand et M. de Caud. -- M. Anatole France a commis une double erreur, dans sa Notice sur Lucile, page 35, en donnant pour date à son mariage «cette terrible année 1793», et en disant qu'elle épousa «le comte de Caud».(retour)

Note 242: Tavernier (Jean-Baptiste), né en 1605 à Paris, mort en 1686 à Moscou. Après avoir parcouru la plus grande partie de l'Europe, il fit six voyages dans les Indes. Les Voyages de Tavernier en Turquie, en Perse et aux Indes (Paris, 1679) ont été souvent réimprimés.(retour)

Note 243: Chactas fait la même question au P. Aubry -- : «Homme-prêtre, qu'es-tu venu faire dans ces forêts? -- Te sauver, dit le vieillard d'une voix terrible, dompter tes passions, et t'empêcher, blasphémateur, d'attirer sur toi la colère céleste!» (Atala.)(retour)

Note 244: A mesure que j'avance dans la vie, je retrouve des personnages de mes Mémoires: la veuve du fils du médecin Cheftel vient d'être reçue à l'infirmerie de Marie-Thérèse; c'est un témoin de plus de ma véracité (Note de Paris, 1834). Ch.(retour)

Note 245: Par pitié sans doute et par reconnaissance pour le médecin qui l'avait si bien soigné, Chateaubriand n'a pas cru devoir dire ce que fut le rôle de Cheftel fils. Il ne se contenta pas de vendre les secrets du marquis de La Rouërie, il trahit jusqu'au cadavre de celui qui avait été son ami. Ses perfides manœuvres conduisirent au tribunal révolutionnaire ceux dont il avait paru servir les desseins; il fit monter sur l'échafaud ces trois femmes héroïques, Thérèse de Moëlien, Mme de la Motte de la Guyomarais et Mme de La Fonchais, la sœur d'André Desilles.(retour)

Note 246: Pierre Abailard (1079-1142) est né au Pallet, petit bourg à quatre lieues de Nantes.(retour)

Note 247: Ce sont les derniers vers du Paradis perdu, chant XIIe:

The world was all before them, where to choose
Their place of rest, and Providence their guide! (retour)

Note 248: Dans René, Chateaubriand a immortalisé le souvenir de cette dernière visite à Combourg: «J'arrivai au château par la longue avenue de sapins; je traversai à pied les cours désertes; je m'arrêtai à regarder les fenêtres fermées ou demi-brisées, le chardon qui croissait au pied des murs, les feuilles qui jonchaient le seuil des portes, et ce perron solitaire où j'avais vu si souvent mon père et ses fidèles serviteurs. Les marches étaient déjà couvertes de mousse; le violier jaune croissait entre leurs pierres déjointes et tremblantes. Un gardien inconnu m'ouvrit brusquement les portes..... J'entrai sous le toit de mes ancêtres. Je parcourus les appartements sonores où l'on n'entendait que le bruit de mes pas. Les chambres étaient à peine éclairées par la faible lumière qui pénétrait entre les volets fermés: je visitai celle où ma mère avait perdu la vie en me mettant au monde, celle où se retirait mon père, celle où j'avais dormi dans mon berceau, celle enfin où l'amitié avait reçu mes premiers vœux dans le sein d'une sœur. Partout les salles étaient détendues, et l'araignée filait sa toile dans les couches abandonnées. Je sortis précipitamment de ces lieux, je m'en éloignai à grands pas sans oser tourner la tête. Qu'ils sont doux, mais qu'ils sont rapides, les moments que les frères et les sœurs passent dans leurs jeunes années, réunis sous l'aile de leurs vieux parents! La famille de l'homme n'est que d'un jour; le souffle de Dieu la disperse comme une fumée. A peine le fils connaît-il le père, le père le fils, le frère la sœur, la sœur le frère! Le chêne voit germer ses glands autour de lui; il n'en est pas ainsi des enfants des hommes!»(retour)

Note 249: Ce livre a été écrit à Berlin (mars et avril 1821). Il a été revu en juillet 1846.(retour)

Note 250: Le Conservateur avait été fondé par Chateaubriand au mois d'octobre 1818. Il avait pour devise: Le Roi, la Charte et les Honnêtes Gens. Ses principaux rédacteurs étaient, avec Chateaubriand, qui n'a peut-être rien écrit de plus parfait que certains articles de ce recueil, l'abbé de La Mennais, le vicomte de Bonald, Fiévée, Berryer fils, Eugène Genoude, le vicomte de Castelbajac, le marquis d'Herbouville, M. Agier, le cardinal de La Luzerne, le duc de Fitz-James, etc. Le Conservateur cessa de paraître le 29 mars 1820, à la suite du rétablissement de la censure.(retour)

Note 251: Les Mémoires sur la vie et la mort de Mgr le duc de Berry avaient paru dès le mois d'avril 1820.(retour)

Note 252: Chateaubriand fut nommé, par Ordonnance du 28 novembre 1820, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire près la cour de Prusse.(retour)

Note 253: Frédéric-Guillaume II (1744-1797), neveu et successeur du grand Frédéric.(retour)

Note 254: Dorothée, princesse de Courlande, née le 21 août 1795, de Pierre, dernier duc de Courlande, et de Dorothée, comtesse de Miden. Elle épousa, le 22 avril 1810, le comte Edmond de Périgord, neveu du prince de Talleyrand. Ce dernier, à l'époque du Congrès de Vienne, dut renoncer à la principauté de Bénévent et reçut en échange le duché de Dino en Calabre: il en abandonna le titre à son neveu, et sa nièce s'appela dès lors duchesse de Dino. Ce fut à elle qu'il confia le soin de faire les honneurs de son salon. Femme éminente, d'un esprit sérieux, cultivé et indépendant, elle déploya dans cette tâche tant de charme et de tact que l'on accourait à l'hôtel de la rue Saint-Florentin pour elle peut-être plus encore que pour le maître de la maison. Elle ne quitta plus le prince et entoura de soins les années de sa vieillesse. Ce fut elle qui lui parla d'une réconciliation avec l'Église; ce fut sur ses instances qu'il signa, le 17 mai 1838, sa rétractation et sa lettre au Saint-Père. Le 3 mai, précédant de quelques jours dans la tombe son frère le prince de Talleyrand, le duc de Talleyrand-Périgord était mort à l'âge de soixante-dix-huit ans, et ce titre était passé à son fils Edmond de Talleyrand-Périgord. Madame de Dino, devenue duchesse de Talleyrand, mourut à son tour le 19 septembre 1862. (Voir, à l'Appendice du tome III des Souvenirs du baron de Barante, la Notice sur la duchesse de Dino.)(retour)

Note 255: Le comte Roger de Caux, premier secrétaire; le chevalier de Cussy, deuxième secrétaire. -- Le comte Roger de Caux, après avoir été secrétaire à Madrid (1814) et à la Haye (1816), était depuis 1820 secrétaire à Berlin. Lors de la guerre d'Espagne, il fut attaché à l'expédition du duc d'Angoulême avec le titre de chargé d'affaires à Madrid. Il a rempli le fonctions de ministre de France à Hanovre du 1er juin 1823 au 15 mai 1831. -- Le chevalier de Cussy, né à Saint-Étienne-de-Montluc (Loire-Inférieure) le 1er décembre 1795, était deuxième secrétaire à Berlin depuis le 1er février 1820. Il devint en 1823 secrétaire à Dresde. De 1827 à 1845, il fut successivement consul à Fernambouc, à Corfou, à Rotterdam, à Dublin et à Dantzick. Consul général à Palerme (12 mars 1845), puis à Livourne (novembre 1847), il fut mis à la retraite le 13 avril 1848. Il avait épousé en 1828 Mlle Amélie Dubourg de Rosnay, fille du général de ce nom.(retour)

Note 256: Aujourd'hui l'empereur et l'impératrice de Russie. (Paris, note 1832.) Ch. -- Nicolas Ier (1796-1855). Troisième fils de Paul Ier, il monta sur le trône en 1825, à la mort d'Alexandre Ier, son frère aîné, par l'effet de la renonciation de son autre frère, l'archiduc Constantin. Il avait épousé la princesse Charlotte de Prusse, fille du roi Frédéric-Guillaume III.(retour)

Note 257: Sur le cousin Moreau et sur sa mère Julie-Angélique-Hyacinthe de Bedée, sœur de madame de Chateaubriand, voir, à l'Appendice, le n° VII: Le cousin Moreau.(retour)

Note 258: Avec une figure que l'on trouvait charmante, une imagination pleine de fraîcheur et de grâce, avec beaucoup d'esprit naturel, se développèrent en elle ces talents brillants auxquels les amis de la terre et de ses vaines jouissances attachent un si puissant intérêt. Mademoiselle de Chateaubriand faisait agréablement et facilement les vers; sa mémoire se montrait fort étendue, sa lecture prodigieuse; c'était en elle une véritable passion. On a connu d'elle une traduction en vers du septième chant de la Jérusalem délivrée, quelques épîtres et deux actes d'une comédie où les mœurs de ce siècle étaient peintes avec autant de finesse que de goût.» (L'abbé Carron, Vie de Julie de Chateaubriand, comtesse de Farcy.)(retour)

Note 259: J'ai placé la vie de ma sœur Julie au supplément de ces Mémoires. (Note B.) -- Ch.(retour)

Note 260: L'abbé Carron (Guy-Toussaint-Joseph), né à Rennes le 25 février 1760. Réfugié en Angleterre après le 10 Août, il fonda à Somers-Town, près Londres, plusieurs établissements charitables, et notamment deux maisons d'éducation destinées à recevoir les enfants des émigrés pauvres. A la première Restauration il fut invité par Louis XVIII à revenir à Paris, amenant avec lui ses élèves et les dames qui s'étaient consacrées, sous sa direction, à cette œuvre de dévouement. L'Institut des nobles orphelines -- tel fut alors le titre que prit l'établissement de l'abbé Carron -- fut installé rue du faubourg Saint-Jacques, au nº 12 de l'impasse des Feuillantines. Le retour de l'île d'Elbe obligea le saint prêtre à reprendre le chemin de l'exil; il se trouvait, en effet, compris dans l'un des nombreux décrets de proscription que Napoléon avait lancés de Lyon. Il ne revint en France que le 8 novembre 1815. En 1816, la duchesse d'Angoulême consentit à ce que son établissement prit le nom d'Institut royal de Marie-Thérèse. C'est dans cette maison qu'il mourut le 15 mars 1821. Il avait écrit un nombre considérable d'ouvrages, dont les principaux sont: les Confesseurs de la foi dans l'Église gallicane à la fin du XVIIIe siècle, et les Vies des Justes dans les différentes conditions de la vie. Ce dernier recueil, qui ne forme pas moins de huit volumes, se divise en plusieurs séries: Vies des Justes dans l'état du mariage; -- dans l'étude des lois ou dans la Magistrature; -- dans la profession des armes; -- dans l'épiscopat et le sacerdoce; -- parmi les filles chrétiennes; -- dans les conditions ordinaires de la société; -- dans les plus humbles conditions de la société; -- dans les plus hauts rangs de la société. C'est dans cette dernière série que se trouve la vie de Mme de Farcy. -- Voir la Vie de l'abbé Carron, par un Bénédictin de la congrégation de France, un volume in-8, 1866.(retour)

Note 261: La Vie de Julie de Chateaubriand se termine en effet par ces lignes: «Mlle de Chateaubriand n'était pas fille unique: hélas! la postérité, en s'attachant à ce nom célèbre, dira les victimes qu'il rappelle, victimes d'un dévouement sans bornes à l'autel et au trône. Un de ses frères, avec tant d'autres braves, avait quitté le sol de la patrie quand sa sœur y périt; elle avait vu la tombe s'ouvrir devant elle, et ce fut de ses bords qu'elle fit tenir, à ce frère si chéri et si digne de l'être, le dernier gage de sa tendresse. Écoutons-le nous raconter l'effet que cet envoi touchant fit sur son cœur.» (Suivait un extrait de la Préface de la première édition du Génie du christianisme.) (retour)

Note 262: Julien-Hyacinthe de Marnière, chevalier de Guer, fils cadet de Joseph-Julien de Marnière, marquis de Guer, et d'Angélique-Olive de Chappedelaine, né à Rennes le 25 mars 1748. Il émigra en 1791, fit une campagne à l'armée des princes et passa ensuite en Angleterre. En 1795, il rentra en France, et on le retrouve alors à Lyon, où il est un des agents les plus actifs du parti royaliste. Obligé de repasser en Angleterre, il ne revint que sous le Consulat et publia, de 1801 à 1815, plusieurs écrits sur des matières financières, économiques et politiques. Préfet du Lot-et-Garonne sous la Restauration, il venait d'être appelé à la préfecture du Morbihan, lorsqu'il mourut à Paris, le 26 juin 1816.(retour)

Note 263: Pommereul (François-René-Jean, baron de), né à Fougères le 12 décembre 1745. Général de division (1796); préfet d'Indre-et-Loire (1800-1805); préfet du Nord (1805-1810); directeur-général de l'imprimerie et de la librairie (1811-1814); commissaire extraordinaire, durant les Cent-Jours, dans la 5e division militaire (Haut et Bas-Rhin). Il fut proscrit par l'ordonnance du 24 juillet 1815, mais, dès 1819, il obtint de rentrer en France. Il mourut à Paris le 5 janvier 1823. On lui doit un grand nombre d'ouvrages et, en particulier, celui auquel fait allusion Chateaubriand: Campagnes du général Bonaparte en Italie pendant les années IV et V de la République française, in-8°, avec cartes; Paris, l'an VI (1797). Le baron de Pommereul était un homme de rare mérite. Un contemporain, dont les jugements ne pèchent pas d'habitude par excès d'indulgence, le général Thiébault, parle de lui en ces termes: «Quant au général Pommereul, ce que j'avais appris de ses travaux scientifiques et littéraires, des missions qu'il avait remplies, de sa capacité enfin, était fort au-dessous de ce que je trouvai en lui. Peu d'hommes réunissaient à une instruction aussi variée et aussi complète une élocution plus nerveuse. Sa répartie était toujours vive, juste et ferme, et, lorsqu'il entreprenait une discussion, il la soutenait avec une haute supériorité, de même que, lorsqu'il s'emparait d'un sujet, il le développait avec autant d'ordre et de profondeur que de clarté; et tous ces avantages, il les complétait par une noble prestance et une figure qui ne révélait pas moins son caractère que sa sagacité. C'est un des hommes les plus remarquables que j'aie connus.» Mémoires du général baron Thiébault, T. III, p. 280.(retour)

Note 264: Lettres de Mme de Sévigné, des 4, 11 et 18 décembre 1675.(retour)

Note 265: Ce n'était pas la comtesse Victorine de Chastenay, l'auteur des très spirituels Mémoires publiés en 1896 par M. Alphonse Roserot. Mme Victorine de Chastenay n'avait que quinze ans en 1786. Elle a raconté elle-même comment elle vit Chateaubriand, pour la première fois, non chez elle en 1786, mais beaucoup plus tard, sous le Consulat, à un dîner chez Mme de Coislin, auquel assistait: «l'auteur du Génie du christianisme», alors dans tout l'éclat de sa jeune gloire. Mémoires de Mme de Chastenay, T. II, p. 76.(retour)

Note 266: La comtesse de Québriac, Bénigne-Jeanne de Chateaubriand, avait épousé en secondes noces, à Saint-Léonard de Fougères, le 24 avril 1786, Paul-François de la Celle, vicomte de Chateaubourg, capitaine au régiment de Condé, chevalier de Saint-Louis, né à Rennes le 29 février 1752. -- De ce dernier mariage sont nés plusieurs enfants, et notamment un fils, Paul-Marie-Charles, devenu chef de nom et armes, né en 1789, décédé en 1859, laissant plusieurs fils qui ont continué la postérité.(retour)

Note 267: L'État militaire de la France pour 1787, à l'article Régiment de Navarre, donne sur ces officiers les indications suivantes: M. de Guénan, lieutenant en premier; M. Berbis des Maillis (et non des Mahis), lieutenant en second; La Martinière, lieutenant en second; Achard, sous-lieutenant.(retour)

Note 268: Victurnien-Bonaventure-Victor de Rochechouart, marquis de Mortemart (1753-1823), entra en 1768 à l'École d'artillerie de Strasbourg, devint ensuite capitaine, puis lieutenant-colonel au régiment de Navarre, fut, en 1778, colonel en second du régiment de Brie, et, en 1784, colonel-commandant du régiment de Navarre. Député aux États-Généraux de 1789 par la noblesse du bailliage de Rouen, il fut promu maréchal de camp le 1er mars 1791, émigra en 1792 et servit à l'armée des princes, où Chateaubriand le retrouva. A la première Restauration, il fut fait lieutenant général le 3 mars 1815, et, après les Cent-Jours, il fit partie, ainsi que son ancien sous-lieutenant au régiment de Navarre, de la promotion de Pairs du 17 août 1815.(retour)

Note 269: Christophe-François-Thérèse Picon, comte d'Andrezel, né à Paris en 1746, était le petit-fils de Jean-Baptiste-Louis Picon, marquis d'Andrezel, ambassadeur de France à Constantinople, et de Françoise-Thérèse de Bassompierre. D'abord page, il entra dans l'armée et fut promu, en 1784, major au régiment de Navarre. Il émigra et fit la campagne des princes. Au retour des Bourbons, il fut nommé maréchal de camp et admis à la retraite. Il entra alors, quoique âgé de 69 ans, dans la carrière administrative et remplit, de 1815 à 1821, les fonctions de sous-préfet de l'arrondissement de Saint-Dié (Vosges).(retour)

Note 270: Frédéric II mourut le 17 août 1786.(retour)

Note 271: Le 12 prairial an VI correspondait au 31 mai 1798.(retour)

Note 272: 23 avril 1798.(retour)

Note 273: Mon neveu à la mode de Bretagne, Frédéric de Chateaubriand, fils de mon cousin Armand, a acheté La Ballue, où mourut ma mère. Ch.(retour)

Note 274: Le château de Marigny est situé dans la commune de Saint-Germain-en-Coglès, canton de Saint-Brice-en-Coglès, arrondissement de Fougères (Ille-et-Vilaine). C'est, on le sait, dans les environs de Fougères que Balzac a placé le théâtre de son roman des Chouans, ou la Bretagne en 1799, et il l'écrivit précisément au château de Marigny, où il était l'hôte du général baron de Pommereul. Il aurait pu y faire un rôle à la sœur de Chateaubriand, car la comtesse de Marigny, royaliste ardente, ne laissa pas de prendre à la chouannerie une part assez active; son château servait aux chefs de lieu de rendez-vous. On la trouve de même mêlée à la pacification de 1800. (Le Maz, Un district breton, p. 338.) La comtesse de Marigny est morte à Dinan le 18 juillet 1860, dans sa cent et unième année.(retour)

Note 275: Voir sur lui la note 1 de la page 27.(retour)

Note 276: Saint-Huberti (Marie-Antoinette Clavel, dite), première chanteuse de l'Opéra, née à Strasbourg vers 1756. Point belle, mais d'une physionomie fort expressive, elle était sans rivale dans les opéras de Gluck, et particulièrement dans le rôle d'Armide, pour l'expression de son chant, la largeur de son jeu et la noblesse de ses attitudes. Mariée d'abord à un aventurier nommé Saint-Huberti, elle épousa, le 29 décembre 1790, le comte d'Antraigues, député aux États-Généraux. Ils périrent tous deux tragiquement, le 22 juillet 1812, en leur cottage de Barnes Terrace, près Londres, assassinés par un domestique italien nommé Lorenzo, congédié de la veille. -- Voir le volume de M. Léonce Pingaud: Un agent secret sous la Révolution et l'Empire. Le comte d'Antraigues, 1893.(retour)

Note 277: Mémoires du maréchal de Bassompierre, contenant l'histoire de sa vie et ce qui s'est fait de plus remarquable à la cour de France jusqu'en 1640, tome I, p. 305.(retour)

Note 278: Nom d'une salle d'attente dans le château de Versailles, lorsque la Cour s'y trouvait; elle était éclairée par un œil-de-bœuf.(retour)

Note 279: Coigny (Marie-Henry-François Franquetot, duc de), né à Paris le 28 mars 1737. Il était, depuis 1774, premier écuyer du roi. En 1789, il fut élu député de la noblesse aux États-Généraux par le baillage de Caen et siégea au côté droit. Sous la Restauration, il fut nommé successivement pair de France (4 juin 1814), gouverneur du château de Fontainebleau, premier écuyer du roi, gouverneur de Cambrai, gouverneur des Invalides (10 janvier 1816) et maréchal de France (3 juillet suivant). Il est mort à Paris le 19 mai 1821.(retour)

Note 280: J'ai retrouvé M. le comte d'Hautefeuille; il s'occupe de la traduction de morceaux choisis de Byron; madame la comtesse d'Hautefeuille est l'auteur, plein de talent, de l'Âme exilée, etc., etc. Ch.

Hautefeuille (Charles-Louis-Félicité-Texier, comte d'), né à Caen le 7 janvier 1770. Capitaine de cavalerie en 1789, il fut des premiers à émigrer (1791), et, après avoir fait à l'armée des princes la campagne de 1792, il prit du service en Suède, dans la garde royale, et ne rentra en France qu'en 1811. Le département du Calvados l'envoya en 1815 à la Chambre des députés, où il siégea jusqu'en 1824. Nommé gentilhomme de la chambre du roi, il assista, en cette qualité, au sacre de Charles X. Il est mort à Versailles le 21 septembre 1865. Il avait épousé, en 1823, Mlle de Beaurepaire, fille de l'un des plus vaillants officiers de l'armée vendéenne. La comtesse d'Hautefeuille a publié, sous le pseudonyme d'Anna-Marie, plusieurs ouvrages remarquables, dont les principaux sont l'Âme exilée, la Famille Gazotte et les Cathelineau.(retour)

Note 281: Beauvau (Charles-Juste, duc de), né à Lunéville le 10 septembre 1720. Membre de l'Académie française en 1771, maréchal de France en 1783, ministre de Louis XVI en 1789. Il mourut, le 19 mai 1793, au Val, près de Saint-Germain.(retour)

Note 282: Dans la Gazette de France, du mardi 27 février 1787, on lit ce qui suit: «Le comte Charles d'Hautefeuille, le baron de Saint-Marsault, le baron de Saint-Marsault Chatelaillon et le chevalier de Chateaubriand, qui précédemment avaient eu l'honneur d'être présentés au roi, ont eu, le 19, celui de monter dans les voitures de Sa Majesté, et de la suivre à la chasse.» Ch.(retour)

Note 283: Le Mémorial historique de la Noblesse a publié un document inédit annoté de la main du roi, tiré des Archives du royaume, section historique, registre M. 813 et carton M. 814; il contient les Entrées. On y voit mon nom et celui de mon frère: il prouve que ma mémoire m'avait bien servi pour les dates. (Notes de Paris, 1840.) Ch.(retour)

Note 284: Cette idylle figure, dans l'Almanach des Muses de 1790, à la page 205, sous ce titre: L'Amour de la campagne, et avec cette signature: par le chevalier de C***. Chateaubriand lui a donné place dans ses Œuvres complètes, tome XXI, p. 321.(retour)

Note 285: Ce livre a été écrit à Paris de juin à décembre 1821. -- Il a été revu en décembre 1846.(retour)

Note 286: On lit dans le Moniteur du dimanche 29 avril 1821, sous la rubrique: Paris, 28 avril: «M. le vicomte de Chateaubriand, ministre plénipotentiaire de France à Berlin, est arrivé avant-hier à Paris.» Le baptême du duc de Bordeaux eut lieu à Notre-Dame le 1er mai 1821.(retour)

Note 287: M. de Villèle sortit du ministère le 27 juillet 1821; Chateaubriand donna sa démission d'ambassadeur le 31 juillet.(retour)

Note 288: Marigny a beaucoup changé depuis l'époque où ma sœur l'habitait. Il a été vendu et appartient aujourd'hui à MM. de Pommereul, qui l'ont fait rebâtir et l'ont fort embelli. Ch.

C'est la nièce de Chateaubriand, Mme Élisabeth-Cécile Geffelot de Marigny, mariée à Joseph-Louis-Mathurin Gouyquet de Bienassis, qui vendit le château de Marigny au baron de Pommereul, par contrat du 30 juin 1810. Le propriétaire actuel est M. Henri-Charles-Jean, baron de Pommereul, petit-fils de l'acquéreur de 1810, marié le 9 juillet 1849 à Mlle Marie-Thérèse Macdonald de Tarente, petite-fille du maréchal duc de Tarente.(retour)

Note 289: La Martinière (Antoine-Augustin Bruzen de), né à Dieppe en 1673, mort à La Haye le 19 juin 1749. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages, dont le principal: Grand Dictionnaire géographique et critique (La Haye, 1726-1730) ne forme pas moins de 10 vol. in-fol. Il était neveu du P. Simon, dont la notice suit.(retour)

Note 290: Simon (Richard), introducteur du rationalisme dans l'exégèse; né le 13 mai 1638 à Dieppe, où il est mort le 11 avril 1712. Il était membre de l'Oratoire. Après avoir enseigné la philosophie à Juilly et à Paris, il fut exclu de son ordre pour avoir soutenu, dans son Histoire critique du Vieux Testament (1678), des opinions qui suscitèrent les critiques de Bossuet et des solitaires de Port-Royal et le firent condamner par le Saint-Siège. Voir Port-Royal, par Sainte-Beuve, tome IV, p. 380, 509.(retour)

Note 291: Jean Pecquet (1622-1674), né à Dieppe comme les deux précédents. On lui doit plusieurs découvertes importantes, entre autres celle du réservoir du chyle, dit Réservoir de Pecquet. Il était membre de l'Académie des sciences. Médecin et ami de Fouquet, il était aussi l'ami de Mme de Sévigné, qui l'appela pour donner ses soins à Mme de Grignan. Voir les Lettres de Mme de Sévigné des 22 décembre 1664, de janvier 1665, du 19 novembre 1670 et du 11 juillet 1672.(retour)

Note 292: Renée-Élisabeth de la Belinaye, fille aînée d'Armand Magdelon, comte de la Belinaye, et de Marie-Thérèse Frain de la Villegontier, née à Fougères le 28 janvier 1728, morte en la même ville le 19 juin 1816. -- Sa sœur, Thérèse de la Belinaye, mariée à Anne-Joseph-Jacques Tuffin de la Rouërie, a été la mère du marquis Armand, le célèbre conspirateur.(retour)

Note 293: Je relève sur l'Almanach royal de 1789, p. 294, la mention suivante: «Cour de Parlement. Grand'Chambre. Président... Messire Louis Le Peletier de Rosambo, rue de Bondy(retour)

Note 294: Delisle de Sales (Jean-Baptiste Isoard, dit), né en 1743 à Lyon, mort le 22 septembre 1816. Quelques-unes de ses compilations ne laissèrent pas d'avoir un assez grand succès. Sa Philosophie de la nature, ou Traité de morale pour l'espèce humaine (1769) a obtenu sept éditions. La dernière, publiée en 1804, forme 10 vol. in-8°.(retour)

Note 295: Flins des Oliviers (Claude-Marie-Louis-Emmanuel Carbon de), né en 1757 à Reims, mort en 1806. La multiplicité de ses noms lui attira cette épigramme de Lebrun:

Carbon de Flins des Oliviers
A plus de noms que de lauriers.

Ami de Fontanes, il rédigea avec lui, en 1789, le Journal de la Ville et des Provinces, ou le Modérateur. Il a fait jouer, non sans succès, plusieurs comédies en vers. L'une d'elles, le Réveil d'Épiménide à Paris ou les Étrennes de la liberté, représentée sur le Théâtre-Français, le 1er janvier 1790, obtint une vogue considérable, justifiée d'ailleurs par le mérite de la pièce et par son excellent esprit.(retour)

Note 296: Le Théâtre-Français occupait, depuis 1782, la salle construite par ordre de Louis XVI, d'après les plans des architectes Peyre et de Wailly, près le Luxembourg, à l'extrémité du terrain qu'occupait le jardin de l'hôtel Condé. En 1798, ce théâtre reçut le nom d'Odéon, parce que des opéras devaient former le fond de son répertoire. C'était un souvenir classique du théâtre couvert de ce nom [Grec: ᾨδεῖον] bâti à Athènes par Périclès pour les concours de musique. La salle de 1782 fut incendiée dans la nuit du 18 au 19 mars 1799. Reconstruit sur ses anciennes fondations par décision du premier Consul, ce théâtre fut détruit une seconde fois par le feu le 20 avril 1818. Louis XVIII le fit rebâtir. C'est l'Odéon actuel.(retour)

Note 297: Brizard (Jean-Baptiste Britard, dit), né en 1721 à Orléans, mort le 30 janvier 1791. Après avoir remporté, comme tragédien, de très grands succès dans les pères nobles et les rois, il s'était retiré, le 1er avril 1786, le même soir que le couple Préville et Mlle Fanier. Tous parurent dans la Partie de chasse de Henri IV, au milieu des bravos et de l'émotion générale. (G. Monval et P. Porel, l'Odéon, tome I, p. 249.)(retour)

Note 298: Talma avait débuté, le 21 novembre 1787, en jouant le rôle de Séide, dans le Mahomet, de Voltaire. (G. Monval et P. Porel, op. cit., tome I, page 57.)(retour)

Note 299: Mlle Saint-Val cadette. Son aînée avait quitté la Comédie-Française en 1779.(retour)

Note 300: Mlle Olivier (Jeanne-Adélaïde-Gérardine), née à Londres en 1765. Toute jeune encore, charmante avec sa chevelure blonde et ses yeux noirs, elle avait créé, le 27 avril 1784, le rôle de Chérubin dans le Mariage de Figaro, et son succès avait presque égalé celui de Mlle Contat, qui jouait Suzanne.(retour)

Note 301: Mars (Anne-Françoise-Hyppolyte Boutet, dite Mlle), née à Paris le 9 février 1779, morte le 20 mars 1847. Elle était fille de l'acteur Boutet dit Monvel et d'une actrice de province, Marguerite Salvetat. Ne pouvant prendre, au théâtre, le nom de Monvel, elle prit celui de sa mère, qui se faisait appeler Madame Mars. Dès l'âge de treize ans, en 1792, elle débuta dans des rôles d'enfants au Théâtre de mademoiselle Montansier, auquel était attaché son père. -- La salle de Mlle Montansier est actuellement le Théâtre du Palais-Royal.(retour)